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Classiques Garnier

Mes souvenirs au monde

  • Type de publication : Article de revue
  • Revue : Alkemie Revue semestrielle de littérature et philosophie
    2023 – 2, n° 32
    . L’animal
  • Auteur : Marguerite (Bruno)
  • Résumé : Comme pour la photographie, dont l’image – perdue incompréhensiblement – montre un temps figé dans l’immensité d’un désert, les mots se perdent une fois écrits. Les histoires (d’amour) finissent toujours mal, chantent les Rita Mitsouko. En général, la poésie vit dans un monde éphémère, elle finit donc par être éternelle, ce qui la rend énigmatique, et magnifique.
  • Pages : 353 à 355
  • Revue : Alkemie
  • Thème CLIL : 4028 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes de littérature comparée
  • EAN : 9782406164395
  • ISBN : 978-2-406-16439-5
  • ISSN : 2286-136X
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16439-5.p.0353
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 31/01/2024
  • Périodicité : Semestrielle
  • Langue : Français
  • Mots-clés : histoires, amour, chat, nature, couleurs
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MES SOUVENIRS AU MONDE

Mon chat prend le soleil à témoin

Devant la fenêtre il se tient droit

Assis son dos fait une courbe de chat

Il suit les mouvements de la rue

De mon bureau je lui fais un regard de chat

Il penche délicatement la tête en avant

Cligne deux fois ses yeux ensommeillés

De tendres vagues dombres sinstallent

Nos silences sont comme des âmes

Émerveillées dêtre seules ensemble

Mon chat ronronne blotti contre ce monde

Assis sur lhorizon jécris nos sourires de chat

Car cest un chat qui comprend ma bouche

Quand elle remue des mots compliqués

Jécoute nos chants mystérieux qui roulent

Quand ma plume reprend son chemin délicat

*

Et cest toi qui es passée devant moi légère

Jai rêvé que ta jupe sétait soulevée dans lescalier

Tu sautais sur les marches et volais dans les coins

Il me semblait aussi que le vent chantait entre nos jambes

La lumière se brisait dans nos yeux en doux éclats

La pluie glissait sur ta peau pleine dautres soleils endormis

Et la sueur que nous avions attrapée insidieusement

Entre nos membres désarticulés sinsinuait

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Je guettais alors ta culotte comme un enfant devant une glace

Tu as soulevé ta jupe dans un grand élan de bonheur avoué

Tu mas dit Tes yeux Tes yeux Donne-les-moi

Nous étions arrivés à la porte de lappartement

Ton corps plaqué contre le bois comme contre un arbre

Ta main retenait à peine ta jupe et ta culotte est descendue

Comme on descend un fleuve agité la bouche ouverte aux parfums

Dans ta main tu la tenais puis tu las jetée et je lai attrapée au vol

Je lai gardée contre moi tandis que la clef hésitait à sintroduire

Tu as couru sur le parquet lisse comme une feuille vers son arbre

Je tai suivie tu as pris mon doigt pour le glisser entre tes lèvres

La nuit commence à peine 

*

Et puis vint la lune inondée

Et les pas de chaussons colorés

Le ciel étirait des Cendrillons bleus

Lheure semblait foncer sur nos poitrines.

On fonçait sur les dalles, libérés,

Tel des oiseaux désaltérés.

On prenait des tours de danses

Comme de vouloir vivre au loin.

Dans la maison de poupée

De nouveau nous glissions

Aller-retours rêvés de sourires

Bonbons acidulés dans nos yeux

La musique faufilait ses ailes

En miroirs surprises et

Gorgés deau de mer en falaise

Tu descendais lescalier majestueuse

*

355

la fenêtre est ouverte au vent

jécris à la nuit pour tenter de vivre

un nuage gris pénètre la feuille noircie

je me dis doublier celle-ci

de laisser senfuir toute chose écrite

et de ne jamais me retourner

je me vois las de ma quête

faux idéal dun produit relégué

quel est le vrai bonheur

le verbe ou lamour infini

je veux parfois à ce monde être étranger

*

Quelques coquelicots aux vents mélangés

Bruinent la terre dun parfum léger

Sauvage et eau dun matinal soleil

Fragile route dun extrême sommeil

Ah Blancheurs matinales et fées de rires rouges

Femmes tiges dans les champs qui bougent

O chants dorés aux troubles impressionnistes

Soufflez ce voyage vers le ciel de Myste

Et si tu regardes en secret la lune

Dépose un baiser sur le bord de ta plume

Bruno Marguerite