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Classiques Garnier

Quod omnes similiter tangit ab omnibus comprobetur Les assemblées sous le règne de Philippe III le Hardi (1270-1285)

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes - Journal of Medieval and Humanistic Studies
    2020 – 2, n° 40
    . varia
  • Auteur : Vasselot de Régné (Clément de)
  • Résumé : Les assemblées destinées à prendre les décisions intéressant l’ensemble du royaume sont systématisées sous le règne de Philippe III. Elles s’appuient sur le quod omnes tangit du Code de Justinien. Le consentement des grands permet de s’assurer de la mise en œuvre des mesures décidées. Leur théâtralisation souligne aussi l’unité du royaume. Elles concourent ainsi à créer la notion de royaume en tant que corps politique et annoncent les grandes assemblées réunies par Philippe IV.
  • Pages : 427 à 454
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes - Journal of Medieval and Humanistic Studies
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406112631
  • ISBN : 978-2-406-11263-1
  • ISSN : 2273-0893
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-11263-1.p.0427
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 04/01/2021
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : XIIIe siècle, France, espace public, barons, Capétiens
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Quod omnes similiter tangit
ab omnibus comprobetur

Les assemblées sous le règne de Philippe III le Hardi (1270-1285)

Dans un article publié en 2003, Jean Richard soulignait la façon dont le conseil royal sétait structuré pendant le règne de Louis IX. Au sein de cet organe, destiné à assister le souverain et à assurer lordinaire du gouvernement, se retrouvaient les membres de la petite et moyenne noblesse du domaine royal ainsi que quelques clercs, fraîchement diplômés des universités en plein essor1. Depuis le xiie siècle, ceux qui gravitaient dans lentourage royal tendaient à prendre le pas sur les grands barons du royaume, même si la littérature épique des xiie et xiiie siècles présentait toujours ces derniers comme les conseillers privilégiés du roi2. Néanmoins, la présence décroissante des barons dans les tâches ordinaires du gouvernement na pas été synonyme de leur éloignement vis-à-vis de la cour royale où ils sont, en fait, de plus en plus assidus3. Et, si Louis IX a préféré prendre la plupart de ses décisions assisté de quelques conseillers choisis, les grandes résolutions du règne ont impliqué le rassemblement des grands barons du royaume. En septembre 1235, Louis IX sentoure, à Saint-Denis, de quarante-et-un barons pour émettre une protestation 428commune contre lindépendance juridique des temporels épiscopaux4. En novembre 1246, dix-neuf barons constituent une ligue pour sassister mutuellement dans la défense de leurs droits contre le clergé et sont énergiquement soutenus par le roi5. Les prises de croix royales, en 1245 comme en 1267, ont toujours lieu au milieu dune assemblée baronniale6. La fréquence de ces réunions des grands du royaume autour du roi augmente sous le règne de Philippe III le Hardi alors que se diffuse, pendant tout le xiiie siècle, depuis le droit privé vers le droit public et depuis le droit canonique vers le droit civil, le principe du Code de Justinien assurant que ce qui concerne tout le monde doit être approuvé par tous (quod omnes similiter tangit ab omnibus comprobetur)7. Lassemblée baronniale devient ainsi le lieu privilégié de la mise en scène du conseil et de laccord donné par les grands du royaume pour les graves décisions engageant lensemble du royaume, se dissociant de plus en plus du conseil royal qui devient lorgane de gouvernement habituel.

La réunion des assemblées plénières

Distinguer le conseil de lassemblée

Lorsquil meurt à Tunis, en 1270, Louis IX laisse à son fils, Philippe III le Hardi, un ensemble de conseillers, liés au roi par serment, qui avaient 429participé au gouvernement du royaume, sans être pour autant associés aux sessions de la curia regis et qui étaient appelés familiares, amici regis ou consiliarii8. Ce groupe réunit notamment les deux régents du royaume, labbé de Saint-Denis, Mathieu de Vendôme et Simon de Nesle, Érard de Valéry et Eustache de Beaumarchais, Thibaut de Pouancé qui devient évêque de Dol en 1280, Foulques de Laon ainsi quHenri de Vézelay. Ils continuent à conseiller le roi, ce qui a amené Charles-Victor Langlois à voir en eux les réels détenteurs du pouvoir9. Par exemple, à en croire la Chronique anonyme finissant en 1286, la décision de convoquer lost pour mettre au pas le comte de Foix, en 1272, aurait été prise à linstigation du conseil royal10. Les mandements de Philippe iii ou ses ordonnances renvoient à des décisions prises en son sein et leur fréquence prouve quil se charge dassurer au jour-le-jour le gouvernement du royaume11.

Les sources du règne attestent aussi de réunions plus larges, elles aussi destinées à conseiller le roi, qui se différencient des sessions du conseil parce quelles rassemblent les barons et les prélats du royaume. Guillaume Anelier évoque le « coseills per qui el rey vol regnar » réuni en 1275, à loccasion des affaires de Navarre, où figurent de nombreux barons12. Une lettre du pape Grégoire X et une bulle de son successeur Innocent V mentionnent, toutes deux, une « délibération » du roi avec les 430barons de son royaume qui aurait eu lieu en 127513. La Chronique anonyme finissant en 1286 précise que la décision de convoquer lost de Sauveterre, en 1276, aurait été prise sur le conseil des barons14. Guillaume Anelier parle également dun « conseil » et dun « parlement » convoqué par le roi où se seraient réunis comtes et vicomtes15. Les vicomtes concernés sont sans doute directement vassaux du roi comme ceux de Châteaudun, de Thouars, de Châtellerault, de Brosse ou de Limoges. En 1278, une lettre du pape Nicolas III refuse une pétition qui lui avait été adressée par le roi et ses barons16. Lordonnance somptuaire de 1279 est émise au parlement de la Pentecôte, du conseil des barons et prélats du roi17. En 1280, une lettre de Maurice V de Craon informe le roi dAngleterre, Édouard Ier, que Philippe III a fait « assembler devant lui » ses évêques et ses barons18. Une autre lettre précise quil a mandé ses barons et prélats à Bourges en 1283, puis a reçu leur conseil à Paris en 128419.

Toutes ces sources semblent désigner une même réalité : une réunion plénière des principaux ecclésiastiques et des grands aristocrates du royaume autour de la personne royale. Elle est appelée indifféremment « délibération », « assemblée », « conseil », « parlement », alors quelle se différencie à la fois du conseil royal, organe de gouvernement restreint et institutionnalisé depuis le règne précédent, comme du parlement, session de la Curia regis destinée à rendre la justice. Ni le premier ni le second ne nécessite la présence des prélats et des grands barons du royaume, point commun de toutes ces assemblées. Labsence de terminologie spécifique pour les distinguer des sessions du parlement ou du conseil illustre la perméabilité des frontières conceptuelles entre ces institutions, dautant plus estompées quelles en viennent parfois à se recouper.

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Réunir le corps autour du chef

À partir de 1274, le rythme des assemblées plénières des barons et des prélats devient quasi annuel. Les années 1277, 1281 et 1282 sont les seules, avec lannée 1285, occupée par lexpédition en Catalogne, où aucune ne se tient. Elles peuvent être datées avec suffisamment de précision pour pouvoir différencier leur rythme de celui du parlement où les sessions périodiques – Pentecôte, Sainte-Marie-Madeleine (22 juillet), Toussaint (1er novembre) ou Saint-Martin (11 novembre) et Chandeleur (2 février) – évoluent vers « une année judiciaire continue20 ». Ainsi, lassemblée au cours de laquelle Eustache de Beaumarchais est investi de la charge de gouverneur de Navarre a lieu vers mai-juin 1275. Elle pourrait sêtre tenue en même temps que le parlement de la Pentecôte (20 mai).

Mais cette simultanéité est rare. Lassemblée, à laquelle Nicolas III répond négativement le 3 décembre 1278, sest déroulée dans le courant de lannée et, donc, en dehors du cadre des sessions du parlement tenues à lÉpiphanie (6 janvier) et à la Toussaint (1er novembre). Elle intervient dans le cadre de laffaire Pierre de La Broce21. Le chambellan royal avait tenté, en sappuyant sur son parent, lévêque de Bayeux, Pierre de Benais, de compromettre la reine Marie de Brabant en répandant le bruit quelle aurait empoisonné le prince Louis, issu du premier mariage du roi, pour assurer la succession à ses propres enfants. Les manœuvres de Pierre de La Broce et peut-être sa trahison au profit dAlphonse X de Castille, que rapporte Primat de Saint-Denis, entraînent son arrestation à la fin de lannée 1277 et son exécution22. Sa chute aurait été provoquée par laction des ducs Robert II de Bourgogne et Jean Ier de Brabant ainsi 432que des comtes Robert II dArtois et Guy Ier de Flandre, qui auraient obtenu que le roi défère son chambellan à leur jugement23. Le 30 juin 1278, les deux ducs et le comte dArtois conduisent personnellement Pierre de La Broce au gibet, avec « moult gentilhommes du royaume24 ». Pierre de Benais, qui était à lorigine des rumeurs sur le compte de la reine sétait, quant à lui, enfui à Rome. En août 1278, Marie de Brabant écrit au pape Nicolas III pour demander justice contre lévêque de Bayeux en fuite. À lorigine, la lettre nétait pas rédigée en son nom propre. Les ducs de Brabant et de Bourgogne, les comtes dArtois, de Gueldre, de Bretagne, de Hollande, de Luxembourg, de Bar, de Saint-Pol, de Dreux et de Soissons, le fils aîné de Jean Ier de Bretagne, Jean de Richemont, Jean de Hainaut, Enguerrand IV de Coucy et Raoul II de Clermont-Nesle sétaient associés à la reine mais leurs noms ont ensuite été biffés25. Cette pièce atteste toutefois de la réunion de tous ces barons autour de la reine en août 1278. Or, la réponse pontificale à lassemblée baronniale au sujet de la croisade est émise le même jour que quatre autres lettres portant sur le sort de Pierre de Benais et destinées au légat pontifical, à Philippe III et à Marie de Brabant26. Le synchronisme de la chancellerie pontificale laisse supposer quune assemblée baronniale a été réunie après lexécution de Pierre de La Broce.

La concomitance entre séances du parlement et assemblées est aussi absente pour lassemblée convoquée par Philippe III en 1280. Maurice de Craon précise quelle sest réunie le 28 juin, soit après la session du parlement de la Pentecôte (13 mai). Lassemblée de 1283 sétant tenue à Bourges, elle ne peut être confondue avec une session du parlement27. 433Quant à celle de Paris, lannée suivante, elle a eu lieu les 20 et 21 février, sans lien avec les activités judiciaires de la Curia regis28.

Si la majorité des assemblées semblent avoir été réunies indépendamment des sessions du parlement, une bonne partie a eu lieu dans le cadre des grandes cérémonies de la royauté29. La Grande chronique de Limoges rapporte quaprès le mariage de Philippe III et Marie de Brabant (21 août 1274), un « parlement » aurait réuni le roi et ses barons et se serait prolongé pendant le mois de septembre30. Les délibérations de 1275, entre le roi et ses barons, au sujet de la croisade, dont parlent les documents pontificaux, ont dû accompagner la prise de croix solennelle du roi, de ses frères, les comtes Pierre dAlençon et Robert de Clermont et de ses deux beaux-frères, les ducs Robert II de Bourgogne et Jean Ier de Brabant, le 24 juin 1275. Cette cérémonie a été solennisée par le couronnement, la veille, de la reine Marie de Brabant31. Lassemblée qui décide de porter secours à Eustache de Beaumarchais et de convoquer lost de Sauveterre est antérieure au 11 mai 1276 et, donc, au parlement de la Pentecôte (29 mai)32. Et, si lordonnance somptuaire de 1279 a bien été émise par le roi, sur le conseil de ses barons et prélats, lors du parlement de la Pentecôte qui a débuté le 21 mai, la réunion des grands du royaume à cette session sexplique, sans doute, par les grandes fêtes qui ont eu lieu pendant tout le mois de mai pour la visite du neveu de Philippe III, le prince Charles de Salerne. À cette occasion, le jeune frère du roi, Robert de Clermont, a été adoubé et deux grands tournois ont été organisés à Compiègne et à Senlis, réunissant plus de trois cent trente chevaliers33.

Si le recoupement occasionnel entre sessions de la Curia regis et assemblées plénières peut expliquer la confusion terminologique entre 434deux types de réunions peu conceptualisées, dans la majorité des cas, les assemblées coïncident plutôt avec les grandes cérémonies organisées par la royauté. Ainsi, leurs acteurs, qui sont appelés à sexprimer sur les grandes questions politiques du moment, sont aussi spectateurs des grandes liturgies exaltant la personne et la dynastie royale.

Du devoir de conseil à la communion politique

Pour la plupart des auteurs, la venue des barons aux assemblées plénières relève du devoir vassalique de conseil qui oblige les vassaux à donner à leur suzerain leur avis sur les affaires personnelles ou dintérêt général, à approuver ses dons ou à lassister dans lexercice de sa juridiction. Charles-Victor Langlois note que les barons et prélats sacquittaient de leur devoir de conseil en siégeant en assemblée auprès du roi34. Michel Hébert a pourtant critiqué récemment cette lecture qui faisait découler la convocation dassemblées du serment vassalique. Il souligne que le devoir de conseil relevait des liens personnels unissant le suzerain et le vassal, institutionnalisés par le serment de fidélité et nimpliquait en aucun cas le rassemblement de vassaux pour obtenir un conseil commun35. De fait, le roi sélectionne les vassaux dont il est particulièrement proche, quil appelle au conseil pour y accomplir leur devoir vassalique. Lassemblée est une autre réalité politique où sont appelés à siéger tous les barons et prélats, non pas parce quils ont un devoir vassalique de conseil à accomplir mais parce quils appartiennent à lespace politique que le roi domine, y compris ceux dont les liens avec le pouvoir sont très lâches comme le comte de Bretagne. Philippe III souligne ainsi lexistence dune forme de souveraineté territoriale et rappelle à ses barons et prélats quils sont ses vassaux.

Cette distinction apparait tout particulièrement dans le récit détaillé, fait par Guillaume Anelier, de lassemblée qui sest tenue en avril-mai 1276. Philippe III convoque son conseil et un « parlement » où se réunissent « comtes et vicomtes et maints hommes de valeur36 ». Une 435fois que lassemblée sest exprimée, le roi tient un « conseil secret » avec « ceux qui lui plaisent le plus37 ». Les vraies décisions sont prises au sein de cette réunion restreinte avec les individus choisis par le roi. Les conseils portant sur les mesures concrètes sont donc bien la tâche des membres du conseil royal. Lassemblée, quant à elle, a surtout pour but de permettre aux grands du royaume, par le conseil quils donnent au roi, dexprimer leur assentiment aux directions politiques déterminées au sein du conseil. Michel Hébert rappelle la distinction, précisée par le cardinal et canoniste Henri de Suse, surnommé « Hostiensis », entre assentiment et consentement dune part et conseil dautre part38. Autant ce dernier relève surtout des individus choisis par le roi, autant lassemblée des barons et prélats semble être convoquée pour apporter un consentement général aux décisions royales.

De lopinion des juristes, lapprobation des grands du royaume est, en effet, requise pour les mesures royales qui doivent sétendre à tout le royaume. En 1283, Philippe de Beaumanoir écrit dans les Coutumes de Beauvaisis :

Quant li rois fet aucun establissement especiaument en son demaine, si baron ne lessent pas pour ce a user en leur terres selonc les anciennes coutumes. Mes quant li establissemens est generaus, il doit courre par tout le roiaume, et nous devons croire que tel establissement sont fet par tres grant conseil et pour le commun pourfit39.

Il renchérit quelques pages plus loin :

Tout soit il ainsi que li rois puist fere nouveaus establissemens, il doit mout prendre garde quil les face par resnable cause et pour le commun pourfit et par grant conseil40.

Ces notions proviennent de la redécouverte et de la popularisation pendant tout le xiiie siècle de la maxime du Code Justinien, quod omnes similiter tangit ab omnibus comprobetur. Elle est dabord utilisée par les papes Alexandre III, Innocent III et Innocent IV, commentée par 436Bernard de Parme et par lHostiensis, et intègre le droit canonique. Elle est connue en France où les clercs de Reims sen servent, en 1264, pour protester contre limposition dune décime41. Mais, à partir de la moitié du xiiie siècle, elle est aussi mobilisée pour justifier la réunion dassemblées autour du souverain laïc42. La lettre de convocation de la diète de Vérone en 1244, par lempereur Frédéric II, sappuie sur ce principe pour préciser que, comme les questions à traiter concernent tout le monde, tous doivent être présents et quil entend recevoir leur conseil et leur assentiment43. Dix ans après la fin du règne de Philippe III, Édouard Ier, dans sa lettre de convocation du parlement adressée à larchevêque de Canterbury, se justifie également par cette maxime, présentée comme une « loi très juste44 ». Plutôt que la prolongation du devoir de conseil des vassaux du roi, les assemblées de Philippe le Hardi se situent dans la ligne du principe du Code Justinien. Elles réunissent lensemble des barons et prélats de la communauté territoriale et politique quest le royaume et, tout en généralisant à cette échelle le devoir vassalique de conseil, doivent surtout leur permettre dexprimer leur assentiment afin de créer un consensus général sur « les affaires qui concernent tout le monde ».

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Traiter les affaires du royaume

Des ordonnances contraignantes ?

À en croire Philippe de Beaumanoir, les assemblées vont de pair avec les établissements royaux qui doivent être appliqués dans tout le royaume. En dépit de létat lacunaire dans lequel nous sont parvenues les ordonnances de Philippe III, au moins deux dentre-elles ont été émises dans la cadre dune assemblée.

Lordonnance édictée en parlement en 1275 a été émise « après délibération45 ». Elle devait régler plusieurs questions en suspens concernant les amortissements des biens nobles, cest-à-dire, les droits que les communautés perpétuelles, notamment ecclésiastiques, devaient payer pour acquérir des biens sur lesquels, à la mort de chaque tenancier, pesaient normalement des droits de rachat. Il sagissait de déterminer le taux de ce droit, le temps pendant lequel il serait versé et son destinataire46. Lordonnance faisait de lamortissement une prérogative royale dans ses fiefs comme dans ses arrière-fiefs, à lexception de ceux des douze pairs de France et des plus grands barons après les pairs, les comtes de Bretagne, de Nevers, dArtois, dAnjou et de La Marche qui, ayant prouvé quils possédaient traditionnellement ce droit, ont pu le conserver, contrairement aux comtes de Blois, dAuxerre, de Tonnerre, de Dreux, de Clermont, de Saint-Pol et aux seigneurs de Bourbon, de Beaujeu et de Coucy47. Cette déclaration qui complète lordonnance a donc nécessité des enquêtes et la présentation de preuves de lexercice du droit damortissement par les barons. La régularisation du système des amortissements concerne ainsi lensemble du royaume.

Au parlement de la Pentecôte 1279, Philippe III émet une autre ordonnance, cette fois somptuaire, « sur le conseil de ses barons et ses prélats48 ». Sa mesure phare, rapportée par la Chronique de Rouen, était de limiter le nombre de services, lors des repas, à deux, sans compter 438le potage et lentremets49. Elle bornait aussi le nombre de robes que pouvait se faire faire chaque année chaque individu, en fonction de son statut, ainsi que lusage des matériaux les plus précieux50. Il est probable quelle ait été complétée dune autre ordonnance, aujourdhui perdue, qui proscrivait les tournois51. Ces deux établissements royaux ont été émis juste après les fêtes somptueuses organisées en mai pour la visite du prince Charles de Salerne en France. Or, au cours des tournois, trois chevaliers ont été gravement blessés. Louis Carolus-Barré pense que lun dentre eux était Jean de Mouy, chevalier du Beauvaisis, dont les actes attestent quil avait perdu la raison par accident52. Il propose de voir, dans le deuxième, Raoul dEstrées, fils du maréchal de France, qui a été si gravement blessé quil a fini par en mourir53. Le troisième et le plus célèbre, Robert de Clermont, le plus jeune frère de Philippe III, récemment adoubé, aurait été rendu fou par une commotion sur la tête54. Compte tenu des démarches faites par la couronne auprès du pape pour obtenir labsolution pour les trois blessés, lémission, dans le mois qui a suivi, de deux ordonnances pour rétablir linterdiction des tournois et limiter le luxe alimentaire et vestimentaire dans tout le royaume sinscrit certainement dans une démarche pénitentielle destinée à racheter les excès ayant eu lieu lors des festivités et dont les accidents, en particulier celui de Robert, pouvaient être interprétés comme une punition divine55. Ici aussi, la législation royale sadressait à tous, ducs, barons, comtes, prélats, chevaliers, clercs ou autres et concernait donc lintégralité des habitants du royaume, y compris les plus grands seigneurs56.

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Préparer la guerre à lextérieur du royaume

Lordonnance somptuaire de 1279 mettait aussi un frein à la spéculation autour des chevaux et obligeait tout chevalier et bourgeois avec un certain niveau de revenus à posséder une jument capable de mettre des poulains au monde. Lassemblée prenait ainsi les moyens dassurer la remonte de la cavalerie car les grands tournois sétaient probablement soldés par une hécatombe de chevaux57. Elle assurait ainsi la capacité de la chevalerie à combattre en cas de levée de lost.

Les affaires militaires semblent, en effet, avoir été lun des sujets majeurs abordés lors des assemblées plénières. En 1275, la mort du roi de Navarre, Henri Ier le Gros, avait amené sa veuve, Blanche dArtois, à confier la garde de sa fille et héritière ainsi que du royaume à son cousin Philippe III58. Lintervention de Pierre, fils du roi dAragon, désireux dépouser la petite Jeanne et celle de linfant de Castille, Ferdinand de la Cerda, qui assiégeait Viane, a conduit les partisans du roi de France à venir lui demander de laide59. Lors de lassemblée qui se réunit en juin 1275, Philippe III désigne le sénéchal de Toulouse, Eustache de Beaumarchais, pour se rendre en Navarre et y assurer, au nom de la petite reine, le gouvernement du royaume60.

Mais ladministration du sénéchal de Toulouse ne parvient pas à rétablir la paix en Navarre où les griefs accumulés entre les différentes factions se sont ajoutés à la colère provoquée par certaines de ses décisions. Eustache de Beaumarchais finit par se retrouver assiégé dans Pampelune. Dans le même temps, la mort de Ferdinand de la Cerda avait contraint son père malade, Alphonse X de Castille, à désigner pour héritier son fils cadet, Sanche, plutôt que ses petits-fils, Alphonse et Ferdinand, privant également de son douaire leur mère, Blanche de France, sœur de Philippe III. Ce dernier prit immédiatement sa défense, envoyant à la cour dAlphonse X leur cousin commun, Jean dAcre, qui parvint à la 440ramener avec lui mais fut contraint dabandonner les infants déshérités en Castille61. Philippe III rassemble, alors, une nouvelle assemblée en avril-mai 1276 pour délibérer sur lévolution de la situation en Navarre et sur lattitude à adopter à légard dAlphonse X62. Comme nous lavons vu, après un débat général, le roi aurait réuni un conseil restreint pour décider de la marche à suivre63. Une armée commandée par Robert dArtois et le connétable Humbert de Beaujeu, composée des vassaux des sénéchaussées du sud de la France, sest rendue en Navarre pour dégager Eustache de Beaumarchais. Dans un deuxième temps, le roi, ayant convoqué lost royal, lève loriflamme à Saint-Denis et se met en route en septembre, pour aller assister le gouverneur de Navarre et tirer vengeance des affronts infligés par Alphonse X à sa sœur et à ses neveux64.

Mais lost sarrête à Sauveterre-en-Béarn et ne traverse pas les Pyrénées65. Les tensions entre les rois de France et de Castille perdurent jusquen 1280, année pendant laquelle les efforts de médiation concurrents dÉdouard Ier, dune part, et du prince de Salerne, dautre part, les amènent à décider dune entrevue66. Le 3 juillet 1280, Maurice V de Craon et Geoffroy de Joinville, qui avaient été chargés par Édouard Ier de proposer sa médiation, répondent au souverain anglais que, comme le roi de Castille avait préféré celle de Charles de Salerne, Philippe III et le conseil royal leur ont répondu quils ne présenteraient pas sa proposition « aux évêques et aux barons67 ». Dans une autre lettre, datée du même jour, Maurice de Craon rapporte que Philippe III a fait convoquer une assemblée des évêques et des barons le 28 juin pour leur faire lire la lettre dAlphonse X que Charles de Salerne lui avait fait transmettre68. 441Là encore, si les termes de la paix seront laissés à la discrétion du roi et de ses proches, lassentiment des barons est requis pour accepter la proposition dAlphonse X. En mars 1282, la révolte des Siciliens connue sous le nom de « Vêpres siciliennes » aboutit à lacclamation de Pierre III dAragon comme roi de Sicile, au détriment de loncle de Philippe III, Charles dAnjou. Ce dernier se rend rapidement à Paris pour demander le soutien de son neveu. Le roi de France laccompagne jusquà Bordeaux où un duel devait régler le conflit entre les deux ennemis et publie, à cette occasion, une convocation générale de lost69. Sur ces entrefaites, le cardinal Jean Cholet, légat du pape Martin IV, propose en son nom à Philippe III la couronne dAragon pour lun de ses fils, au détriment de lexcommunié Pierre III. De juin à novembre 1283, le roi parcourt le midi et négocie avec la comtesse de Foix et vicomtesse de Béarn, Marguerite de Moncade et avec le frère cadet de Pierre III, Jacques II, roi de Majorque, comte de Roussillon et de Cerdagne et seigneur de Montpellier, en vue de préparer une expédition militaire en Aragon70. En novembre 1283, sur la route de Paris, il convoque à Bourges une assemblée générale des barons et des prélats, en présence de Charles dAnjou, pour traiter dune éventuelle expédition militaire contre lAragon71. Philippe III y fait lire la bulle de Martin IV exposant les conditions selon lesquelles lun de ses fils pourrait recevoir la couronne dAragon. Une lettre de Maurice de Craon, datée du 10 mars 1284, rapporte comment, les trouvant trop dures, lassemblée les a rejetées et a mandaté deux ambassadeurs à Rome. Ils sont de retour au parlement de la Chandeleur, avec un messager du pape, lequel a accepté la plus grande partie de leurs demandes72. Le roi convoque alors une nouvelle assemblée qui se tient à Paris, à partir du 20 février 1284, où est prise la décision daccepter la couronne dAragon pour son fils cadet, Charles de Valois73.

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Autrement dit, à partir de 1275, Philippe III nenvisage pas une campagne militaire à lextérieur du royaume, contre un autre souverain, sans réunir dabord une assemblée des prélats et des barons. Cette précaution sexplique, sans doute, par le succès très relatif de lost de Foix. Bien que le roi ait pu réunir, en 1272, une armée suffisamment nombreuse pour mater Roger-Bernard III, le résultat des convocations a été décevant et surtout brouillon, compte tenu de la dimension très hétérogène du service dû par chacun des individus présents74. De 1272 à 1274, le parlement fait la chasse aux évêques, aux établissements ecclésiastiques et aux vassaux qui ne se seraient pas présentés à lost. En septembre 1274, Philippe III prend acte de la mauvaise volonté avec laquelle les barons ont accueilli sa convocation et édicte une ordonnance, prévoyant amende et pénalité pour ceux qui auraient négligé de se rendre à lost75. Si ladministration royale a réprimé les plus puissants récalcitrants, la réunion, à partir de 1275, dassemblées plénières des barons et prélats du royaume, afin dobtenir leur assentiment pour les campagnes militaires royales, relevait certainement aussi de la volonté du roi de lutter contre labsentéisme à lost et dimpliquer les barons dans la préparation des expéditions pour sassurer de leur présence. Ajoutons à cela que, contrairement à lost de Foix, les assemblées sont convoquées pour des guerres où lost est sensé sortir du royaume (en Navarre, en Castille, en Aragon). Or, le service militaire des vassaux nest dû, le plus souvent, quà lintérieur de celui-ci76. Là encore, la réunion systématique dune assemblée plénière pour délibérer à propos de lexpédition militaire en projet, en invitant les barons à donner leur assentiment aux opérations, les associe à la prise de décision, les prédisposant à suivre le roi.

Organiser la croisade

La majeure partie des assemblées est réunie à propos des campagnes militaires et des conflits en dehors du royaume. Certaines concernent aussi la préparation dun type particulier dexpéditions, les croisades. Xavier Hélary a souligné récemment combien lhistoriographie, voyant dans la croisade de Tunis le dernier grand effort pour sauver la Terre 443sainte, avait négligé laction du fils et du petit-fils de Louis IX envers elle77. Le 24 juin 1275, lendemain du couronnement de la reine, le roi, ses frères et ses beaux-frères prennent solennellement la croix, devant une assemblée de « tous les barons et prélats du royaume de France, ainsi que plusieurs parmi les principaux chevaliers dAllemagne78 ». Daprès une lettre du pape Grégoire X à son légat en France, Simon de Brie, la date de lexpédition aurait été fixée, après délibération du roi et des barons, au 24 juin 127779. En 1276, une bulle dInnocent V rappelle à nouveau cette assemblée, les décisions qui avaient été prises, en particulier la date du départ80. Un certain nombre dindices, relevés par Xavier Hélary, attestent que les grands du royaume entendaient participer à lexpédition et sy sont préparés81.

Vers le milieu de lannée 1278, Philippe iii convoque une autre assemblée pour traiter des questions autour de la croisade. Les grands barons du royaume décident denvoyer au pape Nicolas III lévêque dAmiens, Guillaume de Mâcon, également aumônier du roi, le doyen dAvranches, Guillaume, le maréchal de France, Raoul dEstrées, ainsi que les chevaliers Anseau de Garlande et Gaucher de Merry. Ils demandent que des indulgences de croisade soient accordées à ceux qui ne prenaient pas la croix mais qui envoyaient un montant équivalent au quinzième de leurs biens pour soutenir la Terre sainte. Cette assemblée ainsi que la requête du roi et des barons sont uniquement par la réponse négative du pape82.

Conformément au principe Quod omnes tangit, les assemblées réunies par Philippe III le Hardi ont toujours pour objet de délibérer sur des sujets concernant lensemble du royaume. Les expéditions guerrières et leur dérivé, la croisade, sont, de loin, le sujet le plus fréquemment abordé. Quil sagisse dun passage général du roi de France ou dune campagne militaire contre un autre souverain, lensemble des grands seigneurs du royaume est concerné. En convoquant ces assemblées autour de lui, le roi 444contribue à fédérer ses barons autour dun projet commun de croisade ou bien contre un roi ennemi. Il sassure ainsi de leur approbation et de leur participation, ce qui contribue à renforcer lautorité royale. De même, les établissements et ordonnances qui intéressent lensemble du royaume sont émis, eux-aussi, avec lassentiment des barons et prélats. Ils doivent sappliquer non seulement dans le domaine royal, mais aussi dans leurs propres fiefs, où les empiètements des officiers royaux sont peu appréciés. Leur accord est donc nécessaire et les assemblées permettent de lobtenir.

Le fonctionnement des assemblées

Réunir barons et prélats

La grande majorité des mentions dune assemblée affirme quelle réunissait autour du roi ses « barons et prélats » sans plus de précisions83. Les lettres pontificales concernant le projet de croisade parlent des grands du royaume84. Guillaume Anelier parle, en 1276, des « comtes et vicomtes85 ». Mais, aucune convocation ne nous est parvenue et, nous avons peu dinformations sur lassistance exacte.

Les prélats sont ceux qui demeurent le plus dans lombre. Guillaume Anelier mentionne des « archevêques et évêques » présents au conseil restreint qui se réunit après lassemblée de 127686. Pour la réunion plénière de lannée précédente, il cite Matthieu de Vendôme, abbé de Saint-Denis et lévêque de Bar87. La présence du premier paraît logique. Outre lassociation étroite, renforcée par Louis IX, de la couronne avec labbaye de Saint-Denis, son abbé était auparavant chapelain de Louis IX. Il siège au parlement et au conseil royal, assure la régence du royaume 445pendant la croisade de Tunis et continue à conseiller le roi pendant tout le règne de Philippe III88. Il est difficile, en revanche, de voir qui pourrait être cet « évêque de Bar89 ». Guillaume Anelier aurait-t-il confondu avec le comte de Bar ou avec lévêque de Toul ? Lassemblée de 1278 ayant désigné comme ambassadeur auprès du pape lancien aumônier du roi, devenu évêque dAmiens, Guillaume de Mâcon, nous pouvons supposer quil y assistait90. Lors de lassemblée de 1283, Maurice de Craon rapporte quil sest entretenu avec lévêque de Langres, Guy de Genève91. Enfin, le procès-verbal de lassemblée de Paris en 1284 rapporte le rôle joué par larchevêque de Bourges, Simon de Beaulieu, ancien moine cistercien et surtout ami de Simon de Brie, devenu le pape Martin IV92. Certains de ces prélats sont des pairs ecclésiastiques, mais dautres non. La pairie ne semble pas être un critère de sélection des membres de lassemblée.

Nous possédons plus dinformations sur les laïcs. À lassemblée de 1275, Guillaume Anelier donne la parole à trois dentre eux. Le premier est Érard de Valéry93. Sénéchal de Champagne, il a participé à la septième croisade, a suivi Louis IX en Terre sainte où il retourne en 1265. Les conseils quil donne à Charles dAnjou ont été déterminants pour sa victoire de Tagliacozzo, en 1268. Présent à la croisade de Tunis, Philippe III le nomme, en 1271, chambrier de France94. Le deuxième intervenant est un baron sur lequel nous navons aucune information95. Le troisième est un chevalier inconnu dAnelier qui lui a été décrit comme étant lun des douze pairs de France96. À cette date, il ne peut sagir que du comte de Flandre, Guy Ier de Dampierre ou du duc de Bourgogne, 446Robert II. Ce doit être ce dernier, car Anelier connaît le comte de Flandre quil identifie parmi les participants de lassemblée de lannée suivante97. En compagnie de Guy de Dampierre, il relève la présence aux côtés du roi de son cousin, le comte Robert II dArtois et du comte de Bretagne, Jean Ier de Dreux98. Il mentionne aussi le rôle joué par Humbert de Beaujeu, seigneur de Montpensier, neveu du connétable de Louis IX et lui-même connétable de France depuis 126999. Enfin, le procès-verbal de lassemblée de 1284 cite Simon II de Clermont, seigneur de Nesle, membre, à partir de 1256, de lentourage de Louis IX quil assiste sur le plan juridique et pour qui il accomplit des missions diplomatiques. Il est nommé régent du royaume avec labbé de Saint-Denis en 1270 et reste un conseiller proche de Philippe III qui le désigne comme tuteur des enfants de France100. En dépit de laspect fragmentaire de ces informations, nous pouvons déjà relever que les assemblées réunissent à la fois les plus grands barons du royaume et des proches du roi, qui figurent à son conseil, dont le service remonte au règne précédent et qui, en vertu de leur office, souscrivent les diplômes royaux101.

Ce constat est confirmé par une liste beaucoup plus exhaustive. Le 3 décembre 1278, le pape Nicolas III répond au roi et aux barons par deux missives séparées. La seconde est adressée aux membres de lassemblée baronniale qui avait mandaté des ambassadeurs auprès de lui. Les intéressés sont les ducs Robert II de Bourgogne, chambrier de France depuis lannée précédente, et Jean Ier de Bretagne, le comte de Flandre, Guy Ier de Dampierre, le comte de Champagne, Edmond de Lancastre, les comtes Pierre Ier dAlençon, Robert de Clermont, Thibaut II de Bar, Robert II dArtois, le comte de Nevers, Robert III de Dampierre, le comte Robert IV de Dreux, le comte de La Marche et dAngoulême, Hugues XIII de Lusignan, le comte de Ponthieu, Jean de Nesle, le comte de Saint-Pol, Guy III de Châtillon, le comte de Soissons, Jean III de Nesle, le comte de Dammartin, Jean II de Trie, le comte de Roucy, Jean IV 447de Pierrepont, le comte dEu, Jean II de Brienne, le comte Jean Ier de Sancerre, le bouteiller de France, Jean dAcre, le connétable, Humbert de Beaujeu, Enguerrand IV de Coucy, Guillaume VI Larchevêque, seigneur de Parthenay, Simon II de Clermont, seigneur de Nesle, le vicomte Guy II de Thouars et le vicomte de Châteaudun et chambellan de France, Raoul II de Clermont102. Cette énumération fastidieuse permet de constater la présence à lassemblée de tous les personnages attestés dans les autres réunions plénières du règne. Presque tous les grands vassaux directs du roi sont là (cf. Carte). Le duc dAquitaine et le comte dAnjou et du Maine étant respectivement rois dAngleterre et de Sicile, leur absence sexplique assez facilement. Les seuls autres grands barons manquants sont le comte de Blois, Jean Ier de Châtillon, le comte dAuxerre, Jean de Chalon, le vicomte de Limoges, Arthur, petit-fils du duc de Bretagne, et le seigneur de Beaujeu, Louis Ier. De même, le chambrier, le bouteiller et le connétable sont présents, ainsi quau moins un maréchal de France, Raoul III dEstrées, qui nest certes pas cité dans ladresse, mais que lassemblée a désigné comme représentant auprès du pape. Philippe III aurait donc réuni autour de lui, en 1278, la quasi-totalité des grands seigneurs du royaume. Pourtant, cette assemblée nest pas rapportée par les sources contemporaines. Sans la lettre de Nicolas III, nous nen aurions pas connaissance. Il faut donc en conclure que le succès de ce rassemblement nétait pas exceptionnel et quil reflète plutôt lassistance que lon pouvait globalement sattendre à trouver aux assemblées convoquées par le roi.

Rechercher lunanimité : lassemblée de 1284

La dimension lacunaire des sources portant sur les assemblées réunies par Philippe III nous prive de nombreuses informations sur leur déroulement. Mais le procès-verbal du cardinal Jean de Sainte-Cécile, témoin de lassemblée de Paris, les 20 et 21 février 1284, nous permet den savoir un peu plus sur leur déroulement103.

Lassemblée commence par un discours dexposition du roi qui sadresse « aux prélats et aux barons pour requérir et demander quils lui donnent un conseil fidèle » sur la question de savoir sil doit accepter ou 448refuser les propositions pontificales concernant la couronne aragonaise. Philippe III prend lui-même la parole, contrairement à ce que fera son fils, qui laissera parler ses conseillers en son nom104. Linsistance sur la fidélité des présents atteste de la composante émotionnelle, fréquente dans les grands discours douverture et déjà présente ici, qui vise à souligner lunité existant entre eux et le roi105. Une fois cette étape accomplie, les membres de lassemblée commencent par sentendre sur les cadres de la délibération. Ils décident de se retrouver le lendemain, pour réfléchir sur la question, et envisagent de faire leur réponse au roi le 23 février. Le jour suivant, les membres de lassemblée se rendent à nouveau au palais de la Cité. Cette fois, le roi est absent. Il sest retiré pour ne pas peser sur les discussions. Il importe de souligner que ce nest pas lassemblée qui se retire pour délibérer, mais le roi qui abandonne le lieu dexercice du pouvoir. Ce déplacement pourrait symboliser une impossibilité théorique pour le roi dassumer correctement le pouvoir, en labsence dune unité entre lui et le reste du corps social.

Dans un premier temps, tous les membres de lassemblée sont réunis pour entendre la lecture des lettres pontificales faisant état des différentes conditions de la négociation. Puis, elles sont traduites en français, ce qui montre un souci de favoriser la compréhension des questions à lordre du jour pour la totalité des présents. La dimension informative préalable à toute discussion est aussi mentionnée par Maurice de Craon qui, dans sa lettre du 3 juillet 1280, avait également évoqué la lecture publique des lettres de Charles de Salerne lors de lassemblée qui avait eu lieu quelques jours plus tôt106. Les délibérations doivent explorer toutes les possibilités afin de se déterminer pour la meilleure solution, la plus proche de la vérité107. Cela implique que chacun des membres soit le mieux informé afin dêtre à même de comprendre tous les tenants et les aboutissants de laffaire.

Puis, les barons et les prélats se séparent pour délibérer de manière indépendante. Cette séparation semble avoir été motivée par des aspects essentiellement pratiques. La probabilité darriver à des résultats était en effet plus élevée en faisant discuter ensemble des individus ayant peu ou 449prou les mêmes fonctions et le même univers mental. Le procès-verbal ne sattarde pas sur les différentes options explorées par les barons et, sil précise quau début, il y avait des désaccords, il insiste surtout sur la rapidité de la réflexion qui se conclut par la décision de conseiller au roi daccepter les propositions pontificales. Le procès-verbal mentionne des désaccords pour insister sur le ralliement des opposants à lissue du débat. Les barons expriment ensuite leur unanimité en désignant un porte-parole chargé de lincarner. En loccurrence, ils choisissent le seigneur de Nesle, Simon II de Clermont. Ce nest certes pas le plus grand des barons du royaume. Il nest ni comte, ni duc, mais il est proche du roi, participe au gouvernement et a été régent du royaume. Enfin, âgé de plus de soixante-dix ans, il doit être lun des doyens de lassemblée. Il se rend auprès des prélats pour annoncer le résultat des discussions baronniales.

Nous sommes ici privés dinformations par une ellipse du procès-verbal. Les prélats sétaient-ils déterminés avant larrivée du porte-parole des barons ? Ont-ils attendu le résultat des délibérations baronniales pour se mettre daccord ? Que se serait-il passé si les deux assemblées étaient parvenues à des résultats contradictoires ? Et surtout, une telle situation aurait-elle pu advenir ? Nous savons seulement que, apprenant le résultat des discussions des barons, les prélats ont décidé de ne pas attendre le terme précédemment fixé.

Le légat pontifical se rend alors auprès du roi pour lui demander de venir au palais pour entendre « la réponse et le conseil » des barons et prélats. Les deux corps de lassemblée ayant atteint lunanimité séparément, puis ensemble, ils sont en unité. La venue du roi est désormais possible. Elle est très solennelle. Ses deux fils, le prince Philippe et Charles de Valois, sont présents avec le conseil royal au grand complet. Une foule nombreuse (multitudine numerosa) assiste à la scène et souligne encore davantage lunité dans la prise de décision entre le roi et son peuple que lassemblée est censée incarner108.

Le premier à sexprimer est alors larchevêque de Bourges, Simon de Beaulieu. Les ecclésiastiques ont choisi un métropolitain pour les 450représenter et ont opté pour un ami personnel de Martin IV, anticipant les termes de leur réponse et prenant en compte la charge affective que comporte la prise de décision. Larchevêque, précisant quil parle « de la volonté et du mandat des prélats », annonce au roi quil lui conseille daccepter loffre pontificale. Simon de Clermont intervient ensuite, non pas pour donner le résultat des délibérations des barons mais pour déclarer, « du mandat et avec laccord exprès » des barons, quil est entièrement daccord avec larchevêque de Bourges et quil donne le même conseil. La délibération de toute lassemblée se réduit donc à lunanimité sur les mots prononcés par Simon de Beaulieu.

Le roi répond, alors, en les remerciant tous pour leurs bons et fidèles conseils. Puis, il manifeste lunité entre lui et tous les présents en reprenant les mots de larchevêque pour proclamer quil accepte la proposition pontificale. Il invite ensuite les présents à revenir le lendemain pour choisir celui de ses fils qui recevrait la couronne dAragon.

Faire apparaître lunité du royaume

Lassemblée fait donc lobjet dune véritable théâtralisation au cœur des lieux du pouvoir. Le moment de la prise de décision est solennisé par la présence du conseil royal et par celle de la foule. Linstant prend une dimension cérémonielle. Les délibérations qui sétaient faites à huis clos avaient pour but de faire disparaître tout désaccord. En revanche, au grand jour doit apparaître lunité parfaite des prélats et des barons du royaume qui, aux yeux de tous, devient communion avec le roi.

En fait, lassemblée est autre chose quun moment de prise de décision. Le récit de Guillaume Anelier prouve que les décisions réelles étaient prises par le conseil royal109. Ces réunions plénières font partie des cérémonies destinées à mettre en scène la royauté. Ce nest dailleurs pas pour rien quelles ont souvent lieu en même temps que dautres grandes célébrations royales. Elles fonctionnent selon une véritable liturgie du consentement par laquelle tous les prélats et barons du royaume, par la voix de leur porte-parole, expriment leur assentiment à la politique royale.

Cette théâtralisation de lunité du roi et des grands du royaume sur les grandes questions politiques vise dabord à éviter la contestation. Celle-ci trouve un espace dexpression en amont de la prise de décision, lors de 451la délibération. Une fois celle-ci achevée, tous sont censés être daccord avec loption retenue. Par ailleurs, le soutien des grands du royaume à la politique royale est évidemment attendu après cette manifestation publique de leur assentiment unanime.

Enfin, lassemblée met en scène la communion parfaite unissant le corps du royaume, représenté par les prélats et barons avec sa tête, le roi. Les assemblées de Philippe III ont contribué à faire passer le roi de France du statut de seigneur du domaine royal à celui « dempereur en son royaume ». Xavier Hélary a souligné combien les Capétiens, de Louis IX à Philippe le Bel, ont utilisé leurs expéditions militaires pour étendre leur autorité sur lensemble du royaume, effaçant progressivement la distinction entre leurs vassaux directs et indirects, apportant une grande place à la théâtralisation de lactivité militaire pour susciter ladhésion de la noblesse110. Les assemblées plénières sinscrivent dans le même processus. À partir de 1275, Philippe III a réussi à réunir chaque année autour de lui la quasi-totalité des prélats et des barons, les fédérant autour de la couronne. Sous son règne, les hôtels princiers se multiplient à Paris autorisant les grands du royaume à y faire des séjours prolongés, facilitant la répétition de ces cérémonies destinées à célébrer lunité du royaume111. Cette polarisation a même permis de faire entrer dans la sphère dinfluence des rois de France des princes qui ne dépendent pas de lui comme le comte de Bar, Thibaut II, présent à lassemblée de 1278112. Ainsi commence le processus qui amène le fils de Thibaut, Henri III, à faire hommage en 1301, au fils de Philippe, Philippe IV, pour une partie du comté de Bar113.

452

Conclusion

Afin de préparer ses départs en croisade et pour donner plus dampleur à ses protestations contre les empiètements du pouvoir ecclésiastique, Louis IX avait rassemblé à plusieurs reprises les prélats et les barons du royaume de France. Son fils, Philippe III, systématise cette pratique et réussit à fédérer presque chaque année lécrasante majorité des grands du royaume autour de lui. Le succès de ces réunions plénières atteste de la polarisation progressive de la haute aristocratie autour du roi et de lenracinement de la notion de royaume comme corps politique constitué. En son sein, lassemblée est un organe de gouvernement où lassentiment des grands laïcs et ecclésiastiques du royaume à une décision ou un établissement royal est manifesté par une véritable théâtralisation du consentement qui met en exergue lunité du corps du royaume autour de son chef, le roi. Ces assemblées ne concernent toutefois que les décisions ou les établissements royaux qui regardent lensemble du royaume, impliquant les grands et leurs domaines. Leur accord est alors requis afin den faciliter lapplication ou la mise en œuvre, selon le principe du Quod omnes tangit, qui se diffuse dans les conceptions juridiques de la société. Ainsi, lorsquen 1302, Philippe IV le Bel, aux prises avec le pape Boniface VIII, entend regrouper tout le royaume autour de lui, il reprend cette maxime dans les convocations quil expédie pour une assemblée plénière114. Mais, contrairement à celles de son père, il ne se contente pas de permettre à la foule dassister à la liturgie du consentement des prélats et des barons, il invite les représentants des villes à y prendre part. Contrairement aux assemblées des autres princes dOccident à la fin du xiiie siècle et au début du xive siècle, celles que convoquait Philippe le Bel ne devaient pas accorder le consentement à limpôt, mais bien, dans la lignée des assemblées de Philippe III, réunir le corps du royaume, désormais étendu au-delà des barons et prélats, autour du souverain, pour le 453tenir informé des dangers qui pesaient sur lui et sur la Chrétienté et pour, selon lexpression de Julien Théry, « le faire communier dans lapprobation des actions salutaires » royales115.

Clément de Vasselot de Régné

Université dAngers

Temps, Mondes, Sociétés

(UMR 9016)

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Fig. 1 – Fiefs tenus par les barons présents à lassemblée de 1278.
Crédits : Clément de Vasselot de Régné.

1 J. Richard, « Les conseillers de Saint Louis. Des grands barons aux premiers légistes : au point de rencontre de deux droits », À lombre du pouvoir. Les entourages princiers au Moyen Âge, éd. J.-L. Kupper, Liège, Presses universitaires de Liège, 2003, p. 135-147. Voir également Q. Griffiths, The Counselors of Louis IX, PhD, University of California, 1965. Je remercie Amicie Pélissié du Raussas de mavoir communiqué cette thèse ; V. Ménès, La genèse du conseil du roi au xiiie siècle, thèse de doctorat, Université de Cergy-Pontoise, 2001.

2 É. Bournazel, « Réflexions sur linstitution du conseil aux premiers temps capétiens (xiie-xiiie siècles) », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes [en ligne], no 7, 2000, consulté le 19/02/2020 ; J. Richard, « La culture juridique de la noblesse aux xie, xiie et xiiie siècles », Nobilitas. Funktion und Repräsentation des Adels in Alteuropa, éd. O. G. Oexle et W. Paravicini, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1997, p. 55-66.

3 Richard, « Les conseillers de Saint Louis », p. 124.

4 Layettes du trésor des chartes, éd. A. Teulet, Paris, Plon, 1866, t. 2, 2404, p. 298-299 ; Sur cette affaire, voir O. Pontal, « Le différend entre Louis IX et les évêques de Beauvais et ses incidences sur les Conciles (1232-1248) », Bibliothèque de lÉcole des chartes, 123, 1, 1965, p. 5-25.

5 Layettes, t. 2, 3569, p. 645 ; A. Charansonnet, « Les révoltes des barons de Louis IX. Réactions de lopinion et silence des historiens en 1246-1247 », Une histoire pour un royaume (xiie-xve siècle), éd. A.-H. Allirot, M. Gaude-Ferragu, G. Lecuppre, É. Lequain, L. Scordia et J. Véronèse, Paris, Perrin, 2010, p. 218-239.

6 Guillaume de Nangis, « Gesta sanctae memoriae Ludovici regis Franciae », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. L. Delisle, Paris, Imprimerie royale, 1840, t. 20, p. 352 ; Jean de Joinville, Vie de saint Louis, éd. J. Monfrin, Paris, Classiques Garnier, 2010, p. 54-55 ; Guillaume Guiart, « La branche des royaus lingnages », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et L. Delisle, Paris, V. Palmé, 1865, t. 22, p. 204 ; X. Hélary, La dernière croisade, Paris, Perrin, 2016, p. 14-21.

7 M. Hébert, La voix du peuple. Une histoire des assemblées au Moyen Âge, Paris, Presses universitaires de France, 2018, p. 82-84.

8 Griffiths, The Counselors of Louis IX, p. iii.

9 Ch.-V. Langlois, Le règne de Philippe iii le Hardi, Paris, Hachette, 1887, p. 38-40 ; X. Hélary, « La cour de Philippe III », La Cour du Prince. Cour de France, cours dEurope, xiie-xve siècle, J. Paviot, M. Gaude-Ferragu et B. Laurioux, Paris, Champion, 2011, p. 39-51, ici p. 41 ; sur les conflits au sein de lentourage de Philippe III, voir W. C. Jordan, « The Struggle for Influence at the Court of Philip III : Pierre de La Broce and the French Aristocracy », French Historical Studies, 24, 3, 2001, p. 439-468.

10 « Et quant li rois oï ces nouvelles, il sen conseilla que il feroit ; et trouva en son conseil quil alast seur lui efforciement, pour ce quil estoit nouvèlement rois », « Chronique anonyme des rois de France finissant en 1286 », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et J.-D. Guigniaut, Paris, Imprimerie impériale, 1855, t. 21, p. 91.

11 Voir par exemple Cartulario de Don Felipe III Rey de Francia, éd. M. Arigita y Lasa, Madrid, Hernando, 1913, 71, p. 51 ; 78, p. 55-56 ; 127, p. 90 et 133, p. 95 ; Ordonnances des rois de France de la troisième race, éd. E. de Laurière, Paris, Imprimerie royale, 1723, t. 1, p. 305 et 309 ; X. Hélary, « Philippe III et la Navarre, 1274-1284 », Hommes et terres du Sud. Structures politiques et évolution des sociétés, xie-xviiie siècle. Actes du 126e congrès des sociétés historiques et scientifiques, Toulouse, 2001, éd. Ph. Contamine, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2009, p. 195-215, ici p. 195-196.

12 Guilhem Anelier de Tolosa, La Guerra de Navarra. Nafarroako Gudua, éd. M. Berthe, R. Cierbide, X. Kintana et J. Santalo, Pampelune, Gobierno de Navarra, 1995, t. 2, v. 1388, p. 122.

13 « Deliberatione habita cum magnatibus regni tui », Les registres de Grégoire X (1272-1276), éd. J. Guiraud, Paris, Thorin, 1892, 841, p. 345 ; Paris, Archives nationales, J//448, no 88.

14 « Il se conseilla à ses barons quil feroit de ceste chose ; et il li conseillièrent en bonne foi quil assamblast ses genz », « Chronique anonyme », p. 93.

15 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 4216-4219, p. 194.

16 « Pro parte tua et baronum eorundem », Les registres de Nicolas III, éd. J. Gay, Paris, Fontemoing, 1898, t. 1, 392, p. 144-146.

17 H. Duplès-Agier, « Ordonnance somptuaire inédite de Philippe le Hardi », Bibliothèque de lÉcole des chartes, 15, 1854, p. 176-181, ici p. 177.

18 Foedera, Conventiones, Litterae et cujuscunque generis Acta Publica inter reges Angliae et alios quosvis imperatores, reges, &c., ab. A.D. 1101 ad nostra usque tempora habita aut tractata, éd. Th. Rymer, Londres, Record Commission on Historical Manuscripts, 1816, t. 1, pars 2, p. 583.

19 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, 28, p. 448-449.

20 F. Hildesheimer et M. Morgat-Bonnet, Le Parlement de Paris. Histoire dun grand corps de lÉtat monarchique. xiiie-xviiie siècle, Paris, Honoré Champion, 2018, p. 75.

21 Sur Pierre de La Broce et sa condamnation, voir Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 20-30 ; Jordan, « The Struggle for Influence at the Court of Philip III », p. 455-459 ; X. Hélary, « Pierre de La Broce, seigneur féodal, et le service militaire sous Philippe III. Lost de Sauveterre (1276) », Journal des Savants, 2, 2006, p. 275-305 ; X. Hélary, Recherches sur le pouvoir et la légitimité des rois de France (xiiie-xve s.) : lascension et la chute de Pierre de La Broce, chambellan du roi († 1278). Étude sur le pouvoir royal au temps de Saint Louis et de Philippe III (v. 1250-v. 1280), Dossier dhabilitation à diriger des recherches, Université Paris-Sorbonne Paris IV, 2013.

22 X. Hélary, « Trahison et échec militaire : le cas Pierre de La Broce (1278) », La Trahison au Moyen Âge. De la monstruosité au crime politique (ve-xve siècle), éd. M. Billoré et M. Soria, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, p. 185-195, ici p. 192-193.

23 Jean de Vignay, « Chronique de Primat, traduite par Jean de Vignay », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et L. Delisle, Paris, Welter, 1894, t. 23, p. 100.

24 « Chronique anonyme », p. 95-96.

25 J. de Gaulle, « Documents historiques », Bulletin de la Société de lhistoire de France, 9, 1844, p. 98-100.

26 Les registres de Nicolas III, t. 1, 388-391, p. 141-144 ; G. J. Campbell, « Clerical Immunities in France during the Reign of Philip III », Speculum, 39, 3, 1964, p. 404-424, ici p. 408 ; R. Kay, « Martin IV and the Fugitive Bishop of Bayeux », Speculum, 40, 3, 1965, p. 460-483, ici p. 474-478 ; S. Field et W. Simons, « A Prophecy Fulfilled ? An Annotated Translation of the Sources on the Death of Crown Prince Louis of France (1276) and the Interrogations of Elizabeth of Spalbeek (1276-1278), The Medieval Low Countries, 5, 2018, p. 35-91, ici, p. 48-50.

27 « Anonymum S. Martialis chronicon », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et J.-D. Guigniaut, Paris, Imprimerie impériale, 1855, t. 21, p. 804.

28 Foedera, t. 1, pars 2, p. 639-640.

29 Hélary, « La cour de Philippe III », p. 49.

30 Pierre Coral, « Majus chronicon Lemovicense », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et J.-D. Guigniaut, Paris, Imprimerie impériale, 1855, t. 21, p. 784.

31 Ibid., p. 786 ; Guillaume de Nangis, « Gesta Philippi tertii Francorum regis », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. L. Delisle, Paris, Imprimerie royale, 1840, t. 20, p. 496 ; Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 289.

32 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 102, n. 4.

33 L. Carolus-Barré, « Les grands tournois de Compiègne et de Senlis en lhonneur de Charles, prince de Salerne », Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France, 1982, p. 87-100.

34 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 289 ; Voir aussi Richard, « Les conseillers de Saint Louis », p. 118.

35 Hébert, La voix du peuple, p. 81.

36 « E z ab aytant lo rei lo coseyl ac mandad, / E mandec parlament. / E mandec parlamen el rey cui es la flor. / Lay a coms e viscoms e maint om de valor ; / E lo rey diss assi : Cosseyllatz mi, seynnor. », La Guerra de Navarra, t. 2, v. 4216-4220, p. 194.

37 « E.l valent rey de França ac cosseyll celador /Ab cels que may li plac. / Ab çels que may li plac fe cosseyll belamen. », Ibid., t. 2, v. 4243-4245, p. 195.

38 Hébert, La voix du peuple, p. 77.

39 Philippe de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, éd. A. Salmon, Paris, Picard, 1900, t. 2, 1499, p. 257.

40 Ibid., 1515, p. 264.

41 « Unde dicit lex, quod illud quod omnes tangis, debet ab omnibus comprobari », Archives législatives de la ville de Reims, éd. P. Varin, Paris, Crapelet, 1840, t. 1, p. 448.

42 A. Gouron, « Aux origines médiévales de la maxime Quod omnes tangit », Histoire du droit social. Mélanges en hommages à Jean Humbert, Paris, Presses universitaires de France, 1989, p. 277-286 ; O. Condorelli, « “Quod omnes tangit, debet ab omnibus approbari”. Note sullorigine e sullutilizzazione del principio tra medio evo e prima età moderna », Ius Canonicum, 53, 2013, p. 101-127.

43 « Ad ea quae nobis incumbunt, contingunt imperium et specialiter singulos ac generaliter universos, presentiam omnium conveniat instancius evocare, ut quod tangit omnes ab omnibus approbetur [] generalem curiam apud Veronam indicere proponamus, ut in tam solempni et arduo negotio quod est prope proprium singulorum, presential, consilio et assensu principum perfruamur », Historia diplomatica Friderici secundi, éd. J.-L.-A. Huillard-Bréholles, Paris, Plon, 1860, t. 6, part. 1, p. 169.

44 « Sicut lex iustissima, provida circumspectione sacrarum principum stabilita, hortatur et statuit ut quod omnes tangit ab omnibus approbetur, sic et nimis evidenter ut communibus periculis per remedia provisa communiter obvietur », Select Charters and Other Illustrations of English Constitutional History from the Earliest Times to the Reign of Edward the First, éd. W. M. A. Stubbs, Oxford, Clarendon Press, 1870, p. 474.

45 « Deliberatione provida precedente », Ordonnances des rois de France, t. 1, p. 303.

46 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 206-208 et 236-237.

47 Ibid., 6, p. 423-424.

48 Ibid., p. 371-372.

49 « E chronico Rotomagensi », Recueil des historiens des Gaules et de la France, éd. N. de Wailly et L. Delisle, Paris, Welter, 1894, t. 23, p. 361.

50 Duplès-Agier, « Ordonnance somptuaire », p. 179-180.

51 Les Olim, t. 2, p. 161.

52 L. Carolus-Barré, « La folie de Jean de Mouy. Recherches sur la société féodale en Beauvaisis au xiiie siècle », Actes du 97e Congrès national des sociétés savantes (Nantes, 1972). Philologie et Histoire, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 1979, p. 301-346.

53 Carolus-Barré, « Les grands tournois de Compiègne », p. 95-96.

54 X. Hélary, « La gloire et loubli. Philippe III et la postérité ou comment se font les réputations », Atala, 3, 2000, p. 77 ; sur Robert de Clermont, voir L. Carolus-Barré, « Robert de France, sixième fils de Saint Louis, comte de Clermont en Beauvaisis et sire de Bouronnais, 1256-1318 », Autour du donjon de Clermont, témoin de lhistoire. Actes du colloque de Clermont, organisé les 10-11 octobre 1987, Paris, GEMOB, 1989, p. 42-63.

55 Les registres de Nicolas iii, t. 1, 392, p. 276-277.

56 Duplès-Agier, « Ordonnance somptuaire », p. 177-178.

57 Carolus-Barré, « Les grands tournois de Compiègne », p. 98.

58 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 96-98 ; Hélary, « Philippe III et la Navarre, 1274-1284 », p. 195-215 ; X. Hélary, « La place des questions de succession dans la politique extérieure de Philippe III le Hardi », Making and Breaking the Rules : Succession in Medieval Europe, c. 1000-c. 1600. Établir et abolir les normes : la succession dans lEurope médiévale, vers 1000-vers 1600, éd. F. Lachaud et M. Penman, Turnhout, Brepols, 2008, p. 111-128, ici p. 112.

59 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 96-99.

60 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 1183-1411, p. 117-122.

61 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 100-102 ; Hélary, « La place des questions de succession », p. 113-114.

62 « Chronique anonyme », p. 93.

63 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 4174-4276, p. 193-195.

64 X. Hélary, Larmée des rois de France. La guerre de saint Louis à Philippe le Bel, Paris, Perrin, 2012, p. 132-134.

65 Sur lost de Sauveterre, voir Hélary, « Pierre de La Broce, seigneur féodal », p. 275-305 ; Hélary, « Trahison et échec militaire : le cas Pierre de La Broce (1278) », p. 192-195.

66 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 110-118.

67 « E sur ce li rois, et consehl, e nos, respondi, qil navoit mie consehl de parler sur cele chose a ses evesques, ni a ses barons, cum sur chose qui nestoit pas certeine », Foedera, t. 1, pars 2, p. 583.

68 « Li roys de France fist assemler devant soy ses evesques et ses barons et en lor presence, moy present, fist lire la letra, que li roys de Castele avoit envoyé au prince de Salerne vostre cosin », Ibid.

69 X. Hélary, « Les relations entre Philippe III et Charles Ier dAnjou dans la décennie 1270 », LEspace politique méditerranéen. 128e Congrès national des Sociétés savantes. Bastia, 2003, éd. J. Duma, Paris, Centre des travaux historiques et scientifiques, 2008, p. 33-46 ; Hélary, Larmée des rois de France, p. 140-141.

70 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 145-146.

71 « Eodem anno, Philippus, rex Francorum, de baronibus et prelatis apud Bituricam, presente patruo suo Karolo, tenet concilium generale contra Petrum Aragonie, regnum patrui sui Karoli occupantem », « Anonymum S. Martialis chronicon », p. 804.

72 Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, 28, p. 448-449.

73 Ibid., 27, p. 447-448 ; Foedera, t. 1, pars 2, p. 639-640.

74 Hélary, Larmée des rois de France, p. 125-126.

75 Ibid., p. 130-131.

76 Ibid., p. 135 ; Voir également X. Hélary, « Servir ? La noblesse française face aux sollicitations militaires du roi », Cahiers de Recherches Médiévales, 13, 2006, p. 21-40.

77 X. Hélary, « Les rois de France et la Terre sainte de la croisade de Tunis à la chute dAcre (1270-1291) », Annuaire-Bulletin de la société de lhistoire de France, 2005, 2007, p. 21-104.

78 « Majus chronicon Lemovicense », p. 786 ; « Gesta Philippi tertii Francorum regis », p. 496.

79 Les registres de Grégoire X, 841, p. 345.

80 Paris, Archives nationales, J//448, no 88.

81 Hélary, « Les rois de France et la Terre sainte », p. 31-34.

82 Paris, Archives nationales, J//698, no 44 et J//449, no 108.

83 « Gesta Philippi tertii Francorum regis », p. 496 ; « Chronique anonyme », p. 93 ; Duplès-Agier, « Ordonnance somptuaire », p. 177 ; « E chronico Rotomagensi », p. 361 ; Foedera, t. 1, pars 2, p. 583 ; « Anonymum S. Martialis chronicon », p. 804 ; Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, 27, p. 447-448 et 28, p. 448-449.

84 Les registres de Grégoire x, 841, p. 345 ; Paris, Archives nationales, J//448, no 88.

85 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 4219, p. 194.

86 Ibid., v. 4250, p. 195.

87 Ibid., v. 1389, p. 122.

88 Griffiths, The Counselors of Louis IX, p. 208 ; Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 41.

89 Il ne sagit pas dune coquille éditoriale. On lit bien « labesque de Bar » sur la reproduction en fac-similé du manuscrit original : La Guerra de Navarra, t. 1, fol. 40v.

90 Les registres de Nicolas III, t. 1, 392, p. 144-146.

91 Guy de Genève avait accompagné Louis IX à la croisade de Tunis. Il était ensuite devenu lun des conseillers de son fils. Voir P. Duparc, Le comté de Genève (ixe-xve siècles), Genève, Société dhistoire et darchéologie de Genève, 1978, p. 185-186.

92 Foedera, t. 1, pars 2, p. 639-640 ; Sur Simon de Beaulieu, voir J. de Bascher, « La chronologie des visites pastorales de Simon de Beaulieu, archevêque de Bourges, dans la première et la deuxième Aquitaine à la fin du xiiie siècle », Revue dhistoire de lÉglise de France, 160, 1972, p. 73-89.

93 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 1254, p. 118.

94 Griffiths, The Counselors of Louis IX, p. 135.

95 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 1304, p. 120.

96 Ibid., t. 2, v. 1346-1347, p. 121.

97 Ibid., v. 4247, p. 195.

98 Ibid., v. 4224 et 4246-4247, p. 194-195.

99 Ibid., v. 4233-4234, p. 194 et v. 4248-4249, p. 195 ; Griffiths, The Counselors of Louis IX, p. 35.

100 Foedera, t. 1, pars 2, p. 639-640 ; Griffiths, The Counselors of Louis IX, p. 142-143.

101 Sur les officiers de la couronne, voir É. Lalou, « Lapparition des grands officiers de lHôtel du roi et la stratification du service domestique du roi de France. La situation à la fin du xiiie siècle », Hommes, cultures et sociétés. Liber discipulorum en lhonneur de Philippe Contamine, éd. J. Paviot et P. Gilli, Paris, Presses de lUniversité Paris-Sorbonne, 2012, p. 191-203.

102 Les registres de Nicolas III, t. 1, 392, p. 144-146.

103 Foedera, t. 1, pars 2, p. 639-640 ; Voir également Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, p. 150-151.

104 E. Boutaric, « Les premiers états généraux (1302-1314) », Bibliothèque de lÉcole des chartes, 21, 1860, p. 1-37, ici, p. 9.

105 Hébert, La voix du peuple, p. 227.

106 Foedera, t. 1, pars 2, p. 583.

107 Hébert, La voix du peuple, p. 232.

108 Sagit-il déjà des réunions publiques de la population parisienne qui sont organisées sous le règne de Philippe le Bel par des annonces sans doute effectuées dans les paroisses de la ville ? Voir C. Decoster, Les assemblées politiques sous Philippe le Bel, thèse de doctorat, Université Panthéon-Assas Paris II, 2008.

109 La Guerra de Navarra, t. 2, v. 4243-4274, p. 195.

110 Hélary, « Servir ? », p. 21-40 ; id., Larmée des rois de France, p. 258-260.

111 Par exemple, le comte de La Marche et dAngoulême, Hugues XIII, avait acheté ou fait bâtir un hôtel dans le faubourg Saint-Marcel : G. W. Watson, « The Families of Lacy, Geneva, Joinville and La Marche », The Genealogist, 21, 1905, p. 234-236 ; sur cette question, voir B. Bove, Y. Brault et A. Ruault, « Spatialisation des censives urbaines au xviiie siècle avec essai de restitution médiévale », Paris, de pixels en parcelles. Analyse géomatique de lespace parisien médiéval et moderne, éd. H. Noizet, B. Bove et L. Costa, Paris, Presses universitaires de Vincennes / Comité dhistoire de la ville de Paris, 2013, p. 167-196 ; B. Bove, « Typologie spatiale des hôtels aristocratiques à Paris (1300, 1400) », ibid., p. 257-292.

112 Les registres de Nicolas III, t. 1, 392, p. 144-146.

113 G. Poull, La maison souveraine et ducale de Bar, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1994, p. 253.

114 C. Decoster, « La convocation à lassemblée de 1302, instrument juridique au service de la propagande royale », Parliaments, Estates and Representation, 22, 2002, p. 17-36 ; ead., « Lusage de la plena potestas dans les assemblées médiévales », Cahiers de Recherches Médiévales et Humanistes, 31, 2016, p. 31-42.

115 J. Théry, « Une hérésie dÉtat. Philippe le Bel, le procès des “perfides templiers” et la pontificalisation de la royauté française », Médiévales, 60, 2011, p. 157-185 ; É. Lalou, « Les assemblées générales sous Philippe le Bel », Actes du 110e Congrès national des sociétés savantes, Montpellier, 1985, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 1986, p. 7-29 ; E. A. R. Brown, « Les assemblées de Philippe le Bel : la promotion dune image de bon gouvernement consultatif et consensuel », Consensus et représentation, éd. J.-Ph. Genet, D. Le Page et O. Mattéoni, Paris-Rome, Publications de la Sorbonne / Publications de lÉcole française de Rome, 2017, p. 61-94.