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Classiques Garnier

Comptes-rendus

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COMPTES RENDUS








CADEDDU JOSeph, KAUFFER Maurice et KEROMNES Yvon (dlr.), La gastronomie à l'ère du numérique. Regards linguistiques et économiques sur l'Allemagne, la France et l'Italie, Tübingen, Stauf- fenburg, 2019, coll. Romanistik 3, 343 pages — ISBN 978-3-95809- 802-2.

Cet ouvrage réunit une sélection de communications présen- tées lors d'un colloque international qui s'est tenu à l'ATILF les 3 et 5 décembre 2015, mais qui intégrait, en plus des trois pays cités dans le titre de l'ouvrage, le Royaume-Uni et les États-Unis. Le projet est né du double constat que la gastronomie, pourtant classée depuis 2010 au patrimoine immatériel de l'UNESCO, était un domaine jusqu'à présent peu exploré par la linguistique, et que les travaux scientifiques portaient davantage sur l'alimentation et la cuisine et venaient plus souvent des anthropologues, des socio- logues ou encore des historiens. Or la gastronomie —définie dans l'usage comme l'«ensemble des règles qui constituent l'art de faire bonne chère »par le Dictionnaire de l'Académie française —s'est en quelque sorte démocratisée et « a massivement investi l'espace public » (p. 7). Elle présente donc la particularité de concerner un public très large (spécialistes, experts, restaurateurs, amateurs...)
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et de s'affirmer aujourd'hui comme un domaine de spécialité à part entière. D'où l'initiative et l'intérêt d'approfondir, dans une approche interdisciplinaire, la terminologie, le discours et l'image de la gastronomie moderne.
Les directeurs du colloque et de l'ouvrage, Joseph Cadeddu, Maurice Kauffer et Yvon Keromnes, ont suivi deux directions com- plémentaires : la première est celle de l'analyse linguistique, la seconde porte sur les aspects économiques et commerciaux de la gastronomie moderne (food business) sans toutefois jamais s'écar- ter de la première. Les approches choisies dans ce volume l'ont été soit dans une perspective monolingue, soit dans une perspec- tive plurilingue et contrastive entre trois langues, l'allemand, le français et l'italien. De plus, une place privilégiée a été accordée à l'importance des technologies numériques dans les analyses lin- guistiques et économiques de la gastronomie, aussi bien en ce qui concerne les moyens utilisés que les domaines abordés :corpus électroniques écrits ou oraux, présence et discours de la gastro- nomie et des restaurants gastronomiques sur internet et dans les réseaux sociaux.
Les contributions sont essentiellement réparties en trois par- ties, la première étant de loin la plus développée, tandis que la dernière apparaît comme un complément.
La première partie, «Entre langue et discours », regroupe les approches spécifiquement linguistiques. La grammaire du nom vin, et plus particulièrement sa distribution avec les déterminants, est analysée par Georges Kleiber dans le prolongement d'études an- térieures qu'il a menées sur l'opposition massif /comptable. Il en conclut que le comportement de vin avec ses déterminants s'écarte du comportement des autres noms de «matières », lui attribuant une interprétation «comptable » de vin. Viennent ensuite une ana- lysethéorique mais aussi quantitative et empirique des emprunts et internationalismes dans l'allemand de la gastronomie (Maurice Kauffer), une contribution sur la poétique des dénominations des plats de la haute gastronomie française (Eva Levric) et une analyse des discours destinés à faire consommer des aliments biologiques
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(Anne-Marie Nahon-Ralmondez). C'est également le statut d' ex- pert, souvent revendiqué par des «amateurs », qui est mis à l'étude, soit à travers sa négociation sur les forums, soit à travers l'analyse des discours sur le vin tenus par un même professionnel (en l'oc- currence un sommelier) devant des groupes de nature différente (jury d'experts ou table de convives) (Nadine Rentel).
La deuxième partie, «Gastronomie contrastive » ,s'ouvre sur l'analyse des pages du portail «Programme Alimentation et Gastro- nomie » (Gastropédie) de Wikipédia consacrées à la cuisine sarde, en relation avec l'objectif du programme d'apporter une aide aux rédacteurs qui sont invités à offrir aux lecteurs « le meilleur de la littérature encyclopédique dans ces domaines » (p. 139). Quatre termes permettent d'illustrer trois cas différents : panada, fregula et amarettos, casu marzu, avec des regards croisés entre l'italien, le français, l'espagnol et l'anglais (Francesca Chessa et Cosimo De Giovanni). Une analyse onomastique des noms de blogs culi- naires français et allemands montre qu'ils présentent des structures morphosyntaxiques récurrentes. Une seconde étape consiste à en dégager les champs lexicaux les plus significatifs (Stéphane Hardy). Dans une perspective également contrastive, la problématique de la traduction de textes relevant de la terminologie gastronomique est envisagée ici dans la littérature à partir des désignations de la viande dans un roman de Joy Sorman, Comme une bête, avec une focalisation originale et minutieuse sur le terme bavette (Valeria Zotti).
La troisième partie, «Gastronomie et communication », est consacrée à la gastronomie à travers l'image, à partir de documents, qu'ils soient télévisuels ou numériques destinés à l'enseignement. Une première étude porte sur l'univers télévisé de la marque Riso Gallo, l'une des plus anciennes entreprises rizicoles d'Italie, à travers des spots publicitaires accessibles sur le site internet de l'entreprise. Y sont analysés les codes graphiques, iconiques, chro- matiques ainsi que les contenus énonciatifs du corpus rassemblé. S'y joint une approche diachronique —qu'il convient de remarquer ici tant cette dimension, d'une manière générale, est encore nou-
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velle en terminologie) —qui analyse l'évolution des années 1960 à aujourd'hui (Joseph Cadeddu et Sophia Huynh-Quan-Chiêu). Le dialecte n'est pas absent du contexte linguistique et une contribu- tion s'intéresse aux raisons du succès de l'émission culinaire A Gueter (`Bon [appétit]') du dynamique André Muller, diffusée en dialecte alsacien sur France 3 Alsace et accessible aussi sur internet. La valorisation à la fois du patrimoine culinaire et du patrimoine linguistique alsaciens, alliée au recours du support audiovisuel, assurent à l'émission un succès indéniable (Pascale Erhart). Parmi les nombreuses évolutions de la gastronomie, le végétarisme et ses déclinaisons se popularisent et séduisent de plus en plus les grands cuisiniers, qui utilisent tous internet pour communiquer sur leurs créations et rendre plus visible cette tendance. La comparaison des cartes de deux chefs inspirés par une «cuisine végétale », un Français et un Autrichien, permet, dans une perspective sémiotique, d' analyser le discours, le rapport à la nature et à la cuisine, le rapport au client et montre que, dans ce domaine où la nouveauté toujours en évolution produit un effet niche, le chef-cuisinier pourra, «s'il passe à la postérité, devenir prescripteur et participer à la création de la norme. » (p. 258) (Sylvain Farge). Concept encore plus ré- cemment formalisé, le food porn exprime une sexualisation de la gastronomie. Un article retrace l'historique de cet «imaginaire cu- linaire» et analyse, dans une approche socio-discursive, un corpus de 30 000 tweets (français et anglais à part égale) afin d'en dégager les principales caractéristiques, celles-ci s'inscrivant « au coeur d'un ensemble de représentations sociales liées à la nourriture» (p. 276) (Laurence Rosier et Renaud Maes). Cette troisième partie se clôt sur une perspective didactique :l'image de la gastronomie véhiculée par les TIGE en classe de FLE. L'analyse linguistique et l'étude des stratégies discursives s'appuient sur un corpus de textes et vidéos de TV5 Monde ainsi que d'extraits de revues et manuels destinés à l'enseignement du FLE (Nathalie Van der Sanden).

1 Le présent numéro des Cahiers de lexicologie (n° 118), dirigé par Maria Teresa
Zanola, montre que l'évolution est cependant bien en cours.
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Enfin, une quatrième partie, qui se présente comme une sorte d'annexe, s'intéresse plus concrètement aux regards des profession- nels, avec deux interviews du côté de l'Italie (le vin et la marque Riso Gallo), suivies d'une contribution sur la formation hôtelière à l'ère du numérique.
Précisons que chaque article est suivi de sa bibliographie, ce que, pour des articles aussi diversifiés et cependant complémen- taires et formant un ensemble très cohérent, nous trouvons fort appréciable. Cette pratique permet à chaque contribution de faire l'objet d'une lecture autonome.
Cet ouvrage aborde de manière très pertinente les principaux aspects du domaine de spécialité que représente aujourd'hui à part entière la gastronomie. Parmi les principales spécificités qui s'en dégagent, on notera notamment un lexique très créatif, en constante évolution, et des modalités discursives qui lui sont propres, plei- nement mis en valeur par les moyens numériques actuels. Il s'agit d'un domaine qui méritait bien l'attention des linguistes et ce vo- lume, de plus très agréable à lire, ouvre de belles perspectives pour des études ultérieures.



Christine JacQuET PFau

LT2D —Lexiques, Textes, Discours, Dictionnaires
CY Cergy Paris Université
ch. j acquet-pfau @orange. fr

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FAURE Pascaline (dir.), Les langues de la médecine —Analyse com- parative et interlingue, Bruxelles, Peter Lang, 2021, 136 pages ISBN 978-2-8076-1645-5.
L'ouvrage est le fruit de la journée d'étude tenue le 28 sep- tembre 2018 à Paris (Sorbonne Université et Centre de Linguistique en Sorbonne, CeLiSo) La créativité lexicale de la langue médicale actuelle :Analyse comparative interlingue. Il est préfacé par John Humbley. Pascaline Faure souligne dans l'introduction l'intérêt que présente la langue de la médecine, avec sa «créativité lexicale remarquable :néologismes, emprunts, euphémismes, métaphores, métonymies, abréviations et codes ». Est pointé d'emblée le rôle, dès le lendemain de la seconde guerre mondiale, de l'anglais : il s'agit en somme des «langues médicales actuelles et futures» au centre desquelles est montrée précisément cette grande influence de l'anglais. Mais la richesse de l'ensemble, on le verra, tient aussi à de nombreux et judicieux rappels historiques, notamment le latin, le grec ou l'arabe.
Les chapitres au coeur de l'ouvrage sont L'anglais médical, par Pascaline Faure, Le français médical, par Serge Quérin, le Medical German, par Gabriele Berghammer, le Medical Spanish, par Carmen Quijada Diez, L'italien médical, par Rosa Piro, et le Medical Portuguese, par Ana Julia Perrotti-Garcia. Ils présentent des caractéristiques, langue par langue, de ce que P. Faure annonce donc comme langue de la médecine ou comme langues médicales actuelles et futures, ou, pour reprendre le titre, Les langues de la médecine, Analyse comparative interlingue. Le projet semble vaste :avec Les langues de la médecine on peut s'attendre à une étude de la langue médicale en général, dans différents idiomes, variantes culturelles etniveaux delangue — il s' agirait là d' une entre- prise plutôt gigantesque. Surtout qu'il s'y ajoute la communication d'interface médecin-patient annoncée dans la préface, et à travers plusieurs époques. Peut-être des formules telles «Langues de la médecine », ou «Des langues de la médecine », moins englobantes, eussent-elles été possibles également.
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Le projet d'origine semblait légèrement différent : le titre de la journée proposait langue médicale actuelle et analyse comparative. John Humbley préfere annoncer, de manière plus prudente, que le volume est «une défense et illustration des discours médicaux français, allemand, espagnol, portugais et italien sans bien sûr oublier ni l'anglais ni les autres langues ».
L'ouvrage illustre la variété de l'expression médicale, exem- plifiant la communication entre médecins, ou entre non experts du domaine, ou entre les uns et les autres, ainsi que des différences entre langues orale et écrite. Chaque chapitre présente son lot de témoignages dans chacune des langues étudiées.
Le riche texte de Pascaline Faure foisonne de données et sou- ligne, pour l'anglais notamment, l'importance de l'abréviation, de la discrétion —élément intéressant et que l'on ne voit pas souvent mentionné — de l'anthroponymie, de l'orthonymie, de la langue du patient, de la langue courante et des euphémismes, ou encore de la motivation des termes. Elle évoque les approximations terminolo- giques, malgré une volonté de dénomination univoque.
Serge Quérin analyse, pour le français, la composition, la sy- nonymie, la dérivation et la simplification des termes dérivés ;les anthroponymes, toponymes, acronymes et sigles ;les néologismes et équivalents d'anglicismes, mais aussi les régionalismes médi- caux et les emprunts ;les noms des médicaments, la question de la terminologie anatomique et celle de la nomenclature des troubles mentaux, mais aussi la phraséologie, les métonymies et métaphores, et enfin les codes de la langue médicale. Rappelons que la termino- logie officielle française tient compte des travaux terminologiques québécois.
Plus spécifiquement historique, l'analyse de Gabriele Ber- ghammer pour l'allemand présente le rôle de l'histoire et de la culture dans cette langue, à travers un chapitre où sont abordées la situation en Grèce ancienne, la situation de la médecine grecque, la Renaissance... Au Moyen-Âge, on traduisait du latin. À partir du xve siècle, des travaux se firent en allemand. Des centaines de termes de spécialité furent proposés au public. L'auteur relate le
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cas, plus récemment, d'éponymes remplacés en raison du nazisme des personnes dont le nom compose ces termes. L'étude détaille l'évolution du langage médical en allemand sous ses différentes formes, y compris le cas des termes d'allemand courant qui se sont spécialisés.
Carmen Quijada Diez rappelle, dans le contexte historique de l'espagnol médical, des travaux critiquant clairement l'hégémonie de l'anglais. La dualité entre sources grecques et latines de termes médicaux a permis d'établir une différence commode entre termes de spécialistes et termes communs, les premiers d'origine grecque, les seconds d'origine latine. Sont rappelés les néologies de forme, de sens, d'emprunt, ou syntaxique, les éponymes, abréviations et acronymes, ainsi que la place de l'espagnol médical dans le monde. Rien n'est fait, en Espagne, pour la promotion de l'espagnol par rapport à l' anglais.
L'italien médical est présenté par Rosa Piro, dans l'histoire d'abord, puis avec un intérêt particulier porté au Lessico Medico Italiano : on y présente les expressions polylexicales, les éponymes, les toponymes, les noms de maladies, et, de manière originale, une étude spécifique des noms des bruits du corps. Il apparaît finalement que l'italien est resté productif, même si, par ailleurs, l'influence de l'anglais, non étudié dans ces pages, reste forte.
Ana Julia Perrotti-Garcia analyse le portugais médical du Bré- sil, en détaillant les questions des affixes, des abréviations, des anthroponymes, des emprunts, de la phraséologie et des colloca- tions, des euphémismes, de la dualité entre termes techniques du médecin et termes de la langue des patients.
Il aurait pu être utile d'ajouter à l'ouvrage, en guise de conclu- sion, des comparaisons entre les études dans les six langues ana- lysées, pour ce qui est des processus et des résultats décrits. C'est d'ailleurs ce qu'amorce John Humbley en fin de préface, lorsqu'il souligne les ressemblances entre les situations des différentes com- munautés linguistiques présentées :les besoins de communication entre médecins et patients vont grandissant, et le tout serait facilité par une terminologie d'interface adéquate. Il s'agit aussi de cette
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prépondérance bien connue de l'anglais, et bien exemplifiée dans l'ouvrage, mais qui, finalement, encourage elle-même la créati- vité lexicale. Une telle synthèse serait, à notre avis, du plus grand intérêt.


Dânielle CANDEL
Laboratoire HTL
Université de Paris

danielle. candel @ univ-pari s-diderot. fr








GOTTLIEB Henrik, Echos of English. Anglicisme in Minor Speech Communities — with Special Focus on Danish and Afrikaans, Berlin, Peter Lang, coll. Text Meaning Context. Cracow Studies in English Language, Literature and Culture, vol. 15, 2020, 520 pages — ISBN 978-3-631-78-379-5.
L'auteur de ces lignes a sérieusement hésité avant de propo- ser le compte rendu d'un livre qu'il a découvert d'abord en tant qu'examinateur, sous la forme d'une dissertation d'habilitation, et ensuite comme proposition de publication dans la collection «Text-Meaning-Context» chez Peter Lang. Dans les deux cas il avait donné un avis très favorable. Toutefois, il n'est pas question ici de porter un jugement sur le livre de Henrik Gottlieb mais plutôt d'examiner une série d'idées sur la problématique développée dans ce volume, qui est suffisamment originale pour mériter une analyse proprement lexicologique. Gottlieb se propose en effet de revisiter
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la question de l'emprunt linguistique, phénomène a priori surtout lexical, dans un cadre plus vaste et à la lumière des changements de société induits par la domination croissante de l'anglais dans tous les domaines. Le nouveau regard porté sur ce phénomène interculturel est enrichi par la prise en compte d'autres disciplines, dont la sociologie et la traductologie. Les langues retenues pour cette analyse, le danois et l'afrikaans, qualifiées par l'auteur (à tort à notre avis) de communautés linguistiques mineures, figurent rarement dans la conscience linguistique des pays francophones. Leur intérêt est ailleurs, en tant qu'exemples ou études de cas. La transformation de la société danoise, reflétée dans celle de sa langue nationale, préfigure-t-elle ce qui pourrait arriver aux langues comme le français ou l'espagnol ?
Le livre intègre de nombreuses recherches que l'auteur a menées durant une longue carrière (c'est l'avantage d'un travail d'habilitation transformé en monographie) ainsi qu'une synthèse de ses lectures, car il connaît très bien la bibliographie sur le sujet. Il ne s'agit pas toutefois d'une compilation :toutes les analyses sont mises au service d'une seule problématique, la nature et le degré de l'influence que l'anglais exerce sur le danois et l'afrikaans, et, partant, sur d'autres langues. Pour cela, l'auteur divise son ouvrage en dix chapitres, les huit premiers consacrés à différents aspects de l'évolution de l' anglicisation du danois, le neuvième sur l' afri- kaans et sa place dans la société sudafricaine et le dixième sur la projection du sort de l'afrikaans sur le danois.
Il n'est pas possible de reprendre et de commenter toutes les innovations de cette vaste étude. Nous nous bornons à résumer brièvement son contenu, chapitre par chapitre, puis à commenter plus en détail quelques avancées significatives.
Dans le premier chapitre, l'auteur s'efforce de définir l' angli- cisme surtout par rapport à des critères lexicographiques ; il exa- mine en particulier des dictionnaires d'anglicismes, qui adoptent différents critères d'inclusion permettant ainsi une définition en extension. Le deuxième chapitre poursuit la réflexion sur la défini- tion de l'anglicisme et propose une typologie que l'auteur estime
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plus apte à rendre compte de la multiplicité de ses manifestations dans un monde de plus en plus dominé par l'anglais. Le troisième chapitre, un des plus originaux, examine le rôle de la traduction sous ses différentes formes dans la diffusion des anglicismes. Le quatrième est un panorama historique de l'anglicisation croissante du danois et une analyse des différentes enquêtes sociolinguistiques visant à connaître l'attitude des locuteurs. Le cinquième met en lumière les anglicismes «invisibles », dont les phraséologismes, et comment les détecter, développement d'un chapitre que l'auteur a rédigé dans le cadre d'un ouvrage collectif (Furiassi, Pulcini et Rodriguez Gonzâlez 2012). Le sixième approfondit la notion de pseudo-anglicismes tandis que le septième reprend l'histoire de la langue danoise par rapport aux influences externes exercées sur elle, d'abord... et surtout, celle de l'allemand, puis de l'anglais. Le huitième chapitre cherche à évaluer la pénétration de l'anglais dans la vie danoise en étudiant les modes au niveau des prénoms donnés aux enfants et à d'autres tendances dans la création de diverses catégories de noms propres. Remarquons que les chapitres 5 à 8 comportent tous une dimension diachronique, fait rare dans les études sur les emprunts. Les deux derniers chapitres enfin sont focalisés sur le cas de l'afrikaans comme nous l'avons mentionné, invoqué comme prémonitoire pour le danois ainsi que pour d'autres langues.
Gottlieb fait part de son insatisfaction par rapport aux concep- tions traditionnelles de l'emprunt linguistique, surtout celle qui est issue de la typologie de la tradition allemande. Il souhaite mettre l'accent sur le locuteur et la communauté linguistique dans son ensemble plutôt que sur une conception monolithique de la langue. C'est ainsi qu'il s'interroge sur l'adéquation de la notion même de l'emprunt, bien qu'il propose une distinction entre borrowing et loan et sur la pertinence d'une quelconque linguistique de contact, à partir du moment où le contact se limite à ce que les Danois sont amenés à lire ou à écouter. Afin de mettre en pratique cette vision de l'influence qu'exerce l'anglais sur la communauté linguistique du danois, il propose une nouvelle grille d'analyse qui opère une
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première division au niveau de ce qu'il appelle les anglicismes actifs et réactifs, d'une part, et d'une conception de macro- et de micro-langues d'autre part. Les anglicismes actifs sont « adop- tés » — ce sont grosso modo les emprunts directs sous forme brute, ou «adaptés » en termes d'orthographe, de morphologie ou de prononciation. Les anglicismes réactifs seraient «sous influence » (Jacquet-Pfau, Sablayrolles et Humbley 2009), correspondant à l'emprunt interne de la tradition allemande.
Ces deux catégories (des actifs et des réactifs) font partie des éléments microlinguistiques ; au niveau macrolinguistique nous quittons le cadre lexical, car il s'agit d'alternance colique, indice capital de l'interférence, particulièrement fréquente dans les pays diglossiques comme l'Afrique du Sud mais de plus en plus courante en danois. Ces trois catégories (actifs, réactifs et macrolinguis- tiques) sont sous-divisées en plusieurs groupes, selon différents critères. C'est ainsi que le critère du type de lexie est sous-divisé en emprunts d'un mot, d'une lexie de plus d'un mot et d'un élément inférieur à un mot —par exemple le suffixe adverbial -ish. On iden- tifie également les emprunts «cachés », qui passent inaperçus du locuteur natif, les hybrides (deux sous-catégories) ainsi que quatre types de pseudo-emprunts, examinés en détail dans le chapitre 6. Selon cette classification, les emprunts indirects ou «réactifs» sont nombreux. Gottlieb innove en distinguant « loan translations» (qui représentent un nouveau concept) et «calques » (qui représentent des concepts déjà dénommés dans la langue en question). Les calques sont à leur tour sous-divisés en six groupes selon le niveau linguistique concerné (morphologie, phraséologie, phrase, syntaxe, valence et autres). Les emprunts sémantiques se divisent en cinq sous-groupes, dont les doublons et les recontextualisations. Les doublons sont des emprunts qui ont la même forme qu'un mot existant mals un tout autre sens :spotte de l'anglais spot, repérer, tandis que le danois a déjà un verbe spotte, se moquer. Les recon- textualisations sont d'ordre pragmatique, comme dans le cas de l'emploi de Jeg elsker dig (I love you) lorsqu'on prend congé. Puis viennent l'influence au niveau de l'orthographe et de la phonétique,
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de la phonosémantique (pour d'autres langues que le danois) et l'accroissement d'usage. Cette dernière catégorie est constituée de mots dont la fréquence, sous l'influence de l'anglais, est aug- mentée, par exemple ekspert (qui existe bien en danois mais qui est proche de l'anglais) employé de préférence à fagmand (inspiré de l'allemand).
Cette typologie sert à distinguer les différentes perceptions d'anglicismes ;selon les sondages cités, les anglicismes lexicaux sont bien acceptés au Danemark mais certaines formes de néologie réactive, au niveau de l'orthographe, par exemple, sont au contraire plutôt mal perçus. En outre, Gottlieb émet l'hypothèse que c'est surtout l'influence réactive, donc moins visible, qui indique la progression de l'influence de l'anglais. La typologie présentée ici a été élaborée pour tenir compte du danois et accessoirement de l'afrikaans. La question se pose de savoir si elle convient à d'autres situations d'influence linguistique. Par exemple, Gottlieb propose quatre catégories d'anglicismes qui se détachent d'une comparaison en danois entre des emprunts faits à l' allemand dans un passé plus lointain et des emprunts à l'anglais, bien plus récents. En effet, l'allemand a exercé une influence prépondérante sur le danois pendant une très longue période et une comparaison entre ces deux sources est utile si l'on veut faire ressortir les spécificités de celle de l'anglais. Les quatre catégories sont les suivantes
— les «éléments consolidés », d'abord, les emprunts anglais dont la fréquence est élevée sans pour autant éliminer le concurrent allemand (invitere aujourd'hui plus courant que inbyde) ;
— la deuxième catégorie, les «alternatives », où les deux sont à peu près à égalité (copyright et ophavret) ;
— la troisième, les «comètes », anglicismes dont la fréquence s'accroît brutalement (event qui marginalise begivenhed) ;
— la quatrième, les «coucous », qui sont en voie de remplacer les germanismes (guide qui a presque évincé rejseleder).
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Cette typologie se prêterait également à une comparaison entre concurrents d'anglicismes et termes «hérités » —surtout dans le cas d'emprunts « de luxe » ou «non catéchrétiques », distinction qui laisse Gottlieb plutôt sceptique.
Cette nouvelle typologie comble une lacune que Cabré, Domenech-Bagaria et Solivellas (à paraître) signalent lorsqu'ils regrettent le fait que Jean-François Sablayrolles n'a pas prévu de sous-catégorie pour la matrice externe. La typologie proposée par Gottlieb pourrait bien remplir ce rôle. En étoffant la grille de caté- gories d'analyse pour les emprunts, on rééquilibre leur place dans l'économie générale de la néologie. Selon certaines études citées dans ce volume, l'influence de l'anglais serait perceptible dans non moins de 67 %des néologismes identifiés en danois.
La traduction est un vecteur d'influence linguistique et cultu- relle dont on parle peu dans le cadre de l'analyse des «emprunts ». Gottlieb est lui-même professeur de traductologie et il n'hésite pas à remonter dans l'histoire de la littérature pour trouver des exemples de mauvaises traductions qui font le lit de futurs anglicismes. Le français n'est pas de reste :dès le xvllle siècle l'abbé Féraud avait également identifié la traduction comme source de nombreux néo- logismes d'origine anglaise. Les considérations traductologiques sont tout à fait pertinentes à l'époque contemporaine. Si Law- rence Venuti (1998), un des spécialistes les plus en vue, préconise une stratégie de traduction visant le dépaysement (« foreigniza- tion »), Gottlieb (ainsi que d'autres traducteurs non anglophones) soulignent le danger de cette approche appliquée à la traduction d' oeuvres de langue anglaise vers d'autres langues, car le résultat serait une très forte anglicisation. C'est la démarche inverse, la « do- mestisation », qui serait plus appropriée dans ce sens. Gottlieb cite des études menées sur les films sous-titrés en Lithuanie et au Da- nemark qui mesuraient le pourcentage de traductions dépaysantes par rapport aux domesticisantes :dans le pays balte, où l'anglais est moins compris, 85 %des références culturelles américaines étaient ramenées à des équivalents lithuaniens, tandis qu'au Dane- mark 66 %des références culturelles américaines étaient rendues
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littéralement. Les traducteurs ménagent ainsi le public lithuanien tandis qu'ils supposent que les Danois sont plus proches du mode de vie américain. Le rôle de ce qu'il appelle la traduction relais est significatif dans ce contexte; il s'agit à l'origine de l'anglais qui sert de langue pivot pour réaliser des traductions de deux langues peu répandues — en particulier au sein de l'Union européenne, mais aussi par les agences de presse internationales, ainsi que par les bénévoles qui traduisent par exemple les mangas. Le résultat est que tout est repensé par le biais de l'anglais. Les traductions au fil des années ont tendance à adopter un style de plus en plus littéral ; l'auteur compare des traductions de romans effectuées à 50 ou 60 ans d'intervalle pour faire ressortir une nouvelle anglicisation stylistique systématique. Parallèlement, on constate au Danemark un déclin relatif de livres traduits de l'anglais, quine s'explique pas par la diminution de l'influence de l'anglais. Bien au contraire, les Danois préferent désormais acheter l'original anglais, généralement bien moins cher que la traduction danoise, ce qui expose les Danois encore plus à l'influence de l'anglais. Pour mesurer cette influence, Gottlieb introduit deux notions : la richesse des anglicismes, mesu- rée par les entrées de dictionnaires (et donc en voie d'incorporation dans le lexique) et leur densité, mesurée in vivo dans les corpus (et donc faisant référence à la fréquence d'anglicismes en discours).
En conclusion, Gottlieb identifie cinq mesures de l' anglicisa- tion du danois
— les néologismes danois sont majoritairement d'inspiration anglaise ;
— les anglicismes marginalisent de nombreux mots ou phraséo- logismes danois ;
— les publicités font un usage intensif d'anglicismes et d'alter- nances Iodiques ;
— les états d'esprit et les concepts anglo-américains sont adop- tés par les Danois (dating...) : l'anglicisation de la langue reflète celle de la société ;
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— les parents danois préferent désormais des prénoms «inter- nationaux »pour leurs enfants.
Ce livre fournit des outils susceptibles d'analyser l'évolution des langues dans un contexte de plus en plus mondialisé et présente un grand nombre d'études menées autant par l'auteur lui-même que par d'autres qui illustrent le phénomène ainsi que les grilles de lecture qui peuvent aider à comprendre. On aurait pu approfon- dir d'autres thématiques développées dans ce livre (on peut, par exemple, ne pas être d'accord sur le traitement, pourtant bien mo- tivé, des pseudo-emprunts), mais les remarques déjà faites peuvent suffire pour montrer tout l'intérêt de cette étude innovante.


JOhn HUMBLEY
CLILLAC-ARP EA 3967 Université de Paris
humbley. j ohn @ orange. fr


Références

CABRÉ Mârla Teresa, DOMENECH-BAGARIA Ona et SoLIVELLA$ Ivan (à paraître) : « La classification des néologismes :révision critique et proposition d'une typologie multivariée et fonctionnelle », Neologica, 15.
G~RLACH Manfred (2001) : A Dictionary of Anglicisms in selected Euro- pean languages, Oxford, Oxford University Press.
FURIASSI CriStlanO, PULCINI Vlrglnla et RoDRfGUEz GONZÂLEZ Fé11x (dlr.) (2013) :The Anglicisation of European Lexis [compte rendu par John Humbley] dans Cahiers de lexicologie, 103, p. 210-220].
JACQUET-PEAU Chrlstme, SASLAYROLLE$ Jean-FranÇO1S et HUMBLEY John (2009) : «Emprunts, créations "sous influence" et équivalents », dans M. Van Campenhoudt, T. Lino et R. Costa (dir.), Passeurs de mots, passeurs d'espoir. Lexicologie, terminologie et traduction face au défi
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de la diversité, Actes des 8e Journées scientifiques du Réseau de cher- cheurs Lexicologie, terminologie, traduction, Lisbonne, Éditions des Archives Contemporaines /Agence universitaire de la francophonie, Paris, p. 325-340.
VENUTI Lawrence (1998) :The Scandais of Translation. Towards an Ethic of the Di,~erence, London, Routledge.






L'HoMME Marie-Claude, Lexical Semantics for Terminology : An introduction, Amsterdam/Philadelphie, John Benjamin, coll. Ter- minology and Lexicography Research and Practice, 2020, xxi- 263 pages — ISBN 978-9-02720-468-4.
Lexical Semantics for Terminology se présente comme une introduction ou un manuel. On peut supposer que cet ouvrage est destiné prioritalrement aux étudiants (dont peu sont anglophones) engagés dans les filières de traduction spécialisée, un des rares secteurs où la terminologie figure comme discipline de l' enseigne- ment supérieur. En effet, une lecture même superficielle permet de constater facilement la présence de pratiques relevant directement de la didactique :résumés de ce qui sera présenté dans chaque chapitre et annonces de la suite par rapport ce qui a été exposé, mises en perspective de différents points de vue scientifiques sur le même sujet, conseils de lectures complémentaires, etc. Le néophyte est donc bien guidé. Pourquoi alors y consacrer un compte rendu dans une revue comme les Cahiers de lexicologie qui se définit comme relevant de la recherche ?Une lecture plus approfondie de cet ouvrage peut convaincre de sa pertinence pour la recherche dans les deux domaines annoncés dans le titre, à savoir pour la terminologie et pour la linguistique, dont la sémantique lexicale est une branche. L' auteure est elle-même désireuse de rapprocher
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ces deux orientations, au point que l'on peut dire que la thèse de ce livre est la complémentarité des deux principales approches qui caractérisent aujourd'hui la terminologie. La première, la plus ancienne, remonte à la Théorie générale de la terminologie (TGT) telle qu'elle est définie par Eugen Wüsterl et ses héritiers, que l'auteure appelle, non sans justification, la terminologie tradition- nelle. La seconde regroupe les différentes formes de terminologie textuelle, plus ouvertement linguistique, qui se justifie en rappe- lant que la terminologie est, après tout, une question de mots et de discours. Compte tenu de la quantité de travaux sur les discours spé- cialisés (on hésite de plus en plus à parler de langues de spécialité), on peut estimer qu'il est temps de bien clarifier l'épistémologie de ces différentes approches, ce qui justifie de remonter aux sources théoriques et, de ce fait, de rendre compte de cette étude dans une revue qui s'adresse aux chercheurs.
On peut effectivement imaginer deux profils types de lecteurs d'un côté le terminologue, adepte d'une approche qui privilégie la systématisation des unités de connaissance, héritée de Wüster, et de l'autre le linguiste qui s'intéresse à l'analyse de textes spécialisés et des termes en tant qu'unités lexicales. On sait que la TGT opérait une distinction nette entre linguistique et terminologie, cherchant à établir indépendamment une structuration des connaissances et à éliminer l'ambiguïté de la communication scientifique et tech- nique. Or, contrairement à de nombreux linguistes terminologues qui remettent en cause la totalité de cette approche — Bourigault et Slodzian (1999), par exemple, ont le mérite de la clarté et de la concision dans leur condamnation —, L'Homme considère au contraire qu'elle ne doit pas être abandonnée mais plutôt complé- tée par une analyse relevant des sciences du langage. Elle montre comment le paradigme conceptuel de la terminologie d'inspiration wüstérienne peut être réinterprété selon des critères linguistiques, ceux, justement, des différentes versions de la sémantique lexicale.
Le manuel de terminologie de langue française qui refl8te le mieux l'approche de Wüster serait celui de Felber (1987), rédigé pour l'UNESCO. Il figure dans la bi- bliographie du livre de L'Homme.
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En outre, un autre facteur avait joué en faveur d'une autonomie de la terminologie par rapport à la linguistique théorique. La termi- nologie, contrairement aux autres branches de la linguistique, est caractérisée par ses applications. On peut faire de la lexicologie sans envisager de confectionner un dictionnaire, mais la terminolo- gieprésuppose laproduction d'une terminologie, d'où sa polysémie — que Mel'cuk considérerait sans doute comme inhérente. Si l'on parle rarement de terminographie, c'est en partie parce qu'une ter- minologie aboutie est précisément une terminographie. L'identité de l'application et de la méthodologie a sans doute contribué à ce divorce. Or, les applications de la terminologie sont nombreuses, variées et essentielles :elles vont de la conception et la production de dictionnaires spécialisés ou de bases de données à la traduction spécialisée ou encore àl'indexation/classification, la gestion des connaissances, la normalisation, l'aménagement linguistique... Si certaines de ces applications n'ont que peu de besoins proprement linguistiques, d'autres, en particulier toutes celles qui ont une base textuelle, comme la traduction spécialisée, requièrent une approche plus proprement linguistique, qui fait l'objet de l'essentiel de cet ouvrage.
Marie-Claude L'Homme est sans doute la personne idéale pour opérer ce rapprochement. Formée par Igor Mel'cuk et Jean-Claude Boulanger2, elle est professeure de terminologie à l'Université de Montréal, a été longtemps rédactrice en chef de la revue de référence Terminology, est l'auteure d'un manuel innovant de termi- nologie (L'Homme 2004), sans doute le dernier en date en français et le seul qui fasse explicitement le lien avec l'exploitation de cor- pus. Elle est également la responsable et principale instigatrice de deux dictionnaires terminologiques en ligne, DiColnfo (informa- tique) et DiCoEnviro (environnement). Ces dernières ressources sont particulièrement importantes, car elles lui offrent une source
z Jean-Claude Boulanger est dédicataire de ce livre ainsi que Juan Carlos Sager, ce
dernier très souvent cité en exemple, bien plus que d'autres noms bien connus en France comme Alain Rey (une mention) ou Daniel Gouadec (pas de mention du tout).
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de textes et d'exemples de problèmes de terminologie dans laquelle elle puise les propositions qui lui servent de démonstration tout au long du livre.
L'ouvrage comporte neuf chapitres. Le premier, très bref, est en réalité une introduction qui justifie la pertinence de la sémantique lexicale dans le cadre de la terminologie, discipline qui, comme nous l'avons vu, rejetait toute appartenance à la linguistique, du moins lors de ses origines.
Le deuxième chapitre donne un aperçu de ce que constitue la terminologie, vue sous les deux angles différents que l' auteure considère désormais comme complémentaires :celui de l'approche des connaissances et celui de l'analyse proprement linguistique.
Le troisième chapitre invite à élargir les horizons de la termino- logie en tenant compte de ses dimensions textuelles, d'où l'intérêt des approches fondées sur les sémantiques lexicales, exprimées au pluriel, car L'Homme en identifie six :les classes d'objet de Gaston Gross, la Corpus Pattern Analysis (Hanks et Pustejovsky), la Distributional semantics (Harris), la Lexicologie explicative et combinatoire (Mel' cuk), la Frame semantics (Fillmore) et le Gene- rative lexicon (Pustejovsky). Elle en exploite deux dans le cadre du manuel : la démarche Explicative et combinatoire, à laquelle elle avait déjà fait appel pour les deux dictionnaires en ligne, ainsi que la sémantique des cadres, qui est utilisée pour d'autres diction- naires qui exemplifient la méthode, comme ceux de Pamela Faber, pionnière de l' application à la terminologie de la sémantique des cadres. Il s' agit donc de démontrer que la démarche mel' cukienne ou celle de la théorie des cadres, conçues pour le vocabulaire de la langue générale, peuvent également s' appliquer à la terminologie moyennant aménagement.
Le quatrième chapitre aborde la définition du terme des points de vue théoriques et pratiques :comment distinguer dans un texte entre termes et non-termes ? La réponse à cette question fait bien ressortir les différences entre les deux approches, dont on montre cependant la complémentarité. Pour la sémantique lexicale on peut invoquer comme critères la relation avec le domaine, la nature des
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arguments, les questions de morphologie et de sémantique et les relations paradigmatiques.
Le cinquième chapitre, d'orientation sémantique, explique d' abord la démarche conceptuelle de la terminologie traditionnelle avec ses conditions suffisantes et nécessaires, puis propose des analyses qui s'appuient sur la sémantique lexicale et prennent en compte les questions de polysémie.
Le sixième chapitre est plus directement consacré à l' analyse des arguments et à la structure argumentale. Il y est démontré que l'analyse des arguments est nécessaire pour établir le sens d'une unité lexicale (donc d'un terme) et que les arguments s'expriment dans les textes. Cette argumentation porte, car si la linguistique générale s'occupe depuis relativement longtemps de l'analyse des éléments prédicatifs, leur pertinence en terminologie a moins été reconnue. Une heureuse exception se trouve dans les travaux de Pierre Lerat, portant, assez logiquement, sur les discours juridiques, où les relations actancielles sont plus évidentes que dans les termi- nologies strictement technologiques.
Les septième et huitième chapitres sont consacrés aux rela- tions complexes qui existent entre concepts et termes, l'un dans le cas de structures de micro-systèmes et l'autre la structuration de domaines. Ces chapitres comportent une introduction aux taxino- mies, aux ontologies et autres thésaurus et explorent les rapports entre relations paradigmatiques et syntagmatiques. Le chapitre 8 comporte par ailleurs une justification de la complexité du codage des fonctions lexicales, qui peut rebuter le lecteur peu familier de ces conventions, tout en proposant une version «light» (p. 203), employée dans les dictionnaires en ligne. Le dernier chapitre est bref. Il traite de la question de l'équivalence, sujet que l'auteure estime injustement négligé, du moins dans le cadre de la terminolo- gie. Or, en traduction spécialisée c'est une question fondamentale, qui mobilise depuis longtemps les chercheurs en traductologie. Sa quasi-absence en terminologie, que l' auteure regrette, s'explique du fait que l'approche wüstérienne subordonnait la recherche de dénominations (et donc d'équivalents) à la mise au point d'une
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représentation conceptuelle. Comme ailleurs, la recherche portant sur l'équivalence terminologique en traduction spécialisée est très morcelée et souvent peu connue, allant des travaux de Béciri (2007), qui s'intéressait à la réception de la traduction par un public moins spécialisé que celui de l'original, à ceux de Maldussi (par exemple 2015) dans le cas de systèmes conceptuels différents, sans parler de nombreux travaux réalisés en traduction juridique. Voici une avenue de recherche qui mérite d'être ouverte... en grand !
Un des traits qui caractérise ce livre relève peut-être davantage d'une didactique canadienne plutôt que française, à savoir l'entrée en matière par le biais d'un travail pratique, démarche éminem- ment empirique. On commence par s'immerger dans une situation concrète où l'on constate des problèmes pour lesquels on recherche des solutions possibles, faisant appel chemin faisant à différentes théories. C'est la démarche pédagogique choisie par l'auteure pour convaincre lelecteur dubien-fondé de l'utilisation de la sémantique lexicale au début du chapitre 3. On nous présente un corpus de textes représentatifs du domaine de l'informatique qu'on dépouille en vue de faire un dictionnaire spécialisé. Au fur et à mesure du dépouillement on rencontre des problèmes de polysémie, d'équiva- lence etc. Ces exemples, soumis à différentes lectures, permettent de se focaliser sur les différences d'approche entre la terminologie traditionnelle et celle qui s'inspire de la sémantique lexicale en explorant les concepts de sens, de signification et de... concept ! Tout ce cheminement illustre concrètement les différences entre une analyse impulsée par les connaissances (knowledge-driven) et une autre impulsée par le lexique (lexicon-driven), les deux étant nécessaires à différents degrés dans un projet de terminologie.
Il n'est pas possible, dans le cadre d'un livre de format standard de tenir compte de toutes les pistes de recherche largement ouvertes par les deux démarches, ni des convergences qui, souvent, n'ont pas eu de lendemains, comme celle de Picht (1997), qui dans le cadre de la théorie wüstérienne développe ce qui est une description fine des actants de concepts commerciaux.
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Le pari de réconcilier des démarches terminologiques considé- rées naguère comme antagonistes est largement levé dans ce livre grâce aux dons de synthèse de son auteure, qui réunit l'essentiel de la recherche pratiquée par des terminologues qui d'ordinaire se parlent peu. Or, désormais, grâce à ce livre, le dialogue est ouvert.

JOhn HUMBLEY
CLILLAC-ARP EA 3967 Université de Paris
humbley. j ohn @ orange. fr

Références
BÉCIRI Hélène (2007) : «Traduction spécialisée :quelques spécificités de la communication technique assymétrique », Cahiers du CIEL, p. 243-268.
BOURIGAULT Dldler et SLODZIAN MOmque (1999) : «Pour une termin010- gie textuelle », Terminologies nouvelles, 19, p. 29-32.
FELBER Helmut (1987) :Manuel de terminologie, Paris, UNESCO (Info- term).
L'HOMME Marie-Claude (2004) : La terminologie :principes et tech- niques, coll. Paramètres, Montréal, Les Presses de l'Université de Montréal.
MALDUSSI Danio (2015) : « Ideological connotations in financial termi- nology : an English-French-Italian study from `hedge funds' through `fondi speculativi /fonds spéculatifs' to `fondi alternativi /fonds al- ternatifs' », Intralinea online Translation journal, New Insights roto Specialised Translation, p. 1-14.
PICHT Heribert (1997) : « Erarbeitung und Anwendung begrifliicher Struk turierungen », Hermes,l8, p. 33-50, DOI :10.7146/hjlcb.v10i18.25411.
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RODRÎGUEZ GONZÂLEZ Fé11X et CASTANÔN RODRÎGUEz JesüS, DlC- cionario de anglicismos del deporte, Madrid, Arco / Libros S.L., 358 pages — ISBN 978-84-7635-326-4.
Autrefois omniprésents, les dictionnaires d'anglicismes se font de plus en plus rares, le dernier ayant fait l'objet d'un compte rendu dans les Cahiers de lexicologie étant celui d'un des coauteurs du présent volume, Félix Rodriguez Gonzâlez (2017) ; ce dictionnaire portait sur les anglicismes en espagnol général. Celui qu'il publie aujourd'hui avec son collègue d'Alicante, Jesûs Castaiïôn Rodri- guez, est à notre connaissance le premier qui vise la description de l'anglicisation d'un vocabulaire spécifique, en l'occurrence celui des sports, et ne serait-ce qu'à ce titre, il mérite notre intérêt.
Examinons brièvement les parties constituantes de ce diction- naire avant d'inviter le lecteur à une réflexion sur cette innovation lexicographique.
La préface est rédigée non pas par un linguiste mais par un journaliste, spécialiste de la presse, bien connu en Espagne, Âlex Grijelmo. Celui-ci exprime tout son intérêt pour cette initiative lexicographique et il explique comment elle se situe par rapport à la question-clé posée par de nombreux hispanophones... et sans doute pour de nombreux francophones :pourquoi certains sports naturalisent-ils rapidement leur vocabulaire tandis que d'autres conservent un lexique obstinément anglophone ? Grijelmo prévoit un grand succès pour ce dictionnaire, estimant que le lectorat sera large :journalistes, traducteurs, professeurs, correcteurs, directeurs et amateurs, entraîneurs et athlètes, historiens et philologues (p. Ix).
La préface est suivie d'une introduction substantielle, signée des deux coauteurs, qui prend la forme d'un essai sur l'historique des sports dans les pays hispanophones, de leurs origines, générale- ment des pays de langue anglaise, et de leur évolution. Une attention particulière est portée au statut de l'espagnol en tant que langue officielle dans le contexte international et aux efforts consentis par les lexicologues pour promouvoir le vocabulaire sportif espagnol. Il s'avère, pour répondre à la question posée dans la préface, que
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les sports anciens et de masse sont ceux dont le vocabulaire est le mieux assimilé en espagnol, mais la situation peut varier y compris pour un même sport. C'est ainsi que le basketball à l' échelle de l'Espagne et de l'Europe est caractérisé par un vocabulaire assimilé, les émissions de télévision des matchs de la MBA étant en revanche remplies d'anglicismes. La dernière partie de l'introduction est une explication et une justification des choix relatifs à la macrostructure et à la microstructure. Des remerciements, une liste de signes et d'abréviations, une bibliographie ainsi qu'un supplément de onze pages sur la graphie, particulièrement importante pour l'espagnol, complètent le péritexte.
Au niveau de la macrostructure, le dictionnaire comporte plus de 2100 «entrées » (nous examinerons ci-après ce qui est présenté comme «entrée »), mais pour près de cent sports différents (à en juger par la liste des sports qui sert à classer les entrées), ce qui rela- tivise la couverture. Sont privilégiés les mots qui sont visiblement empruntés à l'anglais, les calques étant généralement exclus. C'est ainsi que football a droit à un article à l'adresse de l'anglicisme non adapté, mais non balompié qui a pourtant une entrée, certes glosé rare, dans le Wiktionnaire. En revanche, , fititbol et orsa(y) (o,~side) ont en plus des entrées complètes à l'adresse de la forme hispanisée. Ces entrées multiples font donc partie de la stratégie macrostructurelle, qui se confirme dans de nombreux exemples crawl et sa forme adaptée crol ou troll ont tous les deux des entrées séparées, mais estilo libre, calqué de freestyle, est donné en tant que synonyme à l'intérieur de l'article, sans être retenu comme entrée.
La microstructure comporte des champs obligatoires et option- nels. Le premier champ s'impose : la vedette, mais sans indication de genre grammatical à moins qu'il ne s'agisse d'un féminin, et avec la mention des pluriels irréguliers. Le deuxième champ est la «transcription phonétique », que nous mettons entre guillemets car il s'agit d'une approximation de la prononciation suggérée par une orthographe à l'espagnol. C'est ainsi que handler, par exemple, est rendu par [jan(d)ler] et hero workouts par [jiro güerkâo(t)us], signe
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que le dictionnaire est plutôt destiné à un public de non-linguistes. Certaines transcriptions peuvent d'ailleurs étonner : flex player est rendu par [flat pléier]. Dans l'introduction, les auteurs annoncent deux transcriptions, que l'on relève effectivement, mais dans une minorité de cas : la première indique la prononciation anglaise, la seconde celle qui est adaptée à l'espagnol. Le champ suivant est la source lexicographique du lemme, soit, pour handler (NDA), Nuevo diccionario de anglicismos de 1997 d'un des auteurs, et pour hero workouts, un article (comportant un glossaire) de 2016 sur le jargon relevé dans les salles de gymnastique espagnoles. Suit l'indi- cation du domaine ou du sport précis où le terme est employé, soit pour handler : dep, qui ne figure pas dans la liste des abréviations, mais qui doit renvoyer à deporte en général, et pour hero workouts acd, actividad dirigida. Puis vient la définition, par exemple pour handler
Persona que entrena, mantiene y exhibe un perro en una prueba, espectâculo, etc.
et pour hero workouts
Conjunto de ejercicios ~ woDl con et nombre de un soldado muerto en combate, qu se ejecutan en entrenamientos funcionales.
La définition proprement dite est suivie le cas échéant d'infor- mations de type encyclopédique. Le champ synonyme, marqué sYN indique dans la majorité des cas où il est présent un équivalent plus hispanique. Donc pour football, pour reprendre le premier exemple ci-dessus, on lit : sYN: balompié.
D'éventuels phraséologismes sont ensuite indiqués, introduits par deux barres parallèles. Par exemple, sous l'entrée fitness, on lit
~~ hacer; loc v. acd. Practicar este tipo de gimnasia.
En fin d'article sont présentées les attestations ou citations, ti- rées en grande majorité de la presse espagnole mais aussi de forums
won = workout of the day, avec une entrée à cette adresse.
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et de blogs, et accompagnées de la mention du lieu de publication, généralement en Espagne. Les termes-clés sont accompagnés de trois ou quatre attestations. On peut estimer que cette sélection d'attestations discursives de la nomenclature représente une des richesses de ce dictionnaire. Les auteurs interviennent de temps en temps sous forme d'observations, par exemple pour signaler une irrégularité, comme l'éventuelle homophonie dans la prononcia- tion espagnole de foot fault et foot foui (sous foot fault).
Parmi les grandes questions de macrostructure, le regrou- pement, le dégroupement et l'équilibre à trouver entre les deux constituent un défi majeur. La solution trouvée pour ce diction- naire penche pour le dégroupement, que nous pouvons illustrer en examinant le terme central du «sport roi » ,comme l'appellent les auteurs :football. On relève les articles suivants aux adresses indiquées ci-après
football (o foot ba11) :deux acceptions, une glosée `obso- lète', accompagnée de quatre contextes historiques ;1' autre acception renvoie au football américain ;
— ftiilbo, glosé `despectivo' (péjoratif), humoristique, variant furbo;
ftiilbol, glosé `col.' (`es una variante popular bien aceptada, e incluso documentada a veces en algunos textos con un registro formal') ;
fntbal tambien futbol (sans marque d'usage) —article princi- pal; en fin d'article une série de «dérivés» : fulbito, futbito, futbolear, futboleria, futbolero, futbolin, futbolismo, fut- bolista, futbolistico, futbolitis, futbolizar, futbolodromo, futbol(o)mania ;
futbolin [équivalent espagnol de l'allogénisme français ba- byfoot].
Le lecteur francophone s'étonnera des capacités assimilatrices de l'espagnol, même dans les sports les plus anglicisés. Les compo- cations sont nombreuses : boxam (boxeur.se amateur.e) ;fut-tenis
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(combinaison de football et de tennis, peut-être une évolution his- panique) ;, futvoley (combinaison de football et de volleyball —jeu qui aurait ses origines sur les plages de Rio...). Les vrais dérivés réservent des surprises : , futinero, pratiquant du footing, et, futman pour un jeu pratiqué en fauteuil roulant. On observe également des paradigmes :leader (pas d'article, renvoi à lider), le verbe liderar, l'état de liderato; paradigmes parfois modifiés, par exemple : bas- ketball (ou basquetbol, bksquetbol, basquet ou encore bksquet), basketbalista (ou basket-ballista ou encore basketbolista), basket- bolistico, basketbolisticamente... Les conversions dénominales sont fréquentes : birdear (en golf, jouer un trou un coup sous le par, en anglais birdie) ou encore bikero, adjectif tiré de biker, motard. Les hybrides sont relativement peu nombreux, mais on peut citer lie de Nuevo frito comme terme de golf (lie, «position de la balle en golf »,aune entrée autonome) ; en anglais fried egg lie est bien attesté, mais cet équivalent n'est pas indiqué dans le dictionnaire. De faux anglicismes de différents types sont également signalés, dont mister, entraîneur, partagé avec l'italien. Selon les auteurs, les entraîneurs des premières équipes de football du xlxe siècle étaient des Anglais, qui se voyaient attribuer le titre de Mister. Certains anglicismes semblent avoir fait un détour par la France, comme antidopaje.
De nombreux noms propres et quelques antonomases sont également présents dont certains viennent de l'anglais (Dream Team), d'autres étant d'origine hispanique. On relève des évolutions sémantiques qui ne semblent pas avoir d'équivalent en français ye-yé ne renvoie pas aux Beatles mais à la «grande génération de footballeurs des années 60 ».
Ce dictionnaire comporte de nombreuses allusions historiques, mais il n'a pas pour autant une véritable ambition proprement diachronique : il ne mentionne pas de première attestation à pro- prement parler, mais, pour chaque vedette, la première occurrence dans un dictionnaire, qui constitue une datation de type secondaire mais non moins objective. Comme pour le dictionnaire de 2017, on a parfois du mal à faire la distinction entre emprunt et xénisme :par
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exemple soccer, qui a droit à une entrée propre, est attesté dans les extraits de presse, mais toujours dans le contexte des États-Unis.
Tout dictionnaire est le résultat d'un compromis. Il est permis de penser, au regard de la présentation et du contenu de celui-ci, qu'il correspond assez bien aux attentes des multiples lecteurs que Grijelmo identifie dans la préface, en leur présentant l' ensemble des anglicismes de la presse sportive tels qu'ils ont été répertoriés dans les différents supports secondaires, surtout dans les dictionnaires, et exemplifiés dans les journaux. On peut déceler également une lé- gère orientation aménagiste : on ne déconseille pas les anglicismes, mais on indique systématiquement, sous forme de synonymes (que l'on pourrait tout aussi bien qualifier de concurrents), des formes plus hispaniques. Grâce à ce livre innovant, le linguiste qui s'in- téresse aux études des emprunts a désormais accès à une vaste documentation et y trouve le début d'une analyse qui ne demande qu' à être approfondie.

JObn HUMBLEY
CLILLAC-ARP EA 3967 Université de Paris
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Références

RonRfGUEz GONZt~LEz Félix (2017), Gran diccionario de anglicismos, Alicante, Arco / Libros. S.L., 2017, coll. Diccionarios y manuales, compte rendu de John Humbley, Cahiers de lexicologie, 111-2, 2017, p. 299-304.