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Classiques Garnier

Présentation

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PRÉSENTATION

On trouve trace des débuts poétiques de Marie Nodier dans la correspondance de son père, dabord dans une lettre adressée à Charles Weiss et datée du 7 décembre 1830, ensuite dans une lettre à Alphonse de Lamartine, en date du 3 décembre 1831. Dans la première, Charles Nodier écrit : « Ma fille sest trouvé un nouveau talent dont je ne me doutois guère. Elle fait des vers dont je nose juger, mais quon ma fait lire pendant quelques jours pour des pièces inédites dAndré Chénier, et qui mont paru admirables. » Dans la seconde, Nodier écrit à Lamartine : « Une muse que vous retrouverez à lArsenal quand vous y reviendrez, cest une petite fille dont vous avez daigné aimer lenfance et sur le front de laquelle vous avez probablement laissé tomber en lembrassant quelque souffle inspirateur. Je ne saurois mexpliquer autrement comment ce talent lui est venu, car lidée de faire entrer dans son esprit le goût dangereux de la poésie navoit jamais passé dans le mien. Cependant elle est poète, elle lest décidément, ou je me trompe comme un bon homme de père, et cela ne seroit pas étonnant. Cest vous qui en jugerez ; mais vous me pardonnerez en attendant cette effusion de tendresse et dorgueil. » En plaçant les débuts poétiques de sa fille sous légide dAndré Chénier et de Lamartine, Nodier lui réserve les plus belles promesses de réussite. Les lectures de Chénier, de Lamartine et de beaucoup dautres poètes ont sans doute contribué à son éveil poétique, mais lexemple paternel nest pas à négliger. Si la notoriété de Nodier ne repose pas sur ses poèmes, il a tout de même publié quelques vers de jeunesse comme les Essais dun jeune barde en 1804 et des Poésies diverses en 1827. De plus, quand on fréquente dans les soirées de lArsenal Hugo, Vigny, Musset, Guttinguer, Fontaney, Arvers, Anaïs Ségalas, Saint-Valry, Paul Foucher, comment échapper à la tentation de versifier soi-même ? Noublions pas non plus que Marie mettait en musique les vers de ses amis : Jules de Rességuier, Sainte-Beuve, Émile Deschamps, Marceline Desbordes-Valmore, Amable Tastu (Cf. Mélodies romantiques, 1831). Cette collaboration lui donnait donc 18une proximité, une familiarité, une véritable complicité avec la poésie de la jeune école romantique. Hugo, dans un poème daté de décembre 1830 « À Madame Marie M. » (Les Feuilles dautomne), ne manque pas de rendre hommage à son double talent de musicienne et de poète :

Deux vierges, Poésie et Musique, deux sœurs,

Vous font une pensée infinie en douceurs,

Votre génie a deux aurores,

Et votre esprit tantôt sépanche en vers touchants,

Tantôt sur le clavier, qui frémit sous vos chants,

Séparpille en notes sonores !

Lœuvre poétique de Marie Mennessier-Nodier est peu abondante et nest pas le fait dune écriture intensive ni régulière. Ce sont souvent des vers de circonstance offerts à des amis ou à la famille, écrits sans réel souci de publication. Cet ensemble qui couvre une cinquantaine dannées se partage en trois périodes : les premiers vers de jeunesse (1830-1835), ceux de la maturité (1836-1869), enfin, les derniers vers dont la plupart sont écrits au début des années 1870.

Des premiers poèmes de jeunesse qui nous sont parvenus, il ne reste quune vingtaine de pièces à peine. La forme brève y est privilégiée, les sonnets représentent un tiers de lensemble et les poésies les plus longues excèdent rarement cinquante vers. En dehors de quelques publications dans des revues ou des journaux, la grande majorité est restée jusque-là inédite. Ce sont en effet des poèmes adressés à des proches sous forme dhommages ou des conseils qui ont avant tout un caractère privé : les destinataires sont des membres de la famille (« À mon père », « À Hippolyte »), des amies (Mélanie Gaume ou Émeline Marandon de Montyel) ou des poètes amis (Vigny ou Fontaney). La Muse de Marie, à ses débuts, reste parcimonieuse et ne recherche pas de publicité tapageuse.

La période suivante (1836-1869) souvre tout dabord sur un geste poétique fort : la publication de La Perce-Neige (1836), un recueil collectif dont Marie est le maître dœuvre et qui a pour sous-titre « Choix de morceaux de poésie moderne ». Même si Marie ny publie quun seul poème « Pour endormir ma fille », même si dans sa préface elle se présente modestement comme « le brin de paille qui noue la gerbe », « Madame Marie Nodier-Mennessier » y fait œuvre de poésie et la critique na pas manqué de saluer limportance et la qualité de son travail. 19Cette deuxième période, pour laquelle nous avons pu rassembler une trentaine de poèmes, confirme les tendances de la première : le dialogue avec les proches ou avec les poètes (Amable Tastu, Musset, Deschamps) se poursuit et la publication nest toujours pas un objectif prioritaire, puisque la moitié de ces textes demeure inédite. Quand ils sont publiés, les poèmes sont dispersés dans des journaux et revues tant à Paris quen province. On note toutefois que lécriture de Marie gagne en ampleur et en puissance et fournit quelques longs poèmes : des poèmes narratifs, « Une légende aragonaise » ou « À Monsieur de B*** », un poème de déploration et de consolation, « À son Altesse Royale Madame la duchesse dOrléans » ou un poème déloge et de célébration adressé à Molière et à son œuvre, « Le Monument de Molière ».

Marie Mennessier-Nodier retrouve un nouveau souffle poétique au moment des bouleversements politiques de 1870 : la guerre franco-prussienne, la chute de lEmpire, les débuts de la IIIe République. Son inspiration renouvelée prend un tour combatif et polémique pour plaindre les malheurs de la France, pleurer la fin de Napoléon et fustiger les nouveaux maîtres du pays, ambitieux et profiteurs. On songe à la déclaration de Victor Hugo dans son poème des Feuilles dautomne, « Amis, un dernier mot ! » :

Oh ! la muse se doit aux peuples sans défense !

Joublie alors lamour, la famille, lenfance,

Et les molles chansons, et le loisir serein,

Et jajoute à ma lyre une corde dairain !

Marie Mennessier-Nodier fait donc retentir sa « corde dairain » en rédigeant onze textes partisans et violents, qui sont par ailleurs accompagnés dans le fonds darchives familiales de textes en prose dans le même registre. On conçoit que ces textes hostiles à Thiers et à sa politique naient pas été publiés en leur temps. Mais dans les derniers vers de Marie, on trouve aussi dautres textes où sexprime une voix plus apaisée qui chante les charmes de quelques paysages ou accompagne les joies et les peines de sa famille proche.

Pour la quasi-totalité de ces poésies, il existe des versions manuscrites : des autographes ou des copies et bien souvent les deux. Ces manuscrits, dans les archives Mennessier-Nodier, se répartissent en sept sous-ensembles assez disparates.

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1. Un cahier cousu de format A4 intitulé : Poësies de Mme Marie Mennessier et renfermant dix poèmes autographes :

« À Madame Adolphe Gaume. Vous êtes, mon amie… »

« À mon père »

« Bénédiction »

« À Hippolyte »

« À Mlle »

« À Clémentine S… »

« Solitude »

« À Mme Adolphe Gaume. Ô vous avez raison… »

« Sur une vignette anglaise »

« À une jeune fille ».

Nous désignerons ce manuscrit sous le nom de « Cahier Poësies ».

2. Un cahier cousu allongé (19 cm x 33 cm), sans couverture et contenant quinze poèmes allographes :

« Sonnet. À Mademoiselle Mélanie G. »

« Sonnet. Cétait un soir dhiver… »

Oh ! comme avec regret… 

Sous cette forme ancienne… 

« À Madame Adolphe G. Vous êtes, mon amie… »

« À mon père »

« Sonnet. Ô mon Dieu ! tant souffrir… »

« Sonnet. Près de rendre mon âme… »

« À mes petits neveux »

« À une jeune fille »

« Sonnet. À M. Alfred de Musset »

« Sonnet. Au même »

« Sur la mort dune jeune fille »

Quand ces petits enfants

« Solitude »

Trois poèmes autographes, sur des feuillets libres, sont joints à ce Cahier :

« À son Altesse Royale Madame la duchesse dOrléans »

« À mes petits neveux »

Près de rendre mon âme… 

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Nous appellerons lensemble de ce manuscrit le « Cahier long ».

3. Un cahier cousu ayant pour titre : Pamphlet politique de Marie Nodier, 1872-1873, suivi de différents poèmes. Le pamphlet proprement dit est constitué de onze poèmes politiques. Seuls « Maison rustique » et La ville est radieuse… échappent à cette classification. Les poèmes se présentent dans lordre suivant :

Lorsque Monsieur Prudhomme…

« À une Auguste absente »

« Ave, César »

Il avait entendu dire…

Bon appétit Messieurs !

« Lux perpetua luceat ei »

Sur ce trône trop haut…

Allons ! venez-y tous…

Elle aimait lEmpereur…

« Maison rustique »

Paris a nommé Barodet…

« Le testament de César »

La ville est radieuse…

Nous nommerons ce manuscrit le « Cahier Pamphlet ».

4. Un cahier cousu de format A5 ayant pour titre, en page de couverture : Thècle. Les dix-huit poèmes quil contient sont déjà présents dans les cahiers précédents :

« À une Auguste absente »

« Ave, César »

Laissez venir à moi…

« Sur une valse de Chopin »

Allons ! venez-y tous…

« Lux perpetua luceat ei »

« Thiers-État »

« Thècle »

« Marie »

« Louis »

Paris a nommé Barodet…

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« Maison rustique »

Voilà que nous touchons…

Bon appétit, Messieurs !

« Le testament de César »

Sur ce trône trop haut…

Cest un fouillis charmant…

La ville est radieuse…

Ce cahier portera le nom de « Cahier Thècle ».

5. Un ensemble de sept feuillets de format A4, simplement pliés en deux. Cest une copie allographe de poèmes déjà rassemblés dans les divers cahiers :

« À une Auguste absente »

« Ave, César »

Quand il fait très chaud…

Elle aimait lEmpereur…

Les trois dernières strophes de Bon appétit Messieurs !

« Lux perpetua luceat ei »

« Per amica silentia lunæ »

6. Vingt-six poèmes ont été recopiés à la fin dun volume de prose manuscrit qui recueille les deux nouvelles de Marie Mennessier-Nodier : Le Marquis de Chavannes et Laura Murillo. Ils sont regroupés aux pages 231 à 271 sous le titre de Poésica.

« Fragmenta. Oh ! comme avec regret… »

« Berceuse pour mes petits neveux, à la mémoire de leur bonne mère »

« Pour endormir ma fille »

« À Mme Adolphe de G… »

« À mon père »

« À une jeune fille »

« Solitude » (Stances)

« À Mlle Jenny B… de S… »

« À M. Fontaney »

« Vieille Chanson » (poèmes dAlexandre Dumas mis en musique par Marie)

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« Sur la mort dune jeune fille »

« Sonnet. Décembre 1835. Près de rendre son âme… »

Ô mon Dieu, tant souffrir…

« Sonnet. Cétait un soir dhiver… »

« Sonnet à A. de M… »

« Sonnet au même »

« Aux enfants dune veuve »

« À M. de B*** »

« Une légende aragonaise »

« À M. le baron Taylor »

Ses jours dataient dhier… 

Voilà que nous touchons… 

La lune me disait… 

Il était une fois… 

Seigneur, vous le voyez… 

Cest un fouillis charmant… 

Ce ensemble de poèmes sera nommé Poésica.

7. Enfin, un certain nombre de poèmes manuscrits ne se rattachent à aucun ensemble constitué et se présentent de manière éparse.

Tous les poèmes ne sont pas datés, mais nous avons choisi, autant que faire se pouvait, un classement chronologique, en prenant appui sur les dates des manuscrits quand elles sont mentionnées ou à défaut sur les dates de publication.