« D’un contraire biais » : Montaigne lecteur de Plutarque et d’Amyot Michel de Vascosan, 1565
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
2013 – 2, n° 58. varia - Auteur : Gallet (André)
- Pages : 111 à 112
- Revue : Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN : 9782812430398
- ISBN : 978-2-8124-3039-8
- ISSN : 2261-897X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3039-8.p.0111
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 13/08/2014
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
« D’un contraire biais » :
Montaigne lecteur
de Plutarque et d’Amyot
Michel de Vascosan, 1565
Comme a pu l’écrire P. Villey dont on ne dira jamais assez la méticuleuse et admirable lecture qu’il a donnée dans l’édition municipale des Sources des Essais, Montaigne lit Plutarque dans l’édition grand in-folio que donne Michel de Vascosan des Vies des hommes illustres en 1565. Près de 200 occurrences de ce livre dans les Essais !
Au livre III chapitre viii Montaigne lit l’avis au lecteur d’Amyot :
Suyvant ce que Sirannes Persien respondit à ceux qui s’esbahissoient dont venoit que ses devis estoient si sages, et ses effet si peu heureux : c’est pour autant, dit-il, que les devis sont en ma pleine disposition, et les effets en celle de fortune & du Roy.
Voici la transcription de Montaigne :
Et comme Sirannes le Persien respondit à ceux qui s’estonnoient comment ses affaires succedoient si mal vu que ses propos estoient si sages, qu’il estoit seul maître de ses propos, mais du succez de ses affaires c’estoit la fortune, ceux cy peuvent répondre de mesme mais d’un contraire biais. La plus part des choses du monde se font par elles-mesmes,
Fata viam inveniunt.
L’issue auctorise souvent une tresinepte conduite.
Voyons ce « contraire biais ». Loin de prendre le contre-pied du propos d’Amyot, Montaigne le durcit encore et, en quelque sorte, le laïcise ; exit le Roy de droit divin à la cause des choses du monde (Montaigne ne reprend pas le passage d’Amyot), c’est la fortune seule qui est à la manœuvre, et le biais écarte même Sirannes le Persien de la maîtrise de ses propos au profit de cette dernière ! C’est là tout Montaigne et l’on comprend que les Censeurs romains en aient pris ombrage…
Les « choses du monde se font par elles-mesmes, Fata viam inveniunt. »
Ce n’était pas là ce qu’écrivait Amyot dont Montaigne qui le cite ne reprend pas un seul des termes de ce passage qu’il s’approprie jusqu’à le transformer.
André Gallet
Poitiers Forell EA 3816