Résumés
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
2016 – 1, n° 63. varia - Pages : 199 à 203
- Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN : 9782406060871
- ISBN : 978-2-406-06087-1
- ISSN : 2261-897X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-06087-1.p.0199
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 06/08/2016
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
RéSUMéS/ABSTRACTS
Élisabeth Schneikert, « À propos de la traduction “erronée” de Plutarque par Amyot »
Lors d’un dîner à Rome, Montaigne participe à une discussion où les convives examinent la traduction de Plutarque en français. Ce passage du Journal est tout à fait singulier, puisqu’il prend en défaut Amyot, qui a toute l’admiration de Montaigne, sur des points qui font précisément la qualité exceptionnelle de sa traduction. La façon d’aborder l’erreur dans le texte d’Amyot est une expérience philologique par laquelle se voit définie et ajustée en creux la propre poétique de l’essayiste.
During a dinner in Rome, Montaigne takes part in a discussion during which the guests examine the French translation of Plutarch. This passage of his Travel Journal is absolutely remarkable, since, while Montaigne shows great admiration for Amyot, it catches out the latter’s translation on points which precisely create the exceptional quality of the text. The way Montaigne tackles the notion of error in Amyot’s text is a philological experience through which the essayist’s poetics are defined.
Concetta Cavallini, « Straccinò, stracinò, stracciò ou tormentò ? Encore sur les erreurs (ou prétendues telles) de l’italien de Montaigne »
L’article analyse la partie italienne du Journal de voyage de Montaigne (1774) et la possibilité de l’existence des « erreurs linguistiques » à travers l’exemple de l’interprétation et de la traduction du verbe « straccinò ». L’article se pose aussi la question des livres/manuels que Montaigne pourrait avoir utilisés pour apprendre ou améliorer son italien. Delle phrasi thoscane (1566) de G. Montemerlo présente avec le texte italien du Journal plusieurs analogies qui stimulent la réflexion.
The article analyzes the section of Montaigne’s Journal de voyage (1774) written in Italian and points out the possibility of frequent linguistic misunderstandings through
the analysis of the interpretation and of the translation of the verb “straccinò”. The article also offers an insight into the books that Montaigne could have read in order to improve his Italian language. Montemerlo’s Delle phrasi thoscane (1566) has several points in common with Montaigne’s text that should be analyzed.
Armelle Andrieux, « La “trouppe errante et desvoyée au sentier de perdition”. L’errance comme représentation spatiale de l’erreur »
La métaphore spatiale de l’errance est souvent proche des allusions à l’erreur. L’évocation de la fuite devant la peste est un des passages révélateurs. Montaigne s’appuie sur la réflexion médicale d’alors parasitée par le discours biblique, mais sa fuite annonce aussi celle de Charlotte Duplessis-Mornay devant les massacres de la Saint-Barthélemy. L’errance, image de l’erreur spatialisée, est un vagabondage dont il faudrait s’écarter, mais elle peut également annihiler l’erreur par l’écriture.
The spatial metaphor of wandering is often near to allusions to error. The evocation of flight in front of the plague. Montaigne relies on the medical thought of the time which was influenced by the biblical discourse, but his flight somehow forecasts that of Charlotte Duplessis-Mornay in front of St Bartholomew’s Day massacre. Wandering is an image of spatialised error and that it is also a form of vagrancy to be avoided, but that may annihilate error too by writing.
Bérangère Basset, « Erreur/vérité, mensonge/sincérité, d’Érasme à Montaigne »
L’article confronte les usages, au xvie siècle, du couple erreur/vérité à ceux du couple mensonge/sincérité. Cette étude lexicologique s’appuie sur le texte des Adages d’Érasme et sur celui des Essais de Montaigne pour essayer de déterminer les liens et les tensions entre une appréciation gnoséologique de l’erreur et une appréciation morale de cette même notion. Elle vise à montrer que l’erreur, dans l’ordre du langage, se pose en termes éthiques.
This development compares the uses of error/truth with theses of lie/sincerity in the literature of the xvie century. Based on the Erasme’s Adages and the Montaigne’s Essays, this lexicological study tries to determinate the links between error and lie, between a gnoseological approach and an ethical one. We aim to demonstrate that error, in the language, is envisaged in ethical terms.
Olivier Guerrier, « “La vérité n’est jamais matière d’erreur” »
Cet article entend analyser le sens de la formule « La vérité n’est jamais matière d’erreur » du chapitre « De l’exercitation » des Essais, et en tester la fécondité à l’échelle de l’œuvre entière. Il passe donc d’une enquête in abstracto à une lecture du contexte où elle prend place, pour ensuite de nouveau la délocaliser en l’appliquant à d’autres aspects et enjeux que ceux qui la caractérisent dans le chapitre 6 du Livre II.
This article intends to analyze the meaning of the phrase “La vérité n’est jamais matière d’erreur” in the chapter “De l’exercitation” of the Essais, and test its fertility throughout the entire work. So goes an investigation in abstracto to a reading of the context in which it takes place, then relocate again by applying it to other aspects and issues as those which characterize it in the Chapter 6 of Book II.
Valérie M. Dionne, « “Errare humanum est” ou la monstrueuse errance des Essais »
Penser le monstre comme erreur incite le sujet à questionner la normalité, repenser le moi, la norme, la nature et les superstitions. Pour Montaigne, ceci lui permet de réexaminer l’ordre naturel dans un contexte de crise épistémologique et de reconsidérer la nature selon une conception épicurienne pluraliste, juste et tolérante. C’est en optant pour l’ignorance socratique des phénomènes qu’il en conclut que le monstre est absent de la nature et n’existe qu’en l’homme.
To envision the monster as error encourages the subject to question normality, the self, norms, nature, and superstitions. For Montaigne, it facilitates a reassessment of the natural order in a context of an epistemological crisis, and a reconsideration, in accordance with Epicurean principles, of a diverse, just and tolerant nature. While opting for a Socratic ignorance of natural phenomena, Montaigne concludes that the monster is absent from nature and only exists in the human mind.
Bernard Sève, « Mieux s’instruire “par fuite que par suite”, ou comment user des erreurs d’autrui »
Montaigne soutient qu’il se réforme mieux « par fuite que par suite » : les fausses notes d’un mauvais musicien me ramènent plus sûrement au sens de l’harmonie que d’entendre un bon musicien. Il existe un privilège paradoxal, à la fois cognitif et dynamique, du mal sur le bien, de l’erreur sur la vérité. Cette idée consonne avec l’ontologie de la différence exposée dans les Essais ;
mais son lien avec le contenu du chapitre « De l’art de conférer », auquel elle sert d’incipit, reste quelque peu énigmatique.
In the very beginning of the chapter “Of the art of confering”, Montaigne holds that he better instructs himself “by avoiding than by imitation”. Evil and error have thus a paradoxical advantage on good and truth, an advantage of a cognitive and dynamic nature. Although this idea is consistent with the Montaigne’s ontology which confers much more importance to difference than to identity, its connection with the rest of the chapter “Of the art of confering” remains somewhat mysterious.
Joan Lluís Llinàs, « La place de l’erreur dans la philosophie de Montaigne »
De l’analyse des Essais nous pouvons repérer trois genres d’erreur philosophique : l’erreur cause de la prétention à atteindre la vérité, l’erreur du procédé du jugement, et l’erreur de reconnaissance du jugement. Mais si l’on considère la philosophie de Montaigne comme une forme de vie, la seule erreur possible pour l’auteur est le manque de fidélité à soi-même. Pour le lecteur qui prend les Essais comme une expérience pour mieux régler sa vie, l’erreur n’existe pas.
We find three kinds of errors in the analysis of the Essais : the error caused by the claim to get the truth ; the error caused by the judgement process, the error caused by the recognition of the judgement. However, if we consider the philosophy of Montaigne as art of living, the only error for the author is the lack of faithfulness to himself. For the reader, which considers the Essais like experiences for set his life, the error doesn’t exist.
Nicolà Panichi, « De l’erreur. Entre épistémologie et morale »
Le problème de l’« erreur » est envisagé par Montaigne obliquement et se concentre sur deux pôles, épistémologique et moral, avec des nuances et des renvois de poids. Le premier pôle se catalyse sur le concept de science et de méthode, le deuxième sur l’instance éthique. Mais un décalage supplémentaire se produit aussi du plan gnoséologique au plan moral. L’erreur naît de l’incapacité de confesser notre ignorance qui est le visage authentique de la science.
The problem of « error » is contemplated by Montaigne obliquely and with a focus on two poles : the epistemological one and the moral one – as well as with some nuances
and transfers of meaning. The first pole is concerned with the concept of science and method, the second with the ethical claim. However, another shift is also produced from the epistemic level to the moral one. The error originates from the incapability to confess our own ignorance, this being the authentic face of science.
Thierry Gontier, « Les idoles, de Montaigne à Bacon »
Bacon est l’un des premiers philosophes à avoir tenté une étiologie psychologique systématique de l’attachement de l’esprit humain à l’erreur. Nous montrons ici en quoi les « idoles » baconiennes se rattachent à certaines thématiques sceptiques des Essais de Montaigne. Pour les deux penseurs, quoiqu’en des sens différents, l’erreur provient d’une inquiétude naturelle de l’esprit humain, qui appelle en retour une forme de discipline à travers un attachement aux données de l’expérience.
Bacon is one of the first philosopher to attempt a systematic psychological etiology of the attachment of the human mind to error. I identify here some of the features by which the Baconian « idols » tie up with certain skeptical themes of Montaigne’s Essays. For both thinkers, although in different senses, the error is due to a natural anxiety of human mind, which in return requires a form of discipline through an attachment to the data of experience.
Raffaele Carbone, « L’erreur et l’étonnement chez Montaigne et Spinoza »
Nous thématisons, en premier lieu, le problème de la connaissance dans les Essais. En deuxième lieu, nous examinons les passages où Montaigne parle de l’erreur et de l’étonnement. Ensuite, nous analysons des textes spinoziens sur l’erreur et l’étonnement qui donnent lieu à une comparaison entre les deux auteurs. Pour conclure, en évoquant deux grandes doctrines sur la nature de l’erreur, nous montrons les similarités et les différences entre les positions respectives de Montaigne et de Spinoza.
We thematize, at first, the problem of knowledge in Montaigne’s Essays. Secondly, we consider some passages where Montaigne refers to the error and the astonishment. Then we analyze the spinoziens texts about the error and astonishment that give rise to a comparison between the two authors. In conclusion, invoking two great philosophical doctrines on the nature of the error, we show the similarities and differences between the respective positions of Montaigne and Spinoza.