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Classiques Garnier

De la rhétorique à la tectonique Mise en livre et construction du sens chez les lecteurs de Christine de Pizan (xviiie et xxie siècles)

  • Publication type: Journal article
  • Journal: Cahiers de recherches médiévales et humanistes / Journal of Medieval and Humanistic Studies
    2017 – 2, n° 34
    . varia
  • Author: Delale (Sarah)
  • Abstract: By bringing a contemporary reading to the testimonies of eighteenth century readers of medieval texts, the article demonstrates a contrast between two modes of reading. The first reading understands the text as a linear rhetoric. The second reconstructs a form of textual tectonics in order to discern the hidden meaning that lies below its surface. These two modes of reading are invited by the text, whose form is shaped by a perspective that is both typological (or syntagmatic) and hermeneutic (or tabular).
  • Pages: 259 to 272
  • Journal: Journal of Medieval and Humanistic Studies
  • CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN: 9782406077411
  • ISBN: 978-2-406-07741-1
  • ISSN: 2273-0893
  • DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-07741-1.p.0259
  • Publisher: Classiques Garnier
  • Online publication: 01-20-2018
  • Periodicity: Biannual
  • Language: French
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De la rhétorique à la tectonique

Mise en livre et construction du sens
chez les lecteurs de Christine de Pizan
(xviiie et xxie siècles)

Louise-Félicité de Keralio, qui publia partiellement les œuvres de Christine de Pizan dans sa Collection des meilleurs ouvrages françois, composés par des femmes, dédiée aux femmes françoises1, écrit en introduction à son édition du Livre de la mutacion de Fortune :

Il seroit impossible de rendre compte du plan des ouvrages de Christine, et lorsquelle commençoit à écrire, il est douteux quelle en eut un formé ni dans sa tête, ni sur le papier. Sans être de lavis de ceux qui croient les femmes incapables den former un, il faut avouer quau quatorzième siècle, les ouvrages, en général, paroissoient nen avoir aucun ; il sembloit quun auteur, quel quil fût, choisissoit un sujet et le traitoit, sans sembarrasser ensuite de choisir aussi les objets qui avoient un rapport direct et nécessaire avec lobjet principal. Il écrivoit tout ce que ses idées lui fournissoient, ne savoit circonscrire aucunes bornes autour de son sujet, et divaguoit perpétuellement, ne songeant à revenir à la chose essentielle quaprès de longs détours et des promenades, au milieu desquelles lesprit égaré oublioit sa véritable route, et sembloit ramené à de nouvelles idées, lorsque lauteur savisoit enfin de revenir lui-même à la première. Aussi les ouvrages de ce siècle sont-ils dune extrême longueur ; il falloit alors des volumes énormes pour dire ce quon a quelquefois exprimé depuis dans de simples brochures2.

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Il existe un écho intéressant entre ce jugement et une lecture fautive que Christine avait prévue pour ses textes. Opinion lui avait déclaré dans Le Livre de ladvision Cristine :

Et si te prophetise que ceste lecture sera de plusieurs tesmoingnee diversement. Les ungs sur le langaige donront leur sentence en plusieurs manieres : diront quil nest pas bien elegant, les autres que la composicion des materes est estrange. Et ceulx qui lentendront en diront bien3.

Comment concilier le point de vue de léditrice et traductrice éprouvée quest Mademoiselle de Keralio4 et lintérêt constant que Christine porte à la composition de ses ouvrages5 ? De la « circonscription des bornes » à la « composition des matières », un même souci de la forme du texte unit deux esthétiques, quand les sépare peut-être une conception divergente des genres littéraires.

Hans Robert Jauss avait proposé de définir le genre comme linscription dune œuvre dans un horizon dattente, qui « naurait aucun autre caractère de généralité que celui qui apparaît dans [sa] manifestation 261historique6 ». Mademoiselle de Keralio montre à quel point les jugements critiques sur le plan et la forme des œuvres se construisent sur des attentes propres à chaque époque. Face aux ouvrages médiévaux, léditrice cherche à reconstituer un parcours dauteur, quil soit parcours idéal, celui de la ligne droite, ou parcours incompris et condamné, celui du « détour » où lon « divague ». Cette reconstitution a pour principal guide lépaisseur textuelle : tout ouvrage est dabord purement et simplement un « volume ». Le mystère de lordonnance livresque simpose au lecteur à travers sa présentation, sa présence matérielle.

Rattacher un texte à un genre est donc toujours reconnaître un genre dans une forme, forme à la fois intellectuelle (cette « composition des matières » dont parlait Christine) et matérielle (quon pourrait appeler la mise en livre7 du texte). Cette forme apparaît pour elle-même, mais nest intelligible que par ressemblance avec des formes proches ou semblables. Le rôle de léditeur critique consiste à résorber son mystère en acclimatant son altérité. Par la reconnaissance de chemins discursifs attendus, le propos dauteur trouve sa place dans une carte littéraire où tout nouvel ouvrage intègre des constellations textuelles8. Opération destinée à se renouveler constamment, à chaque mutation des pratiques littéraires contemporaines qui modifie dautant lhorizon dattente.

Il existe de fait un écart dhorizon dattente important entre les lecteurs classiques et les lecteurs du xxie siècle. Cet écart se perçoit sur deux plans très différents. On peut dune part lappréhender à travers les jugements critiques portés par des époques distinctes sur la composition 262dune œuvre. Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V constitue un champ dexploration intéressant dans cette perspective puisquil a été publié à trois reprises durant le siècle des Lumières. En étudiant dautre part la manière dont les copistes du xviiie siècle rendent compte de la mise en livre dun manuscrit médiéval et ladaptent, il est possible de sinterroger sur la relation qui existe entre présentation matérielle dun texte et appréhension de sa forme littéraire. Comment la composition et la mise en livre informent-elle le genre textuel dans lesprit des lecteurs ?

Le Charles V : formes historiques
et horizon d
attente

Commandité par Philippe de Bourgogne, Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V est rattaché par la critique actuelle à la tradition des « miroirs des princes ». Louvrage, fondé sur une base historique, viserait à édifier les successeurs à la couronne de France. Cest ce rôle spéculaire qui pourrait expliquer le plan tripartite de louvrage, exaltant les vertus de Charles au détriment dun récit strictement chronologique. Dès la table des rubriques liminaire, le Charles V dévoile une construction thématique :

Cy commence la table des rubriches de cest present volume appellé le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles, Ve roy dycellui nom, fait et compilé par Cristine de Pizan, demoiselle, [] et est parti le dit livre en troys parties.

La premiere partie parle de noblece de courage en la personne du dit roy Charles, et quel chose est tel noblece.

Item, la seconde partie parle de chevalerie, et dont vint le nom, en appliquant à propos [de] la personne du roy Charles.

Item, la tierce partie parle de sagece, quel chose ce est, et de quoy elle est née9.

Un des principes décriture structurants du livre, pour Claire Le Ninan, consiste à comparer Charles V à des gouvernants du passé. Les anecdotes de la vie du souverain font diptyque avec des exempla et gagnent à travers eux un statut générique. Christine expliquerait cette méthode décriture dans le chapitre xxii de la première partie, où elle écrit du roi quon 263peut « ramener son eslue maniere dordre à legalité des nobles anciens bien renommez10 ». Comme lexplique Claire Le Ninan, « ces quelques mots annoncent [] lélaboration dun système analogique : le bon comportement du roi sera comparé à celui dun sage du passé11 ». Une partie de lécriture politique de Christine reposerait sur ces jeux de miroir :

Les exempla des miroirs des princes proposent essentiellement des modèles à imiter. Une relation se construit avec le lecteur qui linvite à se projeter dans le personnage mis en scène pour mieux le copier. Dans le Charles V, ce lien analogique est double. Découpée en courts récits, la vie du roi prend la forme dexempla qui, touche par touche, constituent le portrait de Charles V en souverain exemplaire, grâce à une comparaison entre ses actes et les faits de personnages antiques connus pour leur valeur morale et politique. Le roi est dans le même mouvement offert comme modèle au lecteur12.

La lecture du Charles V donna lieu au xviiie siècle à des interprétations très différentes. Il fut édité par labbé Lebeuf en 174313 et cette édition fut reprise sous forme condensée par deux autres éditeurs, Jean-Antoine Roucher14 et Mademoiselle de Keralio15. Les trois éditeurs adoptent unanimement le principe de lédition partielle, expurgée en particulier de tous les exempla antiques. Labbé Lebeuf note à propos de Christine :

Comme elle use quelquefois de redites, & quelle a cru devoir orner sa rélation de longues réflexions morales, & de traits tirés des Auteurs Grecs ou Romains, jai omis à dessein toutes ces choses qui nauroient fait que charger limpression16.

Le chapitre qui, selon Claire Le Ninan, explicite la structuration stylistique du texte en couples dexempla est lui-même supprimé par Lebeuf 264qui note à son emplacement : « chapitres xxi. & xxiiNe contiennent rien de considerable17 ». Jean-Antoine Rouchet approuve cette démarche en écrivant en introduction de son édition :

Nous nous sommes convaincus que les suppressions faites par lAbbé le Beuf ne tombent que sur des inutilités & sur des digressions absolument étrangères aux faits qui sont racontés. Christine de Pisan entraînée par le mauvais goût de son siècle, rappelle les exploits des héros de lantiquité dont elle forme des paralleles avec ceux de Charles ; ou bien elle disserte longuement sur des points de morale triviale & commune18.

« Inutilités », « digressions » : comment interpréter une terminologie qui pourrait à tort paraître naïve ? Il est nécessaire de la penser dans une perspective rhétorique, telle que la ressaisit Ugo Dionne :

Science de lorganisation du discours, pour laquelle le texte est dabord une surface à agencer, la rhétorique soppose à la tectonie. Art pratique, pragmatique, peu préoccupé de vérité transcendante, elle délaisse les significations camouflées au profit de la seule mécanique textuelle19.

Une telle conception de la narrativité privilégie « la linéarité du discours, spontanément associée à son intelligibilité20 » et

une parfaite concordance entre le titre dun texte et son « propos ». De cette conception littéraliste et nouée participe une condamnation générale du digressif. Lune des principales tâches du romancier consistera dès lors à gérer lexcursus, à justifier sa présence ou à lui bloquer laccès21.

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On comprend mieux, dans cette perspective, que Mademoiselle de Keralio ait condamné labsence de plan dans les œuvres de Christine, si par « plan » on veut désigner lagencement linéaire dun discours porté sur un sujet unique. Léditrice écrit dailleurs à propos de lorganisation du Charles V :

troublée par labondance des matières, par la fécondité des sujets que présente lhistoire, [Christine] ne put les classer, ni les mettre dans un ordre clair et facile ; et [] ne pouvant ou nosant former de plan, son génie interdit ne put lui fournir les moyens de créer un genre dont elle avoit peu de modèles dans sa nation22.

Lécart entre lhorizon dattente dun éditeur classique et celui dun universitaire du xxie siècle est double. Premièrement, la forme textuelle du Charles V est envisageable pour les classiques uniquement dans la perspective des genres historiques reconnus. Cest en ayant à lesprit une telle structure – celle des chroniques ou celles des annales23 – que Louise de Keralio peut écrire à propos de louvrage de Christine :

si elle avoit su bien choisir tout ce que Froissard et ces chroniques lui offroient, elle auroit composé vraiment une histoire de son prince, et non pas un panégyrique assez froid et surchargé dornemens ; car on ne peut pas même gratifier son ouvrage du titre dannales, lordre chronologique lui étant absolument inconnu. [] Christine auroit été capable de mieux faire, même dans ce genre difficile, si elle avoit employé à ce grand morceau un peu plus de temps, de recherches, de soins et de choix24.

Si le Charles V ne convainc pas, cest quon ne peut le rattacher à une de ces constellations textuelles qui dessineraient avant ou après lui, puis avec lui, le modèle dun genre. Linsatisfaction dun horizon dattente historiquement déterminé, la difficulté à reconnaître dans le texte une forme déjà connue, poussent à formaliser une corrélation entre unicum et imperfection, elles discréditent le texte en tant quétoile errante.

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Deuxièmement, une divergence apparaît dans la manière dappréhender la notion même de plan dun ouvrage. Puisque la rhétorique classique « délaisse les significations camouflées au profit de la seule mécanique textuelle25 », elle cherche à dérouler une interprétation linéaire du texte. En recourant à des outils dinterprétation herméneutique, où le sens sarticule dans un déchiffrement tabulaire, Claire Le Ninan aboutit quant à elle à une vision très différente de la même œuvre :

Le principe interprétatif qui régit lécriture et la lecture allégorique sapplique également, de façon différente, aux exempla []. Plus que la comparaison explicite, le véritable message, celui dont lenjeu par rapport au contexte contemporain est le plus important, et qui, pour cette raison, implique le plus lécrivaine, est à chercher dans le lien implicite faisant appel à lintelligence du lecteur et à sa capacité de déchiffrer la littérature de son temps26.

Cerner la forme dune œuvre revient ici à envisager le texte comme « un artifice syntaxico-sémantico-pragmatique dont linterprétation prévue fait partie de son propre processus génératif », comme « un système de nœuds ou de “joints” » où la coopération interprétative du lecteur « est attendue et stimulée27 ». La lecture intelligente correspond au déchiffrement allégorique des sens de lécriture : la signification se dissimule derrière le littéral en sy superposant. Dans les théories de la lecture, lherméneutique prend la place de la rhétorique : le texte sanalyse comme tectonique, comme espace construit sciemment sur des frottements de sens dont le lecteur doit tirer une dynamique interprétative. Quand on lit le jugement que porte Louise de Keralio sur lallégorie au quinzième siècle, on mesure le rejet auquel était promise une telle lecture dans le cadre de la poétique classique :

[L]es auteurs agréables du temps de Charles VI, ont, pour ainsi dire, tous passé leurs jours au milieu des esprits et des lutins. []. La fiction enveloppe le plus souvent des vérités très-utiles sous une plate allégorie, dont lesprit tâche perpétuellement à se débarrasser pour en venir à la morale, quil cherche et ne peut trouver, tant elle est entortillée dans les voiles quon a multipliés autour delle. [] Si quelquefois Esope et La Fontaine ont enveloppé sous dagréables fictions une morale utile, admirons en même-temps combien ces 267mêmes fictions sont simples, et combien lapplication la plus fine et la plus délicate en est facile aux esprits formés28.

Esthétique classique de la facilité et de la linéarité, qui soppose à une esthétique moderne de leffort, de lintelligence du lecteur : ce sont ces conceptions poétiques qui déterminent la perception des formes textuelles et les modalités de leur inclusion dans les genres littéraires.

Copier les manuscrits médiévaux :
mise en livre et économie narrative

Parmi les manuscrits conservés des œuvres de Christine de Pizan, beaucoup ont été supervisés par leur auteur. En tant quéditeur de ses textes, Christine a compilé plusieurs recueils autographes dont le premier, réalisé entre 1399 et 1402 et surnommé le « Livre de Christine », survit dans deux copies originales29. Au xviiie siècle, la copie actuellement conservée à la Bibliothèque nationale de France30 (L) était en la possession de Lacurne de Sainte-Palaye, membre de lAcadémie des Inscriptions et lune des principales figures du médiévisme à lépoque classique31. Lacurne de Sainte-Palaye faisait copier les manuscrits ne lui appartenant pas pour en conserver un exemplaire et recopier ceux quil possédait pour en lire plus aisément le contenu32. Il a fait réaliser deux copies du recueil de Christine de Pizan, désormais conservées sous 268les cotes BnF, Arsenal 329533 (A) et BnF, Moreau 168634 (M). Œuvre dune main plus hésitante, M laisse souvent des blancs à lemplacement de mots non retranscrits ; A a pu être réalisée plus tard, le scribe ayant alors peut-être sous les yeux loriginal et la copie M. Ces deux copies, réalisées à la plume et à lencre noire, cherchent à atteindre dans une certaine mesure la dimension dun fac-similé : elles transcrivent une colonne de manuscrit par page, A indiquant même en haut de la marge de gauche le numéro du folio correspondant dans L. Les deux copies laissent généralement un blanc lorsquune miniature figure dans loriginal, A explicitant dans une annotation marginale son emplacement35. Tous les blocs textuels ou presque sont conservés : il semble que les scribes aient considéré comme important cet agencement linéaire du texte. Dans les Epistres du debat sus le Rommant de la Rose, paragraphes, retraits et suscriptions sont reproduits : la présentation épistolaire fait toujours pleinement sens à cette époque36. Dans les textes versifiés, lorsquil existe dans le manuscrit original, le découpage strophique est conservé. Mais la copie monochrome nécessite dadapter les éléments de mise en livre manuscrite que sont les rubriques, les pieds-de-mouche ou les initiales.

Les rubriques, lorsquil sagit de titres, sont parfois sorties ou centrées. Pour en rendre compte, il arrive aussi que le copiste augmente le corps des premiers mots, suivant un usage du titrage en noir et blanc37.

Les initiales décorées et pieds-de-mouche, éléments qui ne relèvent pas de la macrostructure du texte mais plutôt de son articulation interne, ont en revanche connu un traitement très fluctuant. Tandis que M ne signale aucun pied-de-mouche, A sefforce de les noter à laide dun crochet38.

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Le rendu des initiales décorées reste flottant : elles sont assez rarement signalées39. À louverture des textes, lorsquune initiale de plusieurs unités de réglure avait provoqué dans le manuscrit original un retrait du texte, il arrive que le retrait soit reproduit sans que la transcription ne rende compte de linitiale40.

Quant aux initiales intratextuelles, qui articulent le propos au sein des ouvrages, elles provoquent de la part des copistes des réactions multiples. La copie du Dit de la pastoure41 dans la copie A témoigne de lindécision dun scribe face à un élément de mise en livre dont il ne semblait pas saisir le rôle42. Certaines initiales sont rendues par adaptation, un corps supérieur ayant été appliqué au mot entier quelles introduisaient (A, fol. 313r et 313v ; L, fol. 159r). Dautres sont rendues de façon peu ou très peu claire à laide dune majuscule et ne peuvent être discriminées avec certitude à la lecture (A, fol. 311r, 312r et 314r ; L, fol. 158r, 158v et 159v). Cette dernière adaptation introduit une confusion avec les majuscules qui rendent compte des lettres cadelées du manuscrit original, comme si le scribe ne percevait pas de différence signifiante entre les initiales décorées et les cadelures en termes de structuration textuelle (A, fol. 313r et 329r ; L, fol. 159r et 167v)43. Elle est également fragilisée par une tendance du scribe, en haut dune nouvelle page, à commencer mécaniquement sa transcription par une majuscule alors que le manuscrit original contient une minuscule (A, fol. 322v et 344v ; L, fol. 163v et 174v). En matière dinitiales décorées, il est donc impossible de percevoir une cohérence dans la pratique du copiste, de même quil serait impossible au lecteur de la copie A de reconstituer le programme de décoration du manuscrit original44.

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À quoi correspondent ces initiales dans Le Dit de la pastoure ? Il est possible de les interpréter comme un soulignement des articulations rhétoriques du propos, mais on peut aussi considérer certaines dentre elles comme les signes indicateurs dune signification cachée, cette parabole couverte que Christine mentionnait dans le prologue du dit :

Et mest avis, qui veult drois

Y visier, quon puet entendre

Qua aultre chose veult tendre

Que le texte ne desclot,

Car aucune fois on clot

En parabole couverte

Matiere a tous non ouverte

Qui semble estre truffe ou fable,

Ou sentence gist notable45.

Le récit retrace les amours dune bergère et dun chevalier et sinterrompt sans réelle conclusion narrative, la bergère demeurant sans nouvelles de son amant et attendant son retour. Plusieurs initiales attirent lattention du lecteur sur linsertion centrale de deux exempla rapportant les amours de Pâris et dŒnone, puis dHercule et dIole46. Or ces exempla peuvent être lus comme la matrice narrative de lhistoire de la bergère, destinée dès son origine, par lintertexte, à sachever sur labandon de la jeune femme par lamant, même si le récit se clôt sans actualiser cette fin probable. Lopération de lecture qui consiste à compléter un récit en apparence inachevé à laide dhistoires insérées en son sein est bien décrite par Alessia Marchiori :

[L]e syllogisme présupposé par la relecture de chaque mythe invite à interroger le texte dans ses interstices et ses silences, et à chercher la vérité dans la fusion entre les paroles de la pastoure et linsertion mythologique ; en ce sens, la parabole couverte des Héroïdes nen finit pas dêtre éloquente47.

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Là encore, les critiques modernes sappuient sur le présupposé que Christine de Pizan en appelait à lintelligence et à la culture du lecteur pour remplir un interstice du récit, pour faire la cartographie tectonique du texte et tirer une interprétation de ses lignes de faille.

Le copiste de A ne semble pourtant pas sensible à la valeur herméneutique des initiales décorées, qui lembarrassent dans sa copie et pour lesquelles, contrairement aux pieds-de-mouche, il ne cherche pas à inventer déquivalence graphique. Comme le signale Ugo Dionne à propos de lépoque classique, lidée que certains éléments de la mise en livre aient une destination principalement interprétative

suppose [] une conception du découpage narratif que peu de romanciers pratiquent alors : celle dune segmentation qui révélerait la structure immanente de louvrage, en soulignerait et en exprimerait le dessin, en épouserait les mouvements et les ruptures48.

Lévacuation des initiales pourrait bien venir dune indifférence à légard de la lecture tabulaire. Traiter un sujet correspond pour un lecteur « linéariste » à le circonscrire dans des bornes. Lexistence dune signalétique invitant le lecteur à sortir du texte proprement dit, pour effectuer ce quUmberto Eco appelle justement des « promenades inférentielles49 » vers lailleurs interprétatif, ne peut susciter chez lui quun désintérêt ou une condamnation du détour.

Conclusion

Rhétorique et tectonique : à la fourche séparant ces deux notions naît une différence fondamentale dappréhension littéraire, éloignant lâge classique du nôtre. À la fourche qui les réunit, on peut discerner deux modèles dorganisation textuelle non contradictoires et non exclusifs lun de lautre. La mise en livre médiévale posséderait deux fonctions : 272une fonction typologique, en tant quelle rapproche le texte transcrit de modèles existants, quelle en assure la lisibilité et lappréhension rhétorique et linéaire ; une fonction herméneutique, qui veillerait au bon fonctionnement de la signification en plaçant pour le futur lecteur les bornes dun itinéraire interprétatif. Si nous avons aujourdhui tendance à appuyer nos lectures critiques sur la seconde fonction, lidée dun balisage herméneutique du texte semble être demeurée opaque à certains siècles qui nous séparent du Moyen Âge.

Que conclure de ces constatations ? Que lhorizon dattente des hommes du Moyen Âge était plus proche du nôtre que de celui de lépoque classique ? Que la mode du structuralisme et de ses lectures héritées de la psychanalyse na fait que renouer avec lherméneutique chrétienne ? Quil faut au contraire nous méfier de nos lectures tabulaires des textes, de ces interprétations qui cherchent à sortir de la linéarité du discours pour entrer dans les structures secrètes dune pensée qui se dissimule ? Lunique certitude est que notre époque, sans quon puisse déterminer si elle comprend mieux le Moyen Âge, fait à celui-ci le crédit plus grand dune intelligence littéraire. Entre deux écueils, celui de la surinterprétation qui a tant travaillé les dernières décennies50 et celui dun refus de linterprétation (qui fait conclure à Mademoiselle de Keralio que Christine aurait « été capable de mieux faire51 »), le chemin le plus profitable, pour dangereux quil soit, reste toujours le plus généreux.

Sarah Delale

Université Paris-Sorbonne, EA 4349

« Étude et édition
des textes médiévaux »

1 Louise-Félicité de Keralio, Collection des meilleurs ouvrages françois composés par des femmes, dédiée aux femmes françoises, Paris, Lagrange, 13 t. (I, 1786, II-IV et X, 1787, IX et XII-XIV, 1788, V et VI, 1789, les t. VII et VIII nont jamais paru). Ce projet éditorial visait à publier les œuvres de femmes ayant contribué à lélaboration et lexcellence de la littérature française. Seuls des textes dHéloïse, Christine de Pizan, Marguerite de Navarre, Louise Labé et Madame de Sévigné ont paru. Le projet initial, qui prévoyait 36 tomes, incluait Madame de La Fayette et des auteurs du xviiie siècle comme Madame Dacier, mais il sest interrompu après 1789. Le commentaire et lédition des œuvres de Christine de Pizan occupent les t. II (p. 108-467) et III (p. 1-132).

2 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. III, 1787, p. 111-112.

3 Christine de Pizan, Le Livre de ladvision Cristine, éd. Ch. Reno et L. Dulac, Paris, Champion, 2001, p. 89-90 : Opinion prophétise à la narratrice la réception réservée à cet ouvrage.

4 Sur ce personnage, on pourra lire G. Mazel, « Louise de Kéralio et Pierre François Robert : précurseurs de lidée républicaine », Bulletin de la société de lhistoire de Paris et de lÎle-de-France, 1989, p. 163-237 et A. Geffroy, « Louise de Keralio, traductrice, éditrice, historienne et journaliste, avant 1789 », Lectrices dancien régime, éd. I. Brouard-Arends, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2003, p. 103-112. Sur lédition des œuvres de Christine dans la Collection, voir Cl. Le Brun-Gouanvic, « Mademoiselle de Keralio, commentatrice de Christine de Pizan au xviiie siècle, ou la rencontre de deux femmes savantes », Christine de Pizan. Une femme de science, une femme de lettres, éd. J. Dor et M.-É. Henneau, Paris, Champion, 2008, p. 325-341.

5 Cet intérêt de lauteur à légard de lordonnance livresque, visible dans bien des passages de ses œuvres, se rencontre en particulier dans le troisième chapitre de la première partie du Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, intitulé « Cy dit la cause, pour quoy ce present volume sera traittié en distinction de trois parties » (Christine de Pisan, Le livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, éd. S. Solente, Paris, Champion, Publications pour la Société de lhistoire de France, 2 t., 1936-1940, ici t. I, p. 9). Christine a réfléchi aux relations entre construction du sens et organisation narrative dans Le Livre des epistres du debat sus le Rommant de la Rose (éd. A. Valentini, Paris, Classiques Garnier, 2014). À ce sujet, on pourra lire R. Brown-Grant, « A new context for reading the “Querelle de la Rose” : Christine de Pizan and medieval literary theory », Au Champ des escriptures, Paris, Champion, 2000, p. 581-595 (une version plus étendue de cet article constitue le premier chapitre de R. Brown-Grant, Christine de Pizan and the Moral Defence of Women, Cambridge / New York, Cambridge University Press, 1999, p. 7-51).

6 H. R. Jauss, « Littérature médiévale et théorie des genres », trad. É. Kaufholz, Théorie des genres, éd. Gérard Genette et alii, Paris, Le Seuil, 1986, p. 37-76, ici p. 42 (cet article a dabord paru dans la revue Poétique, 1, 1970, p. 79-101, et donne la traduction abrégée du chapitre « IV. Theorie der Gattungen und Literatur des Mittelalters », Grundriss der romanischen Literaturen des Mittelalters, vol. I : Généralités, éd. H. R. Jauss, E. Köhler et alii, Heidelberg, Carl Winter, 1972, p. 107-138).

7 La nature du « paratexte » et son rapport à la disposition restent encore aujourdhui problématiques sur le plan critique, outre que la notion a été conçue en fonction du livre imprimé (à ce sujet, voir U. Dionne, La Voie aux chapitres. Poétique de la disposition romanesque, Paris, Le Seuil, 2008, p. 201-205). La dénomination de mise en livre permet de développer à léchelle dun ouvrage entier les outils qui ont enrichi létude de la mise en texte et de la mise en page dans les manuscrits, en particulier depuis la publication de Mise en page et mise en texte du livre manuscrit, éd. H.-J. Martin et J. Vezin, Paris, Cercle de la librairie, Promodis, 1990.

8 Sur la pensée en réseaux, voir G. Deleuze et F. Guattari, Capitalisme et Schizophrénie. Mille Plateaux, Paris, Minuit, 1980, p. 9-37. Voir aussi M. Foucault, LArchéologie du savoir, Paris, Gallimard, 1969.

9 Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, t. I, p. 1.

10 Op. cit., p. 59.

11 Cl. Le Ninan, Le Sage Roi et la clergesse. LÉcriture du politique dans lœuvre de Christine de Pizan, Paris, Champion, 2013, p. 356.

12 Op. cit., p. 333.

13 Abbé J. Lebeuf, Dissertations sur lhistoire ecclésiastique et civile de Paris suivies de plusieurs éclaircissements sur lhistoire de Paris, Paris, Lambert & Durand, t. III, 1743, p. 82-389. Sur les éditions de textes médiévaux à lépoque classique, voir Accès aux textes médiévaux, de la fin du Moyen Âge au xviiie siècle, éd. M. Guéret-Laferté et Cl. Poulouin, Paris, Champion, 2012, et en particulier les contributions dE. Bury, A. Montoya, H. Duranton, F. Bessire, V. Sigu et M. Colombo Timelli.

14 Jean-Antoine Roucher, Collection universelle des mémoires particuliers relatifs à lHistoire de France, Londres & Paris, rue dAnjou-Dauphine no 6, t. V, 1785.

15 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. II, p. 171-296.

16 Dissertations sur lhistoire ecclésiastique et civile, p. 101-102.

17 Dissertations sur lhistoire ecclésiastique et civile, p. 124.

18 Collection universelle des mémoires particuliers, p. 89.

19 U. Dionne, La Voie aux chapitres, p. 18.

20 U. Dionne, La Voie aux chapitres, p. 457.

21 Ibid. Christine définit la rhétorique comme un art dagencement linéaire du discours, touchant lordre du propos. La discipline « nous enseigne ordener / Noz parolles et raisonner / Par mesure et par ordre attraict, / Selon le propos quon retrait ; / Cest lordenance des parleurs / De beau lengage et des dicteurs » (Christine de Pisan, Le Livre de la mutacion de fortune, éd. Suzanne Solente, Paris, Picard, SATF, 1959-1964, 4 t., ici t. II, 1959, v. 7977-7982) ; elle « enseigne la fourme de savoir mettre les paroles en ordre de beau lengage » (Le livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, t. II, p. 34). On peut dans cette mesure lopposer à la « poesie », puisquelle constitue un discours visant la clarté, le sens évident et univoque : « si que dit saint Thomas “comme il appere que Aristote vueille clerement enseigner la verité, et par consequent impugner Platon, Socrates et les autres, qui ont parlé couvert, et ont en ombre escriptes leurs doctrines, toutefois il ne dispute à eulx selon verité occulte, mais selon le sens apparent par dehors” » (Le livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V, t. II, p. 178).

22 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. II, p. 241-242.

23 Sur la faveur des chroniques médiévales auprès des lecteurs classiques, voir H. Duranton, « Éditer la littérature médiévale au temps des Lumières », Accès aux textes médiévaux, p. 357-371, en particulier p. 364-365.

24 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. II, p. 295-296. Pour Claire Le Ninan en revanche, Christine montre dans le Charles V « quelle a assimilé les traités politiques faisant autorité pour les réinvestir dans une forme biographique où le fait historique narré ne constitue que la manifestation concrète dun système de valeurs le dépassant » (Cl. Le Ninan, Le Sage Roi et la clergesse, p. 353).

25 U. Dionne, La Voie aux chapitres, p. 18.

26 Cl. Le Ninan, Le Sage Roi et la clergesse, p. 373.

27 U. Eco, Lector in fabula. Le rôle du lecteur ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, trad. M. Bouzaher, Paris, Librairie générale française, 1989, p. 84.

28 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. III, p. 1-2.

29 Il sagit des manuscrits BnF fr.12779 et Chantilly, Musée Condé 492-493.

30 Ce manuscrit est désormais numérisé et consultable sur Gallica : http://gallica.bnf.fr.

31 Létude de référence sur cet érudit est toujours celle de L. Gossman, Medievalism and the ideologies of the Enlightenment. The World and Work of La Curne de Sainte-Palaye, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1968. Voir aussi M. Colombo-Timelli, « La réception du Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes à la fin du xviiie siècle : La Curne de Sainte-Palaye et la Bibliothèque Universelle des Romans », Accès aux textes médiévaux, p. 455-469 et V. Sigu, Médiévisme et Lumières. Le Moyen Âge dans la “Bibliothèque universelle des romans”, Oxford, Voltaire Foundation, 2013.

32 Sur la lecture et la copie de manuscrits médiévaux par Lacurne, voir M. Colombo-Timelli, « La réception du Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes », p. 468-469 et V. Sigu, Médiévisme et Lumières, p. 64, 73 et 135. Sur le rapport de Lacurne à la littérature médiévale, voir L. Gossman, Medievalism and the ideologies of the Enlightenment, chapitre 7, « The Publication of medieval texts », p. 254-267.

33 La copie est numérisée et consultable sur Gallica.

34 La copie est numérisée et consultable sur Gallica.

35 Cest le cas pour la copie du Dit des trois jugemens, A fol. 151v (« Place de la mignature » ; pas de mention dans M, fol. 149v ; L fol. 77v), des Notables moraulx, A fol. 294v (« icy est la place de la Mignature » ; pas de mention dans M, fol. 279r ; L fol. 149v) et du Dit de la Pastoure, A fol. 309v (« icy est la mignature » ; ce texte ne figure pas dans ; L fol. 157r).

36 Pour un exemple, voir le retrait conservé pour la signature de Christine dans A (fol. 280r) et dans M (fol. 290r) ; L fol. 142r.

37 Voir par exemple la rubrique liminaire des Epistres du debat sus le Rommant de la Rose dans M, fol. 289r (A nutilise pas cet équivalent typographique, fol. 279r) ; L fol. 141v.

38 Voir le traitement des pieds-de-mouche des Notables moraulx (L, fol. 149v sq.) dans A (fol. 294v sq.) et dans M (fol. 279rsq.).

39 On pourra sen convaincre en observant le rendu aléatoire de linitiale liminaire de lEpistre au dieu dAmours (L fol. 65v ; A fol. 128r ; M fol. 126r) ou du Dit de la rose (L fol. 72r ; A fol. 141r ; M fol. 139r).

40 Voir en particulier le début du Dit des trois jugemens (L fol. 77v ; A fol. 151v ; M fol. 149v).

41 Le Dit de la Pastoure, dans Œuvres poétiques de Christine de Pisan, éd. Maurice Roy Paris, Firmin-Didot, SATF, 3 t., 1886-1896, t. II, 1891, p. 223-294.

42 Seul A contient une copie de ce texte.

43 Ces cadelures, qui prolongent le jambage supérieur des lettres situées à la première ligne décriture dune colonne, sont courantes dans les manuscrits originaux de Christine de Pizan. On en trouvera des exemples dans G. Ouy, Ch. Reno, I. Villela-Petit et al., Album Christine de Pizan, Turnhout, Brepols, 2012, p. 223, 432-433 et 463.

44 On peut citer également un cas où le rendu de linitiale de L a été oublié puis réintroduit par un repassage de la lettre : A, fol. 324r ; L, fol. 164v.

45 Le Dit de la pastoure, v. 24-32.

46 Le Dit de la pastoure, initiales précédant les v. 1324 (« Ne te souvient il, Marote » ; L, fol. 167v) et 1444 (« Adonc a celle respons » ; L, fol. 168r).

47 A. Marchiori, « La parabole couverte delle Heroides : intertestualità ovidiane nel Dit de la Pastoure di Christine de Pizan », Christine de Pizan. La Scrittrice e la Città / LÉcrivaine et la Ville / The Woman Writer and the City, Florence, Alinea Editrice, 2013, p. 175-184, ici p. 184 : « il sillogismo presupposto nella rilettura di ogni mito invita a spremere il testo nei suoi interstizi e nei suoi silenzi e a cercare la verità nella fusione tra il detto della pastora e linserzione mitologica ; in questo senso, la parabole couverte delle Heroides non finisce mai di essere eloquente » (nous traduisons). Pour le développement dune même interprétation « interstitielle », nous nous permettons de renvoyer à notre article : « Guillaume de Lorris, contre-exemple de Jean de Meun. Christine de Pizan et le modèle littéraire du Roman de la Rose », Camenulae, 13, 2015, p. 1-21.

48 U. Dionne, La Voie aux chapitres, p. 107.

49 U. Eco, Lector in fabula, p. 150-153.

50 U. Eco, Les Limites de linterprétation, trad. M. Bouzaher, Paris, Librairie générale française, 1994.

51 Collection des meilleurs ouvrages françois, t. II, p. 295.