Notes et comptes rendus
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Cahiers de lexicologie
1989 – 1, n° 54. varia - Auteurs : Höfler (Manfred), Rézeau (Pierre)
- Pages : 163 à 173
- Réimpression de l’édition de : 1989
- Revue : Cahiers de lexicologie
Article de revue : Précédent 9/9
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NOTES ET COMPTES RENDUS
CONTRIBUTION AU COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE DU TLF
Dans son article "À propos de deux problèmes lexicographiques" dans les Cahiers de lexicologie LI, (1987) 2, pp. 149-158, G. GORCY traite, entre autres, des problèmes de la datation en relation avec le TLF, bien qu'il ne parle, pour l'essentiel, que de la partie synchronique, pour laquelle de telles questions sont d'une importance secondaire. Dans cette partie, en effet, l'époque de 1789 à 1960 est considérée comme une unité synchronique, aussi est-il sans importance qu'une attestation citée soit de 1831 ou de 1806. Il est seulement nécessaire que les attestations soient citées et datées correctement et qu'elles soient prises dans des textes qui peuvent être considérés comme représentatifs de l'époque décrite.
Et c'est justement cette question de la représentativité qui nous amène à nous demander si, à côté des textes dépouillés en entier paz le TLF lui-même, il est justifié de joindre les attestations de l'IGLF qui ont été rassemblées selon des critères tout différents. Et si elles sont citées de temps en temps dans le TLF, se pose alors la question de l'exactitude de ces attestations. Ici, GORCY constate certaines insuffisances qui doivent être corrigées dans un Complément bibliographique prévu. Comme exemple de telles corrections, il traite, dans l'article mentionné, de l'ouvrage de A. VIARD, Le cuisinier royal, dont les matériaux de l'IGLF (et à sa suite les volumes déjà parus du TLF) citent une huitième édition de 1831, et pour lequel, maintenant, GORCY précise, à juste titre, que la huitième édition a déjà paru en 1814, mais sous le titre original de Le cuisinier impérial. À partir du fait que l'ouvrage paraît depuis la dixième édition de 1820 sous le nom des deux auteurs VIARD et FOURET et porte depuis la neuvième édition de 1817 pour la première fois le titre de L.e cuisinier royal, GORCY déduit, de façon logique en apparence, que dans l'/GLF, il ne peut s'agir que de la neuvième édition de 1817. Logique, certes, mais seulement à condition que tirage et date de parution puissent être inexacts dans l'IGLF, mais que le titre soit correctement cité. La déduction beaucoup plus immédiate que seule une comparaison des différentes éditions, en tenant compte des paginations respectives, peut résoudre le problème, est certes envisagée compte nécessité supplémentaire par GORCY à la fm de ses réflexions ("Encore faudra-t-il vérifier dans différentes éditions de l'ouvrage si la pagination des exemples répartis dans l'ouvrage correspond.")t, mais cette comparaison n'a toujottrs pas été faite.
Quand il constate expressément au sujet du titre de ce livre de cuisine : "on sait que c'est à partir de la 9e édition (1817) qu'impérial a été remplacé paz royal",1'article impératrice dans le
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TLF, au plus tard, devrait lui donner à réfléchir. Ici, en effet, est donnée une attestation tirée de cet ouvrage "Potages (...) à l'Impératricé' bien que, avec le changement de titre de 1817, le plat décrit change aussi de nom : "Potages... A la Reine" (p. 17). Mais, à la page 24, comme indiqué dans le TLF, se trouve l'attestation "Potages... A l'Impératrice" dans la huitième édition, revue et corrigée de l'ouvrage de A. VIARD, Le cuisinier impérial, ou l'art de faire la cuisine et !a pârisserie, pow toutes !es fortunes, Paris, Barba, 1814. I,es autres attestations citées dans le TLF d'après les matériaux de l'IGLF proviennent aussi de cette édition. Voir p. ex. les articles abaisse, ballot(t)ine, barigoule, canapé, jardinière, julienne, marier, matelote, pain.
Ainsi, la question soulevée par GORCY pour la partie synchronique des articles du TLF se trouve résolue avec la réserve faite au début en ce qui concerne la question de la représentativité. Tout différemment se pose, certes, la question du point de vue diachronique pour lequel nous devons constater que la première édition de 1806 contient déjà tous les mots mentionnés. Tandis que, par exemple, dans la partie diachronique de l'article mayonnaise, la datation 1807 provenant du DG, donnée jusqu'ici (" 1807. Saumon à la mayonnaise, VIARD, Cuisin. impér. p. 300"), a été remplacée, avec raison, paz la date de 18062, dans les articles blond, e et chantilly, même dans la rubrique Etymol. et Hist. sont cités, d'après les matériaux de l'IGLF, les passages provenant de A. VIARD 1831 [lire maintenant 1814, bien que VIARD 18061es contienne déjà.
Pour éclaircir cette question diachronique du rapport des différentes éditions entre elles, nous devons d'abord en distinguer quatre, fondamentales, qui n'ont rien à voir avec le changement de titre relatif aux données politiques du moment, mais qui sont conditionnées seulement par des additions de nouveaux auteurs. Ces compléments sont signalés à partir de la dixième édition de 1820, chaque fois, paz des abréviations à la fln de chaque recette : F. = Fouret, à partir de 1820 ; D. = Délan, à partir de 1832 : B. = Bernazdi, à partir de 1851. Que dans une même et seule série d'éditions, des changements puissent apparaître isolément, l'exemple mentionné de d l'Impériale, remplacé en 1817 par d la Royale, le montre déjà ;mais de nouvelles recettes ont aussi été ajoutées isolément à l'intérieur d'une série, comme par exemple Gâteau d la Manon, Truffes d la serviette pour la première fois en 91817 ou charlotte russe pour la première fois en t t 1822, de sorte que pour chàque cas particulier, doit être vérifié si un mot se trouve déjà au début de la série en question. Pour la question diachronique, on ne doit pas oublier de mentionner que, en particulier l'édition de 1820 avec les compléments de FOURET, contient une foule de nouvelles recettes qui, dans l'ensemble, apporte un nombre beaucoup plus grand de premières attestations que l'ouvrage original de VIARD de 18063.
M. HbFLER
Université de Dusseldorf
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NOTES
1. Cah. lexicol. LI (1987) 2, p. 155.
2. Pourtant, seule la forme (saumon) d la mayonnaise est datée de 1806, tandis que les formes sauce mayonnaise, mayonnaise de volaille ne sont attestées, d'après FEW 6/1, 52a, que depuis AUDOT 1855, bien que VIARD 1806 atteste déjà aussi mayonnaise n. f. (p. 342) et sauce mayonnaise (p. 345) - Au lieu de l'indication d'éditeur "Bordas" dans l'article du TLF, il faut lire "Barba".
3. De façon semblable se pose la question pour le livre de cuisine de L.-E. AUDOT, La cuisinière de la campagne et de la ville mentionnée dans le TLF à partir des matériaux de l'/GLF, et cité d'après la soixante-quatorzième édition de 1896. Il va de soi que ces attestations ne peuvent contribuer que faiblement à l'histoire des mots, surtout si l'on considère que l'ouvrage a paru pour la première fois (anonymement) en 1818, et que peu de compléments y ont été apportés après 1843. Mais encore plus que pour VIARD 1831 (à remplacer par 1814) se pose ici, dans la partie synchronique, la question de la représentativité, car l'édition de 1896 représente tout au plus le vocabulaire des années 40, en grande partie plutôt celui du début du XIXe siècle.
FRANZ~SISCHES ETYMOLOGISCHES W~RTERBUCH.
Eire darstellung des galloromanisches sprachschatzes,
von Walther v. WARTBURG f, publié par Jean-Pierre CHAMBON, fascicule n° 149,
[orne XXV (refonte du tome 1~ : artificialis--aspergere, pp. 385-480, Bâle, 1988.
Conduits selon les méthodes les plus traditionnelles et les mieux éprouvées de la philologie romane, qui en font de véritables produits d'artisanat d'art, mais conçus dans le même temps selon une optique linguistique discrètement mais résolument renouvelée, qui en fait des outils admirablement au point, les derniers fascicules du FEW, publiés sous la direction de Jean-Pierre CHAMBON, font songer au phénix redivivus !Comment ne pas se réjouir que l'ceuvre monumentale de WARTBURG, somme unique du galloroman, lieu de mémoire de notre langue et l'une des meilleures clés qui en permettent l'intelligibilité, ait retrouvé si fière allure et avance d'un si bon pas. Quelle santé !Comme c'était le cas pour les livraisons précédentes, le nombre des articles a plus que doublé par rapport au tome 1~ (au papier désormais jauni et cassant) et leur longueur s'est considérablement accrue :ainsi ASARUM et ASBESTOS, qui se suivent, occupaient respectivement 3 et 2 lignes... ils totalisent ici plus de 5 pages, tandis que, de son côté, ASPECTUS est passé d'une ligne à 3 colonnes !Pour la tranche de nomenclature considérée, les 14 colonnes du tome 1~ sont devenues 96 pages (et d'une densité typographique accrue, un peu "limite" pour les yeux de certains).
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Au chapitre des nouveautés de la nomenclature, on relèvera un bon paquet d'étymons grecs comme ARTÔMELI, ARŸBALLOS, ARYTAINOÉIDES, ASiARCHES, ASKÂLABOS, ASKÂLAPHOS, ASKARiS, ASKETÉS, ASKiDION, ÂSKIOS, etc., des termes du latin classique (ARVALIS) ou patristique (ARTOTYRTTAE, ASETTAS), des déonomastiques (ARTOIS, ASIAGO, ASKLEPiOS, ASPEGREN) ;avec de bonnes raisons, mais non sans nuances ou prudentes réserves parfois, sont proposées des bases étymologiques nouvelles, qu'il s'agisse du préroman *ARTIKA, du gaulois tardif *ARUAAA ou de dérivés du latin comme *ASÏLARE ou *ASÏNATA. Un seul regret, que partage certainement le maître d'ceuvre dont on sait la passion pour l'onomastique, l'absence d'un article ASÎA (et de ses satellites) qui eût poursuivi le paradigme entamé dans la refonte avec AFRICA (24, 255b) et AMÉRIQUE (25, 434a-435b) : maison conviendra que pour rédiger un tel article les éléments ne sont guère faciles à rassembler et relèvent d'une entreprise documentaire spécifique (pour peu qu'on veuille aller au-delà des encyclopédies) ;cette dernière remarque vaut aussi pour les variétés du français hors de France (métropolitaine) et du français hors d'Europe.
Certains articles émergent particulièrement de ces 96 pages :pour la longueur et la complexité des rouages sémantiques, on signalera ASÏNLTS, qui occupe plus de 20 pages et dont la prolifique richesse, magnifiquement servie par l'analyse, eût laissé sans voix l'ânesse de Balaam ! La dizaine de pages que compte ASPER organise aussi au mieux des faits qu'il n'était pas aisé d'articuler en raison d'emplois très variés. Moins longs, mais importants par les difficultés qti ils présentaient ou la nouveauté qu'ils apportent, sont les articles *ARTIKA, *ÂRTOS, *ASÎLARE, ASILUS, *ASÎNATA ;mais, futilité de cette litanie, on devrait citer presque tous les articles.
Parmi les points forts gdil faudrait mettre en relief (critique accrue des sources existantes, accroissement considérable de la documentation, consultations de "spécialistes" les plus divers, attention portée aux régionalismes, discussion ouverte et objective à partir des faits exposés, etc.) on retiendra ici particulièrement deux choses. Le souci tout d'abord d'une écoute attentive de l'étymologie populaire : au lieu d'être moquée et rejetée dans les ténèbres extérieures ou confinée dans des notes infrapaginales, celle-ci se voit accueillie, passée au creuset d'une analyse rigoureuse, et entre à sa place (qui n ést pas mince parfois) dans l'analyse des mécanismes des changements linguistiques ;des articles comme ASCALÔNIA ou *ASiLARE apportent l'excellente démonstration que le jeu en vaut la chandelle. Par ailleurs, cette refonte permet tout naturellement de nombreuses corrections aux volumes des Matériaux d'origine inconnue (et parfois aussi au reste de l'ouvrage) comme on peut le voir abondamment dans ce fascicule, par exemple sous ARTIFICIUM, n. 8-9, AS, n. 16, 18, ASARUM, n. 16, 24, 26-29, *ASCIATA, n. 1, ASCIÔLA, a 5, 9, *ASiLARE, n. 1, 3, 6, 9, 14 etc., *ASINATA, n. 2, 10-11, ASÏNUS, n. 109, 121, ASPARAGUS, n. 9-10, ASPER, n. 23, *ASPERÉLLA, n. 9-11, 15, 17.
Quelques notules. ARTIFICIALIS 385b, n. 2 : pré artificiel figurant déjà dans le questionnaire de l'AIA, rédigé par G. Massignon [idiolecte de l'auteur ?], on peut se demander s'il n'a pas influencé les trois témoins du sud de la Charente qui l'ont employé ; 385a, aj. mouche artificielle "leurre pour la pêche" (dp. 1845, Rob 1985) et soie artificielle, en rectifiant 11, 49b s.v. SAETA, Lar 1933] 1889, Rob 1985. —ARTOIS 391b : aj. d la d'Artois [pour spécifier
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diverses prépazations culinaires, sans qû on puisse, malheureusement, en indiquer la nature] gdteaux (...) d la d'Artois (Almanach des gourmandas, 1807, 76), filets de volaille d la d'Artois (Grimod de La Reynière, Manuel des amphitryons 1808 [éd. A. M. Métailié, Paris, 1983, 121], potage d /a d'Artois (ibid., 158), ris de veau d la d'Artois (imaginés par le dernier comte de ce nom [Charles Philippe, qui devint Chazles X]...) (ibid., 153 ;dartois m. "gâteau feuilleté à la frangipane ou aux confitures" (Laz 1878-1960)). - AS 399a :fichu comme l'as de pique (dep. Ds 1896)] Rig 1881 ; 399b :avoir l'as de carreau sur le dos "être bossu" Ds 1896] Rig 1881, qui précise "dans l'azgot du régiment" ; 399b sous 2.i., aj. Québec battre quatre as "ne pouvoir être surpassé" (1909, Dionne) et aussi tapé d l'as "tout ce qu'il y a de plus soigné" (Rig 1881, citant A. Bouvier, Auguste Manette [1869, 57]) ; 400a, fin du ler §, aj. : Québec être paqueté aux as "être ivre" (1968, ds A. Clas et E. Seutin, Dict. de loc., Montréal, 1985) et perdu aux as "complètement perdu" (1975, ibid.) ; 400a sous 4., as "le consommateur assis à la première table (dans un café, un restaurant]" 1878] 1855 (L. Lespès, Paris dans un fauteuil, 110, d'apr. Rig 1881) ; 400a, aj. six, as et as "dosage classique de poudre noire" (six parties de salpêtre, pour une de soufre et une de charbon de bois)" (Grand Dict. Encyclop. Lar.). - ASCENSIO 416 : aj. ascension "oeuvre d'art représentant l'ascension du Christ" Trév 1704 ; aj. ascension "remontée d'un fleuve" (1828, hapax ( ?), J.-F. Champollion, Lettres, Paris, rééd. 1986, 184 : "... nous étions parvenus au terme de notre ascension niliaque ; la seconde cataracte était devant nous") ; aj. ascensure "ascension du Christ" (1520, hapax à la rime, Noëls de L. Le Moigne, éd. J. Pichon, 1860, 124) ; 417b, n. 4 : peut-être plutôt parce que, bien que "fête mobile", l'Ascension est toujours quarante jours après Pâques. - ASÏNIiVUS 437a : in fine, aj. Haute-Volta charrette asine "petite charrette tirée paz un âne" (Inv. des part. lexicales du fr. en Afrique noire, 1988 (2e éd.), 20). -nSÏNUS 438b : aj. asneau "ânon" (1520, hapax à la rime, Noëls de L. Le Moigne, 51) ; 441 b bougre d'dne, voir surtout TLF s. v. fine, ex. 8, qui cite Courteline, 1888) ; 445a tête d'@ne aj. "poisson : le chabot commun ;reptile (sic) : le têtard de la grenouille" (1808-1825, L. Mau- duyt, Voc. poitevin, Poitiers, Bibl. mun., ms. 837) ;sous 2. b. (3, aj. un renvoi à *PISSIARE 8, 588b (pissat d'dne "mauvaise bière") et pisse d'dne, de même sens (Rob 1985 et maintenant 1977 TLF) ; 450a, fin du 2e §, aj. un renvoi à*PISSIARE 8, 588b (ang. pissat d'@ne "linaire") ; 451b, sous II. 1. a, aj. Haute-Volta et Sénégal asins pl. "ensemble des animaux de l'espèce asine" (1977, ds /nv...., 20). - nSPER 473b : aj. la forme apprasse ( : saize "seize" 1520, Noëls de L. Le Moigne, 71). - *nSPERÉLLA 479 : aux désignations de la prêle motivées paz son utilisation domestique, on pourrait ajouter maintenant la référence suivante : "... nettoyer lou vai'sseou (le tonneau) à l'aide des gaveou de tine (les plants d'asperge sauvage) [v. *GABELLA 4, 15b] qui constituent de vraies brosses de chiendent" (P. Magnan, L'Amant du poivre d'Bne, Paris, 1988, 42), référence qui enrichit aussi l'article ASPARAGUS 464b sous 3.a. Faut-il regretter une peccadille (399b, ligne 1, 1893] 1793) et quelques vétilles et coquilles ? 396a, ligne 4 rév] Trév ; 462a, Se ligne avant la fin :après yov-, aj. "id." (ce formant manque au TLF, qui n'indique que -gone "à n angles" mais qui a pourtant traité ascogone s.v. asco-).
Sous sa couverture immuable, dont la maquette austère évoque quelque "Todesanzeige", cette dernière livraison du FEW est un nouvel hymne au galloroman et à la langue française. Parce qu'elle ignore la routine sclérosante et s'exerce quotidiennement àune rude ascèse, l'équipe bâloise nous livre là des pages de grande qualité, traversées aussi, c'est un plaisir de le souligner, par une jubilation et un enthousiasme communicatifs ;tant de science et de conscience, assorties
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d'un rythme de publication soutenu, placent l'entreprise, malgré la modicité de ses moyens, au premier rang de hi réflexion linguistique et de la production dictionnairique scientifique.
Au moment où les autorités de tutelle helvétiques se désengagent de l'entreprise (à la fm de la refonte du A, prévue pour 1992-1993), il est réconfortant de penser que la communauté scientifique française envisage de prendre le relais (pour des objectifs et selon des modalités à préciser). Au point d'excellence atteint par le Centre du FEW, c'est un honneur en même temps qu'un devoir.
P. RÉZEAU
INaLF -NANCY
DICTIONNAIRE DU FRANÇAIS PLUS
à l'usage des francophones d'Amérique, Montréal, Centre Éducatif et Culturel inc.,
1988, XXIV et 1856 pages.
R y a eu des précédents, notamment le dictionnaire de L. BÉLISLE adaptant [,lTTRÉ pour les besoins linguistiques des Québécois, mais la comparaison tourne court. En effet, il ne s'agit pas ici de coudre des pièces rapportées à un vieil habit, mais bien d'un travail de confection sur mesures à partir d'un patron français. Le Dictionnaire du français Plus, dérivé du Dictionnaire du français paru chez Hachette en 1987, se veut un ouvrage neuf, adapté à la réalité culturelle et linguistique des "francophones d'Amérique" comme l'annonce le sous-titre un peu commercial, en fait des Canadiens, plus particulièrement des Québécois et accessoirement des Acadiens.
On ne s'attardera pas ici sur les mérites du dictionnaire choisi comme point de départ ;sans avoir le prestige de son préfacier, il offrait le double avantage d'être un dictionnaire de langue à jour, ouvert aux descriptions encyclopédiques et d'appartenir à une maison d'édition décidée à tenter l'aventure. Le pari semble gagné puisque, en quelques mois, plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires de ce nouveau produit ont déjà été vendus au Canada. D'où vient un tel succès ? De la gourmandise d'une population encore plus friande peut-être de dictionnaires que les Français ? Ou plutôt, de l'originalité de l'ouvrage et de sa nouveauté ?
Voici en effet que l'on présente aux Québécois un dictionnaire de langue qui rend compte de leur parler sans y mettre des étiquettes ou des symboles discriminants par rapport au français de France. Comment ne se réjouiraient-ils pas de voir leurs mots, leurs expressions pleinement reconnus et sérieusement décrits dans un ouvrage de bonne tenue, garanti par les meilleures cautions universitaires du Québec en la matière, grâce notamment à la participation d'une équipe de l'Université Laval dirigée par CI. POIRIER, rédacteur principal de ce Dictionnaire du français Plus.
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L'adaptation aux réalités d'ici (comme on dit là-bas, ainsi dans la Note de l'éditeur, p. VII) et qui a porté sur 4000 mots ou sens et quelque 200 développements encyclopédiques, est faite grâce à un remodelage à plusieurs niveaux : 1) Aménagement des articles existants, en y insérant des exemples renvoyant à l'univers nord-américain et puisant éventuellement dans la littérature québécoise. Ainsi, dés la première page, sous à, on lit paz exemple Un voyage d Chicoutimi. Aller de Montréal d Québec. La distance de Trois-Rivières d Percé. Lettre ouverte au ministre de l'Éducation au lieu de Un voyage d Madrid. Aller de Strasbourg d Brest. La distance de Paris d Versailles. Lettre ouverte au Président de !a République ;aménagement aussi des développements encyclopédiques, ainsi s.v. académie, blé, climat, mariage, université, etc. 2) Développements encyclopédiques particuliers, dictés par le contexte, qui permettent de mieux appréhender les composantes les plus diverses de la langue, de l'identité et de l'univers des locuteurs, notamment dans les domaines de l'histoire, de l'environnement, des institutions, de la vie quotidienne, ainsi s.v. acadien, avocat, bison, bleuet, bouclier, cajun, canadien, capital, caribou, coopération, commission, cotutitution, cour, érable, forêt, habitant, judiciaire, norme, paroisse, parti, pêche, perdrix, piastre, prononciation, québécois, religieux, sauvage, seigneurie, shérif, suisse (on attendait Révolution tranquille s.v. révolution, avec quelques lignes de commentaire). Dans la même ligne, mais hors-texte du dictionnaire, les pp. 1848 à 1856 offrent des aperçus, dûs à Cl. POIRIER, sur les anglicismes, les québécismes et l'expansion du français. 3) Ajouts à la macrostructure de nouvelles entrées comme abénaquis, aboiteau, achigan, barré, berçante, bi6ite, bingo, b[é d'lnde, bouscueil, canaden, carcajou, carouge, carreauté, C.C.N., cégep, chasse- ga[erie, cipaille, comtnon law, trope[, dérougir, enfarger, ennuyant, épluchette, gang[, gourgane, guignolée, habeas corpus, halloween, jello, micouenne, mitasse, motoneige, niaiseux, pantoute, piton', piton3, pitonner, portage (et famille), poutine, séraphinz, tiret, zonage, etc. ;ajouts aussi à la microstructure ainsi s.v. basz, bombez, caisse, camp, casse-crofite, cave, comté, culotte, pinson, pitonz, rondelle, soc, sous-marin, tourtière. Bien entendu, ces ajouts à la macrostructure et à la microstructure entraînent souvent eux aussi, surtout les premiers, des développements encyclopédiques.
Il y aurait encore à signaler les aménagements concernant les indications phonétiques (discrets mais bienvenus) ou le cazactère inchangé, malheureusement, de la liste finale des proverbes, pp. 1844-1847 (que les lecteurs québécois se rassurent, elle n'est guère adaptée non plus aux lecteurs français).
On le devine, il s'agit là d'un travail énorme qui suppose un lourd investissement de forces diverses et répond à un projet dont P. AUGER et N. BEAUCHEMIN exposent la philosophie dans un Avant-propos, et dont Cl. POIRIER indique avec clarté les principes méthodologiques dans la Présentation. Malgré les difficultés de mise en route d'une pareille entreprise, on peut penser qublle est bien commencée et que les objectifs visés seront atteints progressivement au fil des éditions à venir.
Voici à cet égard quelques suggestions discrètes
- avant d'être considéré comme une norme et pour y parvenir, un dictionnaire doit rendre compte de l'usage et ne pas délaisser des faits bien établis dans la langue, tout en ayant soin bien
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sûr d'en indiquer au mieux les conditions d'emploi. Si l'on enregistre des faits comme barre du jour ou bouscueil, on conviendra que pour une meilleure représentation de la langue usuelle beaucoup de choses restent à enregistrer, de brosse à rêver en couleurs en passant par crème d'habitant, fun, garrocher, guidoune, même (de —), pogner, ça (me) prend..., j'en passe et des meilleures ;s'il fallait pour cela trouver de la place, on verrait disparaître sans grand dommage bon nombre de "gentilés" dont le traitement ne semble pas répondre à une nécessité et qui auraient pu rester dans la table finale (pp. 1830-1845) qui leur est consacrée à juste titre.
- ces ajouts devront comprendre avant tout des mots cachés comme gendarmerie royale du Canada s.v. policer, jouer d !a cachette s.v. coucou, ou oubliés comme bine indiqué s.v. fève ; on devrait avoir soin également que la langue des pages liminaires soit lisible à l'aide du dictionnaire qu'elles annoncent ; en mettant à part défolklorlser (p. IX), québécisation (p. X) ou secondarisé (p. XI) puisqu'ils sont entre guillemets, il reste, et je le souligne en italiques, inc. (page de titre), "les gens d'ici" (p. VII), "les mots tabous et les concepts y rattachés" (p. IX), "efforts politiques et aménagistes" (p. IX), "des outils universels mononormatifs" (p. X), à quoi on ajoutera "violette cucullée" (p. de garde in fine) ou encore, dans les annonces publicitaires pour le Dictionnaire :tel qu'd la télé, équivalent du "w à la télé" en France.
- un excellent procédé est parfois utilisé pour marquer discrètement les divergences entre le Québec et la France, sous forme de remarques ou grâce à l'ajout de l'indicateur FRANCE, ainsi s.v. ballez, bouilleur, cartable, culotte, fève, haricot, mitaine, moufle, tuyau. Il semble bien qu il y aurait intérêt à étendre ce procédé, pour signaler par exemple que enquiquiner, moche, placard ou square etc. n'appartiennent pas ou guère à l'usage québécois.
Paz ailleurs, on pourra avantageusement multiplier des renvois et des mises en parallèle comme ceux que l'on trouve s.v. truite, afm de mieux mettre en valeur ce qui ressortit au français de Québec et au français de France, en complétant au besoin la nomenclature, ainsi bol de toilette vs cuvette de W.C., bas-culotte vs collant, bourgogne (couleur) vs bordeaux, collation vs quatre heures, cuiller d thé (recettes, posologie) vs cuiller d café, débarbouillette vs gant de toilette, détour (panneau routier) vs déviation, facture (au restaurant) vs nd~lition, brun vs marron, palette (de chocolat) vs tablette, peinturer au fusil vs peindre au pistolet, pitonnage/ pitonner/pètonneur vs zappinglzapperizappeur, pointe (de tarte) vs morceau ou part, racoin vs recoin, etc. On aura soin également d'indiquer autant que possible la différence de vitalité d'un mot de chaque côté de l'Atlantique, ainsi pour épeurer ou certains sens de piger, vx en France mais non au Québec.
- une dernière remarque concerne l'indicateur ANGLICISME, qui semble affecté d'une valeur puriste et distribué un peu au hasard. Sans doute veut-on dire paz là qu'il convient de préférer à des mots issus de l'anglais des mots du fonds français, ainsi magasinage vs shopping, stationnement vs parking, industrie du spectacle vsshow-business, mais quel équivalent est offert pour suppléer à flash, peppermint, skye-terrier, smash, etc. ?
De part et d'autre de l'Atlantique, il ne manquera pas d'esprits bien intentionnés pour critiquer cet ouvrage, regrettant paz exemple que l'on ne soit pas parti de sources québécoises au lieu de recourir au support française ou encore pour crier à l'amalgame, au folklore, au laisser-
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aller linguistique. Les auteurs du Dictionnaire ont simplement voulu parer à une situation urgente, notamment sur le plan pédagogique, et ils sont probablement les mieux placés pour apprécier la nécessité de cette réalisation et les difficultés de sa mise en oeuvre. Il convient de les féliciter d'aller ainsi de l'avant et de leur souci (annoncé p. XII) d'apporter au produit les nécessaires améliorations dans les éditions à venir.
Lourde tâche, dont la petite équipe du TLFQ de l'Université Laval assure la plus grande part, en plus de son propre projet, le Dictionnaire du français québécois, dont elle a récemment donné des gages prometteurs.
P. RÉZEAU
INaLF-NANCY
NOTE
1. Pour un projet de dictionnaire général du français québécois, voir cependant Revue
québécoùe de linguistique théorique et appliquée, 7t (1988).
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GESELLSCHAFT FÜR ANGEWANDTE LINGUISTIK (GAL)
20° Congrès annuel
Le 20e Congrès Annuel de la Gesellschaft fiir Angewandte Linguistik (GAL) aura lieu à l'Université de Gdttingen du 5 au 7 octobre 1989. Le thème principal du Congrès sera la Communication Interculturelle, qui sera traité à partir de quatre axes fondamentaux
I Structures de texte et de discours :aspects méthodologiques de la comparaison intereulturelle
II Conflit de langue
III Traduction et civilisation
IV Acquisition d'une langue interculturelle et enseignement des langues
En outre, des groupes seront constitués sur les sujets suivants
1 Phonétique
2 Lexique et Grammaire
3 Linguistique et stylistique de l'écrit
4 Fom~ation à l'expression orale /Communication rhétorique
5 Media et communication
6 Langues de spécialités
7 Sociolinguistique
8 Linguistique de contact
9 Linguistique conttastive et communication interculturelle
10 Traduction
11 Psycholinguistique
12 Pathologie et thérapie de la parole
13 Enseignement des langues
14 Éducation et apprentissage de la langue
15 Linguistique et informatique.
Paz ailleurs, des ateliers et conférences plénières seront organisés sur différents sujets.
Pour de plus amples informations concernant les formalités de participation, les propositions d'articles, la liste des conférenciers et des sujets, prière de s'adresser à Prof. Dr Bemd SPILLNER
GAL - Geschàftsstelle Universitàt Duisburg
Postfach 10 15 03
D - 4100 DUISBURG 1 (R.F.A.)
tél. (0203) 379-2064
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The 20th Annual Congres of the Gesellschaft für Angewandte Linguistik (GAL) e.V. will take place at thc University of Gbttingen from October S-7, 1989. The main topic of the conference will be Intercultural Communication, which will be covered in four main arecs
I Text and Discourse Patterns : Methodological Aspects of Intercultural Comparison
II Language Conflict
III Translation and Civilization
N Intercultural Language Acquisition and Language Teaching
In addition, sections will be held in the following subjects
1 Phonetics
2 Lexicon and Grammar
3 Text Linguistics and Srylistics
4 Speech Training / Rhetorical Communication
5 Media Communication
6 Language for Specific Purposes
7 Sociolinguistics
8 Contact Linguistics
9 Contrastive Linguistics and Intercultural Communication
10 Translation
11 Psycholinguistics
12 Speech Pathology and Therapy
13 Language Teaching
14 Language Learning Technology
15 Computational Linguistics.
Furthemwrc, there will be workshops and plenary lectures on varions subjects.
For any further information regarding attendante, submission of papets, a list of lecturers and topics etc.> please contact
Prof. Dr Bernd SPILLNER
GAL - Gesch~ftsstelle Universit~t Duisburg
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tel. (0203) 379-2064
CONTRIBUTION AU COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE DU TLF
Dans son article "À propos de deux problèmes lexicographiques" dans les Cahiers de lexicologie LI, (1987) 2, pp. 149-158, G. GORCY traite, entre autres, des problèmes de la datation en relation avec le TLF, bien qu'il ne parle, pour l'essentiel, que de la partie synchronique, pour laquelle de telles questions sont d'une importance secondaire. Dans cette partie, en effet, l'époque de 1789 à 1960 est considérée comme une unité synchronique, aussi est-il sans importance qu'une attestation citée soit de 1831 ou de 1806. Il est seulement nécessaire que les attestations soient citées et datées correctement et qu'elles soient prises dans des textes qui peuvent être considérés comme représentatifs de l'époque décrite.
Et c'est justement cette question de la représentativité qui nous amène à nous demander si, à côté des textes dépouillés en entier paz le TLF lui-même, il est justifié de joindre les attestations de l'IGLF qui ont été rassemblées selon des critères tout différents. Et si elles sont citées de temps en temps dans le TLF, se pose alors la question de l'exactitude de ces attestations. Ici, GORCY constate certaines insuffisances qui doivent être corrigées dans un Complément bibliographique prévu. Comme exemple de telles corrections, il traite, dans l'article mentionné, de l'ouvrage de A. VIARD, Le cuisinier royal, dont les matériaux de l'IGLF (et à sa suite les volumes déjà parus du TLF) citent une huitième édition de 1831, et pour lequel, maintenant, GORCY précise, à juste titre, que la huitième édition a déjà paru en 1814, mais sous le titre original de Le cuisinier impérial. À partir du fait que l'ouvrage paraît depuis la dixième édition de 1820 sous le nom des deux auteurs VIARD et FOURET et porte depuis la neuvième édition de 1817 pour la première fois le titre de L.e cuisinier royal, GORCY déduit, de façon logique en apparence, que dans l'/GLF, il ne peut s'agir que de la neuvième édition de 1817. Logique, certes, mais seulement à condition que tirage et date de parution puissent être inexacts dans l'IGLF, mais que le titre soit correctement cité. La déduction beaucoup plus immédiate que seule une comparaison des différentes éditions, en tenant compte des paginations respectives, peut résoudre le problème, est certes envisagée compte nécessité supplémentaire par GORCY à la fm de ses réflexions ("Encore faudra-t-il vérifier dans différentes éditions de l'ouvrage si la pagination des exemples répartis dans l'ouvrage correspond.")t, mais cette comparaison n'a toujottrs pas été faite.
Quand il constate expressément au sujet du titre de ce livre de cuisine : "on sait que c'est à partir de la 9e édition (1817) qu'impérial a été remplacé paz royal",1'article impératrice dans le
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TLF, au plus tard, devrait lui donner à réfléchir. Ici, en effet, est donnée une attestation tirée de cet ouvrage "Potages (...) à l'Impératricé' bien que, avec le changement de titre de 1817, le plat décrit change aussi de nom : "Potages... A la Reine" (p. 17). Mais, à la page 24, comme indiqué dans le TLF, se trouve l'attestation "Potages... A l'Impératrice" dans la huitième édition, revue et corrigée de l'ouvrage de A. VIARD, Le cuisinier impérial, ou l'art de faire la cuisine et !a pârisserie, pow toutes !es fortunes, Paris, Barba, 1814. I,es autres attestations citées dans le TLF d'après les matériaux de l'IGLF proviennent aussi de cette édition. Voir p. ex. les articles abaisse, ballot(t)ine, barigoule, canapé, jardinière, julienne, marier, matelote, pain.
Ainsi, la question soulevée par GORCY pour la partie synchronique des articles du TLF se trouve résolue avec la réserve faite au début en ce qui concerne la question de la représentativité. Tout différemment se pose, certes, la question du point de vue diachronique pour lequel nous devons constater que la première édition de 1806 contient déjà tous les mots mentionnés. Tandis que, par exemple, dans la partie diachronique de l'article mayonnaise, la datation 1807 provenant du DG, donnée jusqu'ici (" 1807. Saumon à la mayonnaise, VIARD, Cuisin. impér. p. 300"), a été remplacée, avec raison, paz la date de 18062, dans les articles blond, e et chantilly, même dans la rubrique Etymol. et Hist. sont cités, d'après les matériaux de l'IGLF, les passages provenant de A. VIARD 1831 [lire maintenant 1814, bien que VIARD 18061es contienne déjà.
Pour éclaircir cette question diachronique du rapport des différentes éditions entre elles, nous devons d'abord en distinguer quatre, fondamentales, qui n'ont rien à voir avec le changement de titre relatif aux données politiques du moment, mais qui sont conditionnées seulement par des additions de nouveaux auteurs. Ces compléments sont signalés à partir de la dixième édition de 1820, chaque fois, paz des abréviations à la fln de chaque recette : F. = Fouret, à partir de 1820 ; D. = Délan, à partir de 1832 : B. = Bernazdi, à partir de 1851. Que dans une même et seule série d'éditions, des changements puissent apparaître isolément, l'exemple mentionné de d l'Impériale, remplacé en 1817 par d la Royale, le montre déjà ;mais de nouvelles recettes ont aussi été ajoutées isolément à l'intérieur d'une série, comme par exemple Gâteau d la Manon, Truffes d la serviette pour la première fois en 91817 ou charlotte russe pour la première fois en t t 1822, de sorte que pour chàque cas particulier, doit être vérifié si un mot se trouve déjà au début de la série en question. Pour la question diachronique, on ne doit pas oublier de mentionner que, en particulier l'édition de 1820 avec les compléments de FOURET, contient une foule de nouvelles recettes qui, dans l'ensemble, apporte un nombre beaucoup plus grand de premières attestations que l'ouvrage original de VIARD de 18063.
Université de Dusseldorf
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NOTES
1. Cah. lexicol. LI (1987) 2, p. 155.
2. Pourtant, seule la forme (saumon) d la mayonnaise est datée de 1806, tandis que les formes sauce mayonnaise, mayonnaise de volaille ne sont attestées, d'après FEW 6/1, 52a, que depuis AUDOT 1855, bien que VIARD 1806 atteste déjà aussi mayonnaise n. f. (p. 342) et sauce mayonnaise (p. 345) - Au lieu de l'indication d'éditeur "Bordas" dans l'article du TLF, il faut lire "Barba".
3. De façon semblable se pose la question pour le livre de cuisine de L.-E. AUDOT, La cuisinière de la campagne et de la ville mentionnée dans le TLF à partir des matériaux de l'/GLF, et cité d'après la soixante-quatorzième édition de 1896. Il va de soi que ces attestations ne peuvent contribuer que faiblement à l'histoire des mots, surtout si l'on considère que l'ouvrage a paru pour la première fois (anonymement) en 1818, et que peu de compléments y ont été apportés après 1843. Mais encore plus que pour VIARD 1831 (à remplacer par 1814) se pose ici, dans la partie synchronique, la question de la représentativité, car l'édition de 1896 représente tout au plus le vocabulaire des années 40, en grande partie plutôt celui du début du XIXe siècle.
Eire darstellung des galloromanisches sprachschatzes,
von Walther v. WARTBURG f, publié par Jean-Pierre CHAMBON, fascicule n° 149,
[orne XXV (refonte du tome 1~ : artificialis--aspergere, pp. 385-480, Bâle, 1988.
Conduits selon les méthodes les plus traditionnelles et les mieux éprouvées de la philologie romane, qui en font de véritables produits d'artisanat d'art, mais conçus dans le même temps selon une optique linguistique discrètement mais résolument renouvelée, qui en fait des outils admirablement au point, les derniers fascicules du FEW, publiés sous la direction de Jean-Pierre CHAMBON, font songer au phénix redivivus !Comment ne pas se réjouir que l'ceuvre monumentale de WARTBURG, somme unique du galloroman, lieu de mémoire de notre langue et l'une des meilleures clés qui en permettent l'intelligibilité, ait retrouvé si fière allure et avance d'un si bon pas. Quelle santé !Comme c'était le cas pour les livraisons précédentes, le nombre des articles a plus que doublé par rapport au tome 1~ (au papier désormais jauni et cassant) et leur longueur s'est considérablement accrue :ainsi ASARUM et ASBESTOS, qui se suivent, occupaient respectivement 3 et 2 lignes... ils totalisent ici plus de 5 pages, tandis que, de son côté, ASPECTUS est passé d'une ligne à 3 colonnes !Pour la tranche de nomenclature considérée, les 14 colonnes du tome 1~ sont devenues 96 pages (et d'une densité typographique accrue, un peu "limite" pour les yeux de certains).
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Au chapitre des nouveautés de la nomenclature, on relèvera un bon paquet d'étymons grecs comme ARTÔMELI, ARŸBALLOS, ARYTAINOÉIDES, ASiARCHES, ASKÂLABOS, ASKÂLAPHOS, ASKARiS, ASKETÉS, ASKiDION, ÂSKIOS, etc., des termes du latin classique (ARVALIS) ou patristique (ARTOTYRTTAE, ASETTAS), des déonomastiques (ARTOIS, ASIAGO, ASKLEPiOS, ASPEGREN) ;avec de bonnes raisons, mais non sans nuances ou prudentes réserves parfois, sont proposées des bases étymologiques nouvelles, qu'il s'agisse du préroman *ARTIKA, du gaulois tardif *ARUAAA ou de dérivés du latin comme *ASÏLARE ou *ASÏNATA. Un seul regret, que partage certainement le maître d'ceuvre dont on sait la passion pour l'onomastique, l'absence d'un article ASÎA (et de ses satellites) qui eût poursuivi le paradigme entamé dans la refonte avec AFRICA (24, 255b) et AMÉRIQUE (25, 434a-435b) : maison conviendra que pour rédiger un tel article les éléments ne sont guère faciles à rassembler et relèvent d'une entreprise documentaire spécifique (pour peu qu'on veuille aller au-delà des encyclopédies) ;cette dernière remarque vaut aussi pour les variétés du français hors de France (métropolitaine) et du français hors d'Europe.
Certains articles émergent particulièrement de ces 96 pages :pour la longueur et la complexité des rouages sémantiques, on signalera ASÏNLTS, qui occupe plus de 20 pages et dont la prolifique richesse, magnifiquement servie par l'analyse, eût laissé sans voix l'ânesse de Balaam ! La dizaine de pages que compte ASPER organise aussi au mieux des faits qu'il n'était pas aisé d'articuler en raison d'emplois très variés. Moins longs, mais importants par les difficultés qti ils présentaient ou la nouveauté qu'ils apportent, sont les articles *ARTIKA, *ÂRTOS, *ASÎLARE, ASILUS, *ASÎNATA ;mais, futilité de cette litanie, on devrait citer presque tous les articles.
Parmi les points forts gdil faudrait mettre en relief (critique accrue des sources existantes, accroissement considérable de la documentation, consultations de "spécialistes" les plus divers, attention portée aux régionalismes, discussion ouverte et objective à partir des faits exposés, etc.) on retiendra ici particulièrement deux choses. Le souci tout d'abord d'une écoute attentive de l'étymologie populaire : au lieu d'être moquée et rejetée dans les ténèbres extérieures ou confinée dans des notes infrapaginales, celle-ci se voit accueillie, passée au creuset d'une analyse rigoureuse, et entre à sa place (qui n ést pas mince parfois) dans l'analyse des mécanismes des changements linguistiques ;des articles comme ASCALÔNIA ou *ASiLARE apportent l'excellente démonstration que le jeu en vaut la chandelle. Par ailleurs, cette refonte permet tout naturellement de nombreuses corrections aux volumes des Matériaux d'origine inconnue (et parfois aussi au reste de l'ouvrage) comme on peut le voir abondamment dans ce fascicule, par exemple sous ARTIFICIUM, n. 8-9, AS, n. 16, 18, ASARUM, n. 16, 24, 26-29, *ASCIATA, n. 1, ASCIÔLA, a 5, 9, *ASiLARE, n. 1, 3, 6, 9, 14 etc., *ASINATA, n. 2, 10-11, ASÏNUS, n. 109, 121, ASPARAGUS, n. 9-10, ASPER, n. 23, *ASPERÉLLA, n. 9-11, 15, 17.
Quelques notules. ARTIFICIALIS 385b, n. 2 : pré artificiel figurant déjà dans le questionnaire de l'AIA, rédigé par G. Massignon [idiolecte de l'auteur ?], on peut se demander s'il n'a pas influencé les trois témoins du sud de la Charente qui l'ont employé ; 385a, aj. mouche artificielle "leurre pour la pêche" (dp. 1845, Rob 1985) et soie artificielle, en rectifiant 11, 49b s.v. SAETA, Lar 1933] 1889, Rob 1985. —ARTOIS 391b : aj. d la d'Artois [pour spécifier
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diverses prépazations culinaires, sans qû on puisse, malheureusement, en indiquer la nature] gdteaux (...) d la d'Artois (Almanach des gourmandas, 1807, 76), filets de volaille d la d'Artois (Grimod de La Reynière, Manuel des amphitryons 1808 [éd. A. M. Métailié, Paris, 1983, 121], potage d /a d'Artois (ibid., 158), ris de veau d la d'Artois (imaginés par le dernier comte de ce nom [Charles Philippe, qui devint Chazles X]...) (ibid., 153 ;dartois m. "gâteau feuilleté à la frangipane ou aux confitures" (Laz 1878-1960)). - AS 399a :fichu comme l'as de pique (dep. Ds 1896)] Rig 1881 ; 399b :avoir l'as de carreau sur le dos "être bossu" Ds 1896] Rig 1881, qui précise "dans l'azgot du régiment" ; 399b sous 2.i., aj. Québec battre quatre as "ne pouvoir être surpassé" (1909, Dionne) et aussi tapé d l'as "tout ce qu'il y a de plus soigné" (Rig 1881, citant A. Bouvier, Auguste Manette [1869, 57]) ; 400a, fin du ler §, aj. : Québec être paqueté aux as "être ivre" (1968, ds A. Clas et E. Seutin, Dict. de loc., Montréal, 1985) et perdu aux as "complètement perdu" (1975, ibid.) ; 400a sous 4., as "le consommateur assis à la première table (dans un café, un restaurant]" 1878] 1855 (L. Lespès, Paris dans un fauteuil, 110, d'apr. Rig 1881) ; 400a, aj. six, as et as "dosage classique de poudre noire" (six parties de salpêtre, pour une de soufre et une de charbon de bois)" (Grand Dict. Encyclop. Lar.). - ASCENSIO 416 : aj. ascension "oeuvre d'art représentant l'ascension du Christ" Trév 1704 ; aj. ascension "remontée d'un fleuve" (1828, hapax ( ?), J.-F. Champollion, Lettres, Paris, rééd. 1986, 184 : "... nous étions parvenus au terme de notre ascension niliaque ; la seconde cataracte était devant nous") ; aj. ascensure "ascension du Christ" (1520, hapax à la rime, Noëls de L. Le Moigne, éd. J. Pichon, 1860, 124) ; 417b, n. 4 : peut-être plutôt parce que, bien que "fête mobile", l'Ascension est toujours quarante jours après Pâques. - ASÏNIiVUS 437a : in fine, aj. Haute-Volta charrette asine "petite charrette tirée paz un âne" (Inv. des part. lexicales du fr. en Afrique noire, 1988 (2e éd.), 20). -nSÏNUS 438b : aj. asneau "ânon" (1520, hapax à la rime, Noëls de L. Le Moigne, 51) ; 441 b bougre d'dne, voir surtout TLF s. v. fine, ex. 8, qui cite Courteline, 1888) ; 445a tête d'@ne aj. "poisson : le chabot commun ;reptile (sic) : le têtard de la grenouille" (1808-1825, L. Mau- duyt, Voc. poitevin, Poitiers, Bibl. mun., ms. 837) ;sous 2. b. (3, aj. un renvoi à *PISSIARE 8, 588b (pissat d'dne "mauvaise bière") et pisse d'dne, de même sens (Rob 1985 et maintenant 1977 TLF) ; 450a, fin du 2e §, aj. un renvoi à*PISSIARE 8, 588b (ang. pissat d'@ne "linaire") ; 451b, sous II. 1. a, aj. Haute-Volta et Sénégal asins pl. "ensemble des animaux de l'espèce asine" (1977, ds /nv...., 20). - nSPER 473b : aj. la forme apprasse ( : saize "seize" 1520, Noëls de L. Le Moigne, 71). - *nSPERÉLLA 479 : aux désignations de la prêle motivées paz son utilisation domestique, on pourrait ajouter maintenant la référence suivante : "... nettoyer lou vai'sseou (le tonneau) à l'aide des gaveou de tine (les plants d'asperge sauvage) [v. *GABELLA 4, 15b] qui constituent de vraies brosses de chiendent" (P. Magnan, L'Amant du poivre d'Bne, Paris, 1988, 42), référence qui enrichit aussi l'article ASPARAGUS 464b sous 3.a. Faut-il regretter une peccadille (399b, ligne 1, 1893] 1793) et quelques vétilles et coquilles ? 396a, ligne 4 rév] Trév ; 462a, Se ligne avant la fin :après yov-, aj. "id." (ce formant manque au TLF, qui n'indique que -gone "à n angles" mais qui a pourtant traité ascogone s.v. asco-).
Sous sa couverture immuable, dont la maquette austère évoque quelque "Todesanzeige", cette dernière livraison du FEW est un nouvel hymne au galloroman et à la langue française. Parce qu'elle ignore la routine sclérosante et s'exerce quotidiennement àune rude ascèse, l'équipe bâloise nous livre là des pages de grande qualité, traversées aussi, c'est un plaisir de le souligner, par une jubilation et un enthousiasme communicatifs ;tant de science et de conscience, assorties
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d'un rythme de publication soutenu, placent l'entreprise, malgré la modicité de ses moyens, au premier rang de hi réflexion linguistique et de la production dictionnairique scientifique.
Au moment où les autorités de tutelle helvétiques se désengagent de l'entreprise (à la fm de la refonte du A, prévue pour 1992-1993), il est réconfortant de penser que la communauté scientifique française envisage de prendre le relais (pour des objectifs et selon des modalités à préciser). Au point d'excellence atteint par le Centre du FEW, c'est un honneur en même temps qu'un devoir.
INaLF -NANCY
à l'usage des francophones d'Amérique, Montréal, Centre Éducatif et Culturel inc.,
1988, XXIV et 1856 pages.
R y a eu des précédents, notamment le dictionnaire de L. BÉLISLE adaptant [,lTTRÉ pour les besoins linguistiques des Québécois, mais la comparaison tourne court. En effet, il ne s'agit pas ici de coudre des pièces rapportées à un vieil habit, mais bien d'un travail de confection sur mesures à partir d'un patron français. Le Dictionnaire du français Plus, dérivé du Dictionnaire du français paru chez Hachette en 1987, se veut un ouvrage neuf, adapté à la réalité culturelle et linguistique des "francophones d'Amérique" comme l'annonce le sous-titre un peu commercial, en fait des Canadiens, plus particulièrement des Québécois et accessoirement des Acadiens.
On ne s'attardera pas ici sur les mérites du dictionnaire choisi comme point de départ ;sans avoir le prestige de son préfacier, il offrait le double avantage d'être un dictionnaire de langue à jour, ouvert aux descriptions encyclopédiques et d'appartenir à une maison d'édition décidée à tenter l'aventure. Le pari semble gagné puisque, en quelques mois, plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires de ce nouveau produit ont déjà été vendus au Canada. D'où vient un tel succès ? De la gourmandise d'une population encore plus friande peut-être de dictionnaires que les Français ? Ou plutôt, de l'originalité de l'ouvrage et de sa nouveauté ?
Voici en effet que l'on présente aux Québécois un dictionnaire de langue qui rend compte de leur parler sans y mettre des étiquettes ou des symboles discriminants par rapport au français de France. Comment ne se réjouiraient-ils pas de voir leurs mots, leurs expressions pleinement reconnus et sérieusement décrits dans un ouvrage de bonne tenue, garanti par les meilleures cautions universitaires du Québec en la matière, grâce notamment à la participation d'une équipe de l'Université Laval dirigée par CI. POIRIER, rédacteur principal de ce Dictionnaire du français Plus.
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L'adaptation aux réalités d'ici (comme on dit là-bas, ainsi dans la Note de l'éditeur, p. VII) et qui a porté sur 4000 mots ou sens et quelque 200 développements encyclopédiques, est faite grâce à un remodelage à plusieurs niveaux : 1) Aménagement des articles existants, en y insérant des exemples renvoyant à l'univers nord-américain et puisant éventuellement dans la littérature québécoise. Ainsi, dés la première page, sous à, on lit paz exemple Un voyage d Chicoutimi. Aller de Montréal d Québec. La distance de Trois-Rivières d Percé. Lettre ouverte au ministre de l'Éducation au lieu de Un voyage d Madrid. Aller de Strasbourg d Brest. La distance de Paris d Versailles. Lettre ouverte au Président de !a République ;aménagement aussi des développements encyclopédiques, ainsi s.v. académie, blé, climat, mariage, université, etc. 2) Développements encyclopédiques particuliers, dictés par le contexte, qui permettent de mieux appréhender les composantes les plus diverses de la langue, de l'identité et de l'univers des locuteurs, notamment dans les domaines de l'histoire, de l'environnement, des institutions, de la vie quotidienne, ainsi s.v. acadien, avocat, bison, bleuet, bouclier, cajun, canadien, capital, caribou, coopération, commission, cotutitution, cour, érable, forêt, habitant, judiciaire, norme, paroisse, parti, pêche, perdrix, piastre, prononciation, québécois, religieux, sauvage, seigneurie, shérif, suisse (on attendait Révolution tranquille s.v. révolution, avec quelques lignes de commentaire). Dans la même ligne, mais hors-texte du dictionnaire, les pp. 1848 à 1856 offrent des aperçus, dûs à Cl. POIRIER, sur les anglicismes, les québécismes et l'expansion du français. 3) Ajouts à la macrostructure de nouvelles entrées comme abénaquis, aboiteau, achigan, barré, berçante, bi6ite, bingo, b[é d'lnde, bouscueil, canaden, carcajou, carouge, carreauté, C.C.N., cégep, chasse- ga[erie, cipaille, comtnon law, trope[, dérougir, enfarger, ennuyant, épluchette, gang[, gourgane, guignolée, habeas corpus, halloween, jello, micouenne, mitasse, motoneige, niaiseux, pantoute, piton', piton3, pitonner, portage (et famille), poutine, séraphinz, tiret, zonage, etc. ;ajouts aussi à la microstructure ainsi s.v. basz, bombez, caisse, camp, casse-crofite, cave, comté, culotte, pinson, pitonz, rondelle, soc, sous-marin, tourtière. Bien entendu, ces ajouts à la macrostructure et à la microstructure entraînent souvent eux aussi, surtout les premiers, des développements encyclopédiques.
Il y aurait encore à signaler les aménagements concernant les indications phonétiques (discrets mais bienvenus) ou le cazactère inchangé, malheureusement, de la liste finale des proverbes, pp. 1844-1847 (que les lecteurs québécois se rassurent, elle n'est guère adaptée non plus aux lecteurs français).
On le devine, il s'agit là d'un travail énorme qui suppose un lourd investissement de forces diverses et répond à un projet dont P. AUGER et N. BEAUCHEMIN exposent la philosophie dans un Avant-propos, et dont Cl. POIRIER indique avec clarté les principes méthodologiques dans la Présentation. Malgré les difficultés de mise en route d'une pareille entreprise, on peut penser qublle est bien commencée et que les objectifs visés seront atteints progressivement au fil des éditions à venir.
Voici à cet égard quelques suggestions discrètes
- avant d'être considéré comme une norme et pour y parvenir, un dictionnaire doit rendre compte de l'usage et ne pas délaisser des faits bien établis dans la langue, tout en ayant soin bien
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sûr d'en indiquer au mieux les conditions d'emploi. Si l'on enregistre des faits comme barre du jour ou bouscueil, on conviendra que pour une meilleure représentation de la langue usuelle beaucoup de choses restent à enregistrer, de brosse à rêver en couleurs en passant par crème d'habitant, fun, garrocher, guidoune, même (de —), pogner, ça (me) prend..., j'en passe et des meilleures ;s'il fallait pour cela trouver de la place, on verrait disparaître sans grand dommage bon nombre de "gentilés" dont le traitement ne semble pas répondre à une nécessité et qui auraient pu rester dans la table finale (pp. 1830-1845) qui leur est consacrée à juste titre.
- ces ajouts devront comprendre avant tout des mots cachés comme gendarmerie royale du Canada s.v. policer, jouer d !a cachette s.v. coucou, ou oubliés comme bine indiqué s.v. fève ; on devrait avoir soin également que la langue des pages liminaires soit lisible à l'aide du dictionnaire qu'elles annoncent ; en mettant à part défolklorlser (p. IX), québécisation (p. X) ou secondarisé (p. XI) puisqu'ils sont entre guillemets, il reste, et je le souligne en italiques, inc. (page de titre), "les gens d'ici" (p. VII), "les mots tabous et les concepts y rattachés" (p. IX), "efforts politiques et aménagistes" (p. IX), "des outils universels mononormatifs" (p. X), à quoi on ajoutera "violette cucullée" (p. de garde in fine) ou encore, dans les annonces publicitaires pour le Dictionnaire :tel qu'd la télé, équivalent du "w à la télé" en France.
- un excellent procédé est parfois utilisé pour marquer discrètement les divergences entre le Québec et la France, sous forme de remarques ou grâce à l'ajout de l'indicateur FRANCE, ainsi s.v. ballez, bouilleur, cartable, culotte, fève, haricot, mitaine, moufle, tuyau. Il semble bien qu il y aurait intérêt à étendre ce procédé, pour signaler par exemple que enquiquiner, moche, placard ou square etc. n'appartiennent pas ou guère à l'usage québécois.
Paz ailleurs, on pourra avantageusement multiplier des renvois et des mises en parallèle comme ceux que l'on trouve s.v. truite, afm de mieux mettre en valeur ce qui ressortit au français de Québec et au français de France, en complétant au besoin la nomenclature, ainsi bol de toilette vs cuvette de W.C., bas-culotte vs collant, bourgogne (couleur) vs bordeaux, collation vs quatre heures, cuiller d thé (recettes, posologie) vs cuiller d café, débarbouillette vs gant de toilette, détour (panneau routier) vs déviation, facture (au restaurant) vs nd~lition, brun vs marron, palette (de chocolat) vs tablette, peinturer au fusil vs peindre au pistolet, pitonnage/ pitonner/pètonneur vs zappinglzapperizappeur, pointe (de tarte) vs morceau ou part, racoin vs recoin, etc. On aura soin également d'indiquer autant que possible la différence de vitalité d'un mot de chaque côté de l'Atlantique, ainsi pour épeurer ou certains sens de piger, vx en France mais non au Québec.
- une dernière remarque concerne l'indicateur ANGLICISME, qui semble affecté d'une valeur puriste et distribué un peu au hasard. Sans doute veut-on dire paz là qu'il convient de préférer à des mots issus de l'anglais des mots du fonds français, ainsi magasinage vs shopping, stationnement vs parking, industrie du spectacle vsshow-business, mais quel équivalent est offert pour suppléer à flash, peppermint, skye-terrier, smash, etc. ?
De part et d'autre de l'Atlantique, il ne manquera pas d'esprits bien intentionnés pour critiquer cet ouvrage, regrettant paz exemple que l'on ne soit pas parti de sources québécoises au lieu de recourir au support française ou encore pour crier à l'amalgame, au folklore, au laisser-
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aller linguistique. Les auteurs du Dictionnaire ont simplement voulu parer à une situation urgente, notamment sur le plan pédagogique, et ils sont probablement les mieux placés pour apprécier la nécessité de cette réalisation et les difficultés de sa mise en oeuvre. Il convient de les féliciter d'aller ainsi de l'avant et de leur souci (annoncé p. XII) d'apporter au produit les nécessaires améliorations dans les éditions à venir.
Lourde tâche, dont la petite équipe du TLFQ de l'Université Laval assure la plus grande part, en plus de son propre projet, le Dictionnaire du français québécois, dont elle a récemment donné des gages prometteurs.
INaLF-NANCY
1. Pour un projet de dictionnaire général du français québécois, voir cependant Revue
québécoùe de linguistique théorique et appliquée, 7t (1988).
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Le 20e Congrès Annuel de la Gesellschaft fiir Angewandte Linguistik (GAL) aura lieu à l'Université de Gdttingen du 5 au 7 octobre 1989. Le thème principal du Congrès sera la Communication Interculturelle, qui sera traité à partir de quatre axes fondamentaux
I Structures de texte et de discours :aspects méthodologiques de la comparaison intereulturelle
II Conflit de langue
III Traduction et civilisation
IV Acquisition d'une langue interculturelle et enseignement des langues
En outre, des groupes seront constitués sur les sujets suivants
1 Phonétique
2 Lexique et Grammaire
3 Linguistique et stylistique de l'écrit
4 Fom~ation à l'expression orale /Communication rhétorique
5 Media et communication
6 Langues de spécialités
7 Sociolinguistique
8 Linguistique de contact
9 Linguistique conttastive et communication interculturelle
10 Traduction
11 Psycholinguistique
12 Pathologie et thérapie de la parole
13 Enseignement des langues
14 Éducation et apprentissage de la langue
15 Linguistique et informatique.
Pour de plus amples informations concernant les formalités de participation, les propositions d'articles, la liste des conférenciers et des sujets, prière de s'adresser à Prof. Dr Bemd SPILLNER
GAL - Geschàftsstelle Universitàt Duisburg
Postfach 10 15 03
D - 4100 DUISBURG 1 (R.F.A.)
tél. (0203) 379-2064
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The 20th Annual Congres of the Gesellschaft für Angewandte Linguistik (GAL) e.V. will take place at thc University of Gbttingen from October S-7, 1989. The main topic of the conference will be Intercultural Communication, which will be covered in four main arecs
I Text and Discourse Patterns : Methodological Aspects of Intercultural Comparison
II Language Conflict
III Translation and Civilization
N Intercultural Language Acquisition and Language Teaching
In addition, sections will be held in the following subjects
1 Phonetics
2 Lexicon and Grammar
3 Text Linguistics and Srylistics
4 Speech Training / Rhetorical Communication
5 Media Communication
6 Language for Specific Purposes
7 Sociolinguistics
8 Contact Linguistics
9 Contrastive Linguistics and Intercultural Communication
10 Translation
11 Psycholinguistics
12 Speech Pathology and Therapy
13 Language Teaching
14 Language Learning Technology
15 Computational Linguistics.
Furthemwrc, there will be workshops and plenary lectures on varions subjects.
For any further information regarding attendante, submission of papets, a list of lecturers and topics etc.> please contact
Prof. Dr Bernd SPILLNER
GAL - Gesch~ftsstelle Universit~t Duisburg
Postfach 10 15 03
D - 4100 DUISBURG 1 (West Germany)
tel. (0203) 379-2064
- Thème CLIL : 3147 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage
- ISBN : 978-2-8124-4307-7
- EAN : 9782812443077
- ISSN : 2262-0346
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-4307-7.p.0163
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 09/11/2012
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français