Avant-propos
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Bulletin de la Société Paul Claudel
2019 – 3, n° 229. Paul Claudel face aux philosophes - Auteurs : Mayaux (Catherine), Nantet (Marie-Victoire)
- Pages : 9 à 10
- Revue : Bulletin de la Société Paul Claudel
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN : 9782406099390
- ISBN : 978-2-406-09939-0
- ISSN : 2262-3108
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09939-0.p.0009
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 09/12/2019
- Périodicité : Quadrimestrielle
- Langue : Français
AVANT-PROPOS
Le dossier « Claudel face aux philosophes » propose pour réflexion un ensemble d’inédits et de témoignages sur les liens que Claudel a pu entretenir de son vivant ou susciter par la lecture avec des philosophes de son siècle et du nôtre. La correspondance échangée avec Étienne Gilson de 1928 à 1950 montre le respect réciproque de ces deux hommes – que sépare le temps d’une génération – pour les aventures de l’esprit et la vie spirituelle. Leur amour commun de saint Bonaventure, « immense esprit » écrit Claudel, les rapproche, de même que la profession de foi clairement dite, et la distance amusée pour le siècle dont les honneurs flattent sans combler. L’hommage que Natacha Galpérine rend à son père rappelle l’intérêt profond pour Claudel de Charles Galpérine qui découvre l’écrivain grâce à Albert Béguin. Acteur dans la création de la Société Paul Claudel dont il fut secrétaire général, travaillant à la préparation des premiers Cahiers Claudel comme du bulletin de la Société, il est dans le même temps fasciné, grâce à Georges Canguilhem qui la lui fait découvrir, par l’histoire et la philosophie des sciences, et oriente ses propres recherches vers l’histoire de la génétique moléculaire brillamment explorée à l’Institut Pasteur où il travaille. La trajectoire passionnante de sa vie, secouée par les bouleversements de l’histoire, jalonnée par les « grandes amitiés » si constructives, le conduit du judaïsme au catholicisme, puis à un retour aux racines juives : alors qu’il prépare en 1967 le Cahier Paul Claudel consacré à La Figure d’Israël, Charles Galpérine rencontre Emmanuel Lévinas dont il suivra de 1975 à 1995 l’enseignement talmudique à l’École Israélite Orientale, développant au fil du temps des liens d’amitié avec la famille du philosophe. Au terme de sa vie, Monseigneur Batut, comme en atteste Natacha Galpérine, permit à Charles Galpérine de « relier les fils de son existence, partagée entre deux rives géographiques et spirituelles, celle de la France autour de Claudel et de la “fleur du catholicisme français”, et celle d’Israël et du judaïsme ». Alain Badiou vint en 2018 à Brangues, alors que se jouait sa pièce L’incident d’Antioche, témoigner de tout ce qu’il devait au Claudel de La Ville ; puis, dans une étude publiée dans le numéro 226 de notre 10Bulletin, il proposa sa lecture de La Jeune Fille Violaine. L’entretien que nous publions ici donne une vision élargie de cette relation au Claudel dramaturge et poète, penseur et croyant, qui a marqué le philosophe aux idées politiques et personnelles si éloignées des siennes et dont pourtant il se sent proche : l’admiration transcende ici un clivage pour reconnaître avec sincérité la part de génie du « loyal combattant de sa croyance » et les leçons d’exigence et de style qu’il a voulu aussi faire siennes. L’ensemble de ce dossier tend à montrer comment des personnalités aux trajectoires si riches, si ouvertes et différenciées, aux idées et croyances profondes et différentes, en viennent à accorder leur pensée, dans tous les sens du terme, à celle de Claudel.
Catherine Mayaux
et Marie-Victoire Nantet