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Classiques Garnier

Adame Ba Konaré, une historienne et la question du pouvoir

  • Type de publication : Article de collectif
  • Collectif : Africana. Figures de femmes et formes de pouvoir
  • Auteur : Mazauric (Catherine)
  • Résumé : Historienne, enseignante-chercheure, Adame Ba Konaré a côtoyé le pouvoir politique en tant que « Première Dame » du Mali durant la présidence (1992-2002) de son époux Alpha Oumar Konaré. Elle problématise la question du pouvoir entre histoire érudite et populaire, sources écrites et orales, sciences humaines et littérature. Le clair-obscur de la régie des instances énonciatives participe d’une stratégie composite visant à promouvoir une puissance alternative à l’exercice rugueux du pouvoir.
  • Pages : 199 à 214
  • Collection : Rencontres, n° 539
  • Série : Francophonies, n° 2
  • Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
  • EAN : 9782406127352
  • ISBN : 978-2-406-12735-2
  • ISSN : 2261-1851
  • DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12735-2.p.0199
  • Éditeur : Classiques Garnier
  • Mise en ligne : 18/05/2022
  • Langue : Français
  • Mots-clés : Femmes, griots, histoire, Mali, puissance d’agir
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Adame Ba Konaré, une historienne
et la question du pouvoir

Historienne, longtemps enseignante-chercheure à lENSup1 de Bamako (de 1976 à 1992), Adame Ba Konaré a été « Première Dame » du Mali durant les dix ans de présidence (1992-2002) de son époux Alpha Oumar Konaré. Elle a ainsi côtoyé − en une position seconde et oblique que chaque sujet qui loccupe est pratiquement conduit à inventer − le pouvoir politique sur les plans national et international. Cela lui en a conféré une expérience tout à la fois substantielle et ambiguë dont elle a tiré un essai ambitieux, LOs de la parole. Cosmologie du pouvoir, paru en 2000. Dans cet ouvrage, elle sollicitait cette double expérience pour proposer une théorie du pouvoir comme réplique de lordonnancement cosmique. Quelques années plus tard, elle a également été à linitiative dun ouvrage collectif issu de son appel à la communauté des historiens, quelle a dirigé en réponse au « discours de Dakar2 » : Petit Précis de remise à niveau sur lhistoire africaine à lusage du président Sarkozy.

Comme elle le rappelle elle-même dans LOs de la parole, cest en réalité dès ses premiers travaux dhistorienne consacrés à des figures de héros fondateurs dempire3 quelle sétait intéressée à la question du pouvoir. Elle a ensuite problématisé cette dernière en lui forgeant une expressivité singulière entre dun côté histoire et littérature, histoire érudite et 200populaire, sources écrites et orales, et de lautre postures dhistorienne, de destinataire du récit théâtralisé des griots ou dauteure : notamment en 1987 dans LÉpopée de Segu, sous-titrée Da Monzon : Un pouvoir guerrier, et en 2018 dans Le Griot ma raconté… Ferdinand Duranton, le prince français du Khasso (1797-1838), doù émerge avec éclat la figure de la princesse peule Sadioba. Ainsi, de lexercice le plus souvent subtil de leur puissance dagir, elle ne détache pas les figures de femmes quelle dépeint, déployées dans lespace de son Dictionnaire des femmes célèbres du Mali (1993) et de même à travers son exploration de la tradition du wusulan, « revendiqu[é par] le mouvement néo-féministe, attaché à la valorisation de tout savoir féminin » (Ba Konaré, 2001, 4e de couverture) comme encore dans son roman, seule œuvre pleinement de fiction quon lui connaisse à ce jour, Quand lail se frotte à lencens (2006).

Nous postulerons ici que cest non seulement parce quil sinscrit en une zone de pliure des savoirs, mais encore parce quil sassume comme féminin que le sujet de lécriture a recours à cet alliage foncièrement instable de genres de discours et de registres. Être femme dans des sociétés promouvant sans ambages la suprématie du masculin, notamment pour ce qui est de la constitution et la transmission de certains savoirs, oblige à composer sans cesse, et plus encore lorsquil sagit de produire et mettre en circulation un savoir ayant trait au pouvoir politique et à son exercice. Se frayer sa voie dans des configurations largement inusitées conduit alors à rechercher et produire des accords inédits, dans une quête continue dharmonies mais aussi dactives dissonances. Dans un tel contexte, lécriture dAdame Ba Konaré allie savoirs issus de la tradition griotique et constitués à partir de sources écrites, certes en conjoignant des sources longtemps opposées par le discours colonial (qui pouvait assimiler les premières à de simples légendes), mais aussi afin de produire des associations nouvelles entre positivité occidentale et savoirs vernaculaires. Cet alliage expérimental ouvrirait alors la voie à une reconnaissance des visions du monde ouest-africaines plurielles et nuancées fondant ces savoirs tout en étant alimentées par eux.

Lexercice nest pas aisé. Il savère même dautant plus délicat que les discours que lécriture entrecroise savèrent généralement porteurs de valeurs et dintérêts antagonistes. Les textes les mettent en scène au sein de sociétés cloisonnées par un système de castes exposé par le récit, et réservant un exercice très réglé de la parole à la catégorie sociale 201génériquement désignée comme celle des griots. Dès lors, le clair-obscur où se maintient la régie des instances énonciatives participe de cette stratégie composite, promouvant de facto une forme de puissance alternative à lexercice rugueux du pouvoir.

« Tirer les héros de leur sommeil »

Histoire savante et imprégnation traditionnelle

Le projet de lhistorienne sest constitué à linterface dune formation académique classique en Europe et de sources marquées par un déséquilibre quantitatif en défaveur de lécrit. Mais ce nest pas ce déséquilibre qui lexplique. Déjà sensible au travers des deux premiers ouvrages consacrés respectivement à Sunjata Keita, fondateur de lempire du Mali, et Sonni Ali Ber, héros légendaire de lempire songhaï, ce projet se nourrit dune idée-force, énoncée en avant-propos de louvrage consacré à Da Monzon, monarque bamanan du xviiie siècle : « Sil existe une discipline qui se reconstruit en fonction du présent cest bien lHistoire. » (Ba Konaré, 1987, p. 15) Le récit historique intègre ainsi fortement une dimension située, il opère dans le champ du présent. Demeurée hautement consciente de son ancrage situationnel, lénonciation historique emprunte à celle des griots non tant par effet esthétique ou darchaïsme que parce quelle se préoccupe des conditions de sa réception : « entre le passé et le présent, il ny a pas de rupture » (ibid., p. 21), ce que rendent sensible les sollicitations et prises à partie, grâce à des proverbes ou de lhumour, des gens de la parole envers leur public. Cela conduit à conjoindre, sans dommageable confusion pour autant, le fonds mythique et légendaire qui persiste à habiter « lhistoire traditionnelle malienne » (Ba Konaré, 1987, p. 20), fait des griots traditionnistes, et la critique analytique du matériau historique relevant de la démarche scientifique. Il ne sagit donc pas de se contenter de reprendre lassociation un peu facile selon laquelle, dans les sociétés contemporaines, les historiens endosseraient des fonctions autrefois assumées par les gens de la parole. Mais bien destimer que le travail de lhistorienne ou de lhistorien sexerce au présent et pour le présent, revêtant le pouvoir dun « avertissement » adressé aux puissants naguère assumé par les griots.

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Conduisant ce projet à travers une grande variété décrits et interventions, Adame Ba Konaré assume un double héritage : elle saffirme héritière de lhistoriographie européenne, cest-à-dire coloniale, tout en reconnaissant également son imprégnation par une conception de lhistoire conforme à ce quelle dénomme tradition du Mali. Dès lors il va sagir de combiner les exigences des deux voies : lécriture historienne, se préoccupant continument de ses destinataires, poursuit sa tâche objectivante tout en cherchant à saffranchir dune sécheresse dexpression concomitante. Elle revendique ainsi des effets propres à lénonciation épique : amplification, intensité dramatique, effets comiques, « beau parler » (ibid.), non tant, même si cette dimension existe, par imitation des griots voire hommage à ces derniers, « dépositaires de lhistoire non officielle » (ibid., p. 19), que par nécessité de forger une histoire vernaculaire à même de parler, au-delà des cercles savants familiers dune historiographie classique, à un public contemporain.

Des figures légendaires
aux héroïnes de lhistoire immédiate

Cantonnées à leurs rôles sociaux et fonctions narratives traditionnelles dans les premières publications, les femmes vont prendre une place de plus en plus significative dans les travaux de lhistorienne, que ces derniers soient dérudition ou quils sapprochent à divers degrés de lécriture de fiction. Un moment historique relevant de lhistoire récente − à loccasion duquel le couple Konaré aura joué un rôle crucial − constitue un tournant, actualisé à travers deux ouvrages de formes très différentes : le Dictionnaire des femmes célèbres du Mali et le roman Quand lail se frotte à lencens. Il sagit du tournant de 1991, à savoir la « révolution démocratique malienne » (Ba Konaré, 2006, 4e de couverture) ainsi quelle est dénommée dans le roman. Cest également à la suite de cette mutation historique majeure que lauteure se sent « interpellée » au triple titre « dintellectuelle, dhistorienne et de femme » afin de « mettre un grand coup du côté des femmes » (Ba Konaré, 1993, p. 7) grâce à un dictionnaire biographique.

Ce dictionnaire couvre un empan chronologique qui va « des temps mythico-légendaires au 26 mars 1991 », comme le précise la seconde partie du titre du volume. Il souvre sur une « page spéciale » consacrée aux victimes de mars 1991, des femmes ayant participé aux marches de 203protestation lors du soulèvement démocratique et qui ont péri victimes des exactions des forces de lordre. Ce chapitre comprend les portraits photographiques de ces femmes courageuses. Chaque notice, outre leurs noms et quelques renseignements quant à leurs liens familiaux, leur profession etc., comporte un récit au passé simple4 des circonstances dans lesquelles elles ont perdu la vie. Le chapitre suivant plonge quant à lui dans les temps mythiques pour présenter des figures relevant de mythologies plurielles : diablesse ou prêtresse soninké, déesse du fleuve chez les Songhoy, ou encore Musokoroni Kuntyé, l« avatar féminin de Penba, le dieu du désordre et de la déviation chez les Bamanan » (ibid., p. 99), dont lhistoire est associée à celle dun arbre dune grande importance dans le biotope ségovien et dont on reparlera plus loin. Le dictionnaire poursuit en présentant sorcières et géomanciennes légendaires, amazones, puis femmes pionnières à divers titres avant den venir finalement aux femmes célèbres actuelles de la diaspora, entrepreneures, artistes ou encore sportives.

Quant au roman, il multiplie, dans une démarche que daucuns décriraient comme intersectionnelle, les coups de sonde, à travers de forts personnages féminins, dans deux mondes sociaux, celui « de lencens », des « élégantes parées de luxe », et celui « de lail » où des miséreux tentent dassurer leur survie. Certes, lhistoire sociale croise ici la « grande histoire » (Ba Konaré, 2006, 4e de couverture) nationale à travers un moment paradigmatique du contemporain. Mais les contradictions dont la société malienne savère pétrie sont quant à elles portées par des personnages féminins dont la fiction fait dauthentiques actrices de lhistoire à ses différentes échelles.

Penser le pouvoir, délier la puissance

La conjonction dun intérêt pour ces héroïnes anonymes du quotidien et de la narration dun moment historique de mise à bas dun pouvoir non démocratique amène à différentes représentations des manifestations de ce pouvoir et de la confrontation à ce dernier. Il conduit aussi 204à la formulation dune théorie qui puisse en rendre compte depuis une perspective située. Celle-ci forme le fil conducteur de lensemble de lentreprise historiographique que lauteure entend tirer, dans LOs de la parole, « dune convergence de faisceaux lumineux » (Ba Konaré, 2000, p. 34). Cet intérêt se formule cependant précédemment à travers le fanga de Segu (Ségou), type de pouvoir dominateur qui fait lobjet de lessai historique de 1987. Dans son avant-propos, lhistorienne cite lanthropologue Jean Bazin5 :

Segu napparaît que comme « lexercice dune domination à partir dun certain lieu, lespace, le temps, les discours spécifiques engendrés par la pratique de cette domination ». Ce qui importe dans la narration de lhistoire de Faama Da, cest, à notre avis, au-delà des faits, cette réalité non moins importante, qui est celle des représentations mentales, des sensibilités, la philosophie afférente à un type de pouvoir dont Da est lémanation. (Ba Konaré, 1987, p. 18)

Cest donc dabord à travers une énergétique que cette théorie du pouvoir, envisagé sur un versant viril, se formule en premier lieu. Puis le frottement de son observation avec le vécu féminin induit des reformulations plus fines.

Énergétiques du pouvoir et de la narration

La préface donnée par le grand aîné Joseph Ki-Zerbo à LÉpopée de Segu, significativement intitulée « Lhistoire, une lumière, une chaleur, une force », donne la clé de cette énergétique, en réalité double. En effet, comme lécrit de son côté lhistorienne dans son avant-propos, il y a bien dune part « un type de pouvoir dont Da est lémanation » et la « philosophie » qui lui est « afférente » (ibid.). Mais celle-ci ne se tient ni du côté de ce pouvoir, ni de celui de lhistoire officielle. Elle est, au contraire :

[] apanage de la société civile, porteuse, elle, dun potentiel de contestation insoupçonnée, allant à lencontre de lidéologie des groupes hégémoniques. Da est certes un homme vaillant, mais il incarne un type de pouvoir proscrit, exécré par le peuple. Le fonctionnement de ce pouvoir repose sur dimmondes vices dont Da est lillustration parfaite. Il est certes intrépide, mais vicieux, 205traître et opportuniste. À la longue, ce genre de pouvoir ne peut quentraîner ruine et désolation et le Faama lui-même ne peut que finir mal. (ibid., p. 19)

Cest pourquoi la philosophie contestataire du pouvoir savère braconnière et buissonnière, circulant à travers ce que lhistorienne nomme « histoire non officielle ». Lon ne peut identifier celle-ci à une « tradition orale » quon appréhenderait comme un corpus figé et fermé, et il convient de concevoir celle-ci différemment. En effet, la « complicité » (ibid.) de lhistorienne savante avec la tradition orale va de pair avec une appréhension de cette dernière à limage dun tissu mobile et vivant de discours, représentatifs de sensibilités plurielles. Et cest pourquoi il convient encore dinterposer dautre part, face à lénergétique délétère dun pouvoir tyrannique incarné par Da, lénergie positive dune histoire nouvellement conçue, alliant aux « données substantielles [gisant] dans les sites archéologiques, dans la poussière des archives [], ou dans les listes généalogiques égrenées par un maître des tambours », « la dynamique du verbe » griotique « réussi[ssan]t » la « performance » de la communion dune collectivité « avec et dans son passé » (Ki-Zerbo, 1987, p. 23).

Le geste consistant à emprunter « une voie originale qui nest ni lhistoire romancée, ni la tradition orale retranscrite, ni lhistoire érudite des initiés, ni la vulgarisation historique habituelle », retenant « le meilleur des deux sources » (ibid., p. 25) pour nourrir substantiellement la mémoire des Africains de notre temps, relève dès lors de la pure et simple restitution. Le récit historique « servi chaud », comme lécrit plaisamment lhistorien burkinabé en filant une métaphore culinaire, non seulement relit à nouveaux frais les sources, mais aussi interroge autrement ses propres usages. Sintéresser davantage aux représentations spirituelles des acteurs, donner une place prépondérante au dialogue dans le tissu narratif par exemple, autant de gestes de reconception invitant le public à se réapproprier son histoire non sous la forme dune geste hiératique, mais au contraire comme un espace critique dinterrogations à lusage du présent.

Le récit hybride le plus récent, retraçant cette fois la geste au demeurant authentique dun « prince français du Khasso », retravaille à nouveau ces enjeux. Djeli Madi, griot narrateur de cette histoire située au début du xixe siècle (1797-1838), fait derechef le tableau du pouvoir au sein 206dun réseau énergétique, reprenant largument de lessai LOs de la parole commis au début de ce siècle :

Le pouvoir a besoin de sacrifices pour naître, se maintenir et se fortifier []. Lénergie du pouvoir est puissante. Lénergie de lhomme de pouvoir lest également. Ce sont des gradations de lénergie cosmique qui gouvernent lunivers. (Ba Konaré, 2018, p. 160)

Le griot nhésite pas à poursuivre en expliquant les sacrifices humains (qui avaient également fait la réputation macabre de lempire de Ségou) par la nécessité dexorciser les maux à travers le versement du sang. Mais cest pour reconnaître aussitôt que de telles pratiques, dont il vient de restituer larrière-fond de représentations, sont bien entendu totalement proscrites aujourdhui :

Hum ! beaucoup de choses se sont déroulées sur notre terre. Le soleil de nos anciens est révolu. Notre soleil nous appartient. Aujourdhui, le sacrifice humain est proscrit. Le monde est changement continu, il ne reste pas sur une seule berge. (ibid.)

Dans ce récit, Adame Ba Konaré semble ainsi avoir retravaillé certains aspects de la narration dont Joseph Ki-Zerbo lui faisait, à travers sa préface, le léger reproche au sujet de LÉpopée de Segu, à savoir des heurts didéologies contraires, cahots narratifs et autres ruptures de ton. Ceux-ci sont pourtant toujours essentiels à la polyphonie constitutive de cette histoire alternative à lhégémonie du pouvoir. Mais laffichage plus méthodique et lisible de la scénographie énonciative du récit, associé à une montée en puissance très significative des figures féminines, au premier rang desquelles la princesse Sadioba, permet de délivrer une vision équilibrée des enjeux auxquels tout pouvoir, même le plus tyrannique et absolu, est un jour confronté.

Pouvoir et puissance

Ainsi, lhistorienne va développer la représentation de puissances alternatives. La riche expérience de lexercice du pouvoir politique à un niveau élevé6 la également amenée à en formuler une éthique. Dans 207LOs de la parole se dévoile une certaine proximité avec une sensibilité écologique et avec les théories du care7, un appel à lhumilité sassociant à la conscience de la vulnérabilité des puissants eux-mêmes, et plus généralement de lespèce humaine :

[] la grandeur des uns se nourrit de la faiblesse des autres, [] chacun dentre nous se réalise dans son prochain [], gratifiés pêle-mêle de dons, nous avons le devoir de nous les répartir équitablement. En renonçant à cette responsabilité cosmique, les puissants sexposent dangereusement. [] Linsignifiant dhier peut être votre sauveur de demain [] Ne dites jamais à votre semblable : « Vous, vous narriverez jamais à rien. » Les Bamanan vous répondront : « Ne minimisez pas la touffe dherbes ; elle pourrait fournir la liane qui vous attachera un jour. » (Ba Konaré, 2000, p. 112)

Pourtant, cette sagesse à la fois pragmatique et morale à dimension écologique et à vocation universelle se combine avec un réalisme prudent dont djeli Madi se fait le porte-parole :

Chez nous au Mali, on ne contredit pas le pouvoir. Chez nous au Mali, on ne parle pas lorsque le pouvoir parle. Chez nous au Mali, et si ma langue laisse la parole séchapper à lenvolée, je dirai que partout dans le monde, depuis la nuit des temps, cest le puissant qui vainc limpuissant. (Ba Konaré, 2018, p. 153)

Ce sombre et radical constat est pourtant proféré « dun ton détendu ». Lon voit bien que son simple énoncé constitue à la fois la reconduction dun avertissement au peuple et la contestation, à travers la puissance de la parole, dun état de fait inique. Là encore, lhistoire est dite et faite pour servir à lédification du présent :

Le pouvoir ! Dire quon ne badine pas avec le pouvoir est un truisme. Le pouvoir tue, le pouvoir blesse, le pouvoir humilie, le pouvoir fait ce qui lui plaît. Hawa Demba était homme de pouvoir, lui qui déchirait la bouche de lennemi jusquaux oreilles. Seuls les téméraires, dotés dénergie puissante, bravent le pouvoir. (ibid.)

À ces opposants ou opposantes téméraires, la puissance. Dans Du contre-pouvoir, Miguel Benasayag et Diego Sztulwark opposent, selon une 208perspective spinoziste, pouvoir et puissance en ce que le premier reste, malgré tout, inscrit dans des limites de temps et despace, tandis que la seconde, résidant au fondement du pouvoir faire, consiste en un processus permanent, une évolution continue dont on ne connaît pas le terme et qui savère synonyme de politique. Le pouvoir tire sa force de ce quil formule une explication du monde. Mais tandis quil sidentifie à un lieu et une pratique, comme cest le cas, exemplairement, du fanga de Ségou, il ne possède pas la capacité de réellement transformer, « den haut », les choses. À linverse, la puissance circulerait à travers le mouvement réel et vivant de ces choses. Reprenant une formule leibnizienne, les auteurs identifient la puissance à la possibilité du changement. Cest justement cette puissance de rupture quexplore lhistorienne en sintéressant, autour du moment-pivot historique de 1991, à des existences ordinaires de femmes extraordinaires, ou, près de deux siècles plus tôt, à laventure ambiguë dun jeune Européen au cœur du royaume khassonké. Autant dhistoires jusqualors en mal de narration, ignorées tant par une historiographie obnubilée par les détenteurs du pouvoir que par une tradition orale méconnaissant la translation au profit de la seule reconduction.

Du griot au lecteur,
une femme tient la plume

La prise en compte de sa condition de femme par le sujet de lécriture, en-deçà de sa double posture dhistorienne savante et de fille dune tradition populaire au demeurant plurielle, prend alors un relief particulier. Elle induit un regard lui-même singulier, que lauteure sest attachée à penser dès ses ouvrages de la dernière décennie du siècle précédent.

Des femmes sans parole

Le Dictionnaire des femmes célèbres du Mali rappelle ainsi sans ambages lexistence du « gouffre ténébreux de la misogynie » (Ba Konaré, 1993, p. 27). Dans le chapitre intitulé « Rôle et image de la femme dans lhistoire du Mali » de ce dictionnaire, Adame Ba Konaré rappelle que la parole des femmes a si peu dimportance dans maintes sociétés traditionnelles 209du Mali quune parole en lair se dit en bamanan « muso kuma », parole de femme sans poids et sans crédit. Comment sinscrire alors dans un univers de parole où celle-ci est réduite littéralement à rien, interdite de signification ? Dabord, bien sûr, en produisant un savoir : historien, mais aussi plus largement inséré dans le champ des sciences sociales. Ainsi la chercheuse en vient-elle à signaler la grande diversité des pratiques et des représentations relatives à la place des femmes dans la mosaïque malienne. Elle note en particulier que certains milieux traditionnels nomades relèvent de « sociétés matriarcales à haute hiérarchisation » et que dans la société tamasheq par exemple, la femme est « investie de tous les pouvoirs », « obéi[ssan]t à lhomme sans jamais se soumettre » (ibid., p. 27), ce qui témoigne bien, dailleurs, de la nécessité de ne dépeindre les mondes sociaux quen termes complexes. De même nuance-t-elle lanalyse en soulignant à raison les grandes différences de condition résultant des appartenances de classe.

Une écriture plurivoque détentrice de la potentia

La première réponse à cette mise au silence principielle et radicale des femmes réside dans lassomption dune position scientifique de surplomb. On peut désigner celle-ci comme une position de pouvoir si lon veut. Ce nest toutefois pas exactement le cas lorsquelle doit être explicitement et fermement réinvestie pour répondre en 2008, en tant que collectif scientifique dirigé par une historienne malienne, à un discours politique au demeurant dune grande médiocrité voire vanité dans tous les sens du terme (à savoir le mal nommé « discours de Dakar »). Prodiguer collectivement une leçon dhistoire afin den finir − une fois encore − avec un regard sur lAfrique ramenant celle-ci à une vaste étendue sans profondeur historique peut plutôt être analysé comme un geste de puissance : cest en effet dévoiler linanité de la posture surplombante empruntée par lignorant, en vertu dun pouvoir dont il prétend pourtant sêtre défait. Ainsi se voit derechef renversée lécriture de lAutre, celle qui prétend écrire lAutre ou encore « ethno-graphie » mise au jour par Michel de Certeau (1975, p. 246) :

Connotée par loralité et par un inconscient, cette « différence » découpe une étendue, objet de lactivité scientifique : le langage oral attend, pour parler, quune écriture le parcoure et sache ce quil dit. (ibid.)

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Une ethno-graphie que lécriture mixte défendue et illustrée dès LÉpopée de Segu sattachait déjà à subvertir en restituant aux Africains leur histoire :

[] rendre lHistoire de Ségou à un large public en employant une voie originale qui nest ni lhistoire romancée, ni la tradition orale retranscrite, ni lhistoire érudite des initiés, ni la vulgarisation historique habituelle. Lidéal visé ici, et le modèle de ce genre nouveau serait de fondre dans un même flux historique le discours « traditionnel » et linvestigation académique pour en faire un seul message plus roboratif, parce que retenant le meilleur des deux sources, et à ce titre, susceptible de nourrir de sucs substantiels la mémoire collective des Africains daujourdhui. (Ki-Zerbo, 1987, p. 25)

Participant de cette restitution, le recours à des archives multiples dans leurs matériaux, dans leurs formes et dans leur nombre engage non seulement une historiographie alternative, mais encore à une redistribution des formes de puissance. En outre, du premier ouvrage au plus récent et jusque dans la fiction romanesque, la langue bamanan est présente, encadrant le texte de préambules et glossaires, le parsemant de la graphie idoine, linnervant de cette parole autre persistant à travers le texte français.

Le texte de lépopée revisitée débute quant à lui comme lépopée traditionnelle, par une présentation de la ville « aux quatre mille quatre cents balanzan8 » auxquels sajoute un « petit balanzan tordu, très tordu », qui représente la ruse, « la trahison : le Faama de Segu » (Ba Konaré, 1987, p. 33). Dans la version transcrite et traduite par Gérard Dumestre de cette même épopée9, le décompte des balanzan (ou acacias) était porté à quatre mille quatre cent quarante, et tenait en moins de trois lignes. Le petit balanzan au dos tordu, emblématique du pouvoir ségovien et pointe rhétorique de cette introduction, figurait naturellement bien là cependant. Dans la version due à Adame Ba Konaré, ce décompte arboré se développe au-delà de la page et débouche sur un panorama riant de la cité « coquette10 ». Lantéposition demphase (« Coquettes elles létaient »), la présence dénoncés disjoints (« Elle était grouillante de 211monde aussi, cette ville de Segu », ibid.) signalent la discrète présence de loralité dans un exposé descriptif au demeurant tout à fait conventionnel à cette place et dans cet usage.

Cette entrée en matière mixant plusieurs discours (épique et historien, colonial et touristique…) répond à une fonction analogue à celle du « Il était une fois » du conteur : en définissant un contrat de lecture, elle campe la scène dénonciation. Ce faisant, elle en installe les paramètres en un lieu de production du discours foncièrement hybride et décentré. Celui-ci lie, sans bien sûr les confondre ni les subordonner les uns aux autres, la restitution du passé aux exigences du présent, la réquisition scientifique aux partis-pris dénonciateurs pluriels. À travers ces associations, lhistorienne fait plutôt siennes lexigence et la pratique des griots traditionnistes selon lesquelles « [e]n Afrique, de façon générale, lincubation temporelle est une posture culturelle » (Ba Konaré, 2008, p. 37) :

[] dans la restitution des faits révolus, le dépositaire du savoir − lhistorien − doit prendre en compte les débats et les conflits qui agitent la société. Lintelligence du moment idoine pour fournir une information est donc une responsabilité dont il est investi. (ibid.)

Autrement dit, la posture scientifique, marquée entre autres par la présence de cartes, de lexiques, dune bibliographie répondant aux normes académiques, ne consiste pas à sextraire du monde pour siéger, depuis le tribunal intemporel de lHistoire, dans le ciel éternel des idées, mais bien à inscrire son intervention dans le contexte discursif daujourdhui, marqué par la pluralité et la complexité.

Dans LÉpopée de Segu, cette complexité se traduit par exemple, à propos du statut des femmes, à travers la juxtaposition de lanalyse du fanga de Ségou porteur de valeurs viriles à des catégories du discours stéréotypé de la tradition (« La trahison féminine vient à bout de Samanyana Basi », titre dun chapitre). Dans le même temps, représenter laction duplice des femmes met en lumière le recours à la subversion oblique dun pouvoir sans partage. Dans Le griot ma raconté…, la construction ostensible dune scénographie concertée marque la stratégie dexposition. À linstar dEn attendant le vote des bêtes sauvages dAhmadou Kourouma, fait de veillées successives dites par un duo complémentaire de griots, le roman se compose de « journées de conversation » lors desquelles le 212griot Madi performe lhistoire de Duranton à lintention dun jeune Français, Nicolas, descendant de Ferdinand Duranton, ce diplomate et agent commercial français qui, au début du xixe siècle, épousa la fille du roi du Khasso avec qui il était en affaires.

Foncièrement dialogique, le discours du griot sinsère dans un dispositif énonciatif lui-même polyphonique. On y rencontre des énoncés parémiologiques et normatifs sur les femmes : « Ah ! Cest la femme sans envergure qui fait de la condition de la femme un problème, sinon être une femme nest pas une affaire minime. » (Ba Konaré, 2018, p. 47) La critique de lémancipation des femmes sy cantonne à une affaire de vêture : « jupes serrées », « talons pointus », « démarche alanguie » voire « pantalons », il est aisé dès lors de conclure à une « drôle dégalité ! » (ibid., p. 99) Ailleurs, le griot rendra les femmes entièrement comptables et responsables de leur condition, cest-à-dire de leur oppression (ibid., p. 161). À plusieurs reprises, il se livre à un panégyrique de Sadioba, « la femme peule sans estomac ni intestins » (ibid., p. 147), renonçant, fût-ce au prix de sa santé, à son propre bien-être pour se consacrer entièrement à lentretien de son époux, ou encore « sans menton et sans bouche » (ibid., p. 153), cest-à-dire « qui ne se laisse pas déborder par [son] appétit, qui ne parle pas beaucoup », car « [c]ontenir sa faim pour satisfaire les autres et savoir garder silence sont des qualités requises pour une femme » (ibid.).

Lenchâssement dun tel discours est cependant simultanément porteur, y compris dans le propos dun même locuteur, dune vision critique assortie dune perspective progressiste :

Et oui, depuis que le mot émancipation a franchi le seuil de notre pays, plus aucune femme nobéit à son mari. Les femmes se sont organisées en associations pour défendre leurs causes, disent-elles, sortent de leurs maisons sans permission, haussent le ton quand elles parlent à leurs maris, les contredisent quand elles ne sont pas daccord avec eux. Eh oui ! Révolu le temps de Sadioba, se lamenta djeli Madi. (ibid., p. 147)

Le dispositif énonciatif du roman met en outre en présence une survivance du système antérieur de distribution de la parole, à savoir un griot maîtrisant son art, mais illettré, et un jeune homme quil a choisi comme assistant, précisément en raison de sa maîtrise de lécrit. Or ce jeune homme, comédien, se situe en réalité à une nouvelle interface entre le monde de lécrit et loralité :

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Ainsi donc lindividu aux cheveux broussailleux sappelait Bakari et était comédien. La rencontre entre lartiste oral et lartiste moderne imprimait une note presque révolutionnaire au cérémonial griotique qui mobilisait lécrit, pourtant présenté comme antagonique à la tradition orale. (ibid., p. 131)

Lors dune scène ultérieure, le griot a derechef recours aux services de Bakari pour réaliser un intermède de lecture darchive au sein de la performance griotique. On se souvient que dans le roman de Kourouma, le répondeur cordoua ponctue la veillée de quelques pitreries, à linstar des ballets agrémentant les représentations du Bourgeois gentilhomme. Ici cest la performance griotique qui est entrecoupée dun rituel de lecture discrètement spectacularisé :

Bakari ouvrit le dossier à sangles [] Il perdit quelques secondes avant de retrouver les passages appropriés. La page identifiée, complètement fondu dans la peau de Duranton, fier des regards dimpatience portés sur lui, il se mit à lire. [] Bakari remit son souffle à létat normal ; il rendit la lettre à djeli Madi qui, méticuleux, la déposa à sa place dans le document sanglé et retourna à son récit. La salle avait suivi avec ferveur la lecture. (ibid., p. 151)

Une oralité autre que celle de la tradition vient ainsi redoubler cette dernière en un double mouvement de désassurance et de réassurance.

Lécriture qui entretisse ces différents discours, nonobstant leurs contradictions internes et externes, savère ainsi le véhicule dune potentia ou puissance dagir toujours mobilisable. La dissémination de cette puissance à travers lécrit met en exergue les transformations sociales en cours, contribuant ainsi à la redéfinition des relations de pouvoir.

Catherine Mazauric

Aix-Marseille Université

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1 Abréviation usuelle au Mali pour lÉcole Normale Supérieure de Bamako, qui dès avant la création de lUniversité du Mali en 1996 formait les professeurs de lycée et formateurs de formateurs, en quatre ans après le baccalauréat et avec un diplôme de sortie équivalant à la Maîtrise (actuel Master 1) dans les universités françaises.

2 En juillet 2007 à lUniversité Cheikh Anta Diop de Dakar, le président français Nicolas Sarkozy prononce un discours censément adressé à la jeunesse africaine au cours duquel il proclame, entre autres, que « lhomme africain nest pas assez entré dans lhistoire ». Lessentiel de la rédaction de ce discours a été attribué à son conseiller Henri Guaino. Le Petit Précis paraît en 2008.

3 Voir : Adame Ba Konaré, Sonni Ali Ber, Niamey, Institut de recherches en sciences humaines, 1977 ; Adame Ba Konaré, Sunjata, fondateur de lempire du Mali, Abidjan, NEA, 1983.

4 Temps de lénonciation historique détachée du présent, du « monde raconté » différant du « monde commenté » selon la terminologie de Weinrich, 1973.

5 Jean Bazin, « La production dun récit historique », Cahiers détudes africaines, vol. 19, no 73-76, 1979, p. 435-483. On notera que dans le volume où figure larticle de lanthropologue prend également place un dossier intitulé « Femmes et pouvoir ».

6 Rappelons que son époux Alpha Oumar Konaré a été président du Mali de 1992 à 2002, puis, à léchelle internationale, président de la Commission de lUnion africaine jusquen 2008.

7 On fait référence ici aux théorisations du care en tant quéthique concrète (sadressant en lespèce à lensemble du vivant, au-delà du seul genre humain) découlant dun ensemble de dispositions morales. Voir Francesca Scrinzi, « Care », Encyclopédie critique du genre. Corps, sexualité, rapports sociaux, dir. Juliette Rennes, Paris, La Découverte, édition revue et augmentée, 2021 [2016], p. 127-137.

8 Acacia albida [note de lédition originale].

9 Voir : La Geste de Segou − Épopée bambara, recueillie et traduite par Gérard Dumestre, Abidjan, CEDA, 1977.

10 Lépithète est fréquente dans les discours coloniaux de propagande, pour qualifier par exemple Bamako ou Conakry « la coquette ».