Bomarzo ou les incertitudes de la lecture : Figure de la meraviglia dans un jardin maniériste du XVI^e siècle

Espace concret et imaginaire, le jardin sollicite à la fois l'esprit, les sens et l'imagination du visiteur. Tous les arts sont réunis dans le jardin, emportant avec eux leurs discours, leurs savoirs et leurs pratiques. Cependant, si cette caractéristique lui confère une remarquable valeur esthétique et épistémologique, elle suppose aussi l'extrême complexité d'un objet qui, de ce fait, se dérobe volontiers à l'analyse. C'est ce que montre de manière exemplaire le bois sacré de Bomarzo, un jardin maniériste italien du XVI^e siècle, qui constitue encore, à ce jour, une véritable énigme pour les chercheurs. La lecture du bois sacré proposée ici est intimement liée à une figure, celle de la merveille, mise en lumière grâce à la poétique de la meraviglia du philosophe Francesco Patrizi (15281597). La merveille se caractérise par un mélange de vrai et de faux, de crédible et d'incroyable, de manière à produire le doute et l'incertitude. C'est elle encore qui assure la liaison entre les sens et l'esprit, en sollicitant au passage la mémoire et l'imagination, et en remuant les passions. C'est la merveille enfin qui permet de rendre compte de l'expérience du visiteur du jardin et des effets d'illisibilité et d'incertitude qui surgissent dans son esprit.