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Classiques Garnier

La contribution de la SIAM à la lecture sceptique des Essais 1992-2012

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La contribution de la SIAM
à la lecture sceptique des Essais
1992-2012

Dans les années 1980, aux États-Unis, le scepticisme antique, a fait l’objet d’un regain d’intérêt attesté par les travaux de M. Burnyeat, J. Barnes, J. Annas, R.J. Hankinson, M. Frede, R. Bett, pour n’en citer que les principales figures.

Au milieu des années 1990, le milieu académique français a connu un même engouement pour le scepticisme moderne, à partir de la diffusion de la traduction de l’Histoire du scepticisme d’Erasme à Spinoza (1979) de Richard H. Popkin, un chercheur californien infatigable en la matière depuis le milieu des années 1950.

Cet ouvrage donnant l’occasion de cerner la particularité de Montaigne sous l’angle du scepticisme, on a cherché en France aussi à aborder les Essais (et notamment le chapitre II, 12) à partir de l’héritage et de la réélaboration du pyrrhonisme antique, du fidéisme (défini comme une forme de scepticisme chrétien) et du rapport à la croyance religieuse en général. Cette lecture philosophique s’est avérée peu à peu indissociable de l’écriture des Essais que Popkin disait être d’ « un style décousu inimitable » propre à faire déferler des « vagues de scepticisme1 ».

C’est à la recherche sur ce dernier aspect, c’est-à-dire l’analyse de la forme de l’essai comme mise en œuvre du scepticisme, aspect seulement mentionné en passant par Popkin comme une singularité, dans sa présentation du texte montanien, que le BSAM (ou SIAM2) a sans doute

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le plus contribué depuis vingt ans. C’est ce je me propose de montrer dans le présent article.

La contribution indirecte de la SIAM
à la lecture sceptique des Essais

Un relais pour la recherche en cours

Au préalable, il faut faire remarquer que cette concentration des nouvelles études montagnistes autour de la question du scepticisme ne provient évidemment pas exclusivement des articles publiés dans la SIAM, pas même de ceux qui proposent de manière explicite, en raison de leur titre, une lecture sceptique de Montaigne3, ou une adhésion au moins partielle à cette lecture4. L’insertion de ces articles du BSAM dans la recherche sur le scepticisme de Montaigne5 est bien plus importante. Ce en quoi on peut parler d’une contribution indirecte de la SIAM à la lecture sceptique des Essais qui s’effectue par plusieurs biais :

1) Les notes infrapaginales d’articles parus dans le BSAM : ces notes savantes font en effet état d’autres publications avec lesquelles l’article entre nécessairement en dialogue. Ainsi, J. Y Pouilloux, dans l’article « dire à demi » qui ouvre le BSAM de juillet-décembre 1999, rédige

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une longue note sur l’antipéristase selon T. Cave6, figure qui selon lui caractérise une pensée foncièrement instable qui cherche à relier les éléments d’une pensée disparate. Accusant ainsi une réception explicitement sceptique de l’ouvrage, et de ce concept en particulier, il contribue à la diffusion de la lecture sceptique de Montaigne.

2) La présentation de certains articles du BSAM comme étant des pièces déprises d’un ouvrage plus consistant du même auteur que ces articles souhaitent renforcer ou compléter. Par exemple, O. Guerrier présente dans le BSAM de juillet-décembre 2006 (p. 49) son article intitulé « Ce que tu dis à feinte : fiction, reconnaissance vérité », comme commençant là où se terminait une étude antérieure : Quant les poètes feignent : fantaisie et fiction dans les Essais de Montaigne (Champion, 2002). De même, J. Y. Pouilloux, à la fin de son article « La question de l’identité » paru dans le BSAM sur « Montaigne et le Nouveau Monde » (juillet-déc 1992, janv.-juin 1993), conclut, contre toute tentative de lecture dogmatique des Essais, que lire « c’est travailler à quitter nos “orbieres” (…) accepter de devenir étrangers à nos représentations de nous-mêmes pour pouvoir prêter attention à cette voix d’éveil » (p. 160), ce qui annonce l’une des idées maîtresses de son ouvrage l’Éveil de la pensée (Champion, 1995), qui paraîtra deux ans plus tard.

3) La présentation de certains articles comme étant des inscriptions en marge d’autres ouvrages écrits par d’autres, mais appartenant à une même veine (sceptique) de lecture des Essais. Ainsi, J.Y Pouilloux inscrit explicitement son article « Pot à deux anses7 », qui porte sur la réversibilité des mots et des choses remarquée par l’essayiste (attesté par exemple par le titre du chapitre I, 38, « comme nous pleurons et rions d’une mesme chose ») dans les marges de Routes par ailleurs d’André Tournon, paru la même année chez Champion, effectuant ainsi une sorte d’addition au statut sceptique des énoncés analysé par ce dernier dans les pages 202-216 (« Règlements intérieurs », « un paradoxe à plusieurs voix ») du livre de ce dernier. Le BSAM se fait ainsi le relais du travail des Essais comme lecture toujours recommencée, ce qui fait partie intégrante d’une lecture sceptique de l’ouvrage.

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4) La publication par le Bulletin d’actes de journées d’étude ou de soutenances de thèse qui donnent une visibilité à la recherche en cours sur le scepticisme. Le dossier « À nouvel usage. Allégation et détournement des Essais à l’âge classique » paru dans le BSAM de juillet-décembre 1998, est le fruit d’une journée d’étude organisé par A. Tournon à l’Université de Paris IV en mars 1998. De même, le numéro du BSAM de janv.-juin 2000 intitulé Montaigne et l’action, constitue la publication des actes d’un colloque parrainé par la SIAM et organisé la même année à la Sorbonne par F. Brahami et E. Naya, qui faisaient alors partie d’un groupe de doctorants du CERPHI travaillant sur le scepticisme de Montaigne.

5) Les comptes rendus du BSAM concernant les derniers ouvrages parus consacrés au scepticisme des Essais : L’Éveil de la pensée de J. Y. Pouilloux (Champion, 1995) dans le BSAM de juillet-décembre 1995 ; L’Ontologie de la contradiction sceptique de Ian Miernowski (Champion, 1998), dans le BSAM de janv.-juin 1999 ; Le Travail du scepticisme de F. Brahami (PUF, 2001) et Penser l’irrésolution (Montaigne, Pascal, La Mothe Le Vayer, trois itinéraires sceptiques) de S. Giocanti (Champion, 2001) dans le BSAM de janv–juin 2003 ; J’aime ces mots… : expressions linguistiques du doute dans les Essais de Montaigne de Kristi Sellevold (Champion, 2004) dans le BSAM de janv.-juin 2005. Ces comptes rendus, tous réalisés par A. Tournon, témoignent d’une attention à ce qui peut alimenter la lecture sceptique des Essais, attester de la synonymie entre scepticisme et cheminement. Dans le BSAM de juillet-décembre 1995, les remarques terminologique d’A. Tournon qui émaillent le compte-rendu d’Itinéraire à Montaigne /jeux de texte, traduction française d’un ouvrage de Fausta Garavini, entrent aujourd’hui en résonance, rétrospectivement, avec ce qui a constitué dix ans plus tard (en 2006) le vocabulaire de Routes par ailleurs, le nouveau langage des Essais.

En ce sens, le BSAM a amplifié, au cours des vingt dernières années, cette polyphonie (ou diaphonia) des énoncés caractéristique du scepticisme, et a également contribué à les analyser en tant que tels.

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La contribution directe de la SIAM
à la recherche sur le scepticisme de Montaigne

Les éclairages philosophiques

Reste ce qui constitue la contribution directe de la SIAM à la recherche sur le scepticisme des Essais de Montaigne, c’est-à-dire les articles publiés dans les différents Bulletins portant sur le scepticisme philosophique de Montaigne.

Ces derniers ont souvent pour origine, dans le Bulletin comme dans la recherche menée ailleurs, une manière critique et même polémique de se rapporter aux travaux de Richard H. Popkin, dans l’analyse de certains philosophèmes.

La croyance religieuse 

Bon nombre d’articles, notamment ceux parus dans le BSAM de juillet-décembre 1993 spécialement consacré à « la question de Dieu », ont contesté que le cœur des Essais soit la prise de position fidéiste de Montaigne dans les querelles religieuses de son temps, position qui permettait d’en faire un philosophe chrétien.

J.Y Pouilloux, A. Tournon, A. Mc Kenna8, S. Giocanti9, ont soutenu que, selon l’essayiste, nul ne croit longtemps ce qu’il croit – la croyance étant prise dans un mouvement d’incertitude et ignorant son instabilité – ou surtout ne doit guère faire cas de sa croyance ; que la foi, comme sentiment religieux, ne fait pas exception à cette analyse anthropologique de la croyance. Dans le Bulletin consacré à « La question de Dieu », F. Garavini (« Quel malheur de douter qu’on croit ») et H. Weber (« L’apologie de Raymond Sebond et la religion de Montaigne ») ont mis en avant que la foi, comme sentiment religieux, n’était qu’une « liaison humaine ». L’humilité montanienne est analysée dans un article (« Penser la limite ») du même recueil, par J. Y Pouilloux, comme une force positive d’affirmation qui permet de se conduire d’une manière

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purement humaine dans notre vie, sachant que, comme le souligne A. Tournon dans le même numéro (« Que c’est que croire »), jusque dans son éthique de la mort, Montaigne refuse de prendre pour objet ce qui ne s’inscrit pas dans les limites de la vie. La bonne foi est alors opposée à la mauvaise foi ou hypocrisie (p. 171) et n’a de sens que comme parole personnelle entre frères humains capables d’une convenance mutuelle des volontés.

Montaigne se présente ainsi comme l’auteur d’une éthique profane, d’un art de « se laisser rouler au vent10 », où le péché et la contrition n’ont aucune valeur, et où comme le souligne A. Tournon (« Que c’est que croire ») les mortifications recommandées aux dévots sont condamnées, le repentir méprisé, toute forme du dégoût de soi vilipendée, et le désir d’une miraculeuse métamorphose absent. Comme le montre J.Y Pouilloux (« Penser la limite »), la plénitude de l’être est atteinte selon Montaigne par une adhésion à notre imperfection radicale, en se gardant de toute croyance.

Le jugement

Dans un contexte polémique, un autre philosophème est d’une grande importance : le jugement.

On peut en effet constater dans les Essais une disqualification sceptique de la raison, comme outil capable de trancher définitivement sur la vérité ou sur ce qu’il faut faire. Comme le dit plaisamment J.Y Pouilloux dans son article « Reflux11 » la raison est chez Montaigne à la fois un canon de Lesbos et un lit de Procuste. Ceci a pour conséquence paradoxale que le sceptique, comme les autres, émet sans cesse des jugements, des assertions successives, souvent contradictoires, qui sont même parfois fermes, pour ne pas dire péremptoires.

Mais ces jugements sont, par statut, provisoires, car insérés dans une trame où les opinions sont sans cesse retravaillées, aussi tranchées soient-elles. A. Tournon écrit dans son article « Le doute investigateur », consacré à la zététique : « Chacun des propos de Montaigne, si

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catégorique ou véhément qu’il soit, est affecté d’une contingence radicale, d’événement d’écriture, aggravée par l’éventualité de sa rétractation que l’auteur fait entrevoir12. » Selon N. Le Cadet, même la maxime, déclaration dogmatique par excellence (car sentencieuse), s’insère dans un environnement incertain et suspensif qui en fait le support paradoxal de la zététique pyrrhonienne caractéristique des Essais. On a affaire à des cadences dogmatiques « dans une partition caractérisée globalement par “une forme d’écrire douteuse en substance”13 ». Comme à Aristote, prince des dogmatistes, il arrive à Montaigne d’être pyrrhonien sous une forme en apparence résolutive14.

Ainsi, le fait que Montaigne juge n’est en rien une objection à son scepticisme, puisque ce qui permet de qualifier le discours de Montaigne de sceptique est le statut de ses jugements (modalisés, reconduits, contredits, nuancés), et non le fait qu’il s’en dispense, ou qu’ils soient suspendus, ou que Montaigne ne sorte pas de l’irrésolution.

La résistance au scepticisme comme validation du scepticisme

Mais pour prendre la mesure du scepticisme de Montaigne, il faut au préalable, comme le dit J. Y Pouilloux, prendre la mesure de la grandeur et persistance du désir de positivité et de certitude qui résiste à l’entreprise d’interrogation et de questionnement15. Le BSAM fait état de cette résistance générale au scepticisme qui, loin d’ébranler l’interprétation sceptique des Essais, la conforte, en soulignant que Montaigne lui-même fait et narre l’expérience du refus psychologique et intellectuel de reconnaître que nous sommes confrontés à la dissemblance davantage qu’à l’identité, à l’incertitude davantage qu’à la certitude : « notre réticence à l’incertitude nous fait spontanément et comme par une pente naturelle lire les phrases des Essais plus volontiers selon une version positive, affirmative, ce qui est au sens propre plus confortable et rassurant, moins dérangeant16 ».

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Si, comme le soutient R. Esclapez, dans son article « Les religions du Nouveau Monde dans les Essais17 », la quête propre à l’essai et qui le fonde, va de l’inconnu, au supposé connu, qui s’est révélé lui aussi inconnu, c’est, comme l’explique A. Tournon18, au sujet du chapitre I, 23 des Essais, parce que le parti pris d’ébahissement et de dérision à l’égard des coutumes exotiques procède lui-même des préjugés de la coutume, et est critiqué comme tel par l’essayiste. De manière plus générale, pour s’étonner « de trouver lointain ce qu’on avait pensé d’abord proche, et étrange ce qu’on avait cru familier19 », il faut déjà porter un regard sceptique sur le monde et sur soi. Ainsi, comme l’expose R. Esclapez dans le même article, les religions inconnues renvoient dans les Essais à l’étrangeté de l’esprit humain, de telle sorte que l’inconnu, rapporté au supposé connu produit cet effet que nous prenons conscience du fait que nous ne nous connaissons pas nous-mêmes.

Notre réticence à l’incertitude porte donc sur le monde, mais aussi et avant tout sur ce que nous sommes et que l’on refuse de voir20. Elle a pour fondement la résistance à sa propre étrangeté, que l’on perçoit seulement après avoir surmonté une familiarité avec soi qui relève de la complaisance à soi. Rapportée à « soi », un soi méconnu qui constitue le fondement souvent inavoué de ce malaise, toute étrangeté trouve donc un ancrage personnel. J. Y. Pouilloux, dans l’Avant-propos du numéro Montaigne. Malaise dans la philosophie21 rejoint ainsi F. Roussel qui, dans « Le commerce de soi22 », analysait le doute non pas comme ce qui conduit à la tranquillité ou l’ataraxie, mais comme ce qui entretient l’inquiétude, en laissant sans repos. Obligeant à une incessante mobilité, contre le confort que représente le désir de cohérence, contre la pente à la proposition stable, contre l’imposture de la certitude, le scepticisme cultive un doute ou un malaise fécond.

La fécondité de cet étrangement est donc valable au premier chef pour soi-même, puisque le moi singulier est à la source d’un désir de

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confort qui justifie la lutte contre les dogmatismes en général. Et c’est en raison de cette résistance à la fois spontanée et malsaine au scepticisme (que l’on peut appeler aussi propension au dogmatisme), que l’on est autorisé à parler d’un « pyrrhonisme de combat » à l’œuvre dans les Essais, selon l’expression d’A. Tournon23, pyrrhonisme de combat que F. Roussel analyse dans « Le commerce de soi » à la lumière de cette déclaration de Deleuze extraite de « Pourparlers » : « chacun de nous (…) se trouve sans cesse en pourparlers et en guérilla avec lui-même, grâce à la philosophie24 ». L’enquête sceptique traduit en effet une exigence de déchiffrement dans le rapport à soi qui relève de l’« étrangement à soi25 », parce qu’elle cherche à saisir le moi dans son échappement même, comme étant exposé au risque de se défaire26, et comme ne pouvait se constituer que par le compte-rendu qu’il fait de lui-même, sous la forme d’un récit, d’une chronique (conformément à la tradition sceptique27) si bien que, selon la formule de F. Roussel, l’écriture sceptiquement comprise est mouvement « d’altération et d’altercation avec soi28 ».

Le scepticisme : une philosophie sans doctrine, sans école,
sans position déterminée

Le scepticisme n’est pas un combat au sens de ce qui pourrait faire l’objet d’une cause militante, il n’est pas à défendre comme une doctrine ou école philosophique (constituée par un corps de propositions qui seraient en bonne logique dubitatives et suspensives) : « Cette étiquette [de scepticisme] est trompeuse et leurrante dès qu’on la range dans la même catégorie que celle des autres sectes philosophiques, dès qu’elle se stabilise, s’arrête, définit », écrit J. Y. Pouilloux29.

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S’il y a donc bien un combat avec soi-même pour demeurer sceptique, il n’y a pas de combat à mener pour gagner le lecteur à la cause du scepticisme, car il n’y a jamais d’adhésion au scepticisme (à la philosophie sceptique, ou à la lecture sceptique d’un auteur) et de constitution de soi comme « sceptique », ce terme désignant plutôt une manière de tracer un chemin sur fond d’un échappement perpétuel à soi, de dé-faite qu’exprime la déclaration de Montaigne : « si mon ame pouvoit prendre pied, je ne m’essaierois pas, je me resoudrois30 ».

La prise de position en faveur du scepticisme des Essais est donc paradoxalement incompatible avec une lecture sceptique des Essais, le scepticisme renvoyant à une position qui doit toujours se mettre en doute elle-même, une pensée de la non position qui exige pour elle-même de faire un retour sur son caractère erratique, ce qui comme le souligne A. Tournon dans son article « “Et séparément considérées”, Mélancolie : les leurres des lectures synthétiques31 », exclut qu’elle entre « en concurrence avec les vérités doctrinales organisées en système » ayant pour socle soit la vérité de la raison, soit la parole divine.

Ce en quoi on ne peut pas désavouer le scepticisme, car, comme le dit D. Brancher32, on rencontre là « une stratégie énonciative purgée de toute assertivité, qui s’emploie sans relâche à marquer ses propres limites » : désavouer le scepticisme serait se conduire comme Antiochus, qui abandonnant le stoïcisme néo-académicien pour se faire stoïcien, ne voit pas qu’« il assure par son irrésolution la permanence du doute qui fonde l’anthropologie sceptique33 ». La forme discursive proprement sceptique est celle qui permet de rompre avec la bêtise d’une adhésion sans recul, pour se forger une opinion réfléchie, y compris si c’est la même opinion que la précédente, car on n’y adhère que jusqu’à la prochaine révision, et peut-être pour d’autres raisons qu’auparavant, le jugement étant toujours reconduit, et non pas suspendu. Il n’y a donc pas d’adhésion théorique à la tradition sceptique, « mais un

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prolongement pratique et singulier de l’attitude pyrrhonienne dans l’écriture de l’essai34 ».

Ainsi, paradoxalement, les articles qui contribuent le plus à la lecture sceptique des Essais ne sont pas tant ceux qui se donnent pour objet le scepticisme (qui ne peut être défendu comme une cause), ni même finalement ceux qui se donnent des philosophèmes (la justice, l’action, la religion, la nature, la coutume, l’identité) pour montrer que Montaigne les traite sceptiquement – par exemple en montrant qu’il n’y a pas d’ontologie de l’essence, mais une sorte de phénoménologie qui rapporte toutes choses aux circonstances et conditions, dans la dissemblance, ce que montrent parfaitement les articles du numéro spécial du BSAM de janvier-juin 2000 sur « Montaigne et l’action » – mais les articles moins philosophiques, qui examinent la forme de l’essai.

La présentation d’un Montaigne comme sceptique implique donc un travail de définition de ce que l’on entend par scepticisme : une manière de penser indissociable d’une composition de la pensée dans son expression textuelle, d’une manière d’écrire.

D’où l’importance de la réflexion sur la forme de l’essai pour définir le scepticisme de Montaigne, c’est-à-dire pour le constituer comme philosophique à partir de la saisie opérée par un lecteur de la spécificité littéraire de l’exercice du jugement mené dans le texte.

La contribution directe de la SIAM,
en tant que revue littéraire, à la définition
du scepticisme comme forme des Essais

C’est le caractère « littéraire » (c’est-à-dire non conceptuel, imagé) du discours et la déliaison de la rationalité au profit de l’usage de la fiction (d’images élaborées par transplantation et ravaudage) à fin de « se dire », qui permettent une réappropriation philosophique des Essais. Dans l’introduction aux actes du colloque sur Montaigne et l’action, E. Naya et F. Brahami écrivaient d’une manière tout à fait significative : « Le scepticisme de Montaigne fait de la raison elle-même une simple

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manière d’être du “courant de pensée” qui ici et là se cristallise, au travers des jeux de la mémoire et de l’imagination, en un ensemble mal joint qui sait dire “je”35 ».

Arrêtons-nous un instant sur la raison comme « courant de pensée » et « les jeux de mémoire et de l’imagination ».

Pour ce qui est du « courant de pensée », on assiste en effet dans les Essais à un surgissement contingent d’énoncés hétéroclites : « tous ces énoncés [qui] ont poussé “comme les choux” (…)36 », sont configurés par choix et fantaisie mais toujours d’une manière précaire. A. Tournon insiste sur la nécessité de penser les Essais « en termes de configurations textuelles, plutôt que de concepts ou de notions définies à l’intérieur des systèmes accrédités à l’époque de Montaigne37 ». « C’est à ce prix », c’est-à-dire en admettant que cette philosophie ne présente ni concepts clairs, ni conclusions définitives, ni synthèses opérées par une raison démonstrative susceptible d’engendrer ses résultats dans la continuité, « que l’on pourra mesurer la portée épistémologique et philosophique des Essais. » Et il conclut pour souligner le paradoxe en le redoublant par un trait d’esprit « … Et tout le reste est littérature38 ». En d’autres termes, ce n’est qu’un portant attention à la lettre des Essais, à leur composition, en arrêtant d’y chercher des doctrines philosophiques, que l’on pourra cerner leur intérêt philosophique.

Pour ce qui est des « jeux de mémoire et de l’imagination », disons que l’essai est l’autre nom de cette manière de composer sa pensée conçue comme fiction (fantaisie, rêverie), ce qui n’est pas contraire à la philosophie, mais constitutif de la philosophie, puisque la philosophie est conçue par Montaigne comme « une poésie sophistiquée » (II, 12, p. 537), un art qui porte sur des représentations, sachant qu’il n’est pas possible selon Montaigne, conformément à la tradition sceptique grecque (qui inclut la Nouvelle Académie), de distinguer une représentation fictive d’une vraie39. Tout travail sur sa pensée sera donc un travail sur ses rêveries, les deux termes étant synonymes dans les Essais.

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À partir de là, il est d’autant plus légitime, comme se le propose O. Guerrier40 d’analyser les procédés par lesquels la pensée est « mise en rôle », au double sens d’enregistrer et de théâtraliser, sur la scène de l’esprit. Et le cas de Lycas évoqué dans l’Apologie de Raymond Sebond (p. 495), se prête bien à l’illustration de l’appréhension montanienne du réel comme faux semblant, conformément à une déclaration attribuée à Pyrrhon : « l’apparence règne partout où elle se présente41 ». John O’Brien montre également que les fictions biographiques lues par Montaigne sont soumises « à des techniques de mise en valeur, de dramatisation et presque de mise en scène » que l’essayiste réorganise par touches et convertit en segments d’énonciation, afin « de voir reflété dans la vie des autres le récit éclaté de la sienne42 ».

L’illusion est donc digne d’être cultivée, parce qu’elle est constitutive du sujet, et qu’elle peut lui procurer du plaisir, ou le contre-piper pour éviter des fâcheries, dans l’usage de la vie. Dans son article « Appelle, peintre abstrait scepticisme et fiction43 », E. Naya explique comment on peut annuler l’adhésion figée à une représentation rationnelle par l’affect, dans une manipulation des fictions qui relève de l’illusion volontaire, ce qui pour un sceptique demeure toujours à portée de l’esprit, puisque « les expériences de pensée sont elles-mêmes éprouvées comme des affects44 . Il est toujours loisible à un sceptique de se détacher de ses propres représentations, de les mettre à distance, non pas tant pour y être indifférent que pour moins les prendre au sérieux, loin des « discours à certes ». Les articles de P. Gueye parus dans la SIAM qui analysent dans cette perspective « les subtilités de l’auto-dérision dans les Essais45 », l’ont mis en évidence : Montagne entretient avec lui-même la même distance critique qu’à l’égard des autres auteurs, et il élabore

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des montages ironiques et paradoxaux autant à partir de ses propres énoncés qu’à partir des énoncés empruntés.

À partir d’une telle réflexion sur le régime de la fiction dans les Essais, on est amené, avec O. Guerrier, à redéfinir sceptiquement la pensée, toujours précaire et momentanée, comme fantaisie, c’est-à-dire comme « une faculté combinatoire créatrice d’images, dont la particularité principale est la mobilité et la variabilité46 ».

La fiction manifeste ainsi sa valeur pratique qu’analyse B. Sève dans son article « L’action sur fond d’indifférence47 » : se considérer comme jouant le rôle d’un personnage emprunté permet d’adopter la position de l’observateur, ce qui préserve la liberté du jugement, sans paralyser l’action, ni inciter à croire que l’on maîtrisera l’événement, qui est la plupart du temps fortuit. Bon nombre d’articles du numéro spécial du BSAM consacré à « Montaigne et l’action » abondent en cette lecture sceptique48 et reconnaissent en la nonchalance une vertu d’affranchissement, finement analysée par A. Tournon dans l’article « “Plantant mes choux”… action et projet » (p. 92), à l’occasion de l’élucidation de la déclaration faite à la p. 89 du chapitre I, 20 des Essais.

Cette position de retrait qui, à la différence de Lycas, n’est pas pour autant désengagée – réfléchir à la modalité de son action et prendre des distances par rapport à elle n’entrave pas l’action, au contraire – a aussi une valeur théorique. L’écart ici produit permet de contempler les errances de son propre esprit, à partir de fictions qui sont autant de « points de perplexité49 » qui permettent de valider ses propres investigations, même si c’est de manière précaire, hors des cadres doctrinaux.

Ceci implique une plasticité de la forme du texte, liée à la fois à son élaboration dans l’écriture et à sa réception par le lecteur, qu’il s’agisse de l’auteur lui-même et de quelqu’un d’autre.

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Tout d’abord, comme l’analyse O. Guerrier, l’informe de la pensée contemplé grâce à la distanciation produite par l’écriture (comme théâtralisation intérieure) prend forme au moyen de la textualisation50. D’où l’importance de ce que N. Le Cadet appelle « le scepticisme stylistique des Essais51 », qui va de pair avec la décision de confier les Essais au français (en tant que ce langage est mouvant). Ses caractéristiques – dont l’énumération opérée par N. Le Cadet p. 86-87 donne également accès aux acquis de la recherche littéraire sur le scepticisme des Essais – sont les suivantes :

1. L’usage d’un vocabulaire sceptique (« fantaisies », « imaginations », « opinions », « rêveries ») qui confère à la pensée un caractère privé.

2. L’usage des modalisateurs, c’est-à-dire expressions modalisantes comme « il me semble que », « peut-être », « à l’aventure », dans un rapport d’affinité avec les expressions sceptiques de Sextus Empiricus. Comme les travaux de K. Sellevold (auxquels l’article de N. Le Cadet renvoie) l’ont montré, les modalisateurs ont cette particularité chez Montaigne de devoir être rapportés à la singularité d’un sujet. Ils sont ce par quoi la portée générale des énoncés est limitée, en marquant une réserve, et en définissant le degré d’engagement du locuteur.

3. L’usage d’une syntaxe à style ouvert (parataxe, hyperbate) étudiée notamment par F. Charpentier (citée en note), syntaxe singularisée par la segmentation des énoncés sous l’effet de la ponctuation et des majuscules de scansion. Cette écriture de la segmentation est restituée par A. Tournon (auquel l’auteur de l’article se réfère également) dans son travail d’édition des Essais et dans les articles de la SIAM parus à ce sujet. Ces articles (dont « La plasticité des Essais52 ») montrent que le langage coupé (discontinu) revendiqué par Montaigne (en I, 26, p. 171 et I, 50, p. 302), qui s’oppose à une discours linéaire enchaînant des assertions péremptoires, se déploie sur plusieurs

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niveau d’énonciation et d’agencement des énoncés, contribuant à une problématisation de la question selon la zététique pyrrhonienne. Ceci conforte l’analyse d’E. Naya selon laquelle le scepticisme n’est pas une philosophie constituée en énoncés, mais un processus d’enquête, inscrit dans une « dynamique contradictoire » qui libère les points de vue53.

Enfin, comme l’a suffisamment montré le dossier du BSAM intitulé à « nouvels usages » consacré aux allégations et détournement des Essais à l’âge classique54, ou encore l’article d’A. Tournon intitulé « La plasticité des Essais55 », la spécificité de l’écriture de l’essai ne peut se comprendre indépendamment d’une réflexion sur la réception des textes par le lecteur : Les énoncés, en raison de leur mobilité virtuelle, se prêtent à être réutilisés et remaniés par leur auteur ou par le lecteur, comme fragments originellement disséminés. « Les inflexions énigmatiques » qui ponctuent le texte des Essais « invitent à une méditation, avec au terme, s’il en est un », écrit A. Tournon, « l’assentiment ou la contestation56 ». Le travail du jugement sur les Essais a donc lieu dans la lecture, qui n’est pas seulement celle d’un autre, mais aussi celle du scripteur qui se lit : « Vous et un compagnon estes assez suffisant theatre l’un à l’autre, et vous à vous-mesmes57 ».

Il s’agit en effet de suivre les traces restées visibles du travail d’élaboration (de réagencement successif des énoncés), et de reprendre ce qui n’est jamais achevé, d’exercer de nouveau son jugement par un retour sur ses propres termes, dans la perspective d’une remise en cause ou ratification. « Les configurations précaires » agencées dans le texte des Essais, composées à partir de matériaux hétéroclites, sont authentifiées seulement dans l’après-coup, par la signature du locuteur58.

Le jugement philosophique de type sceptique porte donc d’abord sur le discours qui les énonce, et dont il ne cesse de faire la critique. Comme le dit Marie de Gournay, citée par A. Tournon59 : « Les autres discourent

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sur les choses : cettui-ci [l’auteur des Essais] sur le discours même, autant que sur elles ». En d’autres termes, ceux de J.Y Pouilloux, « l’écriture apparaît comme un lieu où peut s’accomplir ce travail de ressaisissement indéfini » (de soi), à partir de la conscience de la précarité de son adhésion60. L’écriture est un travail sans cesse à recommencer, de réélaboration permanente de la pensée qui « conjoint une réflexion continue et l’invention renouvelée d’un commencement perpétuel, la poursuite réglée et la surprise inattendue61 ». La vérité, toujours poursuivie, mais jamais atteinte, ne peut s’énoncer que d’une manière incomplète et inachevée.

Par exemple, comme le montre C. Demure dans son article « Lecture des Cannibales62 », le jugement de valeur porté par Montaigne sur les Cannibales (en I, 31) n’est pas un terme de la recherche, mais un moyen de s’interroger à nouveau, qui n’a de sens que par rapport à notre système de références qu’il remet en cause, mais dont on ne peut jamais se déprendre, ouvrant ainsi à un travail infini sur le fond de notre discours, toujours rapporté au sujet à partir de l’objet qu’il pose, et repose.

Ainsi, comme le soutient A. Tournon dans un article consacré à la zététique des Essais la pensée investigatrice du sceptique, volontairement ou involontairement instable, taille la vérité à la mesure du locuteur, le doute n’étant jamais un frein, « mais un stimulant de la pensée, dès lors que celle-ci se découvre irréductible à un savoir, et d’autant plus libre et audacieuse de ses enquêtes63 ».

Conclusion 

La redécouverte de la portée philosophique des Essais ne peut se faire qu’à partir de l’examen de son écriture, de la manière dont Montaigne a donné une forme à sa pensée errante ou sceptique. En effet, le scepticisme de Montaigne ne désigne pas une position philosophique que Montaigne

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aurait tenté d’exprimer par l’intermédiaire du genre de l’essai, mais plutôt le travail d’écriture (ou de réécriture) par lequel il a peu à peu constitué et conforté sa pensée, au fur et à mesure qu’elle s’exerçait et se manifestait à elle-même en quête de sa propre validation.

Le scepticisme n’est donc pas même le fond philosophique pour lequel l’auteur des Essais aurait inventé un nouveau langage, mais une manière d’être à soi, par la pensée et l’action, née d’un exercice d’enregistrement de ses pensées dans de nouvelles formes littéraires.

Ce que le BSAM a permis de montrer ces vingt dernières années, c’est finalement la solidarité entre l’essai montanien et le scepticisme. Et il faut remercier toutes les personnes rompues à l’analyse littéraire et à la linguistique pour avoir, grâce à une lecture sceptique « outillée », rendu Montaigne à la philosophie, et donc aussi aux chercheurs en philosophie.

Sylvia Giocanti

Université Toulouse II,

CERPHI

1 Voir Richard H. Popkin, Histoire du scepticisme d’Erasme à Spinoza, traduction de Christine Hivet, PUF, Léviathan, 1995, chap. iii : Michel de Montaigne et les « nouveaux pyrrhoniens », p. 82.

2 Le Bulletin de la Société des Amis de Montaigne (BSAM) rebaptisé en 2007 Nouveau Bulletin de la Société Internationale des Amis de Montaigne, est plus simplement désigné depuis 2011 par l’acronyme SIAM (Société internationale des Amis de Montaigne).

3 Voir par exemple dans le BSAM de juillet-décembre 1998, l’article de F. Brahami, « figures sceptiques de la subjectivité : Montaigne et Pascal » (p. 27-36), ou dans le BSAM de juillet-décembre 2000, l’article de M. Wild, « les deux pyrrhonismes de Montaigne » (p. 45-56).

4 Voir par exemple BSAM, janv.-juin 1999, M-L. Demonet, « Le langage, de Montaigne à Charron : la fin d’un doute », p. 29-44 et BSAM, janv.-juin 2001, N. Panichi « la boiterie de la raison, le cas de Martin Guerre », p. 171-184.

5 Voir par ordre chronologique les ouvrages de J. Y Pouilloux, Montaigne, l’Eveil de la pensée, Paris, H. Champion, 1995, de F. Brahami, Le Scepticisme de Montaigne, Paris, PUF, Collec. Philosophies, 1997, d’E. Naya, Le Phénomène pyrrhonien : lire le scepticisme au xvie siècle, thèse de doctorat (non publiée), soutenue en 2000, dont le chap. 3 de la partie II est consacré au fidéisme de Montaigne, de S. Giocanti, Penser l’irrésolution, Montaigne, Pascal, La Mothe Le Vayer, trois itinéraires sceptiques, Paris, H. Champion, 2001, et le collectif L’Écriture du scepticisme chez Montaigne, publié par M. L. Demonet et A. Legros, Genève, Droz, 2004. Il est remarquable que l’ensemble de ces auteurs ont contribué à plusieurs reprises à la « défense » d’un scepticisme de Montaigne dans la SIAM..

6 Cette note se trouve p. 14. Elle se réfère à Préhistoires, Textes troubles au seuil de la modernité, ouvrage de T. Cave dont J.Y Pouilloux fera le compte-rendu un an après, dans le BSAM de juillet-déc. 2000.

7 BSAM, juillet-déc. 2006, p. 75.

8 « “Ils croient, ou ils croient croire”, réflexions sur la foi chez Montaigne et Bayle », BSAM, juillet-déc. 1998.

9 « Philosopher avec Montaigne, se défier de toutes croyances », BSAM janv.-juin 2006.

10 À ce sujet, je me permets de renvoyer à mon article paru dans le BSAM de janv.-juin 2000 (numéro spécial consacré à Montaigne et l’action) : « L’action sceptique, un art de se laisser rouler au vent », p. 69-78.

11 BSAM, janv.-juin 2003, p. 25.

12 SIAM, 2e semestre 2009, p. 18.

13 « La maxime et le “nouveau langage” des Essais », BSAM, 2007, 2e semestre, p. 107.

14 D’après les Essais, II, 12 p. 509 (éd. Villey, PUF Quadrige) : « Ils ont une forme d’escrire douteuse en substance et un dessein enquerant plustost qu’instruisant, encore qu’ils entresement leur stile de cadences dogmatistes. »

15 J. Y. Pouilloux, « Socrate », BSAM, janv.-juin 2006, p. 176-177.

16 J. Y. Pouilloux, Ibid. p. 177.

17 BSAM de juillet-déc 1992-janv.-juin 1993, p. 220.

18 Voir « l’Étrange semblable », BSAM de juillet-déc. 1992 – janv.-juin 1993, p. 251.

19 J. Y. Pouilloux « Socrate », BSAM, janv.-juin 2006.

20 J. Y. Pouilloux, « la question de l’identité », BSAM, juillet-déc. 1992, janv.-juin 1993, p. 156.

21 BSAM janv.-juin 2006.

22 BSAM, juillet-déc. 2002.

23 « L’Étrange semblable », BSAM de juillet-déc. 1992 – janv.-juin 1993, p. 258.

24 F. Roussel, « Le commerce de soi », BSAM, juillet-déc 2002, p. 27.

25 Ibid. p. 37.

26 Ibid., p. 42.

27 Le sceptique est défini par Sextus Empiricus comme un historien ou un chroniqueur. Voir Esquisses pyrrhoniennes, I, 1, 4 (traduction P. Pellegrin, édition du Seuil, 1997) : « De rien de ce qui sera dit, nous n’assurons qu’il est complètement comme nous le disons, mais pour chaque chose nous faisons en historien un rapport conformément à ce qui nous apparaît sur le moment. »

28 F. Roussel, « Le commerce de soi », BSAM, juillet-déc. 2002, p. 43.

29 J. Y. Pouilloux « Socrate », BSAM, janv.-juin 2006, p. 185.

30 Montaigne, Essais, III, 2, p. 805.

31 BSAM, janv.-juin 2006, p. 164.

32 In « Montaigne face à la médecine, écriture sceptique et modèle médical à la Renaissance », NBSAM, 2007, 2e semestre, p. 43.

33 Ibid., p. 49, en référence à Essais, III, 9, p. 964 : « Apres avoir establi le doute, vouloir establir la certitude des opinions humaines, estoit ce pas establir le doubte, non la certitude, et promettre qui luy eust donné encore un aage à durer, qu’il estoit toujours en terme de nouvelle agitation, non tant meilleure qu’autre ? »

34 Ibid., p. 44.

35 BSAM, janv.-juin 2000, p. 12. C’est moi qui souligne.

36 A. Tournon, « l’Etrange semblable », BSAM, 1992-1993, p. 258.

37 Voir « “Et séparément considérées”, Mélancolie : les leurres des lectures synthétiques », BSAM, janv.-juin 2006, p. 173.

38 Ibid., p. 174.

39 Voir E. Naya, BSAM, 2e semestre 2007 « Appelle, peintre abstrait scepticisme et fiction », p. 28. Dans le même Bulletin, M.L Demonet (in « La fiction comme chimère chez Montaigne et Sanchez ») montre l’impact de l’identification montanienne des Essais aux « chimères et monstres fantasques » sur le statut de la fiction.

40 Les contributions d’O.Guerrier à ce sujet dans le Bulletin sont nombreuses et précieuses. Voir in BSAM, juillet-déc. 1995, « La “resverie” de Lycas : un exemple problématique », p. 24-38 ; BSAM, janv.-juin 2001 « Des “fictions légitimes” aux feintes des poètes », p. 141-150 ; BSAM de janv.-juin 2003« L’interne juridiction : l’essai comme exercice », p. 43-58.

41 Voir in BSAM, juillet-déc. 1995, « La “resverie” de Lycas : un exemple problématique », p. 32-33.

42 Voir « Montaigne biographe : du fictif à l’essai », in BSAM, juillet-déc. 2006, p. 73.

43 BSAM du 2e semestre 2007, p. 35.

44 D. Brancher, « Montaigne face à la médecine.. », op. cit., p. 49, note 22.

45 BSAM, juillet-déc. 1995, p. 39-45.

46 « La resverie de Lycas », op. cit., p. 35

47 BSAM, janv.-juin 2000, Montaigne et l’action, p. 13-22.

48 Voir J. Céard, « Agir et prévoir selon Montaigne », M.D Couzinet, « Action naturelle, action humaine, action divine », Ulrich Langer, « Mourir et agir dans De l’exercitation », S. Giocanti, « l’action sceptique, un art de “se laisser rouler au vent” ». M. L. Demonet, dans son article « Action et probabilité » paru dans le même numéro (p. 31-44), soutient que, d’après les Essais, nous ne pouvons nous déterminer à agir que selon une approche vraisemblable caractéristique de l’attitude sceptique, qui rapporte tout jugement à un sujet, dont les actions volontaires sont fardées et farcesques.

49 J’emprunte l’expression à O. Guerrier, voir BSAM, janv.-juin 2001 « Des “fictions légitimes” aux feintes des poètes, p. 149.

50 BSAM, janv.-juin 2003, « L’interne juridiction : l’essai comme exercice », p. 47.

51 NBSAM, 2e semestre 2007, « La maxime et le “nouveau langage” des Essais », p. 86-87.

52 BSAM, janv.-juin 1999.

53 Voir « Appelle peintre abstrait : scepticisme et fiction », BSAM, 2e semestre 2007, p. 27.

54 BSAM juillet-déc. 1998.

55 BSAM, janv.-juin 1999.

56 Ibid., p. 52.

57 Essais, I, 39, p. 247. Cité par O. Guerrier dans son article « L’interne juridiction : l’essai comme exercice », BSAM, janv.-juin 2003, p. 46

58 A. Tournon, « l’Etrange semblable », BSAM, juillet-déc 1992, janv.-juin 1993, p. 257.

59 dans son article intitulé « la plasticité des Essais », BSAM, janv.-juin 1999, p. 51. 

60 « La question de l’identité », BSAM, juillet-déc 1992, janv.-juin 1993, p. 160 

61 J. Y Pouilloux, « Dire à demi », BSAM, juillet-déc 1999, p. 20.

62 Voir Montaigne et le Nouveau Monde, BSAM, juillet-déc. 1992, janv.-juin 1993, p. 188-189.

63 SIAM, 2e semestre 2009, « Le doute investigateur : métamorphoses d’un “refrain” de Plutarque dans les Essais », p. 11.