Aller au contenu

Classiques Garnier

La « culture de la guerre » dans les arts figuratifs des cours d’Italie centrale (Mantoue et Ferrare, 1494-1512)

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes / Journal of Medieval and Humanistic Studies
    2019 – 2, n° 38
    . varia
  • Auteur : Rivière (Jean-Marc)
  • Résumé : À compter de l’entrée de Charles VIII en Italie, une déconnexion se produit entre les images produites dans la Péninsule et la politique, considérée dans ses développements militaires. L’analyse des œuvres produites au sein des cours de Mantoue et de Ferrare entre 1494 et 1512 montre que le champ figuratif, tout comme la réflexion historiographique, cherche des solutions inédites pour tenter de comprendre, puis de représenter une réalité historique devenue illisible.
  • Pages : 161 à 174
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes - Journal of Medieval and Humanistic Studies
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406104544
  • ISBN : 978-2-406-10454-4
  • ISSN : 2273-0893
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10454-4.p.0161
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 01/04/2020
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Arts, Renaissance, guerre, histoire, représentations
161

LA « CULTURE DE LA GUERRE1 »

dans les arts figuratifs des cours dItalie centrale
(Mantoue et Ferrare, 1494-1512)

« La politique a besoin des images », a écrit Horst Bredekamp dans sa Théorie de lacte dimage, précisant qu« elle fait naître des images, mais elle se conforme aussi à des images2 ». Si ce rapport essentiel et réciproque de la geste politique à limage se vérifie pleinement en Italie dans le contexte courtisan de la seconde moitié du Quattrocento puis, à partir de léclosion du Maniérisme, dans les centres artistiques romain et florentin, le jugement de Bredekamp se heurte, durant la première phase des guerres dItalie, à un enchaînement logique moins linéaire. À compter de lentrée des troupes de Charles VIII, on assiste en effet à une déconnexion entre les images produites dans la Péninsule et la politique, considérée dans ce qui fait sa spécificité conjoncturelle, à savoir ses développements militaires3.

Alors que les scènes de bataille font pleinement partie de la tradition figurative de la seconde moitié du xve siècle4, John R. Hale signale ainsi 162lexistence de seulement trois représentations de la guerre réalisées par des artistes œuvrant en Italie entre 1494 et 15295 et souligne le contraste entre cette faible visibilité contemporaine du conflit et labondante imagerie produite dans les autres États intervenant, directement ou par lintermédiaire de troupes mercenaires, dans les affaires péninsulaires. Dès la fin du xve siècle, on trouve en effet dans laire germanique des témoignages figuratifs dépisodes militaires liés à la campagne italienne6, mais aussi, surtout à partir de 1510, de nombreuses scènes illustrant la vie militaire ou linsertion sociale des soldats dans la vie civile7. En France, une attention spécifique est portée aux épisodes prestigieux, telles lentrée de Louis XII à Milan ou la prise de Gênes8, ou bien favorables sur le plan militaire, comme les batailles de Fornoue, dAgnadel ou de Marignan9. Justifiant cette différence de traitement par des particula163rismes régionaux (notamment une plus grande valorisation sociale de la figure du soldat dans laire germanique), Hale aboutit à la conclusion que ce type dimages reste « hors des limites de limagination des artistes italiens10 », sans aller plus avant dans lexplicitation dun tel trouble de la représentation.

Or, cette crise de la figurabilité11 apparaît dautant plus problématique que lirruption soudaine de la « furie française12 » trouve, aux yeux des contemporains, une résonnance très forte. La nouvelle manière de faire la guerre, sanglante et impitoyable, introduite par les Français plonge les observateurs péninsulaires dans un état de sidération (dans la description, du moins, quen donnent Machiavel et Guicciardini), accentué par linédite quantification du nombre des morts qui accompagne désormais chaque épisode militaire13. Il nest quà voir la majesté avec laquelle, sur le manuscrit de la Cronaca de Ferraiolo conservé à la Pierpont Morgan Library de New York, un illustrateur napolitain anonyme a représenté les troupes françaises entrant à Naples à la suite de Charles VIII pour comprendre le saisissement que suscite, partout, le passage de cette 164armée14. De ce fait, comme le note Franco Cardini dans son ouvrage consacré à La culture de la guerre,

quelque chose dirréparable sétait produit lorsque le roi de France, Charles VIII, avait fait irruption en Italie : cen était fini des rencontres peu sanglantes, des campagnes interminables ponctuées de ballets diplomatiques. Le doux jardin clos, hortus conclusus, auquel sétaient accoutumés les princes italiens était dévasté et mis sens dessus dessous. La guerre nétait plus un passe-temps, ou le moyen doccuper des mercenaires par trop turbulents : elle était devenue linstrument principal dune lutte politique pour lhégémonie à léchelle européenne15.

La guerre devient ainsi le point cardinal autour duquel sarticule désormais la réflexion politique, puis historiographique, car il sagit là, selon les mots dAndrea Matucci, « dune nouveauté trop attendue et trop crainte pour ne pas se manifester, dabord dans les esprits, ensuite dans les œuvres16 ». Le décalage chronologique relevé par Matucci sépare deux temps distincts : à celui de la perception dune inadéquation entre la réalité historique et les outils dont on dispose pour la comprendre et la décrire, devenus brutalement obsolètes, succède celui de lélaboration dun appareil linguistique et conceptuel capable de réaliser la jonction entre ces plans hétérogènes et damener ainsi une synthèse productrice de sens. Chez Machiavel et Guicciardini, le point de bascule entre ces deux moments, pour des raisons qui relèvent autant de leur parcours individuel que de la conjoncture, se réalise durant les années 1512-151317.

Que le conflit soit longuement exclu du champ figuratif interroge sur la possibilité dune transposition dans le domaine artistique dune semblable dichotomie. Dans la mesure où le geste esthétique relève dune mise en ordre du monde, on peut en effet douter de sa compatibilité avec un univers au sein duquel, selon les mots de Daniel Arasse et 165dAndreas Tönnesmann, « la structure même de la réalité est devenue labile18 » depuis lirruption de Charles VIII. Dès lors, tout comme dire la guerre nécessite davoir un recul suffisant pour en percevoir pleinement les enjeux dans un espace géopolitique élargi, vouloir la représenter ne nécessiterait-il pas une prise de distance par rapport à la narration événementielle, puisquaucune forme de causalité simple ne permet plus dexpliquer lenchevêtrement factuel dans lequel se trouve plongée la Péninsule ? Ceci reviendrait à dire que, pas davantage quon ne peut raisonner de la guerre lorsquon la fait19, on ne pourrait la montrer de façon concomitante, sauf à inventer de nouvelles modalités discursives, dont lavènement du Maniérisme et linvention de la peinture de bataille en tant que genre, durant la troisième décennie du xvie siècle20, seraient les premières occurrences. Lobjet de notre étude nest donc pas la question théorique du statut documentaire de lœuvre dart, ni même celle des modalités, techniques ou esthétiques, selon lesquelles le conflit ou la violence sont représentés dans les arts. Notre démarche est au contraire dordre phénoménologique : il sagit danalyser la manière dont un événement, générateur dun état de crise, travaille la relation entre le fait historique et lœuvre dart, puis dobserver selon quel « tempo » – pour reprendre le terme employé par Florence Alazard à propos du Sac de Rome21 – seffectue ce mouvement.

Compte tenu des liens complexes autour desquels se noue la relation entre un artiste et ses commanditaires, et à défaut de pouvoir mener ici une étude extensive à léchelle péninsulaire, nous concentrerons notre attention sur les cours de Mantoue et de Ferrare. Celles-ci présentent en effet la particularité commune dêtre des entités dynastiques pérennes qui, quoique touchées sur leur territoire par les guerres dItalie, parviennent à 166conserver leur autonomie politique, notamment grâce à leur implication aux côtés de la France22, offrant ainsi un cadre stable aux artistes qui y œuvrent. Elles sont par ailleurs liées entre elles par un solide réseau familial et diplomatique23, mais aussi artistique24, ce qui en fait un champ détudes homogène. En outre, comme le signalent Guido Beltrami et Aldolfo Tura, le fort retentissement des sanglants épisodes militaires y ancre profondément la « culture de la guerre » qui nous intéresse ici25. Afin que la comparaison avec le domaine historiographique soit cohérente sur le plan chronologique, nous nous intéresserons plus spécifiquement à la période qui court de lentrée de Charles VIII en Italie jusquaux pleins développements de la bataille de Ravenne, sans pour autant refuser, au terme de notre étude, une ouverture sur la période successive.

Tout comme Hale la perçu à léchelle de la péninsule italienne, la guerre en elle-même est presque absente du corpus pris ici en considération. Le seul épisode militaire dont nous ayons retrouvé un témoignage figuratif est la bataille de Polesella (1509), dont un artiste anonyme a fait en 1511 le sujet dune xylographie, insérée dans un volume intitulé Rotta facta per il Duca de Ferrara a la Bastia et conservé à la Biblioteca Comunale de Trente26. Sappuyant sur une technique sommaire, lauteur de cette xylographie met en relief le rôle joué par 167lartillerie ferraraise dans la victoire sur la flotte vénitienne et représente Alphonse Ier se tenant derrière ses troupes, dans une position dobservateur-stratège. Concomitamment se développe une imagerie qui montre Alphonse dEste en chef de guerre remerciant lintercession divine pour ses victoires. Il est ainsi figuré en armure, lépée au côté et le bassinet aux pieds, agenouillé devant saint Maurielo, sur lune des trois plaques dargent gravées en 1512 par Giannantonio Leli da Foligno et conservées dans la basilique Saint-Georges à Ferrare. En retrait se tient son destrier caparaçonné, surveillé par deux écuyers armés, tandis quon distingue en arrière-plan une puissante forteresse posée sur un promontoire27. Cest toujours en armure et en prière, les yeux dirigés vers le ciel, quAlphonse est représenté à lintérieur dune lettrine peinte par Matteo da Milano dans les années 1510-1512 sur le manuscrit de lOffiziolo alfonsino, conservé au Museu Calouste Gulbenkian de Lisbonne28. Le choix, commun à ces deux œuvres, dune représentation de profil témoigne de la volonté commémorative29 qui procède à leur réalisation. Limage du Duc nest toutefois pas encore fixée dans sa forme définitive : il faut attendre les années 1534-1536, avec le Portrait dAlphonse dEste de Battista Dossi (Modène, Galleria Estense), bien plus moderne dans sa forme comme dans ses intentions, pour que soit figuré un souverain autrement plus volontaire et maître de sa puissance, dont la victoire militaire doit désormais davantage à ses qualités de commandement (ce dont témoigne le parfait ordonnancement de ses troupes, représentées en arrière-plan) quà la volonté divine.

La représentation dAlphonse Ier, telle quelle se met en place durant les années 1510-1512, nest guère originale, puisquelle imite le célèbre prototype composé par Mantegna pour François de Gonzague. Cest en effet agenouillé et en tenue de combat que le marquis de Mantoue se trouve portraituré en donateur sur le retable de la Vierge de la Victoire, installée dans léglise de Santa Maria della Vittoria le 6 juillet 1496 pour commémorer le premier anniversaire de la bataille de Fornoue30. 168Tout aussi désireux que les Français de donner à cet épisode militaire au dénouement douteux les contours dune indéniable victoire, François met en exergue son rôle décisif dans lissue du combat, dont faisaient écho les mots « victoriae memor » inscrits en haut du cadre original, aujourdhui disparu. Si lépisode militaire en lui-même nest pas figuré sur le tableau, ses traces y sont disséminées et tissent un réseau de relations symboliques aisément déchiffrable. Outre que larmure du marquis est une parfaite représentation de celle quil portait le jour de la bataille, la lance brisée de saint Georges est une allusion aux dangers quil a affrontés ce jour-là, au péril de son intégrité physique, tandis que la présence de Longin (qui est venu mourir à Mantoue après sêtre converti) renvoie au fait que Francesco a offert la lance avec laquelle il a combattu à son frère Sigismondo, qui la alors comparée « au fer de la lance de Longin qui, telle celle ayant servi à verser le sang pour la rédemption de lhomme, fut cette fois loutil du salut et de la libération de lItalie31 ».

François de Gonzague nentend donc pas être un simple supplétif de larmée française, mais clame sa vocation à jouer un rôle central dans le grand chambardement géopolitique qui semble se dessiner. On en veut pour preuve le fait que, simultanément, il confie à Sperandio la réalisation dune médaille, sur le revers de laquelle il se fait représenter sur le champ de bataille, une fois la victoire acquise, sous linscription « ob restitutam italiae libertatem ». Cœur dun projet figuratif global, la bataille de Fornoue est en outre le sujet dun tableau commandé en octobre 1495 à Francesco Bonsignori32, destiné à être associé, au sein du Palais San Sebastiano, aux Triomphes de César de Mantegna (1484-1495) et à Lexpulsion des Buonacolsi de Domenico Morone (1494), qui célèbre linstauration de la seigneurie gonzaguienne en 1328. Ces tableaux sinsèrent dans un cycle commémoratif plus large encore, puisque François commande à plusieurs autres peintres, dont Pietro Antonio Guerzo, des œuvres destinées à chanter les triomphes militaires de son aïeul Ludovic 169pour la salle dite « des victoires » de son château de Guastalla33. La célébration de lépisode de Fornoue permet donc non seulement à François de Gonzague daffirmer ses futures ambitions politiques dans une Italie sous domination française, mais également daffirmer sa place au sein dune prestigieuse lignée dynastique, légitimant ainsi doublement son prestige personnel dans un contexte peu lisible, riche de potentielles opportunités, mais aussi de menaces encore mal perceptibles.

Ce serait toutefois fortement restreindre la présence figurative du conflit que de la limiter à ces seules images de seigneurs en représentation. Nombreuses sont en effet les traces laissées par la guerre dans des œuvres dont la thématique relève de listoria religieuse. La plus aisée à observer est la propension à faire figurer en arrière-plan, parmi les éléments du décor, des bâtiments militaires, places-fortes, châteaux ou bourgades fortifiées. Tel est le cas dans nombre dœuvres de Domenico Panetti (Saint André, 1497-1500, Ferrare, Pinacoteca Nazionale), de Boccaccio Boccaccino (Adoration des mages, 1499-1500, Naples, Galleria Nazionale di Capodimonte ; Vierge et lEnfant entre sainte Catherine dAlexandrie, une sainte martyre, saint Pierre et saint Jean-Baptiste, vers 1506, Venise, Galleria dellAccademia), de Garofalo (Vierge et lEnfant, 1499-1502, Assise, Museo-Tesoro del Sacro Convento ; Vierge et lEnfant en majesté, entre saint Dominique et sainte Catherine de Sienne, 1499-1502, Londres, National Gallery) ou encore de Ludovico Mazzolino (Vierge et lEnfant en majesté, 1509, Berlin, Staatliche Museen ; Sainte Famille avec saint Albert de Trapani, vers 1509, collection privée34).

Si la présence de ces bâtiments nest pas inédite en elle-même, elle prend toutefois un sens nouveau à partir de 1494. Durant le dernier quart du xve siècle, ceux-ci jouaient en effet un rôle structurant sur le plan de la composition, mais étaient souvent dénués de tout réalisme architectural, à limage du château féérique que lon aperçoit par la fenêtre dans la Nativité peinte vers 1490 par Lorenzo Costa (Lyon, Musée des Beaux-Arts). Dans les œuvres réalisées après le tournant du siècle, les forteresses se multiplient, gagnent en réalisme et, surtout, perdent leur fonction strictement picturale pour entretenir désormais un rapport 170fondamental avec le territoire figuré en arrière-plan. Leur présence symbolique témoigne de la densité du maillage défensif mis en place dans les États de Mantoue et de Ferrare et, par ricochet, du bon gouvernement des seigneurs qui ont su anticiper la tempête qui sest abattue sur lItalie. Comme lont noté Jean-Louis Fournel et Jean-Claude Zancarini à propos de la situation antérieure à 1521, « les villes qui sont prises », dans un espace dilaté par limpétueuse guerre de conquête menée par les Français35, « sont celles qui ne se défendent pas36 ». Or, le territoire ici figuré se caractérise, au contraire, par sa faculté de borner lespace et de lenfermer dans un réseau défensif serré, garantissant par là un ordre qui a disparu ailleurs.

Ceci est dautant plus perceptible que toute violence militaire semble exclue des œuvres de notre corpus. Si des soldats sont bel et bien présents en arrière-plan, ils y jouent, pour la plupart, un rôle anecdotique. Chez Panetti (Vierge et lEnfant en majesté avec deux dévots, 1497-1500, Ferrare, Museo della Cattedrale), on les distingue à peine, tandis que, dans lAdoration des mages de Mazzolino (1500-1502, Avignon, Musée du Petit Palais), les cavaliers armés qui occupent la partie gauche du tableau ne semblent guère concernés par la scène principale. Un exemple intéressant de cette présence militaire diffuse se trouve sur la Vierge et lEnfant en majesté entre saint Antoine de Padoue et saint Sébastien du Maestro della Maddalena Assunta (1504-1505, Richmond, Virginia Museum of Fine Arts) : reprenant la solution employée par Ercole de Roberti sur sa Pala Portuense (1479-1481, Milan, Pinacoteca di Brera)37, le peintre y a représenté des soldats visibles à travers un orifice rectangulaire percé dans le socle du trône de la Vierge. La mise en abîme ainsi créée illustre bien la relation complexe qui, dans ces exemples, lie la présence militaire à listoria. La balance entre nécessité historique et hétérogénéité thématique bascule cependant parfois en faveur de la première : sur lAdoration des Mages de Lorenzo Costa (1499, Milan, Pinacoteca di Brera), les soldats figurés au centre du tableau repoussent ainsi à lextrême gauche, en position annexe, le sujet central du tableau.

171

Toutefois, lorsque le sujet impose la présence de soldats, ceux-ci sont intégrés au contexte contemporain grâce au réalisme de leurs armures et de leur armement. Cest le cas dans la Montée au Calvaire de Boccaccino (vers 1497, Londres, National Gallery) : le condottiere qui fixe le spectateur du haut de son destrier présente tous les atours du réalisme historique, tout comme les soldats qui entraînent le Christ38. Ainsi en va-t-il de ceux qui occupent la partie gauche du Salomé présentant à Hérode la tête de saint Jean-Baptiste de Dosso Dossi (vers 1510, Milan, collection privée39). Notons que, dès lors que des soldats en viennent à commettre des actes de violence, ils perdent ce lien mimétique avec la réalité contemporaine : les hommes darmes que Mazzolino représente au second plan de sa Nativité (1506-1507, Parme, Collezioni darte della Cassa di Risparmio di Parma e Piacenza) sont des soldats dopérette, plus proches de ceux que Mantegna a représentés dans ses Triomphes de César que des troupes qui traversent les campagnes émiliennes. Cette tendance à la décontextualisation de la violence atteint son paroxysme chez Mazzolino : lorsque celui-ci insère, dans une série de trois œuvres (La Vierge et lEnfant en majesté, La Sainte Famille avec saint Albert de Trapani et La Sainte Famille avec saint Sébastien et saint Roch40), des bas-reliefs figurant des combats, il fait le choix dune synthèse visuelle entre des décors de sarcophages romains, les fresques de Piero della Francesca à Arezzo et le Combat dhommes nus de Pollaiuolo.

La guerre se trouve donc saisie dans son aspect phénoménologique, à travers les traces quelle laisse sur un territoire, soit en creux à travers le réticule des forteresses qui garantissent la solidité défensive des États considérés, soit plus directement à travers la présence des soldats qui, tout comme ils peuplent lespace réel, jalonnent lespace pictural. Cest une rassurante impression de maîtrise et de stabilité qui se dégage de cet univers doù est éliminé tout indice dun possible chaos à venir : les bâtiments ne portent pas les stigmates du conflit, pas plus que les soldats ne viennent troubler lordre de listoria ou quon nobserve de dérèglements au niveau visuel, comme ce sera le cas durant le moment maniériste. 172Ce nest donc pas parce quelle nest pas là quon ne voit pas la guerre, mais bien parce quun ordre politique et pictural est établi, dans le but de faire rempart aux incertitudes conjoncturelles41. Or, comme le note Marie-Luce Liberge, le rôle de lartiste est « de prendre en charge, de façon esthétique – cest-à-dire en élaborant des formes – ce qui semble relever dun inexprimable apparent », cest-à-dire « de se confronter à cet inexprimable, de le déjouer, et den faire quelque chose42 ». Le discours artistique sur les guerres dItalie ne peut, par conséquent, faire léconomie dune confrontation avec cette aporie.

La solution choisie par plusieurs artistes consiste alors à investir le champ de la métaphore, en saturant lespace visuel dun élément qui, mieux que tout autre, symbolise le conflit en cours : lépée. Ainsi retrouve-t-on de manière récurrente – et parfois saugrenue – des espadons dans nombre de tableaux de notre corpus : songeons par exemple à ceux, dont lanachronisme par rapport à listoria saute aux yeux, que tiennent chez Boccaccino sainte Catherine (Vierge et lEnfant entre saint Jean-Baptiste et Catherine dAlexandrie, 1504-1505, Venise, Museo Correr) ou saint Paul (Vierge et lEnfant entre saint Pierre et saint Paul). Deux exemples indiquent que cette présence revêt une puissante signification symbolique. Dans la Montée au Calvaire (vers 1497, Londres, National Gallery) de Boccaccino, cest bien vers limmense épée tenue au premier plan par un écuyer quest fixé le regard du Christ, tandis que, dans la Vierge et lEnfant en majesté (1503, Ferrare, Pinacoteca Nazionale) de Panetti, le pommeau de lépée que tient saint Guy est orienté vers le point de fuite, dirigé sur lentrejambe de la Vierge, là où se lient sa main et le pied de Jésus.

Cette épée, bien sûr, est lattribut majeur du Portrait dun guerrier avec un écuyer, dit Gattamelata, attribué à Giorgione (1501, Florence, Offices), qui domine de sa puissance larsenal des armes posées sur la table devant lui43. Lépée du condottiere se dresse à ses côtés dans une verticalité parfaite, telle un crucifix. Dailleurs, dans la peinture des cours de Ferrare et de 173Mantoue, ce sont, à linverse, les crucifix qui prennent la forme dune épée. Tel est fréquemment le cas chez Boccaccino (Vierge et lEnfant, 1504-1505, Birmingham, Birmingham Museum and Art Gallery ; Vierge et lEnfant entre saint Jean-Baptiste et Catherine dAlexandrie ; Saint Jérôme, 1504-1505, Cremone, Museo Civico Ala Ponzone ; Vierge et lEnfant entre sainte Catherine dAlexandrie, une sainte martyre, saint Pierre et saint Jean-Baptiste), mais aussi chez Panetti, qui nous en offre une version tout à fait étonnante : dans sa Vierge et lEnfant en majesté (vers 1495, Hanovre, Niedersächsische Landesgalerie), du sang semble sécouler de lextrémité inférieure du Crucifix tenu par saint Jérôme, comme sil sagissait là de la pointe dune épée. Osons lhypothèse que cette assimilation entre le crucifix, arme des fidèles, et lépée, arme des soldats, tire sa source de la Vierge de la Victoire. Mantegna, dont limportance comme inventeur de prototypes se vérifie à nouveau, y structure en effet lespace en fonction des éléments verticaux qui rythment sa composition, dans un jeu de rappels complexe et raffiné : si, dans la partie gauche, le crucifix de saint André fait écho, tant dans sa forme que par sa position, à lépée de saint Michel, à droite la lance de saint Georges répond à la lance brisée de Longin, qui se prolonge dans le fin crucifix tenu par saint Jean-Baptiste enfant.

Plus la situation géopolitique se décante et séclaire, et plus les traces de la « condition des temps » deviennent perceptibles dans les arts figuratifs. Ainsi, les soldats armés de hallebardes, de lances et de rondaches qui, vêtus à la manière des lansquenets, occupent le second plan de lAgonie dans le Jardin des Oliviers de Battista Dossi (vers 1516, Ferrare, Pinacoteca Nazionale) semblent en alerte et prêts au combat, loin de ceux qui, deux décennies plus tôt, discutaient tranquillement avec des chasseurs chez Panetti (Vierge et lEnfant en majesté avec deux dévots). Simultanément, les soldats deviennent les sujets de portraits individuels. Dosso Dossi semble sen faire une spécialité, peignant coup sur coup un Portrait dhomme (vers 1517, Florence, Offices), un Portrait dhomme au béret noir (vers 1517, Stockholm, Nationalmuseum) et un Portrait dhomme au béret rouge et à lépée (1517-1518, Cambridge, Fogg Art Museum). Le soldat nest plus un motif accessoire quun peintre figure dans un angle de sa composition : élément central de la vie péninsulaire, il acquiert une place équivalente dans le tableau, mais gagne également sa place aux côtés de son seigneur, qui partage désormais avec lui ses honneurs. 174Ainsi Lorenzo Costa peint-il en 1522 Frédéric II de Gonzague au milieu de ses troupes pour célébrer sa nomination, lannée précédente, comme Capitaine de lÉglise44. Cette évolution prépare lavènement, à partir du milieu du xvie siècle, de la grande saison de la peinture de batailles, grâce à laquelle la « culture de la guerre » entre pleinement dans le champ figuratif italien45.

Refermons cette étude sur un étonnant paradoxe : si, comme nous le suggérons ici, on admet lidée que les champs figuratif et historiographique avancent sur des voies parallèles durant cette période si particulière, cest un épisode en tout point déconnecté de la réalité contemporaine, la Bataille dAnghiari de Léonard de Vinci, qui synthétise visuellement le mieux ce que Machiavel et Guicciardini, parmi dautres, ressentent sur le plan intellectuel, à savoir lentremêlement chaotique des actions et la confusion dune lutte noyée sous une poussière qui empêche de distinguer les mouvements des uns et des autres. On est bien là au cœur de la spécificité dun art qui, comme la indiqué Daniel Arasse, « est amené à remplir une fonction exceptionnelle : donner une solution, imaginaire, certes, mais efficace à ce niveau, aux questions que le siècle multiplie46 ».

Jean-Marc Rivière

Aix-Marseille Université

Centre Aixois dÉtudes Romanes

1 Cette expression, reprise de louvrage La culture de la guerre. xe-xviiie siècle, nous semble intéressante par lampleur du champ quelle couvre : outre les considérations strictement militaires, Franco Cardini y inclut les éléments sociologiques et juridiques, mais aussi les aspects littéraires et artistiques, ainsi que les données économiques, technologiques, logistiques, tactiques ou encore stratégiques, dans F. Cardini, La culture de la guerre. xe-xviiie siècle, Paris, Gallimard, 1992, p. 12-13.

2 H. Bredekamp, Théorie de lacte dimage, Paris, Éditions de la Découverte, 2015, p. 182.

3 Ainsi Jean-Louis Fournel indique-t-il que l« lémergence dans la péninsule dune nouvelle façon de penser et décrire lhistoire et la politique [] met justement au centre de la réflexion la question de la “guerre” », dans J.-L. Fournel, « La “brutalisation” de la guerre. Des guerres dItalie aux guerres de Religion », Astérion [En ligne], 2, 2004, § 2, mis en ligne le 05 avril 2005 (consulté le 31.03.2018). Précisons demblée que notre champ de réflexion est ouvert à ce qui relève du contexte militaire de façon directe (représentation de batailles ou de soldats), mais aussi à ce qui, plus largement, informe de la guerre, comme témoignage de celle-ci (représentation des conséquences de la guerre sur les populations ou sur le territoire) ou simple expression de sa présence.

4 Voir Orlando Furioso 500 anni. Cosa vedeva Ariosto quando chiudeva gli occhi, éd. G. Beltramini et A. Tura, Ferrare, Fondazione Ferrara Arte, 2016, p. 259-262.

5 Ces œuvres sont une gravure signée dun « Na. Dat. » non identifié représentant la bataille de Ravenne, une gravure sur bois imprimée à Venise par Giovanni Andrea Vavassore illustrant la bataille de Marignan et un tableau sur panneau de bois consacré à la bataille de Camollia (1526) attribué à Lorenzo Cini et faisant office de couverture au livre des gabelles de Sienne, dans J. R. Hale, Artists and Warfare in the Renaissance, New Haven & London, Yale University Press, 1990, p. 140-144. Il faut ajouter à cette liste deux œuvres mineures non recensées par Hale : une xylographie anonyme représentant la bataille de Polesella, sur laquelle nous reviendrons par la suite, ainsi quun ex-voto conservé dans le sanctuaire de la Madonna del Monte de Cesena commémorant un épisode de la bataille éponyme (la reddition dun soldat, qui lui a permis davoir la vie sauve), reproduit dans A. Merendoni, Armi e armati nellItalia dei secoli xv-xvi, Rimini, Il Cerchio, 1993, p. 39. Nous nincluons dans cette liste ni la Bataille dAnghiari de Léonard de Vinci ni la Bataille de Cascina de Michelange qui, si elles contribuent fortement à former lesthétique du genre de la peinture de bataille durant la seconde moitié du xvie siècle, délaissent toute référence directe au contexte contemporain.

6 Peter Paret cite ainsi deux représentations germaniques de la campagne française contre Gênes : un dessin de Niklaus Manuel représentant lassaut de la forteresse de Castellazzo par les troupes françaises, secondées par des mercenaires suisses, au printemps 1507, ainsi que des illustrations de la Luzerner Chronik (1513) réalisées par Diebold Schilling le Jeune, dans P. Paret, Imagined Battles. Reflections of War in European Art, Chapel Hill & Londres, The University of North Carolina Press, 1997, p. 1-10.

7 Sur lavènement du genre de la Soldatenleben, voir Hale, Artists and Warfare, p. 42-72 et 92-108.

8 Lentrée de Louis XII à Milan est le sujet dune miniature réalisée vers 1500 sur le manuscrit de Les Alarmes de Mars sur le voyage de Milan, avec la conqueste et entrée dicelle conservé à la BnF de Paris, tandis quà la prise de Gênes est consacrée une miniature de Jean Marot insérée dans le manuscrit du Voyage de Gênes, daté de 1508 environ et conservé lui aussi à la BnF.

9 La bataille de Fornoue est notamment lobjet de deux représentations : une estampe insérée dans la seconde édition des Chroniques de Bretagne dAlain Bouchart, imprimée en 1518 par Michel Angier (site tablettes-rennaises.fr, consulté le 25.04.2018), et une gravure extraite de La Mer des histoires, reproduite dans J.-L. Fournel et J.-Cl. Zancarini, Les guerres dItalie. Des batailles pour lEurope (1494-1559), Paris, Gallimard, 2003, p. 25. Louis XII et ses vassaux sont représentés honorant les soldats tombés à Agnadel sur une miniature de Raoul Bollart conservée à la Bibliothèque de Genève et reproduite dans J. Gagné, « Counting the Dead : Traditions of Enumeration and the Italian Wars », Renaissance Quarterly, 67, 2014, p. 805. Une miniature contemporaine figurant la bataille de Marignan, attribuée au Maître à la Ratière, est conservée au Musée Condé de Chantilly.

10 Hale, Artists and Warfare, p. 93. Il y a, derrière ce propos, lébauche dun questionnement esthétique plus profond quil ny paraît : Jackie Pigeaud indique ainsi, parmi ses interrogations majeures, sa volonté de « comprendre comment, affrontée à un problème pratique, limagination éprouve ses propres limites », dans J. Pigeaud, Lart et le vivant, Paris, Gallimard, 1995, p. 14.

11 Ce terme est ici employé dans lacception quen donne Georges Didi-Huberman : « la figurabilité soppose à ce que nous entendons habituellement par “figuration”, de même que le moment visuel, quelle fait advenir, soppose ou plutôt fait obstacle, incision et symptôme, dans le régime “normal” du monde visible, régime où lon croit savoir ce que lon voit, cest-à-dire où lon sait dénommer chaque aspect que lœil aime à capturer », dans G. Didi-Huberman, Devant limage, Paris, Les Éditions de Minuit, 1990, p. 38.

12 Sur lusage de cette expression, notamment chez Francesco Guicciardini, voir J.-L. Fournel et J.-Cl. Zancarini, « Come scrivere la storia delle guerre dItalia ? », La “Storia dItalia” di Guicciardini e la sua fortuna, éd. C. Berra et A. M. Cabrini, Milan, Cisalpino, 2012, p. 181-182, ainsi que M. Pellegrini, Le guerre dItalia. 1494-1530, Bologne, Il Mulino, 2009, p. 29-41.

13 L« effet de réel » ainsi créé est finement analysé dans Gagné, « Counting the Dead », p. 791-840.

14 Cet appareil iconographique est reproduit dans Una cronaca napoletana figurata del Quattrocento, éd. R. Filangieri, Naples, LArte tipografica, 1956.

15 Cardini, La culture de la guerre, p. 82.

16 « Ma la guerra nuova è soprattutto [] incontenibile e straordinaria violenza, morte e strage : è realizzazione nella storia, anche al di là dello stesso dato storico reale, di una novità troppo attesa e troppo temuta per non manifestarsi, prima nella mente e poi nelle opere », dans A. Matucci, « “E farai alcun fiume” : il mito della battaglia di Fornovo fra Leonardo e Machiavelli », Les guerres dItalie. Histoire, pratiques, représentations, éd. D. Boillet et M.-F. Piéjus, Paris, Université Paris III Sorbonne Nouvelle, 2002, p. 111.

17 Voir J.-M. Rivière, Lexpérience de lautre. Les premières missions diplomatiques de Machiavel, Vettori et Guicciardini, Aix-en-Provence, PUP, 2018, p. 10-19.

18 D. Arasse et A. Tönnesmann, La Renaissance maniériste, Paris, Gallimard, 1997, p. 43.

19 Rappelons les mots de Machiavel qui, dans sa lettre à Guiccardini en date du 3 janvier 1526, écrit : « Sempre, mentre che io ho di ricordo, o e si fece guerra, o e se ne ragionò », dans N. Machiavelli, Lettere a Francesco Vettori e a Francesco Guicciardini, éd. G. Inglese, Milan, Rizzoli, 1996, p. 340.

20 La réalisation de la Chambre de Constantin, qui marque historiquement la confluence de ces deux nouveautés, date des années 1520-1524 : Federico Zeri signale ainsi La Bataille de Constantin contre Maxence, exécutée par Giulio Romano à partir dun carton de Raphaël, comme un élément basilaire de la « préhistoire » du genre de la peinture de bataille, dans La battaglia nella pittura del xvii e xviii secolo, éd. P. Consigli, Parme, Silva Editore, 1994, p. xviii.

21 F. Alazard, « Les tempos de lhistoire : à propos des arts dans lItalie de la Renaissance », Revue dhistoire moderne et contemporaine, 2002/5, no 49-4bis, p. 32-34.

22 Sur la proximité de François de Gonzague avec le cœur du pouvoir français, voir L. Vissière, « Une amitié hasardeuse : Louis II de la Trémoille et le marquis de Mantoue (1495-1503) », Louis XII en Milanais, éd. Ph. Contamine, Paris, Champion, 2003, p. 149-171. Sur le positionnement diplomatique et militaire de Ferrare et de Mantoue durant les guerres dItalie, voir D. Frigo, « Small States and Diplomacy : Mantua and Modena », Politics and Diplomacy in Early Modern Italy. The Structure of Diplomatic Practice, 1450-1800, éd. D. Frigo, Cambridge, Cambridge University Press, p. 147-175.

23 Voir notamment T. Dean, « Francesco II Gonzaga, Marquis of Mantua », The French Descent into Renaissance Italy 1494-1495. Antecedents and Effects, éd. D. Abulafia, Aldershot, Variorum, 1995, p. 217-229, ainsi que M. Menegatti, « Cronistoria biografica di Alfonso I dEste (1476-1534) », dans Alfonso I dEste. Le immagini e il potere : da Ercole de Roberti a Michelangelo, éd. V. Farinella, Milan, Officina Libraria, 2014, p. 726-928.

24 Lorenzo Costa, né à Ferrare en 1460, meurt ainsi à Mantoue en 1535. Un autre témoignage significatif des liens artistiques qui unissent ces deux cours est le passage de Dosso Dossi de Mantoue à Ferrare, au sujet duquel on consultera P. Humfrey e M. Lucco, Dosso Dossi. Pittore di corte a Ferrara nel Rinascimento, Ferrare, Ferrara Arte, 1998, p. 3-4.

25 « Va detto che la cultura della guerra è parte integrante del mondo delle corti padane fra Quattro e Cinquecento, ed esperienza personale del vissuto di ciascuno. Le battaglie di Polesella (1509) e soprattutto quella di Ravenna (1512) sono eventi che scuotono profondamente le coscienze », dans G. Beltrami et A. Tura, « Cosa vedeva Ariosto quando chiudeva gli occhi », Orlando Furioso, éd. Beltramini et Tura, p. 20.

26 Alfonso I dEste, éd. Farinella, p. 242.

27 Alfonso I dEste, éd. Farinella, p. 263.

28 Alfonso I dEste, éd. Farinella, p. 262-263.

29 Sur le sens et lusage du profil dans les portraits italiens du xve et du début du xvie siècle, voir J. Lipman, « The Florentine Profile Portrait in the Quattrocento », The Art Bulletin, Vol. 18, no 1 (mar. 1936), p. 64-97.

30 Sur les circonstances dans lesquelles cette œuvre a été réalisée, voir Mantegna. 1431-1506, éd. G. Agosti et D. Thiébaut, Paris, Hazan – Musée du Louvre Éditions, 2008, p. 293-296.

31 Mantegna. 1431-1506, p. 306.

32 Lexistence du tableau de Bonsignori, aujourdhui disparu, était encore avérée au xixe siècle, bien quon ignore tout de sa composition et de son sujet exact. Les études préliminaires montrent toutefois lintérêt du peintre pour la topographie du champ de bataille, comme le signale J. Kliemann, dans Gesta dipinte. La grande decorazione nelle dimore italiane dal Quattrocento al Seicento, Cinisello Balsamo, Silvana Editoriale, 1993, p. 102.

33 Voir J. Burckhardt, Italian Renaissance Paintings according to Genres, Los Angeles, Getty Publications, 2005, p. 182.

34 Ce tableau est reproduit dans A. Ballarin, Dosso Dossi. La pittura a Ferrara negli anni del ducato di Alfonso I, Cittadella, Bertoncello Artigrafiche, 1995, fig. 68.

35 Fournel, « La “brutalisation” de la guerre », § 8.

36 « Le città che si prendono sono dunque quelle che non si difendono », dans Fournel et Zancarini, « Come scrivere », p. 189.

37 Il sagit là dune modalité figurative propre à lécole ferraraise des années 1470, puisquon la retrouve, par exemple, dans le Triomphe de sainte Ursule (vers 1475) du Musée Jacquemart-André, attribué à Francesco del Cossa.

38 Lintérêt de Boccaccino pour la représentation réaliste des soldats est dailleurs confirmé par létude dun homme de troupe vu de dos, réalisée vers 1502 et conservée au Fogg Art Museum de Cambridge.

39 Ballarin, Dosso Dossi, fig. 81.

40 La présence sur le marché londonien de ce tableau, daté de 1511, est attestée dans Ballarin, Dosso Dossi, fig. 76.

41 On touche là du doigt un axe problématique majeur de la réflexion sur limage, dont la production, comme la noté Éric Michaud, « nengage pas tant un processus de figuration du réel quun processus de sélection et dinterprétation de ce quelle mémorise », dans É. Michaud, « La construction de limage comme matrice de lhistoire », Vingtième Siècle. Revue dhistoire, 2001/4 (no 72), p. 42.

42 M.-L. Liberge, Images & violences de lhistoire, Paris, LHarmattan, 2014, p. 9.

43 Notons que cest une épée presque identique (et cette fois anachronique) que, toujours chez Giorgione, tient Judith dans le tableau éponyme (vers 1504, Saint-Pétersbourg, Hermitage).

44 Nous nous appuyons ici sur une fiche de la Fondazione Federico Zeri (http://catalogo.fondazionezeri.unibo.it, consulté le 12.05.2018), qui montre une reproduction en noir et blanc de ce tableau et le localise à la National Gallery de Prague. Nous navons cependant pas été en mesure didentifier ce tableau, soit quil ait été détruit, soit quil sagisse là dune erreur dattribution ou de localisation.

45 Voir notamment Bellum. Battaglie nellarte, éd. F. Arisi, Pesaro, Mondavio, 1994, ainsi que J. Delaplanche et A. Sanson, Peindre la guerre, Paris, Nicolas Chaudun, 2009.

46 D. Arasse, Lhomme en jeu, Paris, Hazan, 2012, p. 17.