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Classiques Garnier

Note sur la présente édition

  • Type de publication : Chapitre d’ouvrage
  • Ouvrage : Boule de suif et autres contes normands
  • Pages : LIX à LXII
  • Réimpression de l’édition de : 1986
  • Collection : Classiques Jaunes, n° 536
  • Série : Littératures francophones
  • Thème CLIL : 3436 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques
  • EAN : 9782812418488
  • ISBN : 978-2-8124-1848-8
  • ISSN : 2417-6400
  • DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-1848-8.p.0065
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 08/04/2014
  • Langue : Français
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NOTE SUR LA PRESENTE EDITION

L'établissement du texte des Contes normands pose des pro¬ blèmes délicats. Parus tout d'abord dans les journaux, ces contes furent pour la plupart repris du vivant de Maupassant dans dif¬ férents recueils; en revanche, aucune édition « définitive » ou « collective » ne se fit du vivant de l'écrivain, qui sombra brusque¬ ment, on le sait, dans la maladie et la mort. Il existe entre les éditions des journaux, des recueils, et les éditions collectives parues après la mort de l'écrivain, d'assez notables différences de ponctuation et même parfois de termes. La meilleure solution semblerait, à première vue, celle qui consisterait (en l'absence des manuscrits, disparus ou hors d'atteinte '), à se fonder sur les dernières éditions en volumes publiées du vivant de Maupassant. Il se trouve, hélas, que celles-ci offrent quelquefois des leçons absurdes, des fautes évidentes. Nous nous sommes donc résignés à un travail de collationnement de ces éditions et de différentes éditions collectives, nous ralliant à la solution qui semblait la plus satisfaisante, surtout quand elle était conforme à la version parue avant la mort de l'écrivain.

ι. Les manuscrits des contes de Maupassant que nous éditons ont disparu : ou bien l'on n'en trouve pas trace, ou bien cette trace se perd. Tel est en particulier le cas des contes dont le manuscrit fut vendu le 24 mai 1938 par Giraud-Badin (vente de la bibliothèque du comte de Suzannet) : le Père A viable, Tribunaux rustiques, Boitelle.

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Cette solution n'est qu'un pis-aller, nous ne nous le dissimulons pas : il est impossible de savoir si Maupassant lui-même se serait finalement rallié à la leçon que nous avons adoptée. L'usage de son temps n'était pas tout à fait le nôtre en matière de ponctuation, sans compter qu'il pouvait avoir ses théories propres à ce sujet. Nous nous sommes efforcés à la fidélité; c'est tout ce que nous pouvons dire. D'autre part, les variantes sont en général de peu d'importance, portant sur l'emploi de virgules, la substitution de points d'exclamation à des points d'interrogation. L'allure des contes n'en est nullement altérée. Pourtant, il arrive qu'on se trouve affronté à des problèmes plus graves, portant sur des termes. L'exemple le plus typique se rencontre dans Aux champs. « Les deux paysans besognaient dur sur la terre féconde», indique l'édition Conard; «sur la terre inféconde», portent le journal, l'édition de 1883 des Contes de la bécasse, et l'édition Ollendorf. L'une et l'autre version sont possibles : « la terre féconde » évite le cliché; « la terre inféconde » est plus logique, les champs du pays de Caux étant beaucoup moins riches près des côtes que dans l'arrière-pays. C'est cette der¬ nière version que nous avons choisie. Dans le même conte, on lit, selon les éditions, soit « On posait devant eux l'assiette creuse pleine de pain molli » (Conard, Ollendorf), soit « l'assiette pleine de pain molli ». Nous nous sommes ralliés à la version majoritaire. Ollendorf écrit : « toute la lignée mangeait jusqu'à plus faim »; Conard, « toute la ligne mangeait jusqu'à plus faim » : version du journal et des Contes de la Bécasse, que nous avons gardée parce qu'elle était plausible et introduisait une de ces impressions visuelles qu'aime Maupassant. Que le lecteur se rassure : ce conte offre un exemple extrême. Dans la plupart des autres, les variantes de termes sont fort rares et, au demeurant, peu importantes. Ainsi, dans la description de Boule de suif, « s'ouvraient deux yeux noirs magnifiques » au lieu de « s'ouvraient des yeux noirs magnifiques », donné par certaines éditions collectives; dans la Maison Tellier, les enfants sont «jetés sur les dalles par une espèce de peur dévote»; ailleurs, «par une dévotion brûlante»; dans la Martine, «il aurait voulu l'étreindre, l'étrangler, la manger, la faire entrer en lui », ou « l'étreindre, l'étrangler, la faire entrer en lui»; dans le Gueux, «Veux-tu bien t'en aller» ou «Veux-tu t'en aller»; dans le Petit

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Fût, « si aile s'était point boissonnée », ou « si elle s'était point boissonnée », version moins satisfaisante, puisque « aile » paraît dans toutes les éditions, dans la proposition qui suit. Le problème demeure donc bien plutôt inquiétant pour l'érudit que fondamental pour le sens des Contes. Nous avons tenté de le résoudre sans parti pris. * * * Nous avons adopté l'ordre chronologique dans la présentation des Contes normands. Les astérisques renvoient au glossaire des formes patoisantes qu'on trouvera à la fin du volume. Rappelons que, dès le premier recueil de Maupassant, la Maison Tellier, on trouve des contes traitant de tous les thèmes qui sont ceux de Mau¬ passant : la Maison Tellier est une étude de filles et un conte nor¬ mand; Γ Histoire d'une fille de ferme, l'histoire d'un enfant du hasard; la Femme de Paul met en jeu une perversion, et Sur l'eau le thème de l'obsession. Il en va de même pour presque tous les recueils de contes. Les contes fantastiques dont l'action se déroule en Normandie ont été volontairement écartés de ce recueil, car ils ont été réunis aux autres contes fantastiques dans notre recueil le Horla et autres contes cruels et fantastiques, Garnier 1977. Nous adressons nos remerciements au conservateur de la Biblio¬ thèque municipale de Rouen, Claude Simonnet, et à ses collabora¬ teurs. Et à René Fallu, qui, par sa connaissance du pays de Caux, nous a été d'une aide très précieuse. Le titre Contes normands n'est pas de Maupassant. Il a déjà été utilisé, par exemple par l'éditeur rouennais Defontaine; l'emploi du mot Contes est dans l'esprit de Maupassant, qui a intitulé deux de ses recueils Contes de la bécasse et Contes du jour et de la nuit. Nous avons réuni dans ce recueil les contes de Maupassant dont l'action se déroule en Normandie, soit qu'il l'indique lui-même, ce qui est le cas le plus fréquent, soit que patois ou descriptions permettent une localisation indiscutable.

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Lxii NOTE SUR LA PRESENTE EDITION A On peut naturellement penser que l'orientation des contes de Maupassant dépend du genre du journal pour lequel il écrivait. Voici donc quelques indications sommaires sur ces journaux : — Le Gil Bias parut pour la première fois le 19 novembre 1879, sous la direction de M. Dumont. Il se voulait fort mondain et léger, à la limite de la grossièreté, sans jamais y glisser. C'était le journal du « libertinage » de la haute société. — Le Gaulois fut fondé en 1867 par Edmond Tarbé, et voulut être d'opposition à l'Empire tout en gardant un ton de critique légère et d'information parisienne. Après la guerre de 1870, il se fit bonapartiste. En octobre 1879, ^ passa aux mains d'Arthur Meyer, qui le fit monarchiste parce que le Figaro était alors républi¬ cain : il voulait en faire l'homologue du Figaro dans un camp adverse. Meyer ouvrit d'ailleurs son journal à tous les écrivains de talent, Séverine et Octave Mirbeau compris. — L'Echo de Paris, fondé en 1884, eut pour directeur Valentin Simond et pour rédacteur en chef Aurélien Scholl. Dès ses débuts, le journal eut une bonne tenue littéraire, grâce à la collaboration de Daudet, Huysmans, Banville, Mendès, Mirbeau et Maupassant.