Aller au contenu

Classiques Garnier

Introduction [de la première partie]

17

Introduction

Tous les contributeurs à cet hommage gardent le souvenir de leur première rencontre avec Elizabeth Brown. Pour nombre dentre nous, cette rencontre fut dabord livresque. Ce fut un contact ébloui avec une pensée aussi vive que ferme, avec des idées aussi neuves que cohérentes, avec un esprit critique acéré nhésitant pas à déconstruire les récits des chroniqueurs aussi bien que les hypothèses hasardeuses de lhistoriographie. Ce fut une plongée étourdissante dans des notes foisonnantes, révélant références bibliographiques obscures et sources jusque-là inédites ou inconnues. Et, une fois sa respiration reprise, restait au lecteur un léger sentiment dincrédulité : était-il possible quune seule personne possédât une connaissance aussi aboutie, une maîtrise aussi complète de sujets aussi vastes ?

La réponse à cette question était apportée par une rencontre avec lElizabeth Brown de chair et dos – Peggy, comme elle invite aussitôt ses interlocuteurs à lappeler –, rencontre qui na généralement pas tardé : qui fréquente les archives ou les bibliothèques, en France, mais aussi dans quelque lieu dEurope où ont pu échouer des documents produits par ou pour les souverains français et leur entourage, ne peut manquer de croiser un jour sa route. On est alors frappé par lenthousiasme indéfectible, par la curiosité insatiable que manifeste Peggy pour son interlocuteur et ses recherches. Si les échanges ainsi lancés peuvent être interrompus un temps par la nécessité de poursuivre la consultation dun manuscrit ou la transcription dune pièce darchive, ils rebondissent bientôt, nourris par une soif de savoir et une générosité aussi inépuisables que les pistes de recherche et les renseignements inédits que Peggy offre à chacun dexplorer, ouvrant ainsi une dette quaucun dentre nous ne parvient entièrement à payer de retour.

Le dialogue se poursuit aujourdhui encore, des années après avoir été entamé, et il est toujours aussi fécond. Pour les médiévistes et modernistes français, Peggy Brown ne joue pas seulement un rôle précieux de passeur de lhistoriographie américaine ; elle est aussi une figure incontournable de

18

la recherche en France même, comme latteste sa constante participation à la vie scientifique de ce côté de lAtlantique. Ce nétait donc que justice de reconnaître enfin notre dette à son égard. Cest à cette fin quune journée a été organisée le samedi 15 juin 2013, à luniversité Paris-Sorbonne, dans le cadre des activités du groupe de travail « Les Capétiens et leur royaume (987-1328) » (GDR 3433 du CNRS, dirigé par Dominique Barthélemy), avec le soutien du Centre Roland-Mousnier (UMR 8596, sous la direction de Denis Crouzet et dÉlisabeth Crouzet-Pavan). Nous remercions tous les participants à cette journée, au premier rang desquels Philippe Contamine et Françoise Hildesheimer, qui en ont assuré la présidence avec bienveillance, et, bien entendu, Peggy Brown elle-même, qui a apporté un éclairage complémentaire aux interventions et nous a aimablement transmis la liste complète de ses travaux, publiée ici. Notre reconnaissance va enfin aux Cahiers de recherches médiévales et humanistes qui ont accepté daccueillir les actes de cette journée.

Les auteurs dont les contributions sont réunies ici se sont employés à rappeler quelques-uns des apports de Peggy Brown à la recherche sur la France de la fin du Moyen Âge et de la première modernité, qui construisant une réflexion sur quelques propositions et hypothèses de Peggy, qui dressant un bilan historiographique de ses travaux dans lun des multiples domaines quelle a pu aborder. Mais, avouons-le, son œuvre foisonnante ne se laisse pas aisément synthétiser. Pis, cest lui faire violence que de se risquer à opérer des divisions méthodiques en son sein, alors même quelle forme un tout dune remarquable cohérence. Puisse cependant Peggy nous pardonner nos choix subjectifs et puisse ce volume lui témoigner toute notre estime et notre amitié.

Olivier Canteaut

École nationale des chartes

Centre Jean-Mabillon (EA 3624)

Xavier Hélary

Université Lyon III – Jean-Moulin

CIHAM (UMR 5648)