Biographie de Marc’Antonio De Santis
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Bref traité sur la richesse des royaumes . précédé des 1er et 2e discours sur le change de Marc'Antonio De Santis (1605)
- Pages : 125 à 127
- Collection : Écrits sur l'économie, n° 11
- Thème CLIL : 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
- EAN : 9782406095866
- ISBN : 978-2-406-09586-6
- ISSN : 2261-0995
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09586-6.p.0125
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 12/10/2020
- Langue : Français
Biographie
de Marc’Antonio De Santis
Nous savons très peu de choses de Marc’Antonio De Santis, sinon qu’il s’agit d’un homme d’affaires très actif durant les années qui chevauchent la fin du xvie et le début du xviie siècle. Ses écrits de 1605 lui ont donné une position officieuse au palais, la Pragmatique de juin 1607 inspirée de ses vues (qui sera abrogée peu de mois après sa mise en application), ceci semble encore confirmé par le fait que le 10 mars 1610 la Corte del Collaterale désigne De Santis comme représentant de la nation napolitaine dans le comité technique plurinational1 chargé d’examiner à chaque occasion les problèmes financiers les plus importants. L’importance de De Santis est encore soulignée par le fait que le premier « Discours » est prononcé oralement avant d’être imprimé sur ordre du Président du Sacro Consiglio dans le but d’être soumis à l’examen des plus hautes autorités espagnoles, et des négociants les plus importants qui opèrent à Naples.
La faiblesse du change est l’argument central autour duquel tourne toute l’argumentation de De Santis. Il écrit : « Le prix du change de notre Royaume avec les autres places d’Italie, et de ces places avec le Royaume, est la cause du fait que l’argent comptant n’entre pas dans notre Royaume, et que l’argent comptant qui y est en sort2 ». La proximité des États de l’Église entraîne un flux de revenus vers le Royaume, et un retour dans ces États par change, avec un bénéfice de 10 %. Ce qui est pour De Santis la cause principale de la situation du Royaume. Il propose d’imposer par la loi un taux de change de 125 grains par écu. Le moyen est d’établir le prix de l’écu et du ducat de change à un taux 126plus faible du taux de l’écu d’or effectif. Le but recherché est d’inverser les flux entre le Royaume et les autres places. De Santis s’empresse de préciser qu’il ne s’agit pas de dicter le change sur toutes les places d’Italie, mais simplement de protéger le Royaume. Pour De Santis, la pauvreté et la faiblesse économique du Royaume repose d’abord sur une structure financière inadaptée. De Santis pointe le fait exact que la place de Naples est soumise à celle de Piacenza qui dicte les conditions de change. Le manque de monnaie qui est alors un phénomène répandu dans toute l’Italie, au lieu d’amener De Santis à réfléchir aux conditions générales qui dépassent largement la question du change, le conduit à juger anormale la situation du Royaume de Naples.
Mais derrière l’argumentation, il y a un objectif politique concernant les Génois qui détiennent près de 70 % des créances de la dette publique sur le Royaume, et ne les investissent plus sur place comme ils le faisaient auparavant. La thèse de De Santis est donc clairement orientée contre les banquiers génois. Pour faire que les revenus versés aux détenteurs de créances sur le Royaume demeure en son sein, il suffit, selon De Santis, d’imposer un taux de change bas et de contrôler rigoureusement les monnaies rognées pour les empêcher de sortir du Royaume. En juillet 1605, une réplique attribuée à un gentilhomme Génois est publiée.
L’argument avancé est simple et concis : le change relève d’un accord volontaire entre parties et non de la loi. Le Génois donne raison à De Santis lorsqu’il établit un lien entre manque de monnaie et change élevé, mais il affirme que la Pragmatique demandée par De Santis n’aboutira qu’à la destruction de toute opération de change. Mais l’anonyme avance alors une autre raison qui est celle du système bancaire à Naples, de nature essentiellement scripturale : « Tout se paie en banque, par un écrit sans argent…Et du fait d’une si grande commodité de payer on ne ressent pas le manque d’argent qu’il y a3 ».
L’anonyme propose seulement que l’on refonde l’ensemble des monnaies existantes sans dire ouvertement qu’on le fasse en les diminuant de poids ou de titre pour résoudre le problème. De Santis se préoccupe d’abord de définir un certain nombre de points sur lesquels tous les acteurs économiques du Royaume puissent se retrouver pour exercer une pression déterminée sur le Vice-Roi. Ces points convergent tous dans la même direction : mettre un terme à la politique suivie jusque-là 127vis-à-vis des étrangers, et en particulier des Génois qui exportent leurs revenus, y gagnent par le change et sont des parasites du Royaume. C’est là le mérite essentiel de son ouvrage au-delà des arguments techniques sur le change. La récolte désastreuse de 1606, la plus mauvaise des quarante dernières années empêche que la discussion se développe. Le programme de réforme du Vice-roi Benavente qui prévoyait justement de réduire fortement la dette publique détenue par les étrangers ne sera pas appliqué, et les expédients habituels seront mis en œuvre. Tout d’abord avec la Pragmatique de juin 1607 qui fixe et abaisse le change selon les indications de De Santis, puis avec celle du 6 juin 1607 qui suit les propositions de l’anonyme Génois et organise une refonte de toutes les monnaies qui doivent être apportées à l’Hôtel des monnaies pour y être échangées ; à l’exception des monnaies de très faible valeur comme le demi-carlin (les zanette) et les tre cinquine. Toutes les autres monnaies, rognées à un quart de leur valeur, étant échangées au poids. La bonne monnaie circulant à sa dénomination en unité de compte et les autres au poids. Mais c’est la fameuse Pragmatique du 15 octobre 1612 du Comte de Lemos qui tente de réaliser une réforme d’ensemble de l’État.
André Tiran
1 Le comité comprend en 1610 Paolo Grillo et Giacomo Fornari pour la nation génoise, Bendetto Biffoli pour Florence, Pietro Cortone pour Bergame et le flamand Antonio Antopel, in R. Colapietra, Problemi monetari negli scrittori napoletani dele seicento, Roma, Academia dei Lincei, 1973, p. 16 (introduction).
2 Ibid., p. 17.
3 Ibidem, p. 21.