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Classiques Garnier

La logique de la citation dans le Recueil de l’origine de la langue et poesie françoise (1581) de Claude Fauchet

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes / Journal of Medieval and Humanistic Studies
    2018 – 1, n° 35
    . varia
  • Auteur : Lombart (Nicolas)
  • Résumé : Le livre II du Recueil de Claude Fauchet (1581) peut être considéré comme la première anthologie française de poésie médiévale. Tirant profit de la mode des anthologies ou des recueils de poésie moderne, mais aussi d’un changement (propre à la fin du xvie siècle) dans le régime de l’« allégation », l’auteur, malgré l’urgence dans laquelle il compose son œuvre, sélectionne et dispose ses citations selon une typologie, une fonctionnalité et des modes d’insertion précis que cette étude s’attache à analyser.
  • Pages : 525 à 563
  • Revue : Cahiers de recherches médiévales et humanistes - Journal of Medieval and Humanistic Studies
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406083221
  • ISBN : 978-2-406-08322-1
  • ISSN : 2273-0893
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-08322-1.p.0525
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 29/08/2018
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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LA LOGIQUE DE LA CITATION
DANS LE RECUEIL DE LORIGINE
DE LA LANGUE ET POESIE FRANÇOISE
(1581)
DE CLAUDE FAUCHET

Si le livre ii du Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise de Claude Fauchet1 peut être légitimement considéré comme la première anthologie française de poésie médiévale, cest notamment parce que Fauchet prend soin dy citer, parfois longuement, un texte poétique inédit – ou inouï – quil veut donner à lire, ou à entendre, pour la première fois. En ce sens, le recueil se distingue par exemple des Vidas des troubadours, dont la tradition renaît pourtant à la fin du xvie siècle, notamment à travers Les vies des plus celebres et anciens poetes provensaux de Jean de Nostredame (Lyon, Alexandre Marsilli, 1575), un ouvrage que Fauchet mentionne – sans doute pour mieux sen écarter – à propos du Châtelain de Coucy2. Mais si cette forte présence du texte médiéval confère à louvrage de Fauchet toute sa valeur, le statut ou la fonction de la citation nest pas toujours, dans le détail, facile à déterminer : longue ou brève, assortie de remarques ou simplement insérée, proposée en version originale ou (plus rarement) réécrite, la citation poétique relève dune logique densemble qui échappe dabord un peu 526au lecteur du Recueil, entièrement dépendant des choix dun premier lecteur – Fauchet lui-même – motivés à la fois par un goût personnel, les aléas de lecture des manuscrits et un fort sentiment durgence : citer le texte médiéval, cest dabord, dans un geste salutaire, le sauver dune disparition certaine.

En ce sens, le Recueil de Fauchet participe bien du mouvement général de réévaluation de lautorité de la citation à la fin de la Renaissance, la subordination à son emprise dogmatique étant atténuée ou même contestée par la valorisation ostensible du « travail de la citation », cette activité concrète de sélection critique (dans la lecture), de découpage et de collage qui permet au citeur dassurer une nouvelle forme de mainmise sur le texte cité, et de sinvestir pleinement comme sujet dans cette action3. De manière significative, le Recueil de Fauchet paraît un an après la première édition des Essais de Montaigne (Bordeaux, Simon Millanges, 1580), exemple même de cette nouvelle liberté de lauteur-citeur4. Et louvrage peut également être lu à la lumière du succès grandissant des recueils de lieux communs, qui traduit un goût renouvelé pour la citation – même sil sagit dans ce cas dune culture scolaire et antique – associé à des pratiques privées de lecture et décriture5.

Mais ce « travail » à la fois fébrile et méthodique de la citation est indissociable de lobjectif précis que sest assigné Fauchet : ce dernier est dabord un « antiquaire », et sa manière de puiser dans les textes et den isoler des extraits révèle un discours singulier et reflète un regard neuf dhistorien polyvalent – historien des institutions et de la société, de la 527langue et surtout de la littérature médiévales6. Bien plus, cette logique citationnelle recouvre un certain nombre denjeux relevant à la fois de lécriture de lHistoire et du discours sur la poésie, deux « disciplines » qui évoluent de façon importante au xvie siècle (notamment dans leur manière de citer) et que Fauchet parvient à croiser de manière originale dans son ouvrage. Lintérêt du Recueil de 1581 réside donc tout autant dans la production dun discours (historique) par la citation que dans celle dun discours (théorique) sur la citation. Après avoir éclairé les enjeux de louvrage dans son dialogue à distance avec les grandes questions relatives au renouvellement de lécriture de lHistoire et à lémergence dun discours théorique actualisé sur la poésie, on évaluera les différentes modalités de la citation en rapport avec la composition même du Recueil avant de proposer une première typologie des citations susceptible déclairer le labeur de « seconde main » propre à l« antiquaire ».

DE LÉCRITURE DE LHISTOIRE
AU DISCOURS SUR LA POÉSIE

Les nouveaux enjeux de la citation

Loriginalité du Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise repose sur larticulation étroite denjeux historiques et poétiques. De fait, lusage de la citation chez Fauchet doit dabord être interrogé en rapport avec trois phénomènes relatifs au vaste mouvement de renouvellement de lécriture de lHistoire à la fin du siècle7. Le premier concerne la promotion de l« antiquité » comme objet détude du passé national (antiquité essentiellement gauloise ou gallo-romaine, et plutôt urbaine), 528cest-à-dire dun signe tangible, dune trace manifeste des temps anciens8 : dans cette perspective, le texte poétique cité apparaîtrait chez Fauchet comme une véritable « antiquité médiévale », un « monument » du Moyen Âge – souvent en ruines, comme les manuscrits abîmés quil cherche à sauver – susceptible dune authentique redécouverte. Un autre phénomène important est lémergence de lhistoire littéraire dans le champ général de lHistoire9 : la citation aurait dès lors pour fonction de rétablir un continuum historique de la poésie française, de construire concrètement son archéologie en évitant toute solution de continuité. Le troisième phénomène, peut-être le plus difficile à appréhender, concerne le renouvellement global du régime de lexemplarité dans lécriture de lHistoire, dans le passage (progressif) du paradigme antique au paradigme médiéval10 : non seulement Fauchet privilégie le Moyen Âge dans sa quête des sources, mais il est surtout lun des tout premiers à légitimer la citation littéraire comme exemple historique, le texte poétique comme document licite pour lHistorien11. Cest cette fonction de « preuve » qui est mise en évidence dans les citations poétiques du livre i, 529lesquelles informent tour à tour sur lhistoire de la langue française (sur la réalité du « roman ») et les étymologies (chap. iv), sur lhistoire des idées (chap. v), sur la pratique des jongleurs et la spécificité française de la rime « léonine » (chap. viii), avec le souci constant, chez Fauchet, de mettre en évidence le prestige de la langue, de la poésie et de la culture françaises – par rapport aux Latins bien sûr, mais surtout aux Italiens et à toutes les autres cultures romanes12.

À côté de ces liens étroits à une « nouvelle Histoire », le Recueil entre en résonance avec un discours, lui aussi renouvelé, de promotion de la poésie. Dans ce cadre, lusage que fait Fauchet de la citation, dans le livre ii notamment, se distingue à la fois par son originalité (le Recueil est un objet unique en raison de la place accordée au Moyen Âge) et par une certaine filiation avec trois pratiques éditoriales remarquables. La première est celle de lanthologie de poésie. Comme collection de citations, le Recueil semble en effet profiter de la vogue des anthologies poétiques, depuis le Jardin de plaisance de la fin du xve siècle jusquau Parnasse des plus excellents poètes de ce temps et aux Muses françaises du début du xviie siècle13 : Fauchet tire visiblement profit de cette mode pour valoriser la poésie médiévale, désormais placée sur le même plan que la poésie moderne et sujette aux mêmes modalités de lecture. La mise en lumière des « poetes François, vivans avant lan m. ccc. » paraît ainsi répondre de loin à lanthologie des « poëtes françois modernes » de Gilles Corrozet publiée dix ans plus tôt, lobjectif étant chez lun et lautre de puiser « sentences » et « descriptions » dans un fonds poétique national, passé ou présent14. Lanthologie de Fauchet rappelle aussi la 530pratique et lédition de centons, un genre également très apprécié des juristes, comme le prouve la publication par le jurisconsulte Pardoux Duprat de lAmas chrétien, ou extrait(s) de la poésie de Virgile accommodés aux vieux et nouveau testaments (Lyon, Jean DOgerolles, 1557), une version française du centon virgilien de la poétesse chrétienne Falconia Proba15. Certaines citations du Recueil relèvent en effet de cette pratique de la mosaïque exemplaire, notamment quand Fauchet se plaît à identifier des formules gnomiques, quil présente en guirlandes, chez les auteurs de romans ou de chansons de geste.

Plus généralement encore, le titre choisi par Fauchet fait écho au genre – et surtout à la pratique éditoriale – du « recueil de poésie », qui dépasse celle de lanthologie16. Si lidée de recueil semble devoir être appliquée strictement à la première partie (Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise, ryme et roman), elle semble bien aussi éclairer la seconde, malgré son apparente dimension de simple liste [d]es noms et sommaire des œuvres de CXXVII poetes françois vivans avant lan MCCC. Certes, la seule mention des « noms » de poètes (largement inconnus) et la pratique du « sommaire » (du résumé) sont en soi essentielles pour mettre en lumière ce corpus presque totalement étranger à la culture du temps ; mais cette seconde partie fait bien plus que donner des « noms » et « sommaires » : en multipliant les citations, Fauchet organise un vrai « recueil de poésie médiévale », dans tous les sens que le verbe recueillir peut couvrir au xvie siècle : « rassembler » (des troupes en particulier), « accueillir » (voire « mettre à labri »), « ramasser », « récolter » ou « adopter » (notamment une langue17). Or, si deux des principales occurrences de « recueil » dans le livre renvoient bien à la nécessité dun 531« rassemblement » (celle dune sorte de force culturelle, pour la « gloire » du royaume de France18) ou à la possibilité dune « adoption » (celle dun potentiel linguistique indiscutable, pour lenrichissement de la langue française19), lusage métapoétique que fait Fauchet du verbe « recueillir » à larticulation des deux livres souligne avec force lexigence dun regroupement de ce qui était auparavant dissimulé, dispersé et destiné à une perte irrémédiable :

Voyla ce que je puis dire de la ryme quant à present, & jusques à ce que jen aye plus grande certaineté : laissant à juger aux lecteurs si letymologie de Leonine est bien prouvee ou non. Car nestant moymesme raisonnablement satisfait pour ce regard, je ne conclu rien, & suffit, que suivant ma devise, Jai recueilli ce qui estoit espars et delaissé : ou si bien caché, quil eust esté malaisé de le trouver sans grand travail (Recueil, p. 81).

Le « recueil » permet littéralement de révéler le patrimoine poétique médiéval, de mettre en lumière ce qui était resté « si bien caché20 ». Loin de répondre à une simple fonction de remplissage ou de divertissement, les citations « recueillies » dans le livre ii accomplissent véritablement la 532devise de Claude Fauchet : Sparsa et neglecta coegi21. De même, lapparente modestie de la conclusion de louvrage ne doit pas tromper :

Et à ce propos jose bien asseurer, que des Journaux de simples gens, mont tellement aidé en aucuns endroits dhistoire, que je ne puis appeller gaste-papiers, ceux qui fidellement recueillent les choses de marque : quelque mauvais ordre ou langage dont ils usent. Ce qui me donne esperance que ce recueil, tout lourd quil est, sera bien receu de ceux qui desirent sinformer de lancienne Poesie, ryme & Romans François (Recueil, p. 209).

À la forme active, informer conserve au xvie siècle son sens étymologique de « façonner » (« donner une forme ») voire, selon lusage le plus fréquent, « nourrir », le sens de « mettre au courant » ne venant quensuite22. Désirer « sinformer » de l« ancienne Poesie », cest bien vouloir sen imprégner, en être marqué et modelé. Cest assurément à une initiation (au sens fort) à la poésie médiévale que Claude Fauchet invite son lecteur, initiation dont lefficacité réside paradoxalement dans labondance parfois désordonnée des citations. De fait, la connotation péjorative de ladjectif « lourd » ne doit pas masquer la revendication dune copia informative, à laquelle il faut fructueusement confronter le lecteur, littéralement plongé dans cet inédit « recueil de Poetes ».

La bipartition du Recueil sen trouve donc pleinement justifiée : comme dans certains arts poétiques du xvie siècle, celui de Thomas Sébillet notamment, lexposé théorique est naturellement complété par un « recueil » des meilleurs vers, à la fois invitation à la lecture et incitation à lécriture23. Les quelques citations poétiques du livre i relèvent bien de lallégation, de largument dautorité. En fondant la légitimité du texte poétique médiéval, elles aident à préparer la lecture du livre ii, auquel il faut désormais ajouter le plaisir de la lecture par la manifestation pleine 533dune copia et dune varietas. La composition éditoriale du Recueil permet donc à Fauchet détablir une analogie implicite entre la poésie médiévale et la poésie moderne françaises, toutes deux également susceptibles de prendre la forme danthologies « exemplaires ».

COMPOSITION DENSEMBLE DU LIVRE II :
UN « LOURD » RECUEIL DE CITATIONS

Il convient dans un premier temps dobserver la composition densemble du livre ii et dapprécier les différentes modalités dinsertion des citations dans le texte, afin de mieux cerner dune part les centres dintérêt de Fauchet dans sa lecture de la poésie médiévale, et dautre part son travail de sélection, de découpage et de collage24. Les cent-vingt-sept poètes recensés dans ce livre ii ne sont assurément pas traités de manière égale : certains suscitent visiblement une forte curiosité et un intérêt souligné ; dautres sont mentionnés en passant25. Tous ne sont pas cités, loin sen faut26, et la composition de ce livre met surtout en lumière à la fois une sorte durgence (peut-être mise en scène ?) et une forme dimprovisation : Fauchet cite au fil de la plume, pratique la digression ou insère des anecdotes – sans doute pour rendre la lecture plus agréable, en jouant sur les principes de varietas et de brevitas, destinés à compenser ce que lauteur perçoit comme une « lourdeur » densemble27. Mais dune manière générale, lantiquaire cherche à rester le plus lisible et le plus clair possible dans son projet. Trois principes dorganisation générale sont mêlés dans le livre ii : un classement chronologique, 534un classement selon les manuscrits que lauteur a eus sous les yeux – notamment quand il nen est pas lui-même le propriétaire et quil doit en tirer profit rapidement –, et un classement par genres28.

Si le classement chronologique est globalement dominant, cest que Fauchet raisonne dabord en historien de la poésie, et une citation permet souvent – et dabord – de dater un texte. La chronologie permet de rendre plus lisible une généalogie de la poésie française et de souligner discrètement des évolutions linguistiques. La liste souvre sur Wace (mort vers 1180) et se ferme sur Jean de Meun (mort vers 1305) et Pierre Gentien (mort vers 1298). Mais en réalité, cette logique chronologique, dabord efficace (notices 1 à 13) est mise à mal par la difficulté à dater les textes (notice 14), et dautres modes de classement prennent alors le relais. Le premier mode est celui de lordre imposé par un manuscrit, Fauchet se contentant alors de suivre la succession des auteurs. En effet, la section de lyrique courtoise correspond à la lecture dun manuscrit emprunté à Henri de Mesmes (dit « chansonnier de Mesmes ») aujourdhui perdu (notices 15 à 82)29 ; la première section « mêlée » (mais largement dominée par les fabliaux) correspond pour la plus grande part au ms. BnF, fr. 1593, et ponctuellement au fr. 837 (notices 83 à 102) ; enfin, la section des jeux-partis correspond à un manuscrit appartenant à Antoine Matharel, aujourdhui ms. Biblioteca Apostolica Vaticana, Reg. lat. 1522 (notices 103 à 115)30. Le classement générique, qui apparaît ponctuellement, est souvent dicté par lorganisation des manuscrits. Fauchet a une idée globalement claire de la spécificité des genres médiévaux, même si certaines distinctions lui échappent, comme celle qui oppose roman et chanson de geste, lesquels composent, avec la « satyre », un premier ensemble (notices 1 à 14). Vient ensuite une longue section consacrée à la lyrique courtoise, de Thibaud de Champagne et Gace Brulé (mis en vedette) aux trouvères mentionnés dans le Roman de Guillaume de Dole de Jean Renart (notices 15 à 82). La suivante est une section « mêlée », déjà évoquée, où dominent les récits brefs, essentiellement des fabliaux 535(notices 83 à 102). Enfin, une section consacrée au seul genre du jeu-parti (notices 103 à 115) précède une dernière section « mêlée » mentionnant romans, fabliaux, un lai (que Fauchet nidentifie pas comme tel) et une satire, section qui sachève sur Le Roman de la Rose de Guillaume de Lorris et Jean de Meun pour dévidentes raisons de notoriété (notices 116 à 127).

Un certain nombre de traits sont communs aux modes dinsertion des citations, et à leur encadrement. Fauchet utilise systématiquement les guillemets, qui nont évidemment pas ici de valeur gnomique, comme cest souvent le cas au xvie siècle : il sagit bien de mettre en valeur la citation en tant que telle, au cœur du discours. Lusage fréquent de lesperluette, qui signale à la fois le travail daddition synthétique (&) et louverture possible vers dautres citations (&c.), laisse percevoir tout le potentiel de la poésie médiévale – tout en invitant implicitement à poursuivre un travail par définition simplement ébauché31. Fauchet ne parle évidemment pas de « citation » ou daction de « citer » (dont les sens de sommation/sommer restent exclusivement juridiques au xvie siècle), mais utilise indifféremment les binômes « remarquer »/« extraire » ou plus simplement « trouver »/« mettre », mais aussi plus significativement « alléguer » à larticulation des deux livres, dans une sorte deffet dannonce32. Aucune citation nest introduite abruptement : en multipliant les expressions comme « lautheur/il dit », « il dit encores », « il adjouste », « disant », « il nomme », etc. Fauchet finit par faire littéralement entendre la voix du poète médiéval33 ; le mode dinsertion peut aussi soit souligner la 536valeur de preuve de la citation (« ainsi quil appert par ces vers », « ainsi quil est clair par ces vers », « tesmoins ces vers », etc.34) soit identifier un lieu clé pour la lecture, l« antiquaire » sintéressant naturellement aux mines dinformations que sont les incipit (« leur livre commence », « commençant », « il commence ainsi », « la première chanson commence », « lequel commence », « il dit au commencement », etc.35) et les explicit (des expressions équivalentes, moins nombreuses cependant, identifient les épilogues36), y compris pour les formes brèves. De la même manière, une citation est souvent suivie de sa justification, qui fait alors apparaître la motivation du citeur en des formules généralement appuyées (« ce dernier vers me fait dire », « jay voulu transcrire ces vers [] pour monstrer », « je devine par ces vers », « je nay pas trouvé [à partir de tel vers] », « ce qui me fait plus dire » etc.37).

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Ainsi Fauchet mêle-t-il sans cesse sa voix à celle des poètes quil entend faire connaître. De fait, il y a trois niveaux énonciatifs dans le livre ii : le discours de Fauchet lui-même, la citation (à la fois typographiquement autonome et toujours source de commentaire) et un niveau intermédiaire correspondant soit à la réécriture-paraphrase (autre genre prisé à la fin du xvie siècle) reposant souvent sur un dérimage38, soit au résumé, notamment quand il sagit de mettre en lumière les « matières » (topoï) de la poésie lyrique39 ou des jeux-partis40. Systématique dans ces deux dernières sections, leffet de résumé est cependant diffus dans lensemble du livre ii, traduisant sans doute ce que lauteur avait appelé en titre le « sommaire des œuvres ». En mêlant ainsi les niveaux énonciatifs, Fauchet finit par ouvrir son propre discours aux vieux mots du français, montrant concrètement comment la citation, dans sa répétition, finit par marquer en retour le texte de l« antiquaire », ce dernier étant soucieux de faire lui-même lexpérience du « renouveller41 ».

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Les citations proposées ne sont jamais longues : de un à une vingtaine de vers suivis au maximum – si lon excepte les deux pièces lyriques citées intégralement (ou quasi intégralement), sans doute parce quelles se rapprochent le plus de ce quun lecteur du xvie siècle pouvait connaître et apprécier : la définition générale dAmour dans la « bonne » chanson « Amors nest pas, que quen die » de Moniot dArras42 ou les antithèses damour de la chanson « Qui bien veut amors descrivre » du « bon poete » Robert de Reims43. Quelle que soit la longueur de lextrait, le choix du découpage dépend toujours dun intérêt précis mais, chez Chrétien de Troyes par exemple, deux vers peuvent susciter un commentaire aussi enthousiaste que dix-huit44. Cest dans la première section (romans et chansons de geste) que Fauchet cite le plus, notamment Guiot de Provins (62 vers au total, probablement pour sa richesse encyclopédique) et Chrétien de Troyes (76 vers, sans aucun doute en raison de sa richesse dinvention). Cest dans cette section également quest le plus pratiquée la méthode du centon, pour mettre en valeur la beauté sentencieuse de la poésie narrative française45. Dans les autres parties du Recueil, les citations sont plus courtes mais pas nécessairement moins nombreuses. Dans la section lyrique, par exemple (notices 15 à 82), lauteur cherche surtout à montrer en quelques vers à la fois la tonalité densemble dune chanson et un nombre suffisant de topoï courtois. Mais les notices consacrées à Thibaud de Champagne (55 vers de 9 chansons différentes) ou Gace Brulé (31 vers de 6 chansons) rendent manifeste un goût prononcé pour ces deux poètes, dont limaginaire lyrique est dans son ensemble bien 539restitué46. Dune manière générale, Fauchet associe toujours recherche déquilibre et efficacité : chaque citation vise un effet précis, et une inhabituelle longueur appelle généralement une justification47.

Deux grands principes dominent donc dans la manière dont Fauchet se met en scène comme citeur. Dune part, il ne laisse jamais le lecteur absolument seul devant létrangeté de la langue médiévale48 : presque toutes les citations sont lobjet dun commentaire minimal (historique, esthétique ou lexical) et les termes jugés les plus éloignés de la langue du xvie siècle sont traduits dans des notes marginales49 ; bien plus, lantiquaire réduit la distance avec son lecteur en avouant avoir été lui-même gagné par la lassitude après une lecture prolongée du chansonnier de Mesmes50. Dautre part, Fauchet dramatise son travail, en insistant sur lidée durgence dans lacte de « copier » des « traits » remarquables : il met en scène les tâches de copie, de coupe et de sélection au moment même où il les effectue51. La première fonction de la citation est de sauvegarder un patrimoine poétique menacé de dispersion ou de 540destruction ; et paradoxalement, le moindre extrait imprimé constitue une petite part de ce patrimoine inestimable sauvée de la voracité… des imprimeurs eux-mêmes52. En somme, copier et citer sont des activités qui relèvent dabord (mais pas seulement) dun « réflexe dantiquaire53 ».

TYPOLOGIE DES CITATIONS

Élaborer une typologie théorique des citations nest pas chose aisée54. Une approche plus inductive, fondée sur les commentaires mêmes de Fauchet, sur ce quil dit de ses « motivations », permet de rassembler les citations du Recueil en quatre catégories ou fonctions, qui peuvent le cas échéant se recouper55 : la nomination-identification (pour identifier des auteurs à travers des noms, ou des œuvres à travers des titres), la datation-contextualisation (pour révéler une histoire et une anthropologie 541médiévales), linvention-élocution (pour esquisser un « essai de poétique médiévale ») et la modélisation-actualisation (pour circonscrire, dans un esprit militant, un patrimoine poétique à exploiter).

Des noms dauteurs :
identifier l
auctorialité médiévale

Nom, origine, identité

La première fonction de la citation est de faire apparaître des noms dauteurs (le poète médiéval, à quelques exceptions près, étant encore un quasi inconnu), et si possible de donner à ces auteurs une épaisseur historique en cernant leur origine ou leur identité. Dès lors, la citation fonctionne comme une preuve biographique. Dès quil le peut, Fauchet cite les vers où apparaissent ce nom ou dautres éléments biographiques, et la première notice (Wace) est en ce sens parfaitement exemplaire56. La restitution du nom est aussi inséparable de lidentification de titres douvrages et dune enquête sur la période dactivité de chaque auteur.

Cest dans cette perspective que Fauchet cite souvent lincipit ou lexplicit des romans, et il paraît sensible à cette particularité de lœuvre médiévale – lexistence de prologues et dépilogues, où lauteur se présente et se met en scène, pour nommer et légitimer son projet57. Chaque détail biographique compte, même le plus ténu, par exemple létat monacal de Guiot de Provins58. Fauchet cherche aussi à déterminer lidentité linguistique des auteurs : il se plaît notamment à distinguer le picard, comme dans le cas de Pierre du Riés, continuateur du Roman de Judas Macchabée59. Ces citations témoignent de la volonté de faire de lauteur médiéval une figure concrète, engagée dans son temps – peut-être pour le distinguer des figures « mythiques » et idéalisées évoquées dans les vidas.

La sodalitas médiévale

Mais Fauchet ne veut pas se contenter de donner des noms isolés, il veut inscrire les poètes dans des réseaux, et tente de cerner une sodalitas médiévale. Les citations mettent ainsi en évidence la 542manière dont les poètes médiévaux se nomment, se reconnaissent et sestiment entre eux – comme, du reste, pouvaient le faire les poètes du xvie siècle. Cest dans cet esprit quest cité le passage du Tournoi de lAntéchrist où Huon de Méry évoque Raoul de Houdenc60. Cette mise en évidence dune « communauté des trouvères » apparaît surtout à travers deux phénomènes auxquels Fauchet est particulièrement sensible : la pratique de la continuation et le dialogue (à distance) entre poètes.

La pratique de la continuation – ou de la collaboration – apparaît nettement dans létude du Cycle dAlexandre, chez Godefroy de Leigni (continuateur de Chrétien de Troyes), chez Pierre du Riés (continuateur de Gautier de Belleperche), et bien sûr chez Jean de Meun (continuateur de Guillaume de Lorris61). Fauchet semble ici percevoir une spécificité de la poésie médiévale, dautant plus intéressante ou symbolique à ses yeux quil ne cesse de réfléchir à lhistoire littéraire en termes de continuité – et non en termes de rupture, comme chez la plupart des poètes de la génération de 155062. Les dialogues entre poètes apparaissent nettement dans la section consacrée à la lyrique courtoise (où Fauchet distingue des échos dune chanson à lautre) et naturellement dans la section consacrée aux jeux-partis63.

Vers une « socio-poétique » médiévale :
du trouvère au jongleur

Fauchet sintéresse à la « jonglerie », cest-à-dire à la pratique des poètes, à lunivers social où ils évoluent. Les citations permettent ainsi didentifier non seulement des dédicataires et des protecteurs, mais aussi, parfois, des pratiques et les objectifs concrets de cette poésie. L« antiquaire » peut être sensible à la valeur métapoétique ou réflexive 543de certains passages – un aspect également prononcé dans la poésie du xvie siècle64.

On pourra retenir trois exemples particulièrement significatifs. Le premier renvoie à la mention des onze premiers vers du prologue du Roman dAlexandre, dans lequel Fauchet croit reconnaître la visée éthique de la poésie médiévale, à travers l« intention des Trouverres [qui] estoit danimer les seigneurs, & les encourager à la vertu, mais sur tout à la liberalité65 ». Dans une autre citation, dix-huit vers aujourdhui perdus du prologue de Doon de Nanteuil, Fauchet constate linscription de la poésie comme performance dans une économie de léchange et une logique de la rétribution66 – ce que Ronsard avait pu, en 1550, réaffirmer avec force dans sa conception dune poésie « troque pour troq67 ». Dans un dernier exemple, enfin, Fauchet se plaît à évoquer la figure concrète du joueur de vielle Colin Muset68.

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Une curiosité dhistorien : la poésie en contexte

Lobsession de la datation

Dès la première notice, consacrée à Wace, Fauchet associe naturellement à lidentification de lauteur la question de sa période dactivité ou de la datation de lœuvre – une obsession constante chez l« antiquaire ». De fait, il ne cesse de chercher des éléments permettant de situer un texte, et un grand nombre de citations fonctionnent comme des preuves chronologiques : la mention de personnages ou dévénements historiques, plus rarement de motifs anthropologiques ou de détails lexicaux sont autant dindices temporels.

Un long passage, consacré à la datation de lEstoire li Romans (sic) de Thibaut de Marly, que Fauchet trouve à la suite de la Bible de Guiot de Provins, est révélateur de la méthode privilégiée. Lauteur multiplie les courts passages pour mobiliser des indices lexicaux (par exemple le mot « beduin », inconnu « à nos François avant le voyage de Jerusalem ») et surtout historiques (les noms de nombreux personnages) afin de dater le texte, ce quil ne peut faire « pour le present » mais reste un objectif prioritaire : « [Thibaut de Marly] fait aussi mention dautres [personnages], que je nommeray à fin de remarquer plus certainement le temps quil a vescu, sil se trouve puis apres livre ou titre faisant mention de quelcun deux : ne le pouvant dire au vray pour le present69 ».

La poésie comme document

De fait, Fauchet nhésite pas à considérer la poésie médiévale comme une source pour lhistorien. Si cet usage de la source littéraire est davantage développé dans les ouvrages plus historiques, il est en quelque sorte expérimenté dans le Recueil de 1581, comme il lavait été dans les Veilles de 1555. On a vu comment, avec une formulation significative, Fauchet citait longuement le prologue du Tournoi de lAntéchrist dHuon de Méry dans la mesure où ces vers « serv[aient] à lhistoire du temps70 ».

Mais les informations recherchées ne relèvent que rarement de la « grande histoire », elles intéressent plutôt la vie quotidienne au Moyen 545Âge, et ont une dimension davantage anthropologique. Cest dans cette perspective que Fauchet se plaît à rappeler comment Raoul de Houdenc a su « nomm[er] aucuns taverniers de Paris » et « remarqu[er] une coustume lors pratiquee [] en Bretagne » à travers deux brèves citations du Songe denfer71. Une simple citation poétique peut aussi rétablir une vérité historique : ainsi de lhôpital des Quinze-Vingts, dont les pensionnaires « ne furent Chevaliers, comme lon pense : ains quelques pauvres gens », comme le prouvent douze vers extraits du Dit des ordres de Paris de Rutebeuf72. Les informations évoquées, enfin, peuvent combiner un intérêt social et littéraire, à limage de la tradition des « jeux sous lormel » mentionnés dans une page du Roman de Guillaume de Dole73.

Poésie et encyclopédie

Dune manière générale, Fauchet considère ce corpus poétique comme une véritable « encyclopédie », comme la somme dun savoir ancien – ou plutôt comme une source pour étudier lhistoire de ce savoir74. Mais sil ne peut évidemment en montrer toute la richesse, les quelques exemples donnés sont destinés à convaincre le lecteur quil y a là une mine à exploiter – pour lhistorien, pour le « curieux » des antiquités médiévales ou plus généralement pour quiconque veut défendre la « gloire » du nom français. Car le poète du Moyen Âge est souvent, aussi, un « homme de sçavoir », comme le montre par exemple lusage du bestiaire chez Richard de Fournival75.

Là encore, ce sont surtout les détails qui comptent. Il sagit moins, bien évidemment, doffrir une étude de synthèse que de suggérer des pistes de travail pour lavenir, en mettant le doigt sur des motifs étonnants ou amusants. Cest sans doute dans cet esprit quest présenté lexemple de 546la « marinette », cest-à-dire la boussole (ou « pierre dAimant »), chez Guiot de Provins76.

De linventio à lelocutio médiévales :
définir les goûts du temps

Identifier des sujets

Fauchet sintéresse aussi à ce corpus en amateur de poésie. Il distingue des titres, des genres, et surtout une topique – cest-à-dire une « matière », qui peut être lobjet de reprises et dimitations77. Les citations ont donc pour fonction de fournir un premier répertoire des thèmes et sujets de la poésie médiévale : Fauchet sintéresse à linventio des poètes, que la citation permet toujours de préciser. Sil y trouve à la fois des éléments inédits et des points communs avec la poésie renaissante, il sagit surtout de montrer que ces poètes sont dauthentiques devanciers. Il raisonne toujours de manière nuancée en termes de rupture et de continuité, suggérant quil ny a pas de cassure radicale entre le Moyen Âge et le xvie siècle78.

Fauchet parvient globalement à définir ces topiques en fonction des genres quil identifie. Mais la section consacrée à la lyrique courtoise est exemplaire dans la mesure où l« antiquaire » y établit une liste de topoï avec un réel esprit de synthèse – peut-être pour la comparer implicitement avec celle de la poésie amoureuse renaissante, particulièrement riche et appréciée des lecteurs du temps. La longue notice inaugurale consacrée à Thibaud de Champagne apparaît vraiment comme un inventaire complet des thèmes relatifs à l« art 547daimer » médiéval, mêlant lanalyse esthétique et linformation anthropologique79.

Du génie poétique au génie gnomique :
« inventions » et « sentences » de la poésie médiévale

Fauchet rappelle, au moins une fois explicitement, quil est nécessaire de sintéresser au « stil » des poètes80. Quand il évoque lelocutio de la poésie médiévale, il utilise à la fois les termes de « traits » et « inventions », et ceux de « sentences » et « proverbes ». Les premiers renvoient incontestablement à lidée dun génie poétique français précoce, dune capacité des poètes à mobiliser toutes les ressources de la langue et de la rhétorique (seconde). Lanthologie du livre ii apparaît bien dès lors comme un « recueil », au sens de réservoir ou magasin de figures, même si la terminologie technique de Fauchet nest pas aussi riche que celle des arts poétiques81.

Lidentification de « proverbes » et de « sentences » rappelle lintérêt suscité par les formes gnomiques dans le milieu robin auquel appartient Fauchet. Elle lui donne loccasion, on la vu, de proposer quelques centons censés mettre en évidence lexistence dun « esprit français ». Bien plus, ces « vieux auteurs » développent déjà, à travers leur œuvre, un discours sur la France, comme lauteur de Doon de Nanteuil « qui par tout donne à la France lepithete de douce France82 ». Cette spécificité est nettement mise en avant au sujet dHerbert, le traducteur du Dolopathos de Jean de Haute-Seille, qui selon Fauchet « est tout plein de contes moraux & plaisans, de proverbes François & belles sentences » ; et de citer ensuite neuf vers sentencieux du roman pour relever surtout avec malice que « la deuxieme nouvelle de la iii. journee du Decameron de Bocace peut estre prise de cest autheur83 ». Cest la France qui inspire lItalie. Et cest peut-être cette capacité à être 548à la fois « plaisant » et « moral » qui explique le goût typiquement français pour la « satyre84 ».

La richesse lexicographique :
l
ancien français « illustre »

Fauchet relève un certain nombre de termes qui reflètent la richesse de lancien français, une langue assurément copieuse. Il repère des « epithetes » (en réalité une seule, particulièrement remarquable, chez Huon de Méry : « acerines » qui vient qualifier « espees85 ») et surtout des « mots » (des substantifs) qui suscitent toujours un commentaire historique et sémantique, dans un jeu de comparaison plus ou moins polémique avec le latin ou litalien, pour contredire lidée dune infériorité du français par rapport à ces langues concurrentes86, confirmant les hypothèses théoriques du livre i. Ici comme ailleurs, lessentiel est moins de proposer un tableau complet que de montrer une voie et une méthode – en sappuyant sur une série de citations judicieusement choisies.

Bien plus, les mots circulent dun poète à lautre – et parfois dune période à lautre. Utiliser Gace Brulé pour comprendre le sens du mot dois (« canal ») dans un passage du Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes ou Villon pour comprendre le sens du mot malfez (« diable ») dans un extrait de Gui de Nanteuil contribue à renforcer ce sentiment dune communauté de textes au-delà des œuvres singulières87. Dans une époque soucieuse de développer la lexicographie, Fauchet invite 549implicitement à élaborer un dictionnaire du « vieux » français, que chaque citation pourrait venir illustrer.

Du trouvère au poète moderne :
l
actualité médiévale

Initier le lecteur

Le « recueil » de Fauchet nest pas bilingue, et lauteur a évidemment conscience de la difficulté que peut susciter la lecture dun texte en ancien français. Pour autant, le fait même de citer les textes relève dune initiation à la lecture du poème médiéval, que Fauchet souhaite réellement « pédagogique » : il cite de courts extraits, traduit les termes jugés incompréhensibles pour son lecteur, annote le texte cité quand il y a des difficultés et enfin le paraphrase ou lexplicite si nécessaire. Loin dêtre une simple anthologie, il sagit bien de la première anthologie « commentée », toutes proportions gardées, de poésie médiévale. Là encore, Fauchet adapte à son corpus médiéval une pratique éditoriale, et même un « genre » en soi, le commentaire88, destinée à valoriser et légitimer la poésie moderne.

Comparer des pratiques

Fauchet établit plus ou moins explicitement des comparaisons entre la poésie du Moyen Âge et celle de son temps, sans chercher à hiérarchiser les pratiques. En évoquant le principe (déjà médiéval) de lalternance du genre des rimes, il constate que « Pierre de Ronsard prince de nostre poesie Françoise, & les autres venus depuis luy, [y] ont eu esgard89 », preuve flagrante dune continuité des pratiques sil en est. Fauchet sefforce donc de montrer en quoi la poésie médiévale a été capable, en son temps, dinvention et dinnovation. Sa longue digression sur lalexandrin, déjà évoquée, met en évidence comment ce vers est lexemple même de ce qua inventé le « génie » français, mais bien avant Ronsard précisément. Car si lalexandrin est un vers typiquement français, il est surtout ancien et porteur dune gloire nationale.

550

Exploiter un patrimoine

Non seulement le lexique mais le « stil » même de ceux que Fauchet appelle les « bons peres » et les « vieux autheurs » peuvent être fructueusement exploités par les poètes contemporains – et sans doute même au-delà du cercle des poètes. Le constat dune copia de la langue française médiévale va de pair avec son exploitation (raisonnée). Cest le principe du « renouveller », que Fauchet invoque une première fois à propos du Roman dAlexandre et des termes « desrocher » et « periller », réunis dans un même vers, susceptibles de ramener tout auteur français du xvie siècle à une certaine logique lexicographique dans sa quête dune « illustration » de la langue vulgaire90. Du reste, ce regard raisonné sur le lexique ancien nest pas forcément exempt dun véritable enthousiasme dans la lecture, comme en témoigne cette remarque qui suit une longue citation de Doon de Nanteuil : « & par tout Peliçon hermin, lance fresnine, cendal pourprin, & autres mots de telle façon, dont lon peut user encores aujourdhuy91 ». Jamais évoquée dans le livre i, cette règle du « renouveller » est assurément au cœur du livre ii, tout autant livre de lecture que de pratique.

CONCLUSION

Malgré son apparente « lourdeur » (assumée comme telle par Fauchet, du reste), la logique de la citation dans le Recueil de 1581, et dans le livre ii notamment, repose sur le double objectif de lefficacité et de la clarté. Fauchet cite massivement (pour assurer une imprégnation), mais par morceaux brefs (pour orienter le regard du lecteur). Chaque citation est toujours plus ou moins justifiée, et lensemble du livre ii peut apparaître comme un guide de lecture pour lapprenti lecteur de poésie médiévale. Si le classement par auteurs domine, plutôt quun classement par thèmes ou rubriques comme dans les recueils de lieux communs par exemple, il sagit bien dun premier pas vers lorganisation 551du « champ » de la poésie médiévale à travers un texte à la fois copieux et rendu à sa lisibilité. Et en adaptant son corpus à des habitudes de lecture remarquables (lanthologie, le recueil ou le centon poétiques), l« antiquaire » encourageait à « se frotter » à la poésie médiévale – une pratique désormais indispensable devant le risque de la perte irrémédiable de ces textes provisoirement sauvés par limprimé. En ce sens, lanthologie de Fauchet assume bien la première et plus importante fonction de la citation : assurer et maintenir une « continuité culturelle92 ».

Il convient cependant de noter la situation à la fois intermédiaire et singulière de Fauchet dans sa pratique de la citation. Dans le Recueil, celle-ci nest pas encore vraiment là pour nourrir un discours premier quil sagirait de justifier (sauf ponctuellement dans le livre i), mais elle nest pas non plus entièrement autonome ou distincte de ce discours, qui ne cesse de la mettre en valeur. Loriginalité de Fauchet réside précisément, à travers son usage de la citation, dans la manifestation dune nouvelle forme dallégation en gestation. En sortant de la culture scolaire au sens strict, forgée par les recueils de lieux communs latins et grecs, en rompant avec un usage traditionnel de la citation comme reconnaissance dune autorité figée, Fauchet projette aussi son lecteur vers un usage futur, sans doute à inventer, de la culture poétique médiévale. De fait, si dans le Recueil chaque morceau choisi est avant tout une citation savante, destinée à augmenter le savoir de l« antiquaire », elle apparaît déjà un peu comme une citation plaisante, destinée à élargir une culture davantage « mondaine93 ». À condition bien sûr, après les premières étapes de la « cueillette » et de la « conservation », dassurer pleinement la « greffe » qui rendra définitivement visible ce prometteur Jardin du Moyen Âge.

Nicolas Lombart

Université dOrléans

POLEN (EA 4710) / CESFiMA

552

ANNEXE

Tableau des citations poétiques
en langue vulgaire94

Livre ii

Auteur

Citations / œuvres

Fonction de la citation

iv, 27

[Non mentionné]

Li Roman dAlixandre, 3 v.

[État de la langue romane vers 1150 par opposition au latin]

Id., 32-33

Huon de Méry

Le tournoi de lAntechrist : 18 v. (incipit)

[Le « gros François » mentionné par lauteur est bien la langue romane]

Id., 33-34

Herbert

Dolopathos : 4 + 9 + 2 v.

[« mettre en roman » signifie bien « mettre en français », à partir du latin]

Id., 34

Lambert li Tors (non « Cors »)

Li Roman dAlixandre, 3 v.

[Le « parler Roman » est maintenant « appelé François le plus poli »]

Id., 35

« Le clerc Simon »

Roman dAlexandre : 7 v. dun ms. perdu

[Le « roman » est un langage français propre à Paris]

Id., 36

Adenet le Roi

Li Roumans de Berte aus grans piés : 9 v.

[Les Hurepoix sont bien sujets du roi de France]

Id., 36-37

?

« le Roman de la conqueste doutre mer » (Le chevalier au cygne) : 2 + 3 + 2 v. ; La chanson dAntioche : 2 v.

[Étymologie et sens du mot Hurepoix]

553

v, 40

Rutebeuf (?)

La complainte de sainte Église : 2 v.

[Les docteurs en théologie sont appelés « devins »]

Id., 47

Guillaume de Lorris

Roman de la Rose : v. 702 (éd. Strubel, LGF)

[Les Français ont depuis longtemps pratiqué le sonnet]

viii, 73

Huon de Méry

Le tournoi de lAntechrist : 7 v.

[Pratique des jongleurs]

viii, 74

?

Du chevalier à la robe vermeille [fabliau] : 9 v.

[Pratique des jongleurs]

viii, 77

?

Des trois dames qui troverent lanel [fabliau] : 8 v.

[Rime française « consonante » et/ou « léonine »]

viii, 77

Gautier de Belleperche

Le Romans de Judas Macchabée : 3 v. (incipit)

[Rime française « consonante » et/ou « léonine »]

viii, 79

?

Pour orgueilleux humilier [dit] : 6 v.

[Rime française « consonante » et/ou « léonine »]

viii, 80

Jean de Meun

Roman de la Rose : v. 8691-8692 (éd. Strubel, LGF)

[Exemple de rime léonine : « quand deux dictions sont semblables & de pareille consonance en syllabes » (Fabri)]

viii, 80

?

4 v. « allégués » par Pierre Fabri

[Exemple de rime léonine]

Livre iiii

Auteur

Citations/œuvres

Fonction de la citation

Chansons de geste et romans

82-83

[1]

Wace

Brut : 7 (incipit) et 4 v. (explicit)

[Nom de lauteur + sujet : la généalogie des rois dAngleterre + datation]

83

[2]

Lambert li Tors [Alexandre de Bernay]

Li Romans dAlixandre : 3 v.

[Nom et origine de lauteur, donnés par le continuateur Alexandre de Bernay]

83-84

[3]

Alexandre de Paris [Alexandre de Bernay]

Idem : 3 + 11 v. (incipit).

[Nom et origine de lauteur + continuation/collaboration + pratique poétique]

554

84

[4]

Pierre de Saint Cloot (ou Cloud)

Le testament dAlexandre : 2 v.

[Nom de lauteur]

84-85

[5]

Jean le Nevelon (ou le Venelais)

La vengeance Alexandre : 9 v. ; Li Romans dAlixandre : 3 v. (centon)

[Nom de lauteur + continuation + digression sur lalexandrin, p. 85-88]

88-92

[6]

Guiot de Provins

La Bible : 7 (incipit) + 4 + 4 + 4 + 4 + 8 + 1 + 8 + 4 + 6 + 5 + 5 + 2 v.

[incipit : sujet de louvrage ; autres vers : identité de lauteur + datation/contexte + richesse encyclopédique]

92-93

[7]

Blondel de Nesle

Aucune citation

93-96

[8]

Thibaut de Marly

LEstoire li Romans : 4 (incipit) + 3 + 1 + 2 + 2 + 14 + 8 + 3 + 3 + 3 (centon)

[Sujet + datation/contexte + lien à un protecteur + lexique + « bonnes sentences »]

96-97

[9]

Raoul de Houdenc

Huon de Méry, Le Tournoi de lAntechrist : 8 v. (mentionnent le Roman des ailes)

Le songe dEnfer : 2 (explicit) + 2 + 4 + 3 v. ; Meraugis de Portlesguez : 6 v. (explicit)

[Communauté des trouvères]

[Nom de lauteur + sujet de louvrage + contexte/encyclopédie + « bonnes inventions »]

97-103

[10]

Chrétien de Troyes

Huon de Méry, Le Tournoi de lAntechrist : 5 + 12 v. (éloge)

Le Roman du Graal : 13 + 6 v. (incipit) ; Le Chevalier au lion : 2 (« description du printemps ») + 18 (« description de louye ») + 5 (« desconfiture de gens ») + 12 (centon de « sentences ») + 20 v. (incipit).

Gace Brulé : 2 v.

[Communauté des trouvères]

[Nom de lauteur et du protecteur + « belles & gentilles inventions »]

555

103-5

[11]

Godefroi de Leigni

Le roman de la charrette : 9 (explicit) + 11 + 17 v. (centon, « peine du mal » damour)

[Nom de lauteur + continuation + « belles inventions »]

105-7

[12]

Herbert

Dolopathos : 9 (incipit) + 3 (« proverbe ») + 6 (« sentence ») + 3 v.

[Nom de lauteur + translation + datation + dédicataire + « contes moraux & plaisans », « proverbes François & belles sentences »].

107-9

[13]

Huon de Méry

Le tournoi de lAntechrist : 2 + 27 (incipit) + 4 + 19 + 3 (explicit) + 2 v. (« epithete assez bon »).

[Nom de lauteur + identification + datation + « ces vers servent à lhistoire du temps »]

109-11

[14]

Huon de Villeneuve

(fausses attributions = Cycle de Nanteuil)

Doon de Nanteuil : 18 (incipit, ms. perdu) + 9 + 11 v. (centons de « sentences ») ; Aye dAvignon : 2 + 22 v. (centon) ; Renaut de Montauban : 2 v. ; Gui de Nanteuil : 26 v. (centon) ; Doon de Nanteuil : 2 v. ; Ciperis de Vignevaux : 30 v. (centon).

+ Villon : 4 v. (Ballade en vieil langage françois)

[Nom de lauteur (erreurs) + pratique poétique : « entree de ces Chanterres » + datation + « bonnes sentences & descriptions » + richesse lexicale à exploiter]

Chansonnier de Mesmes

116-22

[15]

Thibaud de Champagne

Chanson 1iii : 2 v. (incipit) ; ch. 2 : 2 + 8 v. ; ch. 4 : 7 v. ; ch. 5 : 8 + 3 v. ; ch. 6 : 1 v. (incipit) ; ch. 7 : 9 v. ; ch. 8 : 2 + 3 v. ; ch. 9 : 6 v. ; ch. 10 : 4 v.

[Nom de lauteur + datation + contexte + relevé de topoï propres à la lyrique courtoise : doux semblant, losengiers, châtiment damour, inconstance de la Dame, « il aime et la hait »…]

556

122-24

[16]

Gace Brulé

Chanson 1 : 1 v. (incipit) ; ch. 2 : 4 + 2 v. ; ch. 3 : 3 v. ; ch. 5 : 8 v. ; ch. 8 : 4 v. ; ch. 24 : 8 v.

[Datation + contexte + relevé de topoï]

124-30

[17]

Le Châtelain de Couci

Chanson 1 : 1 (incipit) + 3 v. ; ch. 2 : 2 v. ; ch. 4 : 8 v. ; ch. 15 : 4 v.

+ 3 v. dune chanson anonyme

[Datation + contexte + relevé de topoï : les losengiers, lamour de loin, la cruauté de la Dame…]

[Nom de lauteur]

130-31

[18]

Blondel de Nesle

Chanson 3 : 5 v. ; ch. 6 : 2 v. ; ch. 8 : 3 v. ; ch. 10 : 9 v.

[Contexte + relevé de topoï + « beaux traits »]

131-32

[19]

Perrin dAngicourt

Chanson 15 : 4 v. ; ch. 22 : 10 v.

[Datation + contexte + relevé de topoï]

132-3

[20]

Thierry de Soissons (?)

Chanson 2 : 9 v. ; ch. 4 : 5 v. ; ch. 5 : 3 v. ; ch. 9 : 2 v.

[Datation + contexte + relevé de topoï]

133-4

[21]

Thibaut de Blaison

[5 chansons]

Aucune citation

134

[22]

Gautier de Dargies

Chanson 6 : 3 v. ; ch. non id. : 2 v.

+ 3 v. de « Richard »

[Contexte + Relevé de topoï]

[Mention du nom Dargies]

134-5

[23]

Moniot dArras

5 premières strophes (sur 7) de la chanson « Amors nest pas, que qen die » (50 v.)

[Chanson « bonne & belle »]

136-8

[24]

Gilbert de Berneville

Chanson 2 : 8 v. ; ch. 5 : 4 v. ; ch. 3 : 10 v. ; ch. 10 : 1 v. ; ch. 11 : 12 v.

[Datation + contexte + relevé de topoï]

138-9

[25]

Richard de Semilly

3 v. (une chanson)

[relevé de topoï]

139

[26]

Vidame de Chartres

Chanson citée dans Guillaume de Dole : 4 v. ; ch. 3 : 10 v.

[« couples [] bonnes » ; « le dernier couplet (= ch. 3) mérite bien destre récité »]

139-40

[27]

Robert de Blois

Aucune citation

557

140

[28]

Raoul de Ferrières

Chanson 2 : 4 v.

[relevé de topoï]

140-1

[29]

Robert de Reims

Chanson intégrale « Qui bien veut amors descrivre » : 42 v.

[« Il a fait des antitheses damour »]

141-2

[30]

Moniot de Paris

Chanson 2 : 1 v. (refrain)

Dit de Fortune : 3 v.

[Contexte]

[Nom de lauteur]

142

[31]

Ode de la Courroierie (?)

[5 chansons]

Aucune citation

142

[32]

Jean Erart

Aucune citation

142

[33]

Raoul de Beauvais

6 v. (une chanson)

[relevé de topoï + « assez bon poete »]

143

[34]

Gautier dÉpinal

Chanson 2 : 4 + 4 v. ; ch. 6 : 7 v. ; ch. 4 : 7 v.

[relevé de topoï + « belles comparaisons »,

« chanson tresbelle & poetique »]

143-4

[35]

Jacques dÉpinal

1 chanson

Aucune citation

144

[36]

Jacques de Cysoing

Chanson 3 : 12 v.

[relevé de topoï courtois + « excellent poete »]

144-5

[37]

Gautier de Soignies

Aucune citation

Roman de G. de Dole : 11 v.

[Nom de lauteur]

145

[38]

Simon dAuthie

Aucune citation

145-6

[39]

Richard de Fournival

Aucune citation

146

[40]

Vielart de Corbie

Aucune citation

146

[41]

Oudart de Lacenie

Aucune citation

146

[42]

Baude de la Carrière

Aucune citation

146

[43]

Thrésorier de lIsle

Aucune citation

558

146-7

[44]

Gilles de Viés-Maisons

Chanson 1 (?) : 6 v. ; ch. 2 : 4 + 3 v.

[relevé de topoï + identification + chanson « tres bien faite & tres belle »]

147

[45]

Bruneau de Tours

Un vers cité

[relevé de topoï]

147-8

[46]

Colin Muset

Chanson 2 : 3 v.

[Figure concrète du jongleur à la vielle]

148

[47]

Jacques de Hesdin

Aucune citation

148

[48]

Henri III de Brabant

Aucune citation

148-9

[49]

Colard le Bouteiller

Aucune citation

149

[50]

Jean lOrgueneur

Aucune citation

149

[51]

Gilles le Vinier

Aucune citation

149

[52]

Pierre de Craon

Aucune citation

149-50

[53]

Le Chanoine de Saint-Quentin

Une chanson : 11 v.

[relevé de topoï + chanson « tresbelle »]

150

[54]

Baudoin des Auteus

Aucune citation

150

[55]

Chardon de Croisilles

Aucune citation

150

[56]

Sauvage dArras

Aucune citation

150

[57]

Robert de Memberolles

Une chanson : 4 v.

[relevé de topoï + chanson « tresbelle »]

151

[58]

Philippe Pa

Aucune citation

151-2

[59]

Hugues de Berzé

Aucune citation

Bible de Guiot : 13 v.

[Nom de lauteur]

152

[60]

Roger (Robert ?) de Cambrai

Aucune citation

559

152

[61]

Jean de Maisons

Aucune citation

152-3

[62]

Le comte de Bretagne [Pierre Mauclerc]

Un vers cité

[Nom de lauteur + identification]

153

[63]

Robert de Castel

Deux chansons : 3 + 3 v.

[relevé de topoï + contexte des Puys]

153-4

[64]

Lambert Ferri

Aucune citation

154

[65]

Jehan le Cuvelier

Aucune citation

154-5

[66]

Eustache le Peintre

Chanson 5 : 8 v.

[« trait digne destre renouvellé »]

155

[67]

Matthieu de Gand

Aucune citation

155

[68]

Robert de Mauvoisin

Aucune citation

155

[69]

Thomas Hérier

Aucune citation

155

[70]

Carasaus « dArras »

Aucune citation

155

[71]

Aubin de Sezanne

Une chanson : 5 v.

[Relevé de topoï]

156

[72]

Jean Frémeau

Aucune citation

156

[73]

Guillaume Veau

Aucune citation

156

[74]

Carasaus

Aucune citation

156

[75]

Thomas « Eriers » [Erars ?]

Aucune citation

156

[76]

Le comte dAnjou

Aucune citation

156

[77]

Roger dAndeli

Aucune citation

560

157

[78]

Le comte de la Marche

Aucune citation

Guillaume de Dole

157-8

[79]

Renaut de Sabloeil [= Robert de Sablé]

[Jean Renart], Le roman de Guillaume de Dole : 2 v. + 16 premiers v. de la chanson « Ja de chanter en ma vie… ».

Guiot, Bible : 1 v.

[Nom de lauteur]

[Mention du nom Robert de Saboeil]

158-9

[80]

Doete de Troyes

[Jean Renart], id. : 6 v.

[Mention du nom + contexte]

159

[81]

« Jonglet » [= Fabliau de Jouglet]

[Jean Renart], id. : 6 v.

[Mention du nom + contexte]

159-60

[82]

Hugues de Braie-Selve

[Jean Renart], id. : 16 v.

[Nom de lauteur + contexte + tradition des « jeux sous lormel »]

Ms. BNF Fr 1593 / Mélange

160-3

[83]

Rutebeuf

Monseigneur Anseau de lIsle : 8 v.

Les ordres de Paris : 12 v.

[« ce couplet me semble bon »]

[Vérité historique : les quinze-vingt ne sont pas des chevaliers mais des mendiants]

163-4

[84]

Marie de France

Fables dÉsope : 4 v. (explicit)

[Nom de lauteur + dédicataire]

164

[85]

Jean Durpain

Lévangile aux femmes : 1 (incipit) + 2 v. (explicit)

[Nom de lauteur]

164-6

[86]

Cortebarbe

[Fabliau] Les trois aveugles de Compiègne : 2 derniers v.

[Nom de lauteur]

Réécriture intégrale du fabliau en prose

167

[87]

Le clerc de Vaudoy

[Fabliau] Le Fablel de Niceroles : 1er v.

167-9

[88]

Jean le Galois

[Fabliau] Plaine borse de sens

Réécriture intégrale du fabliau en prose

170-9

[89]

Jean le Chapelain

[Fabliau] Du segretain moine : 6 v. (incipit)

Réécriture intégrale du fabliau en prose

561

179

[90]

Renaut dAndon

[Le Contenz dou monde]

Aucune citation

179

[91]

Guiart

Lart damours : 2 v.

[adaptation de Lart daimer dOvide]

179-80

[92]

Garin

[Fabliau] Du chevalier qui fist les cons parler : 12 v.

[Nom de lauteur + fonction du fabliau érotique]

180

[93]

Huon le Roi de Cambrai

La devision dordres et de religions (2 v.)

La senefiance de lABC : 5 v.

[Nom de lauteur]

180

[94]

Girart dAmiens

[Roman] Meliacin : 6 v.

[Nom de lauteur]

181

[95]

Hue Piaucele

[Fabliau] Sire Hain et de Dame Hanieuse : 4 v.

[Nom de lauteur]

181

[96]

Jean Bodel

Aucune citation

181

[97]

« Jean du Châtelet » [= Jean de Paris]

« Distiques de Caton » : 5 v.

[Nom de lauteur]

181-2

[98]

« Hue de Cambrai » [= Huon le Roi de Cambrai]

[Fabliau] La male honte : 2 v.

[Nom de lauteur]

182

[99]

Courtois dArras ?

Fabliau de Foucher Boi-Vin (?)

Aucune citation

182

[100]

Haisiau

[Fabliau] De lannel qui faisoit les vis grans et roides : 2 v.

[Nom de lauteur]

182

[101]

Durans

[Fabliau] Trois boçus menestrels : 3 v.

[Nom de lauteur]

182

[102]

Eustache dAmiens

[Fabliau Du bouchier dAbeville]

Aucune citation

562

Mss Matharel : jeux-partis

183

[103]

« Frere » [= Gilles le Vinier]

Aucune citation

183-4

[104]

Guillaume le Vinier

Aucune citation

184

[105]

Adam de Givenchy

Aucune citation

184

[106]

Andrieu (de Paris ?)

Aucune citation

184-91

[107]

Jean Bretel

Aucune citation

Mais 37 chansons sont résumées

191

[108]

Mapolis

Aucune citation

191

[109]

Gamart de Vilers

Aucune citation

191-2

[110]

Jean de Grieviler

Aucune citation

192

[111]

Robin de Compiègne

Aucune citation

192

[112]

Perrot de Nesles

Aucune citation

192

[113]

Sainte des Prés

Aucune citation

192

[114]

Gerart (Gerardin) de Boulogne

Aucune citation

193

[115]

Hue le Maronier

Aucune citation

Mélange

193-5

[116]

Adenet le Roi

Cléomadès : 5 v. (incipit)

[Nom et identification de lauteur]

195

[117]

Guillaume de la Villeneuve

Les crieries de Paris : 5 + 3 v.

[Nom et identification de lauteur + contexte des ordres mendiants]

563

195-6

[118]

Huon le Roi [de Cambrai]

[Lai] Du vair palefroi : 7 v.

[Nom de lauteur et sujet de louvrage]

196

[119]

Richard de lIsle-Adam

[Fabliau] De Honte et de Puterie : 2 + 6 v. (incipit)

[Nom de lauteur et sujet de louvrage]

196

[120]

Jehan de Boves

[Fabliau] Des deux chevaux : 4 v.

[Nom de lauteur]

196-7

[121]

Adam le bossu

Le Jeu de la feuillée : 2 v.

(+ 3 v. de Jean Bretel)

[Élément biographique]

197

[122]

Gautier de Belleperche

Le Romans de Judas Macchabée : aucune citation

197

[123]

Pieros du Riés

Continuation de Judas Macchabée [même œuvre] : 4 + 3 + 4 v.

[Nom et identification du continuateur]

197-8

[124]

Jacquemart Giélée

Renart le nouvel : 3 + 9 v. (explicit)

[Nom de lauteur + datation]

198-200

[125]

Guillaume de Lorris

Roman de la Rose :
5 + 3 + 5 + 6 + 2 v. (+ 2 v. dans la notice 126)

[Titre de louvrage + œuvre inachevée + identification de lauteur comme juriste]

200-7

[126]

Jean de Meun

Trad. de la Consolation de Boèce (prol. en prose)

Honorat Bovet, Lapparition Maistre Jean de Meun (7 v.)

Roman de la Rose : 7 + 3 + 6 + 2 + 1 + 2 (douteux) + 6 + 2 v.

[Identification de lauteur + datation]

[Nom de lauteur + élément biographique]

[Nom et identification de lauteur + datation + continuation]

207-9

[127]

Pierre Gentien

Le tornoiement as Dames de Paris : 3 (explicit) + 4 + 3 + 1 v.

[Nom et identification de lauteur (blason)]

i.Le numéro du chapitre est suivi des numéros de pages dans léd. de 1581. Pour les références précises des vers, voir léd. citée de J. G. Espiner-Scott, Recueil []. Livre ier, 1938.

ii.Les numéros de pages de léd. de 1581 précèdent le numéro de la notice.

iii.Dans lordre du ms. de Mesmes.

1 Voir Claude Fauchet, Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise, ryme et romans. Plus les noms et sommaire des œuvres de CXXVII poetes François, vivans avant lan MCCC, Paris, Mamert Patisson (pour Robert Estienne), 1581 (dorénavant Recueil). Le livre i a été édité par J. G. Espiner-Scott, Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise, ryme et romans. Livre ier, Paris, Droz, 1938.

2 Recueil, p. 128 : « Jehan de Nostredame qui a escrit des poetes Provençaux, fait ce mesme conte de Tricline Carbonnelle, femme de Raimond de Silhans seigneur de Roussillon, amie de Guillem de Cabestan poete Prouençal ». Voir Jehan de Nostredame, Les vies des plus célèbres et anciens poètes provençaux, éd. C. Chabaneau et J. Anglade, Genève, Slatkine Reprints, 1970 [1913], p. 36-38 (« De Guilhem de Cabestan »). Dans louvrage de Nostredame la citation, qui tient une place nettement moins importante que chez Fauchet, reste très largement subordonnée au récit de « vie ».

3 Sur limportance de ce « travail », voir A. Compagnon, La seconde main ou le travail de la citation, Paris, Seuil, 1979. Pour lauteur, la Renaissance se caractérise par un équilibre instable entre lallégation, cest-à-dire « largument de tradition », et la citation proprement dite, cest-à-dire « le nouveau modèle de la répétition qui engage le sujet » (p. 283). On notera que J. G. Espiner-Scott na précisément pas jugé utile déditer la partie anthologique du Recueil de Fauchet (voir supra n. 1), considérant sans doute comme peu révélatrice la pure activité de citation, par opposition au discours théorique plus « élaboré » du livre i. Mais il y a bien, au xvie siècle, un nouveau discours lié à lacte de citer et celui-ci est particulièrement exhibé chez Fauchet.

4 Voir Compagnon, La seconde main, p. 279-313. Le caractère radicalement nouveau du rapport de Montaigne à la citation a été également bien mis en évidence par M. Metschies, La citation et lart de citer dans les Essais de Montaigne [1966], trad. J. Brody, Paris, Champion, 1997 et M. McKinley, Words in a Corner : Studies in Montaignes Latin Quotations, Lexington (Ky), French forum, 1981.

5 Voir A. Moss, Les recueils de lieux communs : apprendre à penser à la Renaissance, trad. P. Eichel-Lojkine, Genève, Droz, 2002, p. 313-354.

6 Sur Fauchet « historien de la littérature », voir la contribution de S. Menegaldo dans le présent dossier. Sur son appréciation esthétique de la poésie médiévale, voir N. Lombart, « Une “défense et illustration” de la poésie française médiévale : le Recueil de lorigine de la langue et poesie françoise de Claude Fauchet (1581) », Accès aux textes médiévaux de la fin du Moyen Âge au xviiie siècle, éd. M. Guéret-Laferté et C. Poulouin, Paris, Champion, 2012, p. 105-142.

7 Voir Cl.-G. Dubois, La conception de lhistoire en France au xvie siècle (1560-1610), Genève, Slatkine reprints, 2011 [1977]. Sur la variété des pratiques historiographiques, voir aussi les récentes études de LHistoire à la Renaissance. À la croisée des genres et des pratiques, éd. R. Darmon et al., Paris, Classiques Garnier, 2015.

8 Voir F. Lemerle, La Renaissance et les antiquités de la Gaule : larchitecture gallo-romaine vue par les architectes, antiquaires et voyageurs des guerres dItalie à la Fronde, Turnhout, Brepols, 2005. Cette discipline est naturellement associée au genre nouveau des « Antiquités de villes » : voir F. Lemerle, « Les villes du royaume de France à la Renaissance : entre antiquités et modernités », et Ch. Liaroutzos, « “Voici en deux mots tout ce que je peux déposer” : le silence des pierres et la parole du chercheur dans les antiquités de villes au xvie siècle », Seizième Siècle, 9, 2013, respectivement p. 37-45 et p. 95-106.

9 Voir E. Mortgat-Longuet, Clio au Parnasse : naissance l« histoire littéraire » française aux xvie et xviie siècles, Paris, Champion, 2006, notamment p. 58-62 et 96-98 sur Fauchet.

10 Voir D. R. Kelley, Foundations of Modern Historical Scholarship : Language, Law and History in the French Renaissance, New York-London, Columbia University Press, 1970, p. 271-300 (« The Rise of Medievalism : Étienne Pasquier Searches for National Past »). Lauteur cite notamment linjonction du juriste Louis Le Caron : « Vous avez, hommes François, assez dexemples en vos histoires, sans en rechercher aux Grecques & Romaines » (Responses du droit françois, Paris, Vincent Normant, 1583, fol. 8r).

11 Voir Claude Fauchet, Origines et dignitez des magistrats de France, Paris, Jérémie Périer, 1600, « Au lecteur », fol. ã6v-ã7r : « Jappelle miens tant de Romans desquels à tous propos je mayde : é de lautruy, ce que Messieurs du Tillet, lEvesque & le Greffier (les plus sçavans en nos Antiquitez qui furent onques en France) maistre Vincent de la Loupe Lieutenant Criminel au baillage de Chartres, & quelques autres doctes & sçavant personnages, ont escrit de lOrigine desdicts Estats. Quant ausdicts Romans qui en parlent, je les tiens pour miens : comme en la preuve dun finage dun Royaume ou Seigneurie, les Princes saydent du tesmoignage de leurs Barons, de hauts Seigneurs, & Nobles Gentis-hommes, mesmes & des soldats, ou paisans des marches & confins, pour verifier leurs limites & possessions immemorialles, aussi je me sers de ceux-cy, pour la preuve de lantiquité que jessaye à descouvrir la plus nette quil me sera possible ».

12 Voir Recueil, p. 37 et 32-37 (chap. iv), 40 et 47 (chap. v), 73, 74, 77, 79-80 (chap. viii). Pour une vue densemble de ces citations du Livre i, voir en Annexe le « Tableau des citations poétiques ». Sur les prises de position modernes de Fauchet en matière dhistoire de la langue, voir Cl.-G. Dubois, Mythe et langage au xvie siècle, Paris, Eurédit, 2010 (éd. augm.) [1970], passim.

13 Voir S. Kovaks, « Formes de médiation du texte littéraire : usage de lanthologie imprimée au xvie siècle », Communication et langages, 129, 3e semestre 2001, p. 110-124 ; J.-Ch. Monferran, « De lanthologie et de lart poétique à la Renaissance », Les Arts poétiques du xiiie au xviie siècle. Tensions et dialogue entre théorie et pratique, éd. G. Ems et M. Minet, Turnhout, Brepols, 2017, p. 107-117 ; M. Bombart et G. Peureux, « Politique des recueils collectifs dans le premier xviie siècle. Émergence dune norme linguistique et sociale », Le recueil littéraire. Pratiques et théorie dune forme, éd. I. Langlet, Rennes, PUR, 2003, p. 239-256.

14 Voir Gilles Corrozet, Le parnasse des poëtes françois modernes : contenant leurs plus riches & graves Sentences, Discours, Descriptions, & doctes enseignemens, Recueillies par feu Gilles Corrozet Parisien, Paris, Galiot Corrozet, 1571. Louvrage posthume (cest le fils de Gilles, Galiot, qui se charge de donner au projet de son père une forme achevée) est réédité en 1572 et 1578. Les termes de « sentences » et « descriptions », souvent repris par Fauchet dans le Recueil, rappellent lintérêt porté à la dimension gnomique de la poésie, très appréciée dans le milieu des juristes de la fin du siècle.

15 Voir M. Clément, « Mettre en vers français une poétesse latine. Proba Falconia à Lyon en 1557 », Auteur, traducteur, collaborateur, imprimeur… qui écrit ?, éd. M. Furno et R. Mouren, Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 165-191.

16 Sur les enjeux liés à la notion de « recueil », voir Réforme, Humanisme, Renaissance, 62, 2006 (« Le recueil poétique »), et notamment lintroduction par N. Dauvois et D. Martin p. 13-20. Sur les résonances de ce terme dans le texte de Fauchet, voir Lombart, « Une “défense et illustration” de la poésie française médiévale », p. 118-123.

17 Daprès A. J. Greimas et T. M. Kane, Dictionnaire du moyen français, Paris, Larousse, 1992, p. 536 et www.atilf.fr/dmf/definition/recueil et recueillir.

18 Voir Recueil, « Au Roy de France et de Polongne », p. 3 : « Aussi est-ce la cause qui mincite à vous presenter ce Recueil, lequel estant fait pour la gloire du nom François, je nay deu addresser à autre quà vostre Majesté, laquelle dés sa premiere jeunesse a monstré par effect combien elle fait cas de lhonneur de ce Royaume ». Les recueils de poètes modernes ont aussi pour but de manifester, de manière synthétique, l« excellence » dun « règne » : voir par exemple le Recueil de vraye Poesie françoyse, prinse de plusieurs Poetes, les plus excellentz de ce règne, Paris, Denis Janot, 1544.

19 Voir Recueil, p. 87 (à propos des mots desrocher et periller chez Jehan le Nevelon) : « Car si nous disons descrocher, pour oster dun croc : pourquoy ne dirons nous, desrocher pour tomber & precipiter dun roc ? Et comme sçauriez vous mieux representer le latin de periclitor & periclitari, que par periller, puis que nous disons peril pour periculum ? Je nay pas deliberé cy apres de faire ainsi de tous les mots, qui se trouveront aux vers que jallegueray en ce Recueil de poetes : mais jay voulu monstrer par ceux cy, comme lon se peut aider daucuns : qui vallent bien le renouveller ». Les citations invitent à lécriture, et le « recueil » complète utilement un discours théorique, comme dans lédition de 1550 de lArt poétique de Thomas Sébillet : Art poetique françoys, pour linstruction des jeunes studieux, & encor peu avancez en la Poësie Françoyse avec le Quintil Horatian sur la Defense & illustration de la langue franc̜oyse. Auquel est inséré à la fin un recueil de poësie franc̜oyse, pour plus facilement entendre ledict art, Paris, Vve François Regnault, 1555 ; il sagit en fait du « recueil » imprimé chez D. Janot en 1544 (voir supra n. 18).

20 Cette définition du « recueil » comme mode de rassemblement provisoire dune œuvre à la fois dispersée et cachée rappelle en partie la pratique de Du Bellay : voir le Recueil de poesie, presente à tresillustre Princesse Madame Marguerite seur unique du Roy, et mis en lumiere par le commandement de madicte Dame, Paris, Guillaume Cavellat, 1549, « A tresillustre Princesse Madame Marguerite seur unique du Roy », p. 3-5.

21 Voir Adrian dAmboise, Discours ou traicté des devises, Paris, Roulet Boutonne, 1620 : « Le Docte Antiquaire. Messire Claude Fauchet avec les armes de sa famille mediocre, mais noble, qui sont trois chevrons crenelez a pris sa devise sur son nom un fauchet, qui sert à fener avec ce mot, Sparsa et neglecta coegi. Éloge qui lui est bien propre à luy, ayant ramassé dans les cendres de lAntiquité plusieurs belles reliques & choses de remarque, qui avant luy estoient negligees ».

22 Daprès Greimas et Kane, Dictionnaire du moyen français, p. 233.

23 Sur lexemple de lArt poétique de Thomas Sébillet, voir supra n. 19. La mode du recueil bipartite (discours théorique en prose/recueil de vers) dépasse le seul genre de lart poétique : voir par exemple Louis Le Caron, La Claire. Ou, De la prudence de droit, Dialogue premier [= traité juridique en prose]. Plus, La clarté amoureuse [= recueil de poésie amoureuse], Paris, Guillaume Cavellat, 1554.

24 Voir Compagnon, La seconde main, p. 15-45. Pour une vue densemble de ces citations du Livre ii, voir en Annexe le « Tableau des citations poétiques » (les notices sont numérotées de 1 à 127).

25 Sur ce « Parnasse » des poètes médiévaux, voir la contribution de S. Menegaldo dans le présent dossier.

26 Cinquante-sept notices ne proposent aucune citation de lauteur mentionné : no 7, 27, 31, 32, 35, 37 à 43, 47 à 52, 54 à 56, 58 à 61, 64-65, 67 à 78, 90, 96, 99, 102, 103 à 115 (toute la section des jeux-partis), et 122.

27 Sur la « lourdeur » (ou copia) du Recueil, voir supra. Latténuation de lérudition par la variété est demblée un principe de composition des Veilles, comme la rappelé A. Coulombel dans sa contribution au présent dossier.

28 Nous nous contentons de résumer la très claire analyse de ces trois critères de composition et du rapport de Fauchet à la lecture de manuscrits proposée par S. Menegaldo dans sa contribution au présent dossier.

29 Voir Recueil, p. 116-117, où Fauchet relate sous forme danecdote la découverte de ce « livre » dans « la librairie de messire Henry de Mesmes ».

30 Voir Recueil, p. 183, où Fauchet évoque le « livre [] en la possession de monsieur Matherel Advocat en Parlement [] digne destre gardé ».

31 Le premier centon de trois vers, tirés du Roman dAlexandre (notice 5 sur Jehan le Nevelon) souligne une richesse lexicale, dûment repérée par l« antiquaire-citeur » ; voir Recueil, p. 87 : « Ces vers donc qui suivent, pourront servir à cest effect : & donner à congnoistre une partie du stil desdits autheurs : lun desquez parlant dun chevalier qui donna un coup despee sus le heaume dun autre, dit Si la feru del branc que sus larçon ladente.” / & De morts & de nauvres enjonche la campagne.” / & Ahi dame fortune tant estes nouveliere.” comment sçauriez vous mieux representer novatrix Latin » (je souligne). La récurrence du « &c. » traduit à la fois limpossibilité de tout transcrire et la nécessité de poursuivre ce travail.

32 Voir Recueil, [alléguer], p. 81-82 (livre i : « [] comme les vers pris des vieils Romans dAlexandre & Siperis, que jallegueray au second livre »), p. 87 (voir supra n. 19), 102 (mais cest Geoffroy Tory qui est ici allégué) ; [remarquer] p. 82, 86, 94, 95, 108, 131 ; [extraire / faire un extrait], p. 91, 122, 157 ; [mettre], p. 82, 83, 91, 92, 99, 109, 110, 116, 128 et 208. Les occurrences du verbe trouver sont innombrables.

33 Voir par exemple Recueil, p. 88-92, lusage particulièrement révélateur de ce procédé dans lenchaînement des citations de la Bible de Guiot de Provins (notice 6).

34 Voir par exemple Recueil, p. 99 (notice 10 sur Chrétien de Troyes) : « Il appert que ledit Christien a nommé un de ses œuvres, le Romans du Graal, puis quil dit, “Christians qui entent & paine / “A rimoyer le meillor conte, / “Par le commandement le Conte, / “Quil soit contez en cort royal. / “Ce est li contes del Graal, / “Dont li quens li bailla le livre ».

35 Voir par exemple Recueil, p. 82 (notice 1 sur Wace) : « Cest pourquoy pourquoy je suis contraint de mettre le premier en rang, maistre Wistace ou Huistace : autheur du Roman appelé Brut. Le poeme duquel commence par ces vers : “Qui veut ouir, qui veut savoir, / “De Roy en Roy, & dhoir en hoir, / “Qui cil fure, & dont vinrent / “Qui Angleterre primes tinrent, / “Quiez Roy y a en ordre eu : / “Et qui ainçois, & qui puis fu : / “Metre Huistace le translata ». Voir aussi la longue citation de lincipit du Tournoi de lAntéchrist de Huon de Méry, p. 107-108 (notice 13) : « Il declare au commencement de son œuvre, en quel temps il la composé, puis quil dit, “Il avint apres celle emprise, / “Que li François orent emprise, / “Contre le Conte de Champaigne : / “Que li Rois Lois en Bretaigne [en marge : Ce fut S. Loys] / “Mena son ost sans point daloine, / “Que mors ert li quens de Boloine [Fauchet cite les v. 27-53 du prologue] [] Par ces vers que jay voulu mettre au long, pource quils servent à lhistoire du temps, il appert que Huon vivoit au commencement du regne du Roy S. Louis, à sçavoir lan m. ccxxviii. auquel finit ceste guerre de Bretaigne ». On pourrait multiplier les exemples.

36 Voir par exemple Recueil, p. 82-83 (notice 1 sur Wace) : « Je ne sçay pas quand ce mWistace mourut, mais à la fin de lœuvre il dit, “Puis que Dieu incarnation / “Prist pour nostre redemption / “Mil cent cinquante cinq ans / “Fit metre Wistace cet Romans. De sorte quon peut sasseurer par ceste datte, du temps auquel il a vescu ». Voir aussi la brève citation de lexplicit du Tournoi de lAntéchrist (dun manuscrit sans doute perdu), p. 109 : « À la fin il nomme son livre, “Par son droit nom a peau cet livre / “Qui tresbien saccorde à lescrit / “Le tournoiement dAntichrist ». Là encore, on pourrait multiplier les exemples.

37 Voir par exemple, outre la fin de la citation du Tournoi de lAntéchrist mentionnée supra n. 35, Recueil, p. 116 (notice 14 sur « Huon de Villeneuve » [= Cycle de Nanteuil]), après la citation dun long centon de vers extraits de Ciperis de Vignevaux : « Je devine que lautheur fut Picard, parce quil prend son principal suject dun seigneur de Boulenois, & aussi que ce vers luy est eschapé. “Dont sonnerent le cloque qui bondi hautement. Toutesfois je nose rien asseurer, car ainsi que jay dit, je ne vey jamais que deux copies de ce livre, encores rompues au commencement, au milieu, & à la fin ».

38 Voir Recueil, p. 164-166 (notice 86), 167-169 (notice 88) et 170-179 (notice 89), la réécriture en prose de trois fabliaux (Des trois aveugles, La bourse pleine de sens et Le sacristain). Fauchet résume ainsi sa poétique de la réécriture (à propos du Sacristain) : « Et le reste en ryme que jay mis en prose le plus pres du sens de lautheur, retenant beaucoup de ses propres mots pour davantage descouvrir le temps » (p. 170).

39 Voir par exemple la présentation (emblématique) qui est faite de la poésie de Robert de Blois, premier trouvère du « Chansonnier de Mesmes » à nêtre lobjet daucune citation (notice 27), Recueil, p. 139-140 : « Robert de Blois dit en sa ii. chanson, que par trop celer son courage, il ne peut à joye monter. Et neantmoins il tient que cest outrage de trop gehir (cest à dire descouvrir & confesser, mot qui vient de gehenne) son penser. Aussi ne peut on estimer sage homme, qui trop sçait celer. Mais celuy-la fait bien son affaire, qui se couvre sagement. Il fut de Blois ainsi quon peut voir par sa premiere chanson : & je nen trouve que quatre ».

40 Dans la section des jeux-partis (notices 103 à 115), Fauchet compense labsence de citation par la mise en lumière de la dimension dialoguée du genre en exploitant les ressources du discours indirect libre. La notice 107 consacrée à Jean Bretel « grand maistre de jeux partis », résume ainsi 37 pièces : voir Recueil, p. 184-190. Fauchet sintéresse au genre (clairement défini : des « demandes, lesquelles il est loysible de disputer probablement pour & contre ») en raison de son caractère proprement national : « Ces demandes joyeuses servoyent à faire passer le temps aux compaignies honnestes : & je trouve que tel esbat a esté longuement pratiqué en France » (p. 184). De fait, labsence de citation ici nempêche pas Fauchet de faire entendre des voix en débat.

41 Voir par exemple Recueil, p. 183 (sur lusage du mot « dosnoyer » dans la notice 103) : « Ce Frere [Gilles le Vinier] demande, De deux amans lun aime par devis, & a son vouloir entier : lautre na fors le dosnoyer [en marge : “privauté de rire, baiser, & autres petits avantages damours sans avoir le dernier poinct : lItalien Donneare”] : & toutesfois il est asseuré que samie estant debonnaire, que son bon luy lairroit faire, mais il veut targier pour son honneur garder [] ». Sur le principe du « renouveller », voir supra n. 19.

42 Voir Recueil, p. 134-136 (notice 23). Les 50 heptasyllabes de cette chanson sont introduits avec une simplicité inhabituelle : « La vi. [chanson] me semble bonne, & est telle [] ». Fauchet cite les cinq premières strophes des sept aujourdhui identifiées de cette chanson.

43 Voir Recueil, p. 140-141 (notice 29). Les 42 heptasyllabes de cette chanson sont introduits par un énoncé caractéristique : « en sa iii. [chanson] il a fait des antitheses damour, disant [] ».

44 Voir Recueil, p. 100-101 (notice 10 sur Chrétien de Troyes), à propos de la « description de Printemps » (deux vers) ou de la « description de louye » (dix-huit vers) dans le Chevalier au Lion.

45 Voir Recueil, p. 87 (Jehan le Nevelon), 101 (les « bons proverbes & sentences » de Chrétien de Troyes), 104-105 (la peine damour selon Godefrois de Leigni), et 111-114 (les « bonnes sentences & descriptions » dans la Geste de Nanteuil).

46 Voir Recueil, p. 116-122 (notice 15) et p. 122-124 (notice 16). À propos du premier, Fauchet se reproche du reste davoir été un peu « long » : voir infra n. 47. La tonalité est indiquée, dans linsertion de la citation, par des verbes qui complètent les traditionnels « il dit » : « il est joyeux », « se plaint », « confesse », « crie merci », etc.

47 Voir par exemple Recueil, p. 108 (fin de la citation déjà mentionnée supra n. 35) et p. 122 : « Jay esté un peu long à lextrait de cet autheur [Thibaud de Champagne], à fin de monstrer davantage de ses traits ».

48 Fauchet en appelle en effet à un lecteur ignorant (sans connaissance préalable de la langue médiévale), alors que les auteurs de recueils leçons pouvaient sappuyer sur un fonds commun de culture antique. Dans le Recueil, Fauchet sadresse toujours au lecteur avec une certaine légèreté ou pour dédramatiser le rapport à la langue médiévale : « Voyla ce que je puis dire de la ryme quant à present, & jusques à ce que jen aye plus grande certaineté : laissant à juger aux lecteurs si letymologie de Leonine est bien prouvee ou non » (Recueil, p. 81) ; « Je pouvois extraire davantage de belles manieres de parler, tant de ceux qui sont nommez, que des autres sans nom : mais tout ainsi que je me suis lassé de lire, aussi croy-je bien, lecteur, que tu ne le seras pas moins » (p. 157) ; « Jay mis toutes ces raisons, à fin que toy (lecteur) en juges ce quil te plaira » (p. 206).

49 Il nest évidemment pas question de faire ici le relevé de ce lexique traduit, mais cette étude reste à mener pour mettre en lumière ce qui était compris de ce qui ne létait plus de la langue médiévale au xvie siècle.

50 Voir Recueil, p. 157 (passage cité supra n. 48).

51 Voir Recueil, p. 87-88 : « [] ces vieux autheurs [= médiévaux], dont maintenant jescri les vers, peuvent estre comparez [à Ennius et Pacuvius, imités par Virgile] » ; p. 91 : « Ce livre [la Bible Guiot] seroit trop gros qui voudroit mettre tous les poemes que jay leuz : & lextrait que jay faict daucuns, servira pour faire garder les vieils livres, & ne les vendre plus aux relieurs : car il se trouve quelque fois de bonnes pieces parmi tels cahiers moisis » (je souligne à chaque fois).

52 Voir Recueil, p. 98 (à propos du Conte du Graal de Chrétien de Troyes) : « Il y a deux ans quallant en une imprimerie, je trouvay que les imprimeurs se servoyent à remplir leur timpan dune fueille de parchemin bien escrite : où ayant leu quelques vers assez bons, je demanday le reste : & lors on me monstra environ huit fueilles de parchemin, toutes de divers cahiers, mais de pareille ryme & subject : qui me faisoit croire que cestoit dun mesme livre. Le premier monstroit evidemment lautheur, & pour ce que je crain que le reste soit perdu, je mettray ici tout ce que je copiay lors, & qui me sembla bon. Le Romans du Graal commence ainsi, etc. » ; et p. 115 (à propos de Ciperis de Vignevaux) : « Les bons traits qui se trouvent dedans me lont fait icy mettre : & craignant aussi que ce que jen ay veu il y a plus de xx. ans soit perdu : car le livre nestoit pas mien ». Voir aussi lanecdote rapportée p. 91, déjà citée supra n. 51.

53 Voir J. G. Espiner-Scott, Claude Fauchet, sa vie, son œuvre, Paris, Droz, 1938, p. 115-217 (sur le Recueil), et plus particulièrement p. 141-217 (sur le livre ii). Mais les remarques de lauteur montrent à quel point lacte même de citer est réduit, toutes proportions gardées, à une pure activité denregistrement : « Les citations donc ne sont jamais faites pour des raisons artistiques ou littéraires, et pourtant il faut noter quelques exceptions à cette règle » (p. 154) ; « Les citations du Recueil ne sont accompagnées daucune appréciation littéraire – à peine y trouve-t-on quelques remarques philologiques. Cependant quelques-unes des belles et vigoureuses citations que nous venons de retranscrire révèlent que Fauchet ne manque pas de sens esthétique » (p. 158). Lauteur relève quand même cette nécessaire copia (« belles et vigoureuses citations ») qui permet au lecteur du Recueil de se plonger littéralement dans la poésie médiévale.

54 Sur la place de la citation à côté de la référence, du plagiat et de lallusion, voir A. Bouillaguet, « Une typologie de lemprunt », Poétique, 20, 1989, p. 489-497. Voir aussi Compagnon, La seconde main, p. 49-92.

55 Ces fonctions sont indiquées dans la dernière colonne du tableau proposé en Annexe.

56 Voir supra les n. 35-36.

57 Ibid.

58 Voir Recueil, p. 89-90.

59 Voir Recueil, p. 197.

60 Voir Recueil, p. 96.

61 Voir Recueil, p. 83-85 (notices 3 sur le Roman dAlexandre, 4 sur le Testament, et 5 sur une des continuations, la Vengeance dAlexandre de Jehan le Nevelon), 103-105 (notice 11 sur Godefroy de Leigni continuateur de Chrétien de Troyes), 197 (notice 123 sur Pieros du Riés continuateur du Roman de Judas Macchabée) et 198-207 (notices 125 et 126 sur Guillaume de Lorris et Jean de Meun).

62 Cest dans cette perspective quil faut comprendre la « réhabilitation » de Clément Marot dans les Veilles, bien mise en évidence par A. Coulombel dans sa contribution au présent dossier.

63 Sur les jeux-partis, voir supra n. 40.

64 Sur cette dimension, voir les remarques de S. Menegaldo à propos du « rôle des jongleurs » dans sa contribution au présent dossier.

65 Recueil, p. 84.

66 Voir Recueil, p. 110, et le commentaire de Fauchet : « Jay voulu mettre ces vers, & pour monstrer lentree de ces Chanterres avant que faire leurs recits, & aussi les recompenses quils tiroyent des seigneurs, en chevaux, habits, & deniers. Le 13. vers me fait soupçonner quun Chanterre desroba ce Romans à Huon de Ville-neuve, qui en estoit le Trouverre, & inventeur ». Aussi faut-il bien distinguer le chanterre (le jongleur, lexécuteur) du trouverre (le poète, linventeur).

67 Voir Ronsard, « Ode au Roy » (1550), Œuvres complètes, éd. P. Laumonier, t. III, Paris, Didier, 1968, p. 33-34, v. 469-474 : « Prince, je tenvoie cette Ode, / Trafiquant mes vers à la mode / Que le marchant baille son bien, / Troque pour troq : toi qui es riche, / Toi roi de biens, ne soi point chiche / De changer ton present au mien ». Sur cet aspect, voir Th. Berriet, « Le prix du don : de léloge au blâme chez Pierre de Ronsard », COnTEXTES [en ligne], 5 / 2009, mis en ligne le 25 mai 2009, consulté le 01 avril 2018.

68 Voir Recueil, p. 147-148 : « Colin Muset fut un joueur de violle, qui alloit par les cours des Princes, ainsi que declare sa. i. chanson. Par la ii. il donne à connoistre que sa vielle nestoit pas pareille à celle dont jouent communément les aveugles du jourdhuy. car il dit, “Jalay a li el praelet : / “O tot la vielle & larchet. / “Si li ai chanté le muset. La figure dun Jougleor tenant ceste forme de vielle ou violle se voit en bosse au costé dextre du portail de lEglise de S. Julian des Menestriers, assis à Paris, en la rue S. Martin, representant un instrument communément appelé Rebec ».

69 Recueil, p. 94.

70 Voir supra n. 35.

71 Voir Recueil, p. 97.

72 Voir Recueil, p. 161.

73 Voir Recueil, p. 160 (notice 82 à propos du ménestrel Hugues de Braie-Selve) : « Ces plaids & gieux ou jeux souz lormel, estoyent une assemblee de dames & gentilshommes, où se tenoit comme un parlement de courtoisie & gentillesse pour y vuider plusieurs differens. Il y en avoit dautres en autres provinces, selon quil se trouvoit des seigneurs & dames de gentil esprit ».

74 Sur cette autre obsession du xvie siècle, voir J. Céard, « Lidée dencyclopédie à la Renaissance », Lencyclopédisme, éd. A. Becq, Paris, Aux Amateurs de Livres, 1991, p. 57-67.

75 Voir Recueil, p. 145-146.

76 Voir Recueil, p. 91 : « Jay appris de ce Guiot de Provins, le vrai nom. François de la pierre dAimant, de laquelle usent les mariniers à la conduite des navires allans sus mer. Car apres avoir parlé du Pole Arctique quil appelle Tramontane, il dit, “Icelle estoile ne se muet, / “Un art font qui mentir ne puet / “Par vertu de la Marinette, / “Une pierre laide & noirette / Ou li fer volontiers se joint ».

77 Voir Recueil, p. 198-199 (notice 125 sur Guillaume de Lorris) : « Maistre Guilleaume de Lorris eut peu estre mis avant sept ou huit de ces derniers, neust esté quil se trouve joint de composition, avec maistre Jehan de Meung. Ce Guilleaume de Lorris fut tresbon poete : & lequel amoureux dune dame, composa le livre intitulé le Romans de la Rose, contenant en somme les commandements dAmour, pour parvenir à jouissance : imitant Ouide (ainsi que je croy) en lart daimer : & du quel ces deux, ont pris la plus part de leur matiere : y meslant de la Philosophie morale ».

78 Lexemple le plus significatif est assurément le long développement sur lalexandrin, le vers français par excellence : voir Recueil, p. 85-88.

79 Voir supra n. 46.

80 Voir supra n. 31. Mais il sait modérer son enthousiasme ; ainsi dit-il à propos du Tournoi des Dames de Paris de Pierre Gentien : « Ce tournoy peut estre leu pour la memoire daucunes familles de Paris plus que pour excellence du stil » (Recueil, p. 208).

81 Voir Lombart, « Une “défense et illustration” de la poésie française médiévale », passim. Fauchet mentionne cependant des figures notables : « antithèse », « similitude », « translation » (métaphore ?), « comparaison », « figure » (allégorie).

82 Recueil, p. 111.

83 Voir Recueil, p. 105-106.

84 Sur lusage de ce terme, voir Recueil, p. 88 (Guiot de Provins), 93 (Thibaut de Marly), 108 (Huon de Méry), 167 (le Clerc de Vaudoy), 179 (Renaut dAndon), 180 (Huon le Roi de Cambrai), 197 (Jacquemart Giélée) et 206 (Jean de Meun).

85 Voir Recueil, p. 109 : « Il appelle en un endroit les espees acerines, qui est une epithete assez bon. “As grans espees acerines / “Fierent com feuvres sus enclume ».

86 Voir par exemple Recueil, p. 112-113 : « Le mot de pailles signifie un riche drap de soye. Et en Italie Correre il paglio est courre pour gaigner des pieces de drap dor, de veloux, soye, ou escarlate, que les seigneurs & republiques donnent à certains jours de lannee pour resjouir le peuple à voir courir les chevaux de barbarie. Quant au mot Gaut, il signifie bois, tesmoins ces vers du Romans de Regnaut de Montauban, “Eins charpentier en bos ne sot si charpenter, / “Ne mena telle noise en parfont Gaut ramé. & Goi en Breton signifie bois : Esperons dormier signifie de fer doré. Encores à Paris lon appelle sellier lormier celuy qui peut faire des selles garnies de boucles & fenures necessaires. Et lormerie en ce mestier, sappelle toute ferrure qui appartient au harnois dun cheval, hors le mors ».

87 Voir Recueil, p. 101 et 114.

88 Voir J. Céard, « Les transformations du genre du commentaire », LAutomne de la Renaissance (1580-1630), éd. J. Lafond et A. Stegmann, Paris, Vrin, 1981, p. 101-115.

89 Recueil, p. 86.

90 Voir supra n. 19.

91 Recueil, p. 111.

92 Voir S. Morawski, « The Basic Functions of Quotation », Signe. Langage. Culture, éd. A. J. Greimas, R. Jakobson et al., The Hague-Paris, Mouton, 1970, p. 690-705, ici p. 691.

93 Sur cette tension, qui caractérise surtout le premier xviie siècle, voir B. Beugnot, « Dialogue, entretien et citation à lépoque classique », Canadian Review of Comparative Literature, 3/1, 1976, p. 39-50.

94 Ne sont pas précisés pour linstant : lorigine de la citation (quel ms. Fauchet a-t-il copié ?) ; le lien aux Veilles ou aux autres ouvrages de Fauchet (qui fait circuler ses citations) ; la qualité de la transcription de Fauchet (leçon généralement fidèle, si lon met de côté la modernisation orthographique quasi systématique) ; la question des attributions fausses ou incertaines ; le renvoi à des éditions modernes (sauf dans quelques cas). Il na été tenu compte que du corpus premier mentionné par Fauchet, non des sources alléguées en seconde main (chroniques, etc.). De même, les citations en « vieux langage François-Germain », en provençal ou en latin, présentes surtout dans le livre i, nont pas été retenues. Nous restituons directement les noms des auteurs et les titres des ouvrages retenus par la tradition, non ceux utilisés par Fauchet.