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Classiques Garnier

Chroniques et comptes rendus

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers de lexicologie
    1991 – 1, n° 58
    . varia
  • Auteurs : Forgue (J. G.), Cossette (A.), Candel (D.)
  • Pages : 173 à 189
  • Réimpression de l’édition de : 1991
  • Revue : Cahiers de lexicologie
  • Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
  • EAN : 9782812443107
  • ISBN : 978-2-8124-4310-7
  • ISSN : 2262-0346
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4310-7.p.0173
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 09/11/2012
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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CHRONIQUES ET COMPTES RENDUS



Gregory JAMES (ed.), Lexieographers and their works
Exeter Linguistic Studies, vol. 14 ;University of Exeter, 1989, 225 p.



Ce quatorzième volume de Exeter Linguistic Studies, paz la diversité de ses articles, témoigne de l'internationalisation en même temps que de l'affinement de la métalexicographie, étant bien entendu qu'il est aussi difficile de fonder une métalexicographie générale qu'une linguistique authentiquement générale tenant compte de toutes les langues connues.
Henri BÉJOINT, traitant de la notion de codification de l'unité lexicale, rapporte celle-ci à la quantité des échanges (paz opposition aux hapax, créations personnelles) et à la qualité d'intégrant de phrase (opposée à  :intégrant d'un mot). Il aurait peut-être pu signaler pour la rejeter la phrase trbs courante du type Joyeux Noël, caz, comme il le dit lui-même, la codification est un phénomène beaucoup plus large.
Charles BWENGE, traitant du souahéli, montre la difficulté qu'il y a à choisir la forme- entrée d'une langue morphologiquement très complexe où les formes du discours sont préfixées comme les dérivés, ce qui bouscule la présentation alphabétique. Les lexicographes font des nomenclatures différentes ;aussi bien faut-il envisager une macrostructure double ("the mixed word-stem-affix system'"). Ceci ne serait pas sans rappeler la solution adoptée en français pour le Robert méthodique, encore qu'il s'agisse là d'une langue pour laquelle ce procédé s'av8re moins nécessaire.
Aidan CARTEL aborde le sujet mal connu des dictionnaires de russe, fascinant parce que la vocation de la lexicographie en Union soviétique est avant tout pédagogique. L'auteur nous présente des dictionnaires de fréquences (mots affectés d'un nombre), ainsi que les nombreux travaux sur cet aspect du lexique, qui permettent un meilleur encodage. Une telle entreprise soulève des difficultés bien connues et CARTEL juge sans indulgence les résultats obtenus dans le Russian Word Count (R.W.C.) fréquemment utilisé par les anglophones. II a raison de conclure à l'importance toute relative des informations de fréquence, de par leur principe même.
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Pierre CORBIN, poursuivant ses recherches sur les dictionnaires français monolingues, s'efforce de suivre les transformations "généalogiques" dans une même lignée de dictionnaires afin de saisir l'évolution des lexicographes. N'est-ce pas là accorder trop d'importance linguistique à des faits éditoriaux complexes liés aux personnes impliquées  ?Néanmoins, la comparaison des nombreuses définitions du mot brasier, par exemple, se révèle être un excellent exercice de sémantique lexicale.
A. P. COWIE, à propos d'une étude du Collins Cobuild Dictionary, présente ses idées sur l'exemple de dictionnaire. On sait que cet ouvrage expose dans une préface due à J. M. SIN- CLAIR des vues quelque peu archaïques et souvent superficielles sur la nature et les fonctions de l'exemple et sur la supériorité de l'exemple extrait d'un corpus. COWIE démontre bien que l'exemple forgé est nécessaire et que le rôle du lexicographe est déterminant, ne serait-ce que dans le choix d'une phrase de corpus.
Arthur DELBRIDGE affame que les dictionnaires sont impuissants à décrire correctement les pazlers régionaux, et en prend pour exemple l'anglais australien, tel qti il est traité notamment dans Webster's Third et l'Oxford English Dictionary.
À propos des pays arabophones, Turlâ DIAB souhaite l'amélioraàon des dictionnaires bilingues d'apprentissage et préconise l'élaboration de dictionnaires fondés uniquement sur la demande de l'utilisateur et sur les connaissances résultant des cours suivis, c'est-à-dire d'ouvrages ciblés avec précision.
W. Stephen DODD fait le point sur le rôle de l'informatique à l'heure actuelle dans la confection des dictionnaires (base de données, analyse de texte, syntaxe des mots), particulière- ment dans le I,ongman Dictionary of Contemporary English et dans le Collins Cobuild Dictionary. Il envisage à terme la quasi-disparition du dictionnaire comme livre traditionnel et avance que la base de données au service du demandeur coGtera moins cher et s'avérera plus fiable. Il est loisible de ne pas entièrement partager cet optimisme.
Walter GRAUBERG, comparant quelques langues, conclut à propos des proverbes et des locutions qti ils reflètent plus l'expérience humaine générale que la sagesse ou les particularités de telle ou telle nation. Werner HÜLLEN s'interroge sur l'avenir de la lexicographie et montre qu'elle a sa source dans la glose, c'est-à-dire dans une remarque métalinguistique, généralement manuscrite, sur un mot et dans un texte quelconque ;puis il propose une typologie linguistique des gloses.
Gregory JAMES ouvre des horizons sur des méthodes lexicographiques inconnues dans les langues européennes, et singulièrement sur le dictionnaire de tamoul, langue dravidienne parlée paz 64 millions de personnes. Dans de tels dictionnaires, la nomenclature n'est pas
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alphabétique, mais phonétique ou syllabique ;l'article comporte une importante bibliographie sur le tamoul et ses relations avec les observatetus occidentatix depuis le XVIIIe siècle.
Tamàs MAGAY passe en revue la lexicographie bilingue anglo-hongroise et présente l'ceuvre de Lâszlb ORSZ,~GH (1907-1984), lexicographe bien connu en Europe et dont le personnage fait penser à Émile LITI'RÉ paz sa puissance de travail et son acharnement. ORSZAGH a publié en 1948 un dictionnaire de conception moderne, où, à la différence de ses prédécesseurs, il présentait un lexique usuel, où les mots sont classés paz familles et où pour la première fois est signalée la prononciation en A.P.I., la typographie même annonçant celle d'ouvrages plus récents.
De nécessaires éclaircissements sur The Oxford Companion to the English Language sont fournis paz Tom McARTHUR, qui a participé à cette entreprise encyclopédique et lexicale.
N. E. OSSELTON s'intéresse aux premiers dictionnaires anglais du point de vue de l'ordre alphabétique des entrées. Dans A TAble Alphabeticall (CAWDREY, 1604), douze pour cent des mots ne sont pas dans un ordre strictement alphabétique, ce qui amène à se demander  :pourquoi ce désordre  ? OSSELTON mentionne les anomalies de hasard, les préférences de l'imprimeur, le rapprochement des dérivés, les variantes suffixales, préfixales et même radicales (à sens égal de mot). La plupart des dictionnaires actuels ont une nomenclature présentant des problèmes comparables.
Enfin, plusieurs articles très courts apportent des informations qui retiendront l'attention du lecteur. Ainsi, une histoire de la codification des prononciations pour les noms propres à la B.B.C. (The BBC Pronouncing Dictionary of British Names), signée de Graham POINTON ; une étude de l'apparition d'un style objectif, clair et transparent pour le lecteur, avec l'Universal Erymological English Dictionary (1721), de Nathaniel BAILEY (John A. SIMPSON) ;des tests sur l'aide apportée paz le dictionnaire au cotas de la lecture (Ytiltio TONO)  ;des remarques sur le ciblage de différents dictionnaires du Nouveau Testament grec, mis en évidence par l'organisation diverse d'un méme vocabulaire selon les ouvrages (Peler WHALE)  ; et pour terminer, un sujet rarement abordé, à savoir l'illustration décorative des dictionnaires, (qui n'a pour fonction ni de montrer ni de définir), fait l'objet d'une belle étude du grand spécialiste Ladislav ZGUSTA, à qui n'échappe aucun aspect de la production lexicographique.

G. J. FORGUE
Université Paris III -Sorbonne Nouvelle
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Dominique LABB~ , Le vocabulaire de François MITTERRAND,
Presses de la fondation nationale des sciences politiques,
Paris, 1990, 326 pages.

L'étude de Dominique LABBÉ sur le vocabulaire de François MITTERRAND s'appuie sur un large corpus de 305 124 mots correspondant aux 68 intervenàons radiotélévisées du chef de l'État au cours de son premier septennat, plus précisément entre le 14 juillet 1981 et le 22 mars 1988. Le fait que le président ait plus ou moins renoncé aux allocutions dans ses prestations radiotélévisées au profit de formules aussi proches que possible de la conversaàon consàtuait une assurance, recherchée au départ, que le texte étudié serait bien de MITTERRAND lui-même.
Le dépouillement des textes a été soigneusement réalisé conformément à la norme de Saint- Cloud pour le découpage en mots et à celle de MULLER pour la lemtnaàsaàon. Le traitement informaàque, qui occupe ici une place importante, a été fait sur micro-ordinateur -cela mérite d'être souligné- au Centre de recherche sur le poliàque, l'administration et le territoire de l'Insàtut d'études politiques de Grenoble.
Les études quanàtaàves du vocabulaire des hommes poliàques français ne sont pas trbs nombreuses. Aussi, voulant éclairer son sujet en faisant ressortir l'originalité et la spécificité de la langue de Mitterrand, LABBÉ a dû compléter son corpus en dépouillant deux débats télévisés (celui de mai 1981 entre V. Giscard d'Estaing et F. Mitterrand et celui d'avril 1988 entre J. Chi- rac et F. Mitterrand), de même que les entreàens télévisés du Général de Gaulle avec M. Droit pour le second tour de l'élecàon présidentielle de 1965. Cette heureuse iniàaàve a permis d'établir tout au long du volume d'intéressantes comparaisons entre le vocabulaire de Mitterrand et celui de ses rivaux d'hier et d'aujourd'hui.
On apprend, par exemple, que "les discours du général de Gaulle et de F. Mitterrand semblent s'opposer dans leurs caractérisàques principales" (p. 90). "Le général de Gaulle uàlisait pratiquement trois fois moins la première personne du singulier que F. Mitterrand" (p. 12), dont le comportement ressemble ici plutôt à celui de J. Chirac. Le général utilisait aussi un vocabulaire moins riche que celui de Mitterrand. On apprend aussi que les verbes d'action occupent une place beaucoup plus réduite chez Mitterrand que chez de Gaulle, Chirac ou Giscard d'Estaing (p. 29). La comparaison permet par ailleurs d'attester de "l'existence d'un lexique propre à la vie poliàque française"  :LABBÉ précise en effet que des mots comme "France, pays, gouvernement, Français, politique, République, président, ministre, État, Europe pour les substanàfs, national, social ou européen dans les adjectifs connaissent une fréquence d'emploi beaucoup plus forte chez les poliàques que dans les deux dicàonnaires de fréquences" (pp. 23- 24) qui lui servent de références.
177 Mais l'essentiel du travail de LABBÉ réside non pas dans la comparaison mais bien dans l'analyse interne du vocabulaire présidentiel. Le premier chapitre porte sur l'étude des vocables les plus fréquents et sur la répartition de ces vocables et des catégories grammaticales dans le texte. Parmi les principales conclusions de ce chapitre, notons que "pour l'essentiel, F. Mitter- rand utilise de manière personnelle un vocabulaire banal" (p. 57) et que son vocabulaire habituel (paz opposition à son vocabulaire circonstanciel, moins également réparti), privilégie la pazole qui devient littéralement pour le président un moyen de gouverner  :n'est-il pas celui qui expose, précise, accorde que, résume, confie, propose, depuis l'Élysée 7
LABBÉ ne se contente pas d'une analyse rapide de la fréquence. II fait constamment référence aux contextes dans lesquels se trouvent les mots. Paz exemple, il relève que le verbe entendre est fréquent chez Mitterrand mais il souligne aussi que "le quart des emplois de ce verbe sont construits avec la conjonction "mais" sur le modèle  :"j'entends bien... mais...". Et il poursuit l'analyse en indiquant combien de fois la formule est utilisée en s'adressant à tel ou tel groupe social (p. 30). On pourrait multiplier les exemples de cas semblables où l'analyse fouillée de LABBÉ nous livre des secrets que la fréquence n'aurait pas pu dévoiler seule.
Mais chaque vocable appartient aussi à un "univers lexical" dans lequel il se définit paz ses combinaisons syntagmatiques autant que paz ses rapports paradigmatiques d'équivalence ou d'opposition. Dans le deuxi8me chapitre, LABBÉ étudie ces univers lexicaux, en particulier ceux de je, président, France, Français, nous, on, eux les autres, et montre comment le discours de Mitterrand s'organise essentiellement autour de sa propre personne dans un tissu de relations mettant en jeu la première personne institutionnelle ("Moi le président"), la première personne du pluriel en rapport avec le pays ("Nous la France") et la première personne du singulier en rapport personnel avec les Français ("Moi et les Français"). En dehors de la première personne, l'univers lexical s'organise autour de Eux les autres.
La façon dont LABBÉ détermine un univers lexical est originale  : il compte d'abord la proportion des phrases dans lesquelles apparaît le vocable dont il veut étudier l'univers lexical. Cette proportion permet de calculer le nombre attendu d'occurrences (dans ces phrases) de chacun des autres vocables du corpus. Un test d'écart réduit détermine ensuite les vocables qui sont significativement plus (ou moins) fréquents dans ce contexte ou "univers lexical" du vocable à l'étude. Le fait de retenir la phrase comme unité de base de l'univers lexical ne manque pas d'intérêt, et il nous semble que ce point de départ doit être maintenu, mais on peut se demander si la proportion de phrases contenant le vocable est bien la meilleure norme de la fréquence des autres vocables associés à son univers. La longueur des phrases est en effet fort variable. II nous paraîtrait donc plus juste de calculer la fréquence théorique des vocables en multipliant leur fréquence dans le texte de longueur N par la proportion NyN, N' désignant le nombre de mots compris dans les phrases contenant le vocable à l'étude.
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Le troisième chapitre porte sur la richesse du vocabulaire présidenùel. LABBÉ explique d'abord que le concept de richesse recouvre des réalités assez différentes  : il utilisera donc des indices différents, et relaùvement nouveaux. L'indice de diversité du vocabulaire ("le nombre de vocables différents [...]") ne sera donc pas confondu avec l'indice de spécialisation ("le poids relatif du vocabulaire spécialisé par rapport au vocabulaire total du texte") ou l'indice d'originalité du vocabulaire ("le rapport entre le nombre observé et le nombre attendu de vocables propres à chaque texte").
L'étude de l'accroissement du vocabulaire amène e~n LABBÉ à découper le septennat en quatre périodes  :"l'ère des réformes (juillet 81-mai 83)" sera suivie du "temps de l'effort et de la modernisaùon (mai 83-janvier 85)", puis de la période oil le jeu poliùque se fait "majorité contre opposiùon (avril 85-octobre 86)"  ; le septennat se termine sur la rivalité entre "le président et le Premier ministre (octobre 86-mazs 88)". Chacune de ces périodes est analysée en détail dans le quatrième chapitre au moyen notamment de la noùon de "spécificité" du vocabulaire, c'est-à-dire de vocabulaire caractérisùque.
Le dernier chapitre porte sur les phrases du président. Après avoir étudié les mots et les champs lexicaux, LABBÉ s'intéresse maintenant i1 la manière, c'est-à-dire au style de F. Mitter- rand. Il analyse d'abord la longueur et la complexité des phrases du président au moyen des procédures proposées paz Conrad BUREAU dans Linguistique fonctionnelle et stylistique objective, PUF, 1976. Étudiant un échantillon de 1000 phrases, LABBÉ fait ainsi ressortir le maniérisme et la faiblesse de la coordinaùon dans le style de Mitterrand dont il re18ve aussi les procédés favoris qui sont la pazenthèse, l'insistance et l'inversion rhétorique.
Le livre de LABBÉ se termine sur 3 annexes  : un index alphabétique des lemmes et des formes avec leur fréquence et leur indice de réparùùon, un classement par catégorie grammaricale et paz ordre de fréquence décroissante des vocables dont la fréquence est supérieure à 10, et un classement chronologique des émissions qui consùtuent le corpus. De tels index sont toujours intéressants, mais on peut se demander ici si le premier des trois n'occupe pas, du moins en pazùe, un espace gdil aurait mieux valu réserver à d'autres fins. On semble en effet avoir manqué de place - à moins qû il ne s'agisse d'un parti pris (de l'éditeur  ?) -pour exposer la méthodologie statistique sous-jacente aux analyses dont on présente les résultats dans le volume. Il aurait pourtant été facile, en ne conservant que les lemmes, de réduire de plus de moitié ce premier index qui occupe plus d'une centaine de pages.
On trouve certes en encadré l'essenùel de la significaùon de noùons comme La répartition d'un vocable dans un texte (p. 45) ou Diversité, spécialisation, originalité, croissance du vocabulaire (p. 112) ou Spécificités et stabilité du vocabulaire (p. 138). Dans ce dernier cas, la brièveté de l'encadré se justifie assez facilement puisgti il s'agit d'une noùon bien connue, qui est d'ailleurs exposée dans le manuel de MULLER, devenu classique, Principes et méthodes de statistique lexicale, auquel on renvoie le lecteur. Mais lorsqu'il s'agit d'une formule nouvelle,
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comme celle de l'indice de réparààon d'un vocable dans un texte, on souhaiterait avoir au moins la formule et un peu plus d'explicaàons. De même pour les indices de diversité, de spécialisaàon et d'originalité qui reposent sur un modèle original et assez complexe de parààon du vocabulaire. On ne peut pas dans un tel cas se contenter d'un simple renvoi à l'article de LABBÉ et HUBERT dans Études sur la richesse et la structure lexicales, Paris-Gentve, Champion-Slatkine, 1988, d'abord parce qu'il ne s'agit pas d'un manuel, ni d'un classique, mais aussi parce que cet article ne parle pas de l'indice d'originalité dont on conànuera ainsi d'ignorer jusqu'à la formule, même après avoir consulté les Études.
L'ouvrage de Dominique LABBÉ est riche de renseignements et d'analyses qui intéresseront le poliàcologue et qui aideront à mieux comprendre le premier septennat du président MITTERRAND. Le linguiste lexicologue pourra aussi y trouver une belle illustration de l'intérêt et de la rentabilité d'une étude quanàtaàve du vocabulaire. Quant au spécialiste de l'analyse lexicométrique, il notera une originalité certaine dans le traitement quantitatif tout en déplorant de ne pas disposer des formules ni des explicaàons ou discussions qui auraient permis de mieux comprendre et de mieux situer ]a valeur des nouveautés proposées.
A. COSSETTE
Université du Québec àTrois-Rivières




Gitte BAUNEBJERG HANSEN, Artikelstruktur im zweischprachigen WSrlerbuch. Überlegungen zur Darbietung von Übersetzungsllquivalenten im
WSrterbuchartikel. (Structure des articles dans le dictionnaire bilingue. Réflexions sur la présentation d'équivalences de traductions dans l'article de dictionnaire), in Lexicographica, Series Maior 35, Max Niemeyer Verlag, Tübingen 1990, 196 p.


Gitte BAUNEBJERG HANSEN, de l'Insàtut d'allemand de l'Université des Sciences Économiques de Copenhague, s'inspire de la définiàon générale qu'a donnée F.-J. HAUS- MANN du dicàonnaire  :une collection d'unités lexicales présentées au moyen d'un support déterminé, pour lesquelles on donne des informations déterminées destinées d un utilisateur déterminé, ces informations devant être organisées de manière d permettre un accès rapide d l'information spécifique recherchée. Il s'agit ici d'appliquer cette définiàon aux dictionnaires bilingues, qui doivent être conçus en tenant compte des besoins spéc~ques des uàlisateurs.
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Ceux-ci sont en droit d'exiger une certaine unité dans un dictionnaire bilingue. Or cette condition est loin d'être remplie dans tous les cas. Trop souvent les différents articles des dictionnaires sont construits selon des principes variables, que l'utilisateur est ainsi amené à découvrir dans chaque cas particulier. En supprimant cette disparité, on peut faire gagner beaucoup de temps à l'utilisateur du dictionnaire. C'est là le but de l'auteur (1, pp. 1 il 4).
L'ouvrage commence paz une analyse détaillée de l'état de la recherche sur ce sujet. Dans cette partie sont abordées une typologie des dictionnaires bilingues et les questions de la microstructure des articles, de la signification en lexicographie bilingue, des rapports d'équivalences, de la différenciation des sens, et des exemples (leur définition et leur fonction) (2, pp. 5 il 26).
L'accent est mis sur la compétence de l'utilisateur de dictionnaùe. Les questions de choix de la nomenclature ont volontairement été laissées de côté, ainsi que celles des informations de nature grammaticale.
L'auteur analyse un ensemble de dictionnaires, en traitant d'abord de questions terminologiques avant de s'intéresser plus particulii ;rement aux buts visés paz les dictionnaires et au public auquel ils prétendent s'adresser d'après leurs préfaces  ;l'optique de départ des dictionnaùs est analysée, les informations implicites et explicites en sont extraites, et des modèles de microstructures sont présentés (organisation interne des articles) ;les principes annoncés par les auteurs de dictionnaùes sur la composition du dictionnaire et la nature des informations qu'ils proposent, ainsi que les applications pratiques que l'on peut constater sont exposés et discutés à travers des exemples précis (cf. le principe du classement alphabétique des exemples) (3, pp. 27 il 95).
Ce sont 10 dictionnaùs qui ont été sélectionnés  : 4 dictionnaires danois-allemand, 5 dictionnaires allemand-danois et un dictionnaire néerlandais-allemand (VAN-DALE), qui apparaît nettement mieux structuré que les autres.
Le chapitre suivant est consacré i1 la construction d'un modèle théorique de structure d'article généralisable, avec la prise en compte de principes directeurs et l'exposition de consignes de rédaction (4, pp. 96 à 141).
Il est rappelé que l'on hésite parfois entre un ensemble quasi implicite d'informations denses et concentrées (paz exemple paz le biais de citations riches en informations, données sans commentaires), et des informations explicites sous une forme métalinguistique claire et détaillée. Cette dernii;re solution prend, matériellement, souvent plus de place, ce qui est un inconvénient certain. Mieux vaut cependant avoù recours i1 l'information explicite, et éviter ainsi nombre d'erreurs d'interprétation. Les travaux d'archivage d'information en we de l'informatisation
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de dictionnaires ne peuvent que conduire à ce choix  :l'information en clair, facilement codifiable, est absolument recommandée (cf. les travaux de l'équipe Danlex) (p. 97).
Gitte BAUNEBJERG i3ANSEN propose 9 principes à retenir pour faciliter au maximum la consultation du dictionnaire
- déterminer avec précision le public visé et ses exigences,
- les informations proposées dans le dictionnaire devront correspondre aux besoins du public,
- les informations devront être en harmonie avec le type de dictionnaire de traduction,
- renoncer totalement it des informations en langue cible même dans un dictionnaire "passif' (donc en langue maternelle) serait une erreur,
- les équivalents proposés et leur disposition doivent dépendre des relations existant véritablement entre l'entrée et sa traduction, et non pas dépendre uniquement de la structure sémantique de la vedette, comme dans le dictionnaire monolingue,
- toutes les différenciations de signification doivent être précisées dans la langue maternelle, - des instructions et consignes de rédaction strictes sont nécessaires pour l'aménagement et la dispositon des informations de microstructure,
- la préface du dictionnaire doit être claire sur les principes de composition et de disposition des articles,
- les informations présentes dans le dictionnaire doivent être autant que possible explicites

Dans les deux types de dictionnaires (thème et version), et pour toutes les catégories de mots, les articles se composent de deux parties
- la partie A, obligatoire, avec la vedette, ses équivalents de traduction "généralisables" et des exemples illustratifs,
- la partie B, avec les groupes de mots et diverses indications et informations lexicales (phraséologies, collocations, idiomes et leurs traductions).
D'apr8s l'auteur, selon qu'il s'agit d'un dictionnaire de thème ou de version, la structure de la partie A est modifiée, mais jamais celle de la partie B. La partie A du dictionnaire de thème recueillerait ainsi surtout des données organisées d'après des critères sémantiques, alors que la partie A du dictionnaire de version recueillerait des données organisées selon des critères syntaxiques (p. 102).
Gitte BAUNEBJERG HANSEN propose enfin 42 pages d'articles modèles conformes aux conclusions tirées de ces diverses analyses et tenant compte des principes érigés dans les chapitres 1 à 4 (S, pp. 142 it 186).
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Il s'agit donc d'un ouvrage de métalexicographie et de métadictionnairique (nous souhaitons introduire ici l'utile distinction que fait B. QUEMADA entre lexicographie, analyse et traitement du vocabulaire dans les textes, et dictionnairique, science de la confection des dictionnaires).
Gitte BAUNEBJERG HANSEN analyse exclusivement des dictionnaires bilingues. Plus exactement, ce sont uniquement des dictionnaires bilingues prenant en compte l'allemand et le danois qui sont discutés, de même que ces seules langues ont été utilisées dans les exemples d'articles nouveaux proposés en fm d'ouvrage. Dans la lexicographie-dictionnairique bilingue, on accorde une grande importance au "principe actif-passif' (Aktiv-Passiv-Prinzip), différence entre le dictionnaire d'encodage et le dictionnaire de décodage, entre le dictionnaire de thème et le dictionnaire de version  :l'auteur discute la validité du "criti !re de transparence" (Transparenzkriterium), selon lequel les syntagmes proposés dans le dictionnaire de version seraient naturellement "transparents" et immédiatement compréhensibles pour le consultant.
Cependant tout lexicographe et tout faiseur de dictionnatre ou dictionnariste pourra trouver dans les nombreuses analyses et discussions proposées paz l'auteur des sujets de réflexion proches des siens ou identiques aux siens  : la lexicographie et la dictionnairique bilingues allemand-danois ou danois-allemand abordent aussi des problèmes de dictionnairique générale, et ces questions d'ordre général intéresseront le plus grand nombre de lecteurs. Paz exemple, l'importance du public visé (p. 6) est la même pour toute production dictionnairique.
La démarche méthodologique adoptée  : I.es analyses des dictionnaires ont d'abord été faites à partir d'une lecture détaillée d'un ensemble d'ouvrages et d'articles portant sur les dictionnaires et couvrant ces vingt dernières années, en privilégiant la dernière décennie (la bibliographie répertorie 60 titres, en grande majorité en allemand). Des comptes rendus en sont donnés de façon trbs précise et des discussions sont engagées sur de nombreux sujets.

L'analyse de dix dictionnaires témoins vient en second lieu, d'un point de we sémantique, pragmatique et syntagmatique.
l.a proposition de principes nouveaux clôt le tout, avec la rédaction d'articles modèles, issus des conclusions de l'auteur d'après ses lectures et d'apri :s des analyses personnelles de la pratique des usagers.
I.a démarche est donc analytique, et les références fréquentes et précises i1 la littérature secondaire sont un guide précieux tout au long du livre. Ce choix entraîne aussi quelques difficultés de lecture, et certains éléments du plan pourraient pazaître répétitifs (comme les questions de "microstructure" en 2.2. (Die Mikrostruktur), en 2.3. (Attjbau der Mikrostruktur) et en 3.4.1. (Modelle der Mikrosrruktur), ou de "différenciation des sens (Bedeutungsdiffe- renzierung)" en 2.2.3. et en 3.6.3. (Notons, en passant, l'inutile numérotation en 4.3.4.1).
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La nécessité d'un important effort terminologique a été soulignée (p. 8), et l'auteur a tenté certaines mises su point en we d'une meilleure expression et d'une meilleure entente entre spécialistes. Mais un index terminologique aurait beaucoup aidé le lecteur à travers l'exposé minutieux et analytique de G.B.H., ainsi qu'un index des noms d'auteurs cités. À défaut, le lecteur est tenté de faire lui-même ces relevés "Hinübersetzungswbrterbücher" /"Heriibersetzungswarterbücher" (dictionnaires de thème /dictionnaires de version), reencoding dictionaries (p. 6), "Funktion des Herübersetzens"/"Funktion des Herverstehens" (fonction de traduction de la langue étrangère vers la langue source/fonction de compréhension de la langue étrangère) (p. 6), "referentielle Bedeutung"/"pragmatische Bedeutung"/"intralinguistische Bedeutung" (signi)<cation référentielle/ pragmatique/intralinguistique) (p. 11), "Vollttquivalenz/ Nullkquivalenz/partielle Aquivalenz" (équivalence totale qui est très rare sauf dans les domaines technoscientifiques/équivalence nulle qui peut être remplacée par une traduction de définitions/ équivalence partielle (pp. 13-14)), paraphrases métalexicographiques (p. 16), "bifunktionales Wôrterbuch" (dictionnaire conçu pour les locuteurs des deux langues /Monofunktionales WSrterbuch" (dictionnaire conçu pour le locuteur d'une seule langue) (p. 18), unité lexicale, vedette et lemme, équivalent, exemple (p. 27), collocations et son synonyme syntagmes idiosyncratiques, phraséologies et idiomes (p. 28).
L'analyse révèle tout au long de l'ouvrage les imperfections et inhomogénéités des dictionnaires bilingues allemands-danois ou danois-allemands. Si les chercheurs consultés par Gitte BAUNE$JERG HANSEN proposent souvent des solutions aux problèmes soulevés, l'auteur en revient généralement à souligner l'insuffisance de ces solutions, qui sont elles-mêmes fréquemment remises en cause, et ses appréciations demeurent donc dans l'ensemble négatives. Les dictionnaires bilingues sont peu engageants, l'analyse est franchement décourageante. On peut se demander si la véritable difficulté ne réside pas, tout simplement, dans le fait que les équivalences de traduction n'existent pas, ou n'existent qu éxceptionnellement. D'autre part, est- il envisageable de tracer des cadres généralisables pour la présentation d'équivalences dans les dictionnaires bilingues 7 Des consignes peuvent-elles être données, qui soient utilisables dans tous les cas  ? On est en droit d'en douter. Car un mot n éxiste jamais seul, il est en contexte, et il en est de même pour l'équivalent qui doit lui être proposé. Il n'y a d'équivalence qu'en contexte (v. p. 15), et tout contexte diff8re de son voisin. N'est-ce pas là le paradoxe du dictionnaire qui voudrait décrire la Langue d'une manière parfaite, tout en décrivant un ensemble d'usages  ?Mais quelle serait la solution  ?
Il semble, d'après cet ouvrage, qu'un effort très important soit à fournir du côté de la lexicographie-dictionnairique bilingue. Souhaitons que Gitte BAUNEBJERG ait visé juste, et que ses propositions soient suivies d'effet.
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Spécialisé dans la métalexicographie-métadictionnairique bilingue, cet ouvrage propose aussi de nombreuses réflexions d'ordre général intéressant tout lexicographe et tout faiseur de dicàonnaire, et complète uàlement la série des ouvrages de métalexicographie.

D.CANDEL INaLF -CNRS





Terminologie et enseignement des langues
Colloque International de l'Association Européenne des Linguistes et
des Professeurs de Langues (AELPL), 31 janvier et ler février 1991,
Cergy-Pontoise, France, au Conseil Général du Val d'Oise


Les présidents de la Conférence, J.-P. ATTAL, président de l'AELPL, et J. HIJMBLEY, responsable du Centre de Terminologie et de Néologie (CTN, CNRS-INa1F), avaient ainsi exprimé le but de ce premier Colloque de l'AELA "préciser (...) en quoi consiste la terminologie, (...) examiner comment elle s'insère dans le tissu économique et social européen, quels sont les nouveaux outils, surtout informatiques, et les nouvelles carrières qui s'ouvrent".
Cette rencontre a atteint son but, elle a permis de très fructueux échanges d'informaàon sur les outils, les carrières et les techniques de la terminologie.
Les lexicologues, les lexicographes et les dicàonnaristes, même s'ils étaient minoritaires, auront pu recueillir, lors de ce colloque, des informaàons ou des appréciaàons du plus grand intérêt. En effet, les démarches des terminologues et des enseignants linguistes ne sont pas fondamentalement différentes des leurs.
Dans sa conférence introducàve, J. GOETSCHALCI{J{ (CCE, Eurodicautom, SaNT) a rappelé combien le linguiste professionnel est aujourd'hui tributaire des ressources termino- logiques. Bien qti il dispose maintenant de données terminologiques sur support informaàque, et que les dicàonnaires, nomenclatures et glossaires sur papier ne soient plus ses seuls outils, les ressources terminologiques restent souvent inférieures aux besoins réels du traducteur. Terminologue, linguiste et spécialiste devraient, par ailleurs, travailler ensemble.
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1. Définitions et situation de la terminologie
La conférence de G. BUDIN (Université de Vienne) (et Chr. GALINSKY, empêché (Infoterm, ISO, Termnet)), La science et la terminologie et ses applications présentes et futures, souligne le danger de la crise de l'information et de la terminologie, due à la somme toujours grandissante des documents sur la connaissance dans le monde, qui s'accumulent de façon presque chaotique. Les méthodes terminologiques et les systèmes terminographiques modernes sont d'une importance capitale. G. BUDIN a tenté de formaliser les relations qui devraient unir les linguistes, la recherche en LSP et la terminologie ; il a proposé une représentation scientifique du rôle de la terminologie dans la communication spécialisée ainsi que dans l'information et la documentation.
D'autres intervenants ont tenté une approche de définition de la terminologie  : "À chaque fois qu'une tournure est spéciale i~ un méfier déterminé, nous sommes en terminologie", précise paz ailleurs J. GOETSCHALCKX. Pour P. WUNANDS, la "terminologie couvre trois domaines pratiques (...)  : la normalisation (...), la traduction et les systèmes d'information". Elle ne consiste pas seulement à enregistrer des termes mais aussi i~ analyser et à créer, ajoute-t-il.

2. La terminologie et les entreprises
La formation terminologique
P. THOMAS (Université du Surrey), T. HARTLEY (Brighton Polytechnic, ISO, CEN), A. KUKULSKA-HULME (Aston Univ., Birmingham) et T. HARTLEY (Brighton Polytechnic) évoquent leurs expériences d'enseignement de la terminologie, généralement informatisée, en collaboration avec l'industrie (p. ex. dans le domaine médical). P. THOMAS dispose d'outils importants pour l'analyse des termes techniques, comme les lecteurs optiques  ;ses investigations passent par les études de fréquence. T. HARTLEY souligne l'importance d'une meilleure information terminologique aussi bien dans les milieux plurilingues (traducteurs) que dans les milieux monolingues (rédacteurs techniques). A. KUKULSKA-HULME déplore le manque de connaissances approfondies en terminologie dans les entreprises et le manque d'initiation à la rédaction technique. Il faudrait améliorer les moyens informatiques mis à la disposition des rédacteurs techniques, en particulier des traducteurs de textes techniques.
La terminologie dans l'entreprise
S. CHAUDIRON (DIST, MRT, Université de Paris X) rappelle que la terminologie, qui est une activité de production linguistique utilisant de plus en plus l'outil informatique, fait place à la terminotique. C'est aussi une activité de transfert de connaissances, d'information, qui a sa part dans la veille technologique. Les trois axes principaux de l'activité de la DIST sont "l'identification des domaines stratégiques, le soutien il la production terminologique multilingue
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dans ces domaines, le souàen 3 la diffusion de préférence électronique des ressources terminolo- giques à des fins de formaàon et d'informaàon". Ch. MAYER (IBN France) souligne que l'on est surtout obligé de travailler vite, dans l'urgent. Les bases de données sont donc indispensables. Tous les centres de traducàon dTBM du monde foncàonnent avec le même logiciel. On relève une inévitable proliféraàon de terminologies parallèles, fruits de lexiques individuels ;ces lexiques ne sont pas toujours fiables. C. BUREAU (SYSTRAN) expose les deux axes de recherche de sa société  : traducàon automaàque (1 500 000 mots traduits du russe paz mois par l'US Air Force), et base de données terminologiques (entre 120 000 et 500 000 termes codés). J.-J. PERROT (SITE) souligne que la terminologie peut fluctuer, n'étant que rarement normalisée. II est nécessaire de concevoir la créaàon d'une terminologie monolingue dans le contexte spécifique de l'entreprise avant de parler de terminologie multilingue. A. BERMAN (Centre Jacques Amyot) organise depuis 1987 des stages pour traducteurs d'entreprise. Les entreprises expriment une forte demande en méthode et en stratégie de terminologie, en poliàque terminologique (500 traducteurs salariés de l'entreprise ont assisté i1 ces stages).

3. La pratique de la terminologie
P. WUNANDS (Euroterm, Maastricht), disàngue la terminologie bi- ou mulàlingue, la terminologie monolingue, la terminologie documentaire, la terminologie cognitique, la temrinologie temrinoàque (infomraàsaàon de ces concepts terminologiques), la terminologie de l'aménagement linguisàque. M. SLODZIAN (CRIN, INaLCO) a pour objecàf la production de dictionnaires tradiàonnels et électroniques, de bases de données lexico-tem~inologiques, de bases de connaissances bi- ou mulàlingues. Elle essaie de marquer les différences entre les sciences et les techniques. Elle note qu'on attribue it la technique les caractères de la science. On ne peut plus prétendre aujourd'hui qû il y ait une rupture entre sciences et techniques (40 96 des mots nouveaux qui entrent dans les dicàonnaires généraux de vocabulaire commun étant d'origine technique). Les taxinomies rigides du passé ne conviennent plus au traducteur d'aujour- d'hui. E. TEN PAS (Vrije Universiteit, Amsterdam) insiste sur l'importance des collocations, de la phraséologie, i1 prendre en compte de manière systémaàque et détaillée, puisque ce sont bien les textes qui communiquent les connaissances spécialisées. J.-M. HENNING (Université de Clermont-Fetrand, Cézeauterm, Terminformaàque) s'est penché sur la quesàon de "l'incidence des nouveaux ouàls de l'informaàque sur les techniques d'élaboraàon des dictionnaires technico-scientifiques". L'importance prise par les traducteurs influence l'interprétaàon praàque de la terminologie générale et théorique, ce qui modifie le statut du terme paz rapport à celui de la noàon. II faut aujourdmui des systèmes flexibles.
187 4. La terminologie dans le cursus de formation linguistique
J. HUMBLEY (CTN, CNRS-1Na1F) rappelle que c'est parle biais de la traduction que la terminologie a trouvé une place dans l'enseignement supérieur dans certains pays réputés monolingues comme la France. L'évaluaàon des cursus reste à faire. A. DUVAL (Dicàonnaire Le Robert) présente le point de vue du lexicographe de dicàonnaire bilingue, qui arrive en aval du terminologue et en amont du traducteur (le dictionnaire étant outil d'apprentissage linguisàque). Le terrtte proposé paz le terminologue devra subir des tests d'acceptabilité, répondre à des critères de fréquence, et être dénué de toute ambiguïté (cependant, dans le cas d'éléments polysémiques, une accepàon rare peut être retenue, dans un but de désambiguïsation). Le lexicographe sera moins volonàers néologue ou emprunteur que le terminologue. P. LERAT (Université de Paris Nord, fondateur du CTN) présente le cadre de son enseignement de rédaction technique et de terminologie (sémiotique, documentaàon, bureautique, rédaction générale, lexicographie, terminographie, gestion de données, qui comprend l'esquisse d'un carnet de vocabulaire électronique). Z. GUEVEL (Université de Trois Rivières, Québec) rappelle que le français des affaires, sur lequel elle travaille, représente 30 ~o du volume de traducàons du Secrétariat d~tat du Canada. Elle accorde une grande importance au vocabulaire en contexte et aux cooccurrences. J. SCHLISSINGER (Université de Pazis Nord, INaLCO) souligne l'inadéquaàon qu'il peut y avoir entre les disponibilités terminologiques et les situations sur le
terrain.
5. Enseignement de la terminologie et productions de terminologies
D. GOUADEC (Université de Rennes In a pour principes directeurs une réflexion sur les langages techniques, sur les enjeux de la communication technique, des réalisations pratiques, des combinaisons de compétences, l'intégration absolue langue-technique. Il expose la structure de la fotmaàon qu'il offre et les caractérisàques des produits terminologiques qu'il fait réaliser (cf. sa Terminologie, parue chez AFNOR Gesàon) ; il compose des "dicàonnaires terminologi- ques". Il insiste sur la nécessité de fonder les acquisitions sur une praàque de type professionnel impliquant et favorisant la maîtrise des divers ouàls informatiques.
6. Les organisations internationales et la terminologie
M. J. de SAINT-ROBERT (ONU) décrit le profil du terminologue de l'ONU, et les contraintes qui sont les siennes. Les termes sont classés hiérarchiquement ;les équivalences sont données, ainsi que les termes à proscrire ; ce sont les domaines généraux qui sont retenus, au détriment des secteurs hyperspécialisés.
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7. Les grandes banques de terminologie
Elles ont été énumérées et décrites paz J. GOETSCHALCICX. R. GOFFIN (CCE, Bruxelles) présente un historique des banques de terminologie. Certains fichiers sont multidirec- tionnels, d'autres sont bidirectionnels. Toutes les banques visent à engranger des technolectes. On a besoin de recherches sérieuses en terminologie différentielle, contrastive.
Après un exposé de C. H. STOLL (EUROLUX, Luxembourg) sur les techniques informa- tiques, J.-P. VAN DETH (ENS PTT, Expolangues) a rappelé l'évolution de la problématique de la terminologie en France, et la succession des institutions de terminologie (comme Afterm, Franterm, le centre Jacques Amyot, le CTN, les Commissions ministérielles de terminologie). Priorité devrait être donnée aux terminologies monolingues, avant de penser aux terminologies multilingues. Il est permis de rêver d'un métier de "temrinologue-néologue-normalisateur".

En guise de bilan
Comme on pouvait s'y attendre, plusieurs questions générales très importantes ont été soulevées, discutées, critiquées au cours de ce colloque. Outre une question aussi matérielle -mais combien importante- que
- comment faire pour trouver les experts nécessaires à tout non spécialiste qui se mêle de langues de spécialistes  ?
Certaines questions plus théoriques sont restées en suspens
- quels sont le rôle et l'importance de la définition paz rapport su rôle et à l'importance du contexte dans une fiche terminologique  ?
- quels sont les rapports entre langue et terminologie 7 Les termes ont-ils un statut  ? - quels sont les rôles de la sémasiologie et de l'onomasiologie en terminologie  ?
- quels sont les rapports ou les différences entre la démazche lexicographique (ou dictionnairique, l'art de faire des dictionnaires) et la démazche du terminologue ou plutôt du terminographe  ?
Ces questions n'ont généralement pas trouvé réponse. Vaines questions de définitions, simples préoccupations de théoriciens, ou futiles questions de... terminologie ont dit certains, ont pensé d'autres. Caz, pour beaucoup, on n'a pas vraiment le temps, aujourd'hui, de s'arrêter à ce
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genre de réflexion  : il faut être efficace, il faut être rapide, il faut produire des terminologies, afin de répondre à la demande.
Ce colloque, bien entendu, réunissait plus de terminologues, de traducteurs et d'enseignants que de linguistes-lexicographes et auteurs de dictionnaires. Mais, du point de vue de ces derniers, il aura eu le mérite de montrer que la démarche du terminologue ne differe pas toujours de celle du rédacteur de dictionnaires spécialisé dans les domaines technoscientifiques. Au contraire, même si les résultats recherchés divergent, les chemins parcourus sont souvent les mêmes. Ne conviendrait-il pas, alors, que les uns et les autres se rapprochent davantage, qu'ils assemblent leurs outils et leur savoir-faire, afin d'aller encore plus vite, et mieux, vers de nouveaux produits  ?
Alors que ce texte est sous presse, les Actes du Colloque paraissent, La TILV éditeur, Collection Paroles et Actes, Paris, mai 1991.
D. CANDEL
INaLF -CNRS