Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : À la croisée des arts. Sublime et musique religieuse en Europe (xviie-xviiie siècles)
- Pages : 505 à 515
- Collection : Lire le xviie siècle, n° 32
- Série : Musique et littérature, n° 4
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- EAN : 9782812446801
- ISBN : 978-2-8124-4680-1
- ISSN : 2257-915X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4680-1.p.0505
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 25/06/2015
- Langue : Français
Résumés/Abstracts
Marianne Cojannot-Le Blanc, « Charles Le Brun, peintre du sublime ? Sur quelques tableaux sacrés des années 1650 »
Marianne Cojannot-Le Blanc est professeur d’histoire de l’art à l’université Paris-Ouest – Nanterre – La Défense. Ses travaux portent sur les conditions de la création artistique et le pouvoir monarchique au xviie siècle. Elle a publié D’Acide et d’encre. Abraham Bosse (1604 ?-1676) et son siècle en perspectives (Paris, 2004) et À la recherche du rameau d’or. L’invention du Ravissement de saint Paul (Paris, 2012).
La personnalité de commanditaires dévots, tels que Jean-Jacques Olier et l’abbé Édouard Le Camus, a sans doute eu des conséquences poétiques sur l’art de peindre de Le Brun, invitant celui-ci à esquisser un horizon sublime en peinture, dont on trouve trace par la suite dans sa peinture irradiée par le portrait des passions.
The personality of devout sponsors such as Jean-Jacques Olier and the Abbé Édouard Le Camus have had a significant impact on Le Brun’s art in poetic terms, encouraging him to sketch sublime horizons, which can be traced in his painting illuminated by the portrait of the passions.
Jean-Philippe Grosperrin, « Performance de l’oratorio et inscriptions du sublime. Il Ritorno di Tobia de Haydn (1775-1784) »
Jean-Philippe Grosperrin est maître de conférences en littérature française à l’université de Toulouse. Ses recherches se partagent notamment entre l’œuvre de Fénelon et le genre tragique après 1680, au théâtre comme à l’opéra. Il a travaillé sur la résurgence de la figure d’Idoménée dans le théâtre du xviiie siècle, avec la publication d’une tragédie jésuite inédite : Fr. Paulin, Idoménée (1700), SLC, 2008.
Il Ritorno di Tobia de Haydn donne à penser la plasticité de la catégorie du sublime à la fois comme style et comme effet, et invite à ne pas dissocier le sublime religieux, porté ou produit par la musique autant que par les vers italiens, d’un effet de performance, ni des bienfaits de l’étendue, des ornements, en somme de tous les artifices de la musique.
Haydn’s Il Ritorno di Tobia encourages us to reflect on the plasticity of the category of the sublime as both a style and an effect. It also warns us not to disassociate the religious sublime – projected or produced by music as much as by Italian verse – from the effect of performance nor from the benefits of the range, ornamentation, and the other artifices of music.
Pierre Saby, « Une épiphanie du sublime chez Mozart. à propos de l’Et incarnatus de la messe en ut mineur, KV 427 »
Pierre Saby est professeur de musicologie à l’université Lumière – Lyon II et membre de LIRE. Auteur d’une thèse sur le chœur dans les œuvres dramatiques de Jean-Philippe Rameau, il a ensuite élargi ses travaux au genre de l’opéra, aux problématiques de la musique vocale et à l’esthétique musicale du xviiie siècle. Il a consacré plusieurs de ses travaux récents à l’œuvre musicale et théorique de Jean-Jacques Rousseau.
La cadenza de l’Et incarnatus de Mozart peut être mise en relation avec deux arie d’opéra, de composition antérieure, par le biais d’un motif musical commun aux trois morceaux. Les glissements de signification opérant d’un morceau à l’autre permettent d’analyser le sentiment du sublime que suscite la messe, dans le cadre paradoxal d’une aria concertante tendant à la miniature ornementale.
The cadenza of the Et incarnatus by Mozart can be related to two earlier operatic arias due to a musical motif common to all three pieces. The shifts in meaning which take place between the pieces allow us to analyse the sense of the sublime produced during mass, in the paradoxical context of a concertante aria which tends towards the ornamental miniature.
Thierry Favier, « Sublime et colère divine dans la musique religieuse française du xviiie siècle. Une musique démesurée ? »
Thierry Favier est professeur à l’université de Poitiers et spécialiste de la musique française des xviie et xviiie siècles. Ses recherches récentes portent sur les collections musicales, le concert, la notion de genre musical dans les transferts culturels, l’esthétique du sublime. Il a publié Le Chant des muses chrétiennes (Paris, 2008) et Le Motet à grand chœur (1660-1792) : Gloria in Gallia Deo (Paris, 2009).
Appliqué à des expérimentations sonores qui tendent à repousser les normes implicites du bon goût, le concept de démesure permet d’interroger, dans les
motets français du xviiie siècle et particulièrement dans les versets évoquant la colère divine, l’opposition entre le rationalisme esthétique français et la théorie du sublime anglaise fondée sur le terrible.
Applied to sound experiments which reject the implicit norms of good taste, the concept of excess allows us to interrogate the opposition between the rationalism of French aestethics and the theory of the English sublime based on the terrible through eighteenth-century French motets, particularly in the verses evoking divine anger.
Robert G. Rawson, « Sublime et merveilleux dans les pastorales de Noël tchèques des xviie et xviiie siècles »
Robert G. Rawson est Reader in musicology and performance à la Canterbury Christ Church University (UK). Chercheur et interprète, il travaille sur la musique baroque en Europe centrale, particulièrement la musique tchèque. Il a entrepris des recherches sur des musiciens anglais mineurs et publié de nombreux articles et une monographie, Bohemian Baroque : Czech Musical Culture and Style 1600–1750 (Woodbrige, 2013).
Alors que le sublime dans les représentations tchèques de la Nativité n’a guère retenu l’attention en raison de la prédominance du thème pastoral, traditionnellement vu comme une sorte d’antithèse du sublime, l’article se propose d’étudier le genre de la pastorale dans son contexte culturel et dévotionnel, pour dégager son étroite proximité avec le sublime qui en fait un puissant instrument de conversion.
While the sublime in Czech representations of the Nativity has scarcely received any attention, given the predominance of the pastoral theme which was traditionally seen as the antithesis of the sublime, this article studies the genre of the pastoral in its cultural and devotional context, in order to elucidate its proximity to the sublime, which in turn makes it a powerful instrument of conversion.
Sabine Volk-Birke, « La prière dans les livrets de Haendel. Quelques réflexions sur le sublime dans les Chandos Anthems »
Sabine Volk-Birke est professeur de littérature anglaise en Allemagne, à l’université de Martin-Luther-Universität – Halle-Wittenberg. Ses recherches portent sur la littérature du xviiie siècle, les transferts culturels, les croisements entre littérature et religion et les livrets de Haendel. Elle a publié plusieurs articles sur la question du sublime.
Les Chandos Anthems sont ici analysés comme des exemples de musique religieuse dans lesquels les paroles peuvent être source de sublime tout autant que la musique. À partir d’une réflexion sur la prière dans l’Église anglicane, l’auteur examine la théorie de John Dennis sur le sublime religieux, afin de mieux saisir les aspirations de Haendel, faisant de ses motets une prière poétique sublime.
The Chandos Anthems are analysed here as examples of sacred music in which words are a source of the sublime as much as music. Beginning with a reflection on prayer in the Anglican Church, the author examines the theory of John Dennis on the religious sublime so as to better understand Handel’s motivations, making of his anthems a sublime poetic prayer.
Keith Chapin, « Sublime néoclassique et sublime rhétorique. La réception musicale des Odes et mélodies spirituelles (1757) de Christian Fürchtegott Gellert »
Keith Chapin est Senior Lecturer in Music à l’université de Cardiff et membre du comité éditorial de la revue Eighteenth-Century Music. Il travaille sur la théorie critique, l’esthétique et la théorie musicales du xviie au xxe siècle. Il s’intéresse au contrepoint et à l’esthétique du sublime. Il a dirigé Speaking of Music : Addressing the Sonorous (New York, 2013) et Musical Meaning and Human Values (New York, 2008).
L’article formalise une distinction entre les notions de mise en valeur, d’un côté, et d’ornement ou interprétation de l’autre, qui met au jour le fil de la poétique néoclassique du sublime dont Gellert est l’héritier. Elle permet de comprendre pourquoi Doles et Carl Philipp Emanuel Bach ont pu adopter des approches si différentes dans la présentation des sujets religieux sublimes de la poésie de Gellert.
This article formalises a distinction between notions of development on the one side and ornament or interpretation on the other which sheds light on the strain of neoclassical poetics of the sublime inherited by Gellert. It enables us to understand why Doles and Carl Philipp Emanuel Bach could adopt such different approaches to the presentation of the sublime religious subjects of Gellert’s poetry.
Claire Fourquet-Gracieux, « Les airs profanes, voie paradoxale vers le sublime biblique. De la rhétorique à la sémiotique »
Claire Fourquet-Gracieux est maître de conférences en stylistique à l’université Paris-Est – Créteil et auteur d’une thèse intitulée « les Psaumes tournés en français (1650-1715) ». Elle a publié des articles sur les notions rhétoriques du sublime, du doux et de l’insinuation. Son étude des traductions et des paraphrases l’a menée à accorder une dimension herméneutique aux supports de publication.
Dans les ponts-neufs, composés à partir de textes bibliques et surtout des Psaumes, les deux langages, musical et verbal, sont là pour mettre en valeur le sublime divin, qui se loge dans le silence de la rhétorique et les dissonances sémiotiques. Loin de signifier une désacralisation, ils signalent la dimension non rhétorique du sublime, qu’ils situent dans l’orbite divine.
In the pont-neufs, composed from Biblical texts and in particular from psalms, the two languages, musical and verbal, are there to enhance the divine sublime, located in the silence of rhetoric and semiotic mismatching. Far from signifying deconsecration, they signal a non-rhetorical dimension of the sublime, which they situate in the divine orbit.
Delphine Bastet, « Les grands mays de Notre-Dame au seuil de la notion de sublime (1630-1707) »
Delphine Bastet, attachée de conservation du patrimoine au Museon Arlaten (Arles), musée d’ethnographie provençale des Bouches-du-Rhône, a soutenu une thèse de doctorat en histoire de l’art sur les mays de Notre-Dame de Paris. Ses travaux universitaires ont également porté sur l’iconographie des Bacchanales Richelieu de Nicolas Poussin et sur les fêtes des Capitouls à Toulouse au xviiie siècle.
La notion de sublime est-elle opérante pour la peinture religieuse du xviie siècle, alors qu’elle n’apparaît explicitement qu’à la fin du siècle dans les écrits de Roger de Piles ? Les grands mays de Notre-Dame de Paris, qui sont des tableaux de dévotion offerts de 1630 à 1707 par une des confréries d’orfèvres, permettent de creuser cette question.
Does the notion of the sublime operate in seventeenth-century religious painting, even though it only appears explicitly at the end of the century in the writings of Roger de Piles ? The great Mays of Notre-Dame-de-Paris, devotional paintings offered between 1630 and 1707 by brotherhoods of craftsmen, allow us to explore this question.
Mathieu Lours, « L’église néoclassique. Une écriture architecturale du sublime en France dans la seconde moitié du xviiie siècle ? »
Mathieu Lours enseigne actuellement l’histoire des arts en classes préparatoires aux grandes écoles au lycée Léon-Blum de Créteil et est chargé d’enseignement en histoire moderne et en histoire de l’architecture à l’université de Cergy-Pontoise. Il a réalisé de nombreuses publications sur le thème des cathédrales, notamment Cathédrales d’Europe (Paris, 2011) ou encore Dictionnaire des cathédrales (Paris, 2008).
Le sublime constitue un intéressant fil conducteur pour comprendre l’histoire du sentiment religieux dans l’architecture des églises françaises de la seconde moitié du xviiie siècle. Les architectes y ont vu un moyen d’exprimer plus librement la transcendance, en passant outre les nécessités du figuralisme chrétien pour s’orienter vers un sacré ouvert, autorisant les évolutions de la période révolutionnaire.
The sublime is a thread which helps us to understand the history of the religious feeling expressed in the architecture of French churches from the second half of the eighteenth century. Architects saw it as a way of expressing transcendence with greater freedom : it allowed them to bypass the need for figurative representations and turn to a more open idea of the sacred, thus authorising the developments of the revolutionary period.
Servane L’Hopital, « Le sublime et les cérémonies romaines de la messe en France à la fin du xviie siècle »
Servane L’Hopital travaille sur la confrontation du théâtre et de la liturgie et cherche à définir les deux conventions, liturgique et théâtrale puis à déterminer leurs interactions. Elle se propose de montrer que l’institutionnalisation du théâtre au xviie siècle ne se fait pas sans un dialogue avec les enjeux de la pastorale chrétienne et que la convention théâtrale influence la manière de penser la liturgie.
L’article se penche sur les rapports problématiques du sublime théologique et du sublime esthétique des cérémonies de la messe. Le statut des cérémonies oscille entre sacralisation et démystification et, bien que le concile de Trente considère qu’elles sont capables d’« élever » vers le divin, elles tiennent plutôt d’une propédeutique qu’elles ne relèvent du sublime longinien.
This article focuses on the problematic relation between the theological sublime and the aesthetic sublime of mass. The status of ceremonies fluctuates between sacralisation and demystification and, although the Council of Trente held that these ceremonies were able to “elevate” towards the sublime, they are more related to propaedeutics than to the Longinus’ sublime.
Donald Fader, « Les ornements de l’art. Marc-Antoine Charpentier et la tradition du sublime harmonique »
Donald Fader est Assistant Professor de musicologie à l’université de l’Alabama. Ses recherches concernent différentes questions relatives au style italien dans la musique française des xviie et xviiie siècles. Ses publications comportent deux éditions pour Web Library of Seventeenth-Century Music, des articles dans des périodiques tels que le Journal of Musicology, Music and Letters, Early Music, et la Revue de musicologie.
Cet article constitue une introduction au problème de l’harmonie contrapuntique au cours de la dernière partie de la vie de Charpentier et des années suivantes, à partir des différentes interprétations des concepts issus de la rhétorique classique, particulièrement celui d’ornement rhétorique.
This article is an introduction to the problem of contrapuntal harmony in the last part of Charpentier’s life and the years which followed, based on different interpretations of concepts resulting from classical rhetoric, particularly ornamental rhetoric.
Sophie Hache, « Le sublime de l’harmonie imitative. Autour des motets de Mondonville »
Sophie Hache est maître de conférences à l’université Charles-de-Gaulle – Lille III, où elle enseigne la stylistique et la rhétorique ; elle est membre d’Alithila (Analyses littéraires et histoire de la langue). Ses travaux sont consacrés aux questions d’esthétique autour de l’éloquence sacrée et aux études de langue et de style. Elle a publié La Langue du ciel. Le sublime en France au xviie siècle (Paris, 2000).
Appliquée à la réception de Mondonville au milieu du xviiie siècle, la notion d’harmonie imitative, pertinente en musique comme en littérature, apparaît comme une question clé pour comprendre l’évolution du sublime musical et l’émergence d’un goût pour le tableau caractérisé par l’effet d’ensemble et l’abstraction de la représentation.
Applied to the reception of Mondonville in the mid-eighteenth century, the notion of imitative harmony, as pertinent to music as it is to literature, is a key in understanding the evolution of the musical sublime and the emergence of a taste for the tableau characterised by the effect of the ensemble and the abstraction of representation.
Therese Bruggisser-Lanker, « Un temple des muses. La révélation divine et le sublime au regard de la tradition monastique »
Therese Bruggisser-Lanker est Privatdozentin à l’université de Zurich. Elle consacre ses recherches à la musique du Moyen Âge et de la Renaissance. Elle a publié des articles concernant l’articulation entre rite et mémoire, les cérémonies de couronnement ou le symbolisme de la musique des anges et de la figure du roi David. Elle a notamment publié Musik und Tod im Mittelalter (Göttingen, 2010).
Martin Gerbert, moine du couvent de Saint-Blaise en Forêt-Noire, bibliothécaire et savant, incarne un mode de vie et une conception de l’art orientés vers le divin et pleinement favorisés par le catholicisme baroque. Auteur d’un traité De Sublimi, Martin Gerbert illustre l’intériorisation de la religion et la sacralisation du poétique.
Martin Gerbert, a monk at the convent of Saint-Blaise in the Black Forest, a librarian, and a scholar, epitomized a way of life and a conception of art which was orientated towards the divine, and favoured by baroque Catholicism. Around a treatise called De Sublimi, Martin Gerbert illustrated the interiorisation of religion and the sacralisation of the poetic.
Pierre Dubois, « Idéologie et esthétique du sublime dans la musique religieuse en Angleterre au xviiie siècle »
Pierre Dubois est professeur de langue et littérature anglaises à l’université de Tours. Sa recherche porte sur la musique, les théories esthétiques, l’histoire culturelle et la littérature britannique au xviiie siècle. Il a publié l’édition critique de l’Essay on Musical Expression de Charles Avison (Burlington, 2004) et édité La conquête du mystère musical en Grande Bretagne au siècle des Lumières (Lyon, 2009).
Les tentatives en Angleterre au xviiie siècle pour confiner la musique religieuse dans la catégorie du sublime ont eu deux effets différents et consécutifs : d’abord, la définition paradoxale d’un sublime de l’intériorité, puis l’emprisonnement caricatural de la musique sacrée dans une quête de l’emphase et de l’excès qui annonce un changement d’esthétique et l’avènement du romantisme.
Attempts in eighteenth-century England to confine religious music to the category of the sublime had two different and consecutive effects : first, the paradoxical definition of a sublime of interiority, then the caricatural reduction of sacred music to a quest for emphasis and excess which announced a change in aesthetics and the advent of Romanticism.
Agathe Sueur, « S. Werenfels, J. Ch. Gottsched, J. A. Scheibe. Contexte et structures de la perception du sublime et de l’enflure dans l’Allemagne des années 1730 : le cas de la musique religieuse »
Agathe Sueur est actuellement professeur agrégé de lettres en khâgne. Tout en poursuivant la pratique de la flûte traversière baroque, elle consacre ses recherches aux multiples facettes de l’éloquence musicale du xvie au xviiie siècle. Sa thèse est parue sous le titre : Le Frein et l’aiguillon. Éloquence musicale et nombre oratoire (Paris, 2013).
Dans l’Allemagne des années 1730, les conceptions et perceptions du sublime comme style oratoire ont influé sur certaines entreprises de théorie et de critique musicale. J. A. Scheibe en particulier, dans sa revue le Critischer Musikus, se pose en émule de deux rhétoriciens réputés, l’érudit S. Werenfels et le célèbre professeur d’éloquence à Leipzig J. Ch. Gottsched, dont il fut l’élève.
In Germany in the 1730s, conceptions and perceptions of the sublime as an oratory style influenced some works in musical theory and criticism. J. A. Scheibe in particular, in his review Critischer Musikus, sought to emulate two reputed rhetoricians, the erudite S. Werenfels and his famous professor of eloquence at Leipzig, J. Ch. Gottsched.
Théodora Psychoyou, « Du canon au sublime. Normes et interstices dans les écrits sur la musique en France au xviie siècle »
Théodora Psychoyou est maître de conférences à l’UFR de musique et musicologie de l’université Paris – Sorbonne. Ses travaux portent sur le discours sur la musique au xviie et xviiie siècle en France, sur l’économie et le statut des sources musicales et théoriques, et sur la musique religieuse. Elle étudie également les fortunes et les fonctions de l’héritage antique dans la pensée musicale.
Dans les écrits sur la musique de la seconde moitié du siècle, la beauté se démarque de la hiérarchie des styles et relève davantage du « coup de maître » s’écartant de la « bonne composition ». Paradoxalement, la transgression maîtrisée conférant du génie à l’ouvrage échappe précisément à la norme. Le « je ne sçay quoi » du sublime représente une alternative au modèle aristotélicien de la nature mise en ordre.
In writings on music from the second half of the seventeenth century, beauty breaks away from the hierarchy of styles and is seen to result from a “masterly touch” which deviates from “good composition”. Paradoxically, the mastered transgression which confers genius on a work escapes the norm. The « je ne sçay quoi » of the sublime represents an alternative to the Aristotelian model of an ordered nature.
Hélène Michon, « Le sublime, une antimystique ? »
Hélène Michon est maître de conférences à l’université François-Rabelais de Tours. Ses travaux portent sur Pascal et Port-Royal, le croisement entre littérature et philosophie, l’humanisme et la spiritualité et l’écriture mystique. Elle a publié L’Ordre du cœur. Philosophie, théologie et mystique dans les Pensées de Pascal (Paris, 2007) et Saint François de Sales. Une nouvelle mystique (Paris, 2008).
La mystique médiévale, en recueillant l’héritage augustinien, a formulé une vie mystique qui n’est pas sublime : elle renvoie à un Dieu intérieur, que l’homme atteint parce qu’il en est l’image, et qui grâce à la théologie des dons, notamment celui de sagesse, est perçu de beaucoup plus près. En ce sens, elle peut être dite antisublime, à moins qu’elle ne soit une antimystique.
Medieval mysticism, drawing on an Augustinian heritage, has put forward a mystic life which was not sublime : it referred to an inner God who can be reached by all human beings because man was made in His image and who can even be approached closer, thanks to the theology of gifts, notably wisdom. In this sense, the mystic life could be said to be anti-sublime, unless it is anti-mystic.
Pascale Thouvenin, « Le sublime, du Père René Rapin à l’abbé J.-B. Du Bos. Une quête du plaisir littéraire »
Pascale Thouvenin est maître de conférences à l’université de Strasbourg, habilitée à diriger des recherches. Elle est l’auteur de travaux sur le classicisme et d’éditions critiques : Pascal, Entretien avec M. de Sacy (Paris, 1994) ; Nicolas Fontaine, Mémoires, ou Histoire des Solitaires de Port-Royal (Paris, 2001) ; René Rapin, Les Réflexions sur la poétique et sur les auteurs anciens et modernes (Paris, 2011).
L’hypothèse d’une relecture de Rapin par l’abbé Du Bos permet de cerner certaines mutations de la notion de sublime. Dans un contexte épistémologique fortement imprégné par la tradition, celle-ci a pu se présenter comme une catégorie esthétique à la disposition des doctes tournés vers la prise en compte d’une motivation essentielle de la poésie : la jouissance esthétique.
The hypothesis of a rereading made by the Abbé Du Bos of the work of Rapin allows us to grasp certain mutations in the notion of the sublime. In an epistemological context strongly imbued with tradition, the sublime is presented as an aesthetic category available to those scholars seeking to take into account one of the essential motivations of poetry : aesthetic pleasure.
Volker Kapp, « Le sublime selon Kant et Schiller et la théorie musicale de Michaelis »
Volker Kapp est professeur émérite de l’université de Kiel. Il est spécialiste de littérature française et italienne, qu’il étudie plus particulièrement sous l’angle de la rhétorique, du théâtre et de la spiritualité. Il a publié de nombreux articles et dirigé des volumes collectifs parmi lesquels Les Lieux de mémoire et la fabrique de l’œuvre (Paris-Seattle-Tübingen, 1993) ou Literatur und Moral (Berlin, 2011).
Introduit par Schiller à l’esthétique kantienne, Michaelis construit sa propre théorie musicale, marquée aussi bien par le philosophe de Königsberg que par le poète : la musique n’est sublime qu’en tant que ses mélodies vigoureuses et ses harmonies hardies élèvent l’imagination aux pensées et images sublimes. Sa théorie offre une vision d’ensemble de l’art musical englobant la musique instrumentale.
Introduced to Schiller through Kantian aesthetics, Michaelis developed his own musical theory influenced as much by the philosophy of Königsberg as by the poet : music is sublime only to the extent that its vigorous melodies and daring harmonies lift the imagination up to sublime thoughts and images. His theory offers a total vision of musical art, including instrumental music.
Michela Garda, « Résister à l’inhumain. La dynamique du sublime musical chez Herder »
Michela Garda est actuellement professeur à l’université de Pavie, dans le département de musicologie. Elle est l’auteur de nombreuses études sur l’esthétique musicale des xviiie et xxe siècles et de deux livres : Musica subline. Metamorfosi di un’idea nel Settecento musicale (Milan, 1995) et L’estetica musicale del Novecento. Tendenze e problemi (Rome, 2007).
S’opposant à Kant, Herder révèle une résistance farouche à l’esthétique moderne du sublime et met en garde contre les dangers psychologiques et existentiels qu’elle présente. Résister à l’inhumain, c’est-à-dire à une mauvaise compréhension du sublime, consiste selon lui à cultiver une relation équilibrée entre l’homme et le monde naturel, comme entre l’homme, l’univers et la transcendance.
Opposing himself to Kant, Herder resisted the modern aesthetic of the sublime fiercely and warned against the psychological and existential dangers arising from it. Resisting the inhuman – that is, a mistaken understanding of the sublime – consisted in cultivating a balanced relationship between humanity and the natural world, and between humanity, universe, and transcendence.