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Classiques Garnier

Sommaire

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Cahiers de lexicologie
    1987 – 2, n° 51
    . varia
  • Pages : 1 à 2
  • Réimpression de l’édition de : 1987
  • Revue : Cahiers de lexicologie
  • Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
  • EAN : 9782812443046
  • ISBN : 978-2-8124-4304-6
  • ISSN : 2262-0346
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-8124-4304-6.p.0007
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 09/11/2012
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
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ASPECTS DU LEXIQUE CLAUDELIEN




This vast and meaty subject really calls for a big book. The following article could be considered as a saemmary of this book, conceived thus : 1. Words whose intimate adequation with the object engenders the impression of what ~. RIVIÈRE once felt to be a 'formidable propriety ; II. Words deeply rooted in the soil... of France or of far off lands ;III. Words peculiar to CLAUDEL : claudelisms, not Words which he actually invented, but which he used with a fiequency and ara art which are all his ; IV. Intrinsically comical Words : on the one hand, portmanteau Words, on the other, creations by way of internat derivation creating an amusing effect ; V. Compound or compoundlderived Words :the former of profane origin and usage ;the latter loan translations from the Vulgate and which abound in the "biblical" works.
Que ses mânes me pardonnent :j'aurais voulu dédier à la mémoire de R.-L. WAGNER (qui fut, avec Charles BRUNEAU, mon maître) quelques-unes de ces pages denses dont il nous a légué le modèle, où beaucoup de labeur caché fait qu'elles enchantent en même temps qu'elles enseignent. La rigueur du sort me contraint hélas ! à bâtir dans la hâte une brève esquisse illustrée de peu d'exemples, là où il faudra bien entreprendre un jour une étude patiente, reposant sur un inventaire copieux de références.
CLAUDEL, comme tout écrivain, est un ouvrier de mots. Sur ce qu'il attendait d'eux -et ce qu'il en obtenait- beaucoup se sont déjà exprimés. Nul, à mon sens, n'a touché plus juste que Jacques Rtv>ÈRE, dès 1910
"Votre oeuvre n'a dans notre passé littéraire aucune préparation. Vous tombez parmi nous avec une violence formidable et inattendue (...). Mais la seule chose par quoi vous vous trahissez Français, c'est cette formidable propriété des mots ;c'est bien notre langue que vous parlez, et avec une justesse énorme que nous ne soupçonnions pas, -commandant aux mots de produire à chaque instant (pour justifier leur sens) tout leur passé, toute leur histoire."i
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Inutile après cela de partir à la recherche de formules sentant la cuistrerie que CLAUDEL vomissait pour tenter de cerner mieux son usage lexical à des fins expressives : le quasi-oxymore redoublé "formidable propriété... justesse énorme" nous installe au centre d'un phénomène stylistique qui en effet prit des allures d'aérolithe. Une question se pose cependant aussitôt :certains traits lexicaux n'appartiennent- ils pas davantage tels au poète lyrique, tels au dramaturge, tels au prosateur -celui des oeuvres profanes (à supposer qu'il en existe une seule qui le soit tout à fait) et celui des commentaires et méditations sur la Bible ?
La réponse est -très globalement- négative, du moins à s'en tenir à l'aspect extérieur des mots. Ce qui change, d'un endroit à l'autre, c'est la charge affective qu'ils reçoivent et plus encore la "tension", la "valeur dynamique" dont ils sont affectés.
Le seul genre où se manifeste le recours à un vocabulaire disons comme lui "espécial", est celui des livres d' "exégèse" -du moins dans leurs parties proprement herméneutiques, car les innombrables excursus dont ils sont entrecoupés rejoignent la veine lexicale des autres proses.
Ajoutons au passage une précision touchant aux à-côtés de l'oeuvre littéraire. Un maniement fréquent de sa correspondance révèle que le lexique de l'épistolier diffère peu de celui de l'écrivain. Lui-même déclara un jour à Robert MALLET qui l'interrogeait à ce propos : "Je n'ai pas deux styles ;j'écris toujours comme ça, à la va comme je te pousse". Ne nous gênons pas pour comger : à la va comme le vent du génie te pousse. Une seule remarque : il ne fait aucun effort dans ses lettres pour éviter les répétitions de termes qui vont parfois au-delà de ce que chacun d'entre nous se permettrait.
A ces réserves près, le code stipulé par la Muse qui est la Grâce ne souffre pas discussion
"Les mots que j'emploie,
Ce sont les mots de tous les jours, et ce ne sont pas les mémes !
Vous ne trouverez point de rimes dans mes vers ni aucun sortilège. Ce sont vos phrases mémes. Pas aucune de vos phrases que je ne sache repren- dre".2
Cependant, parmi ces mots de tous les jours, il en est qui, pour lui, comptent plus que d'autres et auxquels il accorde, par un mouvement volontaire ou non, un statut privilégié. C'est même là l'une des marques les plus ostensibles de son art.
Esquisse d'un inventaire.
Un chapitre particulier, en fait inépuisable mais qu'on ne mentionne ici que