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Classiques Garnier

Annexe Affiches, annonces et avis divers, ou journal général de France, n° 203, du vendredi 22 juillet 1791 [BNF v 28337, 1791/07-08], p. 2663-2664 (voir supra, p. 403, n. 62)

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Annexe

Affiches, annonces et avis divers, ou journal général de France,
no 203, du vendredi 22 juillet 1791
[BNF v 28337, 1791/07-08], p. 2663-2664
(voir supra, p. 403, n. 62)

« AVIS DIVERS. ÉTUDES DE LA NATURE, par Jacques-Bernardin-Henri de S. Pierre. Chez P.-Fr. Didot le jeune, Libr. Quai des Augustins, à Paris. 5 vol. in-12 : prix 16 liv. – Cette nouvelle édition peut se distinguer des contrefaçons si multipliées de cet ouvrage, en ce que le nom de lauteur y est en lettres transparentes dans les feuilles du titre. On lit, dans lAvis qui le précède, ce Paragraphe, qui sera lu avec intérêt des vrais Citoyens. “Il serait assez inutile de parler ici de la révolution particulière que la Révolution générale a opéré dans ma fortune & dans mes projets de retraite & de bonheur à la campagne. Mais, comme jai parlé, dans lAvis en tête de lédition précédente, des bienfaits annuels qui mavaient été donnés au nom du Roi, par quelques Ministres, à loccasion des premiers succès des Études de la Nature, la vérité, ainsi que la reconnaissance, mobligent de dire que jen ai été privé en tout ou en partie, à mesure que la Révolution que jy avais annoncée sapprochait : dun autre côté, le Roi ayant lu ces mêmes Études, avait témoigné, de son propre mouvement, quil était fâché de la modicité des grâces qui mavaient été accordées, & quil eût désiré les augmenter, si les circonstances le lui eussent permis. Si lÉtat en effet meût dû quelque récompense, ce sentiment de bienveillance du Roi leût acquittée. Jai été très touché de cette marque dintérêt dun Prince en faveur dun ouvrage dont le principal mérite a été davoir défendu les droits des Peuples. Si jen ai éprouvé quelque surprise, cest par rapport à moi, qui lui suis personnellement inconnu : car le désir du bonheur des Peuples a été de tout temps dans le cœur du Roi. Cest lui qui a été le premier mobile de leur liberté, dabord chez les Anglo-Américains, quil a délivrés de 486loppression de leur Métropole : ensuite il a extirpé en France les dernières racines de la servitude féodale, qui sétaient conservées sous les degrés du trône, et même sous ceux de lautel. Pour protéger la fortune du Peuple, il a établi des Assemblées Provinciales, premiers éléments de lAssemblée Nationale. Après avoir achevé dépuiser ses finances à défendre la liberté des Anglo-Américains, il a rejeté le conseil quon lui donnait avec une apparence de justice, de faire banqueroute des dettes contractées par le luxe, depuis Louis XIV jusquà lui exclusivement. Sil eût été injuste envers les règnes passés, le sien sans doute serait plus tranquille. Il pouvait rester dans le port, & abandonner à la tempête ceux qui lavaient excitée. Maintenant, il en est accablé ; il a sur sa tête ce quil pouvait laisser sous ses pieds. Qui pouvait donc ne pas acheter, à son exemple, lespérance du bonheur général, par le [2664] sacrifice de son bonheur particulier ? Le pêcheur échoué sur le rivage a-t-il à se plaindre de son sort, en voyant sur la mer irritée les flottes dispersées, et leur amiral devenu lui-même le jouet des vents et des flots ?

Ô Roi ! puissent vos destins se réunir à ceux de votre Peuple, & ne sen séparer jamais. Puisse votre vue le faire ressouvenir du bien que vous avez voulu lui faire, dont ses Représentants se sont occupés à votre invitation, & que vous avez désiré avec ardeur, comme la seule récompense digne des grands Rois ! Éloignez de vous tous les conseils qui pourraient vous en séparer, sous prétexte de votre repos ou de votre gloire : rappelez-vous toutes ces maximes du Précepteur des Rois, sur leur autorité & leurs devoirs : “Le Roi peut tout sur les Peuples : mais les Lois peuvent tout sur lui. Il a une puissance absolue pour faire le bien, les mains liées dès quil veut faire le mal. Les Lois lui confient les Peuples, comme le plus précieux de tous les dépôts, à condition quil sera le père de ses Sujets. Ce nest point pour lui-même que les Peuples lont fait Roi : il ne lest que pour être lhomme des Peuples. Cest aux Peuples quil doit tout son temps, tous ses soins, toute son affection, & il nest digne de la royauté, quautant quil l[sic] oublie lui-même, pour se sacrifier au bien public. Minos na voulu que ses enfants régnassent après lui, quà condition quils règneraient suivant ses maximes. Il aimait encore plus son Peuple que sa famille” TÉLÉMAQUE, Liv. V. Sire, si vous vous rappelez que les premiers temps de votre règne, votre affection pour votre Peuple, votre économie personnelle, dans la crainte dépuiser sa fortune, le soin que vous avez eu déloigner du trône les ministres qui 487lui étaient suspects, et dy appeler ceux qui étaient recommandables par leur probité ; enfin la convocation que vous avez faite vous-même de ses Députés, pour remédier aux maux que lui avaient causés les erreurs de plusieurs règnes, et pour combler labîme quil navait pas creusé, vous retrouverez les maximes de Fénelon au fond de votre propre cœur”. Cet Avis est terminé par une Note très intéressante, où lAuteur explique, au moyen de sa Théorie des Marées, pourquoi les hivers sont plus tempérés & les étés plus froids fur les bords de la mer Atlantique que sur les bords des autres mers dans lintérieur du continent, aux mêmes latitudes ».